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Les « états des crimes dignes de mort ou de peines afflictives » : un programme ancien enfin réalisé

Chapitre 1 : Genèse et origines d’une enquête sur la justice au XVIIIe siècle

I. Le XVIII e siècle : une ère pré-statistique et une volonté de réformer les institutions monarchiques

2. Les « états des crimes dignes de mort ou de peines afflictives » : un programme ancien enfin réalisé

Le 9 octobre 1733, le chancelier Henri-François d’Aguesseau envoie une circulaire à tous les intendants et procureur généraux du royaume prévoyant la mise en place d’états recensant tous les six mois les crimes dignes de mort ou de peines afflictives à l'échelle de chaque intendance et de cour souveraine3. Cette circulaire n’est pas en soi novatrice mais est l’héritière directe de décisions royales et d’entreprises antérieures.

a. L’héritage de l’Ordonnance criminelle de 1670

La circulaire de d’Aguesseau est clairement influencée par la Grande Ordonnance criminelle de

1670. En effet, l’article 20 du titre X prévoyait déjà la mise en place d'un contrôle des délits :

« Nos procureurs ès justices ordinaires seront tenus d'envoyer à nos procureurs généraux, chacun dans leur ressort, aux mois de janvier et de juillet de chacune année, un état signé par les lieutenants criminels et par eux, des écrous et recommandations faites pendant les six mois précédents ès prisons de leurs sièges4 ».

Cette idée de vérifier et de réunir les procédures n’est pourtant pas une innovation de l'Ordonnance criminelle de 1670. L’article 184 de l’ordonnance de Blois de 1579 stipulait déjà aux officiers des

1 STOREZ-BRANCOURT (ici pp. 338-341).

2 Exemple : Arch. dép. Puy-de-Dôme, 1C.1552, Etat des justices de la subdélégation de La-Chaise-Dieu.

3 C’est la date que portent les circulaires conservées. Arch. dép. Côte-d’Or, C.396, Circulaire du chancelier d’Aguesseau - 9.10.1733 ; Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 1C.1267, Circulaire du chancelier d’Aguesseau - 9.10.1733.

Les intendants et subdélégués y font également référence dans plusieurs de leurs lettres. Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 1C.1267, Lettre : accusé de réception de la circulaire du 9 octobre 1733 - 17.10.1733 ; Arch. dép. Hérault, C.1569, Lettre : envoi de l’état des crimes de l’intendance du Languedoc pour l’année 1734 – 15.08.1735.

De même que le chancelier et ses successeurs. Arch. dép. Hérault, C.1570, Lettre : le chancelier à l’intendant du Languedoc – 14 avril 1738 ; Arch. dép. Bouches-du-Rhône, C.3521, Lettre : le chancelier à l’intendant – 7.12.1757.

Néanmoins l’arrêt du Parlement de Flandres du 22 octobre 1738 mentionne la date du 27 septembre 1733. Pièce justificative « Réquisitoire du procureur général du parlement de Flandres sur lequel la Cour rendit, le 22 octobre 1738 un arrêt de règlement conforme, relatif aux statistiques criminelles » in DAUTRICOURT, Pierre, La criminalité et la répression au parlement de

Flandres auXVIIIe siècle (1721-1790), Lille, Chez G. Sautai, 1912, 432 p. (ici pp. 405-407).

La circulaire conservée à Rouen est datée de novembre de 1733. Arch. dép. Seine-Maritime, Circulaire du chancelier d’Aguesseau – novembre 1733.

