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Paragraphe I. Les différents modes de contrôle

A) Le contrôle opéré par le TRACFIN :

287. La coopération et la collaboration bancaire sont devenues une obligation depuis les

années 90, dans la lutte contre le blanchiment d’argent491. Les banquiers doivent coopérer avec la cellule de traitement du renseignement et d’action contre les circuits financiers clandestins, issue du décret du 26 juin 2006492. A l’issue de cette coopération deux obligations incombent aux banquiers, une obligation de vigilance et une obligation de déclaration. Cette lutte contre les opérations illicites prend de plus en plus d’ampleur avec l’intégration et la création des groupes et des institutions anticriminelles, comme le Groupe d’Action Financière (GAFI)493. Ces mesures supranationales494 peuvent être envisagées sous un angle préventif ou

487 Ce contrôle opéré par des organismes publics comme la banque de France, contribue à renforcer l’obligation de sécurité du banquier

488 Décret n° 2006-736, 26 juin 2006, relatif à la lutte contre le blanchiment de capitaux, JO 27 juin, p. 9625. 489 Décret n°90-382 du 9 mai 1990 portant création d’un office central pour la répression de la grande délinquance financière ; JO du 10 mai 1990 ; V. aussi E. Vernier, Ch. Gaudin, « La coopération judiciaire en matière de lutte anti-blanchiment existe-t-elle ? », Banque et Droit 121 septembre-octobre 2008, p. 3.

490 Ch. Cutajar, « L’extension du champ de la déclaration de soupçons et ses conséquences », in La prévention

du blanchiment et du financement du terrorisme, op. cit. p. 107.

491 R. Routier, Obligations et responsabilité du banquier, op. cit. p. 780. 492 JO, 27 juin 2006, p. 9625.

493 Ch. Cutajar, « La prévention du blanchiment et du financement du terrorisme », Revue de Droit bancaire et financier, mai-juin 2009, p. 83.s.

494 E. Vernier, Ch. Gaudin, « La coopération judiciaire en matière de lutte anti-blanchiment existe-t-elle ? »,

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répressif, afin de lutter contre toutes activités illicites495. Ce combat s’effectue sur la base d’une obligation de vigilance (1) et de déclaration (2).

1) L’Obligation de vigilance

288. Le banquier étant un professionnel du crédit, qui est tenu de ne pas divulguer les

informations que son client lui fourni.496 Il est tenu par une obligation de secret, renforcée par celle de non-ingérence497. Ces obligations connaissent des exceptions dans plusieurs hypothèses. Notamment en cas de saisie attribution et de coopération policière dans le cadre d’une procédure pénale498. Cette dernière tire ses fondements dans la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme499. Cette obligation de vigilance à l'encontre des professionnels dés l'ouverture de compte ou avant même de nouer des relations d’affaires avec son client500. La loi exige la présentation d'un document d'écrit probant attestant l'exactitude de l'identité de son client501. Ainsi que tous éléments ou informations pouvant informer sur l'objet et la nature de la relation d'affaire et tous renseignements nécessaires pour l'identification de son client502. Cette phase d'identification du client et de la nature et l'objet de la relation d'affaire est un préalable nécessaire et indispensable à l’ouverture d’un compte bancaire.

289. L’article L. 561-8 du Code monétaire et financier pose une interdiction absolue de

nouer toute relation d'affaires, de poursuivre et d'examiner quelle que soit l'opération dés lors que le client ne remplit pas les formalités requises503. De plus, pendant la seconde phase de l’opération, la loi impose aux banquiers et aux établissements financiers, une connaissance actualisée du client et un examen attentif des opérations effectuées, cela pour permettre à la banque d’être toujours en mesure d'évaluer la cohérence des opérations entreprises par son

495 R. Routier, Obligations et responsabilité du banquier, op. cit. p. 780

496 Cf. TGI Nanterre, 6e Ch. 25 mai 2010, Banque et droit, n° 133 sept-oct. 2010 , Com. Th. Bonneau.

497 J. Lasserre Capdeville, « Que reste-t-il au XXIe siècle du devoir de non-ingérence du banquier? », Banque et

droit 2005, n ° 101, p. 11

498 Crim. 27 avril 1994, D. 1994, J. 402, note Gavalda, chacun est tenu d’apporter son concours à la justice pour la manifestation de la vérité article 10 du Code civil.

499 E. Fernandez-Bollo ,Anne-Marie Moulin, « L’approche fondée sur le risque : Le point de vue du contrôleur

bancaire », in La prévention du blanchiment et du financement du terrorisme, op.cit.p. 86.

