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Paragraphe I. Les différents modes de contrôle

B) Le contrôle opéré par l’ACP Et l’AMF

293. Au-delà du double contrôle exercé d’une part par les comités de surveillance religieux,

les conseils religieux ou le charia board, et d’autre part celui exercé par le TRAFIN, dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d’argent. Les banques islamiques qui vont s’installer sur le territoire français vont faire l’objet d’un troisième type de contrôle opéré par l’autorité de contrôle prudentiel qui depuis janvier 2010 exerce, en plus de son monopole en ce qui concerne la délivrance de l’agrément, un rôle de contrôle et de surveillance des établissements bancaires, le projet de loi de la nouvelle loi bancaire en France prévoit d’élargir le rôle de cet organe de contrôle. Vu l’étendue de l’activité des banques islamiques, qui connaît aussi bien

509 Le decret en Conseil d’Etat n° 2013-480 6 juillet 2013 entré en vigueur le 1 juillet 2013 fixe les conditions de recevabilité de déclaration de soupcon.

510 Source, Tracfin, Rapport d'activités 2008, p. 10. 511 ACP. Com. Sanction, 24 oct. 2012: JCP. E. 2012, 738.

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des activités relevant du domaine bancaire que du domaine financier. Cela fait intervenir l’autorité des marchés financiers.

294. Le contrôle de cette dernière sera secondaire par rapport à celui de l’ACP. Nous allons

voir dans ce paragraphe de quelle manière ces deux autorités mènent leur contrôle sur les produits commercialisés par les banques islamiques. En d’autres termes, nous allons axer notre analyse sur le contrôle des produits. Le contrôle des produits bancaires qui sera effectué par l’ACP sera examiné en premier lieu avant de voir, dans un second temps, le contrôle des produits financiers ou hybrides, qui seront susceptible d’être exercé par l’AMF.

1) Le contrôle des produits bancaires islamiques par l’autorité de contrôle prudentiel 295. Le contrôle de l’activité bancaire est confié à l’autorité de contrôle prudentiel512.

L’activité de la banque renvoie aux opérations de banque, telles qu’énumérées dans le code monétaire et financier dans son article L.311-1. Elles regroupent les opérations de crédit, la remise de fonds et la mise à disposition des services bancaires de paiement. Toutes ces opérations font appel à des produits et des instruments bancaires qui peuvent aller de la remise ou l’utilisation d’une carte bancaire, jusqu’à l’octroi d’un crédit ou son remboursement.

296. Ces produits qui permettent l’exercice des opérations bancaires aussi simples soient-ils

méritent un contrôle afin de sécuriser d’avantage le client. Ce contrôle s’effectue en tenant compte aussi bien de la forme juridique de la banque, impérativement personne morale513, mais aussi des qualités des dirigeants. Tout cet arsenal de contrôle ne fait que renforcer et compléter la mission du TRAFIN dans sa lutte contre le blanchiment de capitaux. Cela atteste du fait que les banques islamiques sont susceptibles d’être contrôlées et cela doublement, non seulement par les autorités et les organismes européens, mais aussi par les instances religieuses, comme le conseil de charia board, ou l’instance supérieure de l’université Al azhar, qui fait office de cour suprême dans le domaine islamique.

512 L’article L. 612-1 du Code monétaire et financier.

513 Selon la nouvelle lecture de l'article L.511-1 du Code monétaire et financier issue de l’ordonnance n° 2013-544, 27 juin 2013, D. actualité 1 juillet 2013, note de X. Delpech, « les personnes morales dont l’activité

consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituel , à recevoir des fonds remboursables du public (..) et à octroyer des crédits (...). quant aux sociétés de financement , ce sont des « personnes morales ,

autres que des établissement de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites definies par leur agrément ».

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297. Aujourd’hui la France doit emprunter le modèle adopté par les pays non islamisés mais

qui ont accepté le système islamique en adaptant leurs institutions financières de contrôle514. On peut citer le cas de l’Egypte et celui de l’Angleterre aussi, qui ont réussi à faire cohabiter les deux systèmes. Nous ne pensons pas que la France va instaurer un système de contrôle spécialement dédié à la finance islamique, puisque le législateur aurait pu le faire lors de l’ordonnance du 21 janvier 2010, qui avait instauré l’ACP, il pourra tout de même autoriser les charias board. Du fait du caractère hybride des banques islamiques, le contrôle ne peut pas seulement se limiter aux