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justices inférieures d’envoyer leur rôle de procès criminels aux baillis et sénéchaux et à ceux-ci de transmettre le leur au procureur général et au parlement afin « de connoistre quel devoir et diligence ils y auront fait »1. L’article 63 de l’ordonnance d’Orléans de janvier 15602, l’article 139 de celle de Villers-Cotterêts d’août 15393 et l’article 36 de l’Ordonnance de Moulin rappelaient quant à eux l’obligation d’instruire rapidement les procès. Serpillon citant de Bouhier, président du Parlement de Bourgogne, fait également mention d’un arrêt du Parlement de Dijon qui, sur la requête du 18 février 1603 des officiers du bailliage d’Avalon, enjoignait aux procureurs d’offices et aux greffiers des justices inférieures de leur ressort de remettre aux greffes des bailliages l’état de leurs procédures et d’y satisfaire dans le mois, faute de quoi, il serait permis aux officiers du bailliage de se rendre directement sur les lieux pour les connaitre4.

Les dispositions de l’Ordonnance de 1670 apparaissent à plusieurs reprises dans la correspondance relative aux états des crimes. L’intendant de Montpellier rappelle ainsi au procureur du roi de la sénéchaussée du Puy qu’il peut recourir à l’article 20 du titre X pour punir les procureurs d’office de son ressort qui ne satisfont pas à l’enquête de 17335. En 1748, le procureur du roi du bailliage du Haut-Vivarais déplore que les soixante-treize justices seigneuriales de son ressort « n' [...] envoyent point leurs certificats comme il leur a été enjoint par l'article 20 du titre 10 de l'ordonnance criminelle »6. Dans

1 « Enjoignons à tous nos juges et des hauts justiciers, informer en personne et diligemment, sans divertir à d’autres actes, des crimes et délits qui seront venus à leur connoissance, vaquer et procéder, toutes choses délaissées, à la confection des procès criminels, selon le contenu au soixante-troisième article de l’ordonnance faite aux estats tenus à Orléans, ensemble faire procès-verbal des plaintes et dénonciations qui leur auront esté faites des crimes et délits commis en leur ressort. Et afin de connoistre quel devoir et diligence ils y auront fait : enjoignons à nos prevosts, chastelains, et tous autres juges inférieurs d’envoyer aux baillifs et séneschaux ou leurs lieutenans le rôlle des procès criminels qu’ils auront jugez, et lesdits baillifs et sénéchaux, envoyer semblable rôlle à nos cours de parlement et procureurs généraux en icelles […] ». DECRUSY,ISAMBERT, François-André, TAILLANDIER, Alphonse-Honoré, Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l'an 420 jusqu'à la Révolution

de 1789… Paris, Belin-Leprieur, 1829, vol. 14 partie 1, 650 p. (ici pp. 424-425)

2 Joachim du Chalard dans ses remarques sur l’article 63 de l’ordonnance d’Orléans considère que « les juges qui, par amitié, connivence ou dissimulation ne punissent pas les malfaiteurs, sont infâmes […], pêchent mortellement […] car ils se montrent coupables & participans des crimes qu’ils tolèrent […] et ils doivent estre punis de la même peine que les délinquans ont mérité ». Il estime également que les procédures au criminel ne doivent pas être instruites trop rapidement afin d’éviter de condamner à tort un innocent : « Il est vray […] qu’il ne faut pas aller trop vite, car dans l’instruction des procès criminels, où il y a plus de danger, plus il faut avoir de conseil & procéder lentement. S’il faut penser une heure en matière civile, il en faut penser cent en cause criminelle où il est question de l’honneur & de la vie d’un homme, chose prétieuse au de-là de toutes autres qui sont de ce monde. La repentance d’avoir mal jugé n’a point de lieu en ce cas-là, c’est pourquoi on ne peut apporter trop d’attention pour n’y point faire de faute. […] Ou si le Prince l’avoit commandé estre exécuté promptement par une chaude colère ». NERON,Pierre, GIRARD, Etienne, Recueil d’édits et d’ordonnances royaux sur le fait de la justice et autres matières

les plus importantes…, Paris, Chez Montalant, 1720, vol. 1, 1127 p. (ici pp. 394-395). Cette remarque est particulièrement

intéressante, car elle met en évidence le souci de favoriser une justice juste et exacte au détriment d’une justice prompte et aux jugements éventuellement précipités. Ces considérations ne semble pas être la principale préoccupation du chancelier d’Aguesseau – du moins dans la circulaire de 1733, car il défend le contraire dans ces Mercuriales – qui souhaite au contraire accélérer le cours de justice et punir plus rapidement. TUFFERY-ANDRIEU, Jeanne-Marie, La discipline des juges : les

Mercuriales de Daguesseau, Paris, L.G.D.J., 2007, 194 p. (ici p. 18).