500 Code Monétaire et Financier, art. L. 563-3, le banquier doit opérer une vérification dés lors que l’opération excède le seul de 150 mille euros.

501 Code. Monétaire et Financier Art. L. 561-5, I. 502 Code Monétaire et Financier, Art. L. 561-6, al.1. 503 Crim. 3 dec. 2003, JGP. G. 2004, II 10066, p. 790

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client504. Il arrive en outre des situations prévues par la loi où le banquier doit effectuer une vigilance supplémentaire en plus des obligations de vigilance principales505. Ce contrôle ne se limite pas à cette seule obligation de vigilance, il va plus loin car une fois que le banquier découvre une information suspecte, il sera soumis à une autre obligation, celle de déclaration.

2) Obligation de déclaration

290. Le traitement du renseignement et des actions contre les circuits financiers clandestins

(TRACFIN), est une cellule de renseignement financier nationale. La mission essentielle de cette dernière consiste à recueillir, analyser, enrichir et exploiter les déclarations et les informations qui sont portées à sa connaissance dans le cadre des dispositions, afin d'établir l'origine et la destination des sommes ou la nature des opérations qui lui sont soumises. Lorsque ses investigations mettent en évidence des mécanismes de blanchiment du produit d'une infraction punie d'un emprisonnement de plus d'un an, ou du financement du terrorisme. Le TRACFIN doit saisir le procureur de la République compétent par note d'information506. Cette cellule est au cœur du dispositif de cette obligation de vigilance, et cela d’autant plus que la loi impose aux établissements mentionnés à l'article L. 561-2 du CMF, dont les établissements de crédits, l’obligation de déclarer au service de TRACFIN les sommes ou les opérations portant sur des sommes « dont ils savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner »qu'elles proviennent d'une infraction punie de plus d'un an d'emprisonnement »507.

291. Concernant cette déclaration, le soupçon seul ne suffit pas pour engager le processus

déclaratif. Il faut que le professionnel soit à même d’associer l'un au moins des critères prévus par l'article 2 du décret du 16 juillet 2009508. Le législateur a toujours dans son article L. 561-15 IV du Code monétaire et financier, fait obligation aux assujettis de déclarer à TRACFIN toutes opérations pour lesquelles le doute demeure à l'issue des diligences de vigilance. La

504 Code monétaire Financier. Art. L.561-6, al 2.

505 R. d’Estaintot, « Les personnes politiquement exposées (PPE) : Réflexions sur une obligation renforcée de

vigilance, in La prévention du blanchiment et du financement du terrorisme, op. cit. p. 97. V. aussi C. mon. Fin. Art. L. 561-10

506 Code monétaire et financier, Art. L.561-23,II

507 H. Robert, « Tracfin après l’ordonnance n°2009-104 du 30 janvier 2009 », in La prévention du blanchiment

et du financement du terrorisme, op. cit. p. 101.V. aussi C. mon. Fin .art. L.561-15, I.

508 Ch. Cutajar, « L'extension du champ de déclaration de soupçon et ses conséquences », Revue droit bancaire

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nouvelle loi bancaire du 26 juillet 2013 sur la séparation des activités bancaires a étendu le domaine de cette obligation de déclaration aux articles L. 561-15 et suivant du Code monétaire et financier, prévoyant d’autres cas de déclaration de créance. Désormais, la tentative de blanchiment est soumise à cette obligation de déclaration509. Sur l'identité du donneur, du bénéficiaire effectif ou du constituant d'un fonds fiduciaire ou de tout autre instrument de gestion d'un patrimoine d'affectation. Cette lutte contre le blanchiment d'argent demeure l'une des préoccupations majeures du législateur et les réformes allant dans ce sens se multiplient. Depuis 2008, 14565 déclarations ont été effectuées à TRACFIN et 79% de ces dernières proviennent des établissements de crédit510. Cet arsenal juridique français, qui est très efficace en matière de lutte contre le blanchiment de fonds ne va pas épargner le système de la finance islamique. Ce qui veut dire que, comme pour le système classique, la finance islamique est elle aussi, susceptible d'être contrôlée par le système juridique français de la même matière et même de faire l’objet de sanctions pénales511.

292. Malgré les doutes et les soupçons dont la finance islamique est victime, il est avéré à

travers ce qui précède que le système financier islamique est comme le système occidental, susceptible d être contrôlé par les moyens mis en place par le législateur et ces moyens très divers.