3 « Nous enjoignons à tous nos juges, qu’ils aient à diligemment vaquer à l’expédition des procès et matières criminelles, préalablement et avant toutes autres choses, sur peine de suspension, de privation de leurs offices, et autres amendes arbitraires, où ils feront le contraire : dont nous chargeons l’honneur et conscience de nosdictes cours souveraines ». DECRUSY,ISAMBERT, François-André, JOURDAN,Athanase Jean Léger, Recueil général… Paris, Plon frères, 1829, vol. 12 partie 2, 923 p. (ici p. 629).

4 Titre X, article XXI inSERPILLON, François, Code criminel ou commentaire sur l’Ordonnance de 1670, Lyon, Chez Périsse, 1767, vol. 1, 893 p. (ici pp. 574-575).

5 Arch. dép. Hérault, C.1571, Lettre : accusé de réception de l’état des crimes de la sénéchaussée du Puy pour les 6 premiers mois de 1739 - 31.10.1739.

6 Idem, C.1579, Lettre : envoi de l'état des crimes du bailliage du Haut-Vivarais pour les 6 premiers mois de 1748 - 27.06.1748. Le semestre suivant, il rappelle à nouveau cet article mais fait état cette fois-ci de soixante-dix-huit justices seigneuriales en infraction. Pour les 6 premiers mois de 1749, ce sont donc quatre-vingt procureurs fiscaux qui sont incriminés. Idem, C.1579, Lettre : envoi de l'état des crimes du bailliage du Haut-Vivarais pour les 6 derniers mois de 1748 - 23.12.1748 ; C.1581, Etat des crimes du bailliage d'Annonay pour les 6 premiers mois de 1749 - 28.06.1749.

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la généralité de Rennes, en 1784, le subdélégué de Châteaulin pour expliquer l’absence d’état et de certificats de la part du procureur de Laz et de La Roche1, précise à l’intendant que cet officier « a cru que suivant l’ordonnance criminelle de 1670, il lui suffisoit d’envoier ses états au procureur du roi »2. Une lettre envoyée depuis Valenciennes en 1763 fait quant à elle référence à l'article 19 du titre VI de la Grande ordonnance criminelle3 qui prévoit que :

« Les greffiers des prévôtés et châtellenies royales, et ceux des seigneurs seront tenus d'envoyer par chacun an, au mois de juin et de décembre, au greffe du bailliage et sénéchaussée, où ressortissent leurs appellations médiatement ou immédiatement, un extrait de leur registre criminel dont leur sera baillé décharge sans frais. Et ceux des bailliages, sénéchaussées et maréchaussées, seront tenus au commencement de chacune année, d'envoyer à notre procureur général, chacun dans son ressort, un extrait de leur dépôt, même l'état des lettres de grâces ou abolition, entérinées en leurs sièges, avec les procédures et sentences d'entérinement, et la copie des extraits qui leur auront été remis par les greffiers des justices inférieures, l'année précédente »4.

Il s’agit comme pour l’article 20 du titre X de contrôler les procédures et les jugements. Cette lettre mentionne aussi l’article 29 de la déclaration du roi du 5 février 1731 sur les cas prévôtaux et présidiaux qui rappelle que l’article 19 du Titre VI de l’ordonnance de 1670 doit être exécuté et qu'en plus :

« les greffiers des bailliages, sénéchaussées, présidiaux & maréchaussées sont tenus d'envoyer tous les six mois à nos procureurs généraux en nos cours de parlement chacun dans leur ressort un extrait de leur registre ou dépôt signé d'eux & visé tant par les lieutenants criminels que par nos dits procureurs audits bailliages, sénéchaussées & sièges présidiaux; dans lequel extrait ils seront tenus d'insérer en entier la copie des jugements de compétence rendus pendant les six mois précédents & de la prononciation d'iceux en la forme prescrite par l'article XXIV ci-dessus; le tout à peine d'interdiction ou de telle amende qu'il appartiendra & sans préjudice de l'exécution des autres dispositions contenues dans ledit article XIX du Titre VI de l'Ordonnance de 1670 »5.

Enfin, cette lettre fait état d’un arrêt rendu par le Parlement de Flandres le 22 octobre 1738. Cet arrêt, constatant que l’Ordonnance de 1670 et la déclaration de 1731 ne s’exécutent pas, rappelle que le chancelier « a écrit à ce sujet le 27 septembre 1733 […] de lui envoyer tous les six mois en janvier et en juillet de chaque année, un état exact de tous les crimes dignes de mort ou de peines afflictives qui auront été commis dans l'étendue du ressort de la Cour »6. Cette lettre met en évidence que l’enquête ordonnée

1 Laz, Finistère, c. Briec, arr. Châteaulin.

2 Arch. dép. Ille-et-Vilaine, C.137, Etat des crimes de la subdélégation de Châteaulin pour les 6 premiers mois de 1784.

3 Arch. dép. Nord, C.11135, Lettre : les officiers de Valenciennes à l’intendant – 12.01.1763.

4 Ordonnance criminelle de 1670, Titre VI, article 19.

5 Déclaration portant sur les cas prévôtaux et présidiaux donnée à Marly le 5 février 1731, article 29 Cf. http://lecahiertoulousain.free.fr/Textes/declaration_1731.html.

6 Pièce justificative « Réquisitoire du procureur général du parlement de Flandres sur lequel la Cour rendit, le 22 octobre 1738 un arrêt de règlement conforme, relatif aux statistiques criminelles » in DAUTRICOURT,Pierre, Op. cit.

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par le chancelier en 1733 est directement liée à l’Ordonnance de 1670, mais aussi à la déclaration de 1731 qui complète un de ses articles.

Si l’enquête de 1733 est clairement à mettre en relation avec les textes royaux qui l’ont précédée et qui commandaient déjà un contrôle des procédures et la formation d’états, il faut également tenir compte d’une autre enquête : celle concernant les prisonniers détenus par la maréchaussée. Cette entreprise ordonnée par le secrétaire d’Etat à la guerre a également pu, au même titre que l’Ordonnance de 1670 et la déclaration de 1731, servir de source d’inspiration au chancelier pour sa propre enquête.

b. Les états des prisonniers de la maréchaussée : un modèle et un prédécesseur ?

Dans nos sources, nous avons trouvé des états des prisonniers antérieurs à l’enquête du chancelier d’Aguesseau. Ces états sont formés par les lieutenances de maréchaussée tous les trois mois (quartiers de janvier, avril, juillet et octobre) puis envoyés à l'intendant qui transmet un état global au Secrétaire d'Etat à la guerre. Cette entreprise n'a semble-t-il concerné que l'intendance du Languedoc, même si un état des particuliers arrêtés par la maréchaussée du Hainaut lors de l’année 1727 a été conservé1.

Le point de départ de cette enquête est une lettre du secrétaire d’Etat à la guerre, M. d’Angervilliers datée du 17 décembre 1732 et adressée à l’intendant de Montpellier. La raison invoquée de cette entreprise est le « defau d’expéditions des procès dont les prevost et leurs lieutenants ont été déclarés compétents et du long temps qu’ils laissent les accusés dans les prisons sans les juger ». Il est alors nécessaire pour le secrétaire d’Etat de « pouvoir reconnoistre s’il a lenteur dans l’instruction [et si cela] vient ou de la négligence de ces officiers ou des difficultés qui peuvent les arrester pour être en état d’y pourvoir ». Ce souci de vérification le mène à :

« [...] ordonner au prevost général et à ses lieutenans de […] remettre [à l’intendant] exactement tous les trois mois un état de tous les particuliers qui auront été constitués prisonniers par les maréch[auss]ée pendant le même tems du titre de l’accusation et de l’état auquel sera la procédure en marquant à la marge les raisons qui en feront différer le jugement, […] [d]’envoyer copie de ces états et […] [de] marquer […] [un] avis sur les mesures que […] [l’intendant croira] nécessaire de prendre pour faire haster les jugements »2.

Cette enquête sur les prisonniers et la longueur des procédures prévôtales ne dispense en rien les greffiers de la maréchaussée de suivre l’article 29 de la déclaration du 5 février 1731 et de d’envoyer tous les six

1 Arch. dép. Nord, C.9622, Etat des prisonniers de la maréchaussée du Hainaut pour l’année 1727. Cet état est peut-être dû à la circulaire du Secrétaire d'Etat à la guerre envoyée le 9 octobre 1725 aux intendants de Flandres (M. Méliand), du Hainaut (M. de Vastan), de Metz (M. de Creil de Bournezeau), d'Alsace (M. de Harlay), d'Amiens (M. Chauvelin), de Grenoble (M. de Fontanieu), de Perpignan (M. Le Gras du Luart) et de Franche-Comté (M. de La Neuville) en leur enjoignant de lui envoyer un état des prisonniers actuellement détenus dans leur province. Arch. nat., E.2756, Registres des expéditions faites par le secrétaire d'État de la Guerre - 1725.

Cet état n'est d'ailleurs pas construit de manière trimestrielle contrairement à ceux conservés dans l'intendance du Languedoc.

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mois un extrait du registre criminel au procureur général du parlement. Cette enquête, relayée par l'intendant du Languedoc dès le 28 décembre 1732 aux différentes brigades de maréchaussée de sa circonscription1, fait d’ailleurs aussi référence à cet article et s'intéresse comme sa consœur de 1733 aux retards que peuvent subir les procédures2. La proximité entre les deux entreprises est telle qu’à plusieurs reprises, qu’elles souvent mentionnées ensemble dans la correspondance3. De plus, si les états des prisonniers sont gérés par le secrétaire d'Etat à la Guerre, cela n'empêche pas l'intendant de menacer le procureur du roi de la maréchaussée du Puy d'informer le chancelier s'il ne lui envoie pas immédiatement l'état du quartier de juillet 17344. Les deux enquêtes sont d’ailleurs si proches par leur objet et par leur méthode, que les officiers de justice les confondent parfois. Un des secrétaires de l’intendance de Montpellier écrit ainsi au procureur du roi de Toulouse le 16 mars 1738 :

« J’ay receu, M. […] l’état des procédures qui ont esté faites d’autorité de la maréchaussée depuis le 24 juin 1737 jusques au 24 Xbre suivant. Je crois devoir vous observer ainsy que M. de Bernage l’a déjà fait que cet état doit luy estre envoyé tous les trois mois conformément aux ordres de M. d’Angervilliers et qu’indépendamment de cet état, vous devés pour satisfaire à ce que M. de Bernage vous a marqué par sa lettre du p[remi]er f[évri]er 1734 luy en envoyer tous les six mois un autre de tous les crimes dignes de mort ou de peine afflictives qui se sont commis dans le ressort de vostre siège […] »5.

Et en 1741, l’état des crimes de la sénéchaussée et celui de maréchaussée de Carcassonne sont envoyés ensemble. Si le titre indique qu’il s’agit de l’ « état des crimes dignes de mort ou de peines afflictives qui ont été poursuivis pendant les mois d’avril, may et juin 1741 », dans les faits, la partie consacrée à la maréchaussée ne couvre que trois mois tandis que le paragraphe concernant la sénéchaussée regarde les six premiers mois de l’année6.

Les états des particuliers arrêtés par la maréchaussée se poursuivent parallèlement aux états des crimes au moins jusqu'au quartier de juillet 17677 même si des états des crimes de la maréchaussée sont

1 Idem, C.1569, Lettre : l'intendant demande au prévôt général de la maréchaussée – 28.12.1732 ; Idem, C.1569, Lettre : l'intendant demande aux procureurs du roi de la maréchaussée – 28.12.1732.

2 Dans la lettre adressée aux procureurs du roi, l'intendant demande, contrairement à celle envoyée aux lieutenants de maréchaussée, de préciser en marquant l'état de la procédure « les raisons qui en font différer le jugement ». Des lettres adressées au prévôt général de la maréchaussée et à ses lieutenants quelques mois plus tard, indiquent aussi qu'il faut, en plus du titre de l'accusation et de l'état où se trouve la procédure, noter quelles sont les raisons qui en retardent le jugement. Idem, C.1569, Lettre : l'intendant aux procureurs du roi de la maréchaussée – 28.12.1732 ; Lettre : l'intendant au prévôt général de la maréchaussée et à ses lieutenants - 6.04.1733 ; Lettre : l'intendant au prévôt général de la maréchaussée - 7.04.1733 ; Lettre : l'intendant aux procureurs du roi de la maréchaussée – 7.07.1733.

3 Exemple : Idem, C.1574, Lettre : le procureur du roi de la sénéchaussée de Toulouse à l’intendance – 19.01.1744.

4 « Je suis étonné, M. de n’avoir pas receu vostre réponse à la lettre par laquelle je vous ay demandé le 28 8bre d[erni]er, l’état des particuliers arrêtés # pendant le q[uarti]er de juillet d[erni]er # dans vostre département et écroués à vostre requeste en qualité de procureur du roy en la maréchaussée. Je vous prie de me l’envoyer au receu de ma lettre et d’y avoir attention à l’avenir ainsy que je vous l’ay déjà recommandé plusieurs fois, sans quoy je ne pourroit me dispenser d’en informer M. le chan[celi]er ». Idem, C.1569, Lettre : l'intendant à la maréchaussée du Puy - 8.12.1734.

5 Idem, C.1570, Lettre : accusé de réception de l’état des procédures de la maréchaussée de Toulouse faites de juin à décembre 1737 – 16.03.1738.

6 Idem, C.1573, Etat des crimes dignes de mort de Carcassonne pour le quartier d’avril et le premier semestre de 1741. C’est aussi le cas pour le premier semestre de 1743. Idem, C.1574, Idem pour le quartier d’avril et le premier semestre de 1743.

7 Exemple : Idem, C.1587, Etat des prisonniers de la lieutenance de maréchaussée de Toulouse pour le quartier de juillet 1767 - 1.10.1767.

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également dressés dans le même temps tous les six mois1. Que ce soit donc au niveau, des enjeux, ou encore de leur réalisation2, les deux enquêtes dans l’esprit des officiers sont fort semblables et se confondent parfois.

c. Une enquête entre héritage et originalité

Nous l’avons vu, l’enquête de 1733 s’inspire fortement de l’Ordonnance de 1670, de la déclaration de 1731 et des états des prisonniers de la maréchaussée. Cela explique les nombreuses similitudes entre ces différentes influences et les états des crimes.

Tout d’abord, l’esprit de la circulaire de 1733 et celui de la lettre du secrétaire d'Etat d’Angervilliers datée du 17 décembre 1732 sont fort proches. En effet, le chancelier d’Aguesseau met en avant la négligence des officiers royaux et seigneuriaux3 et le ministre à la guerre celle des officiers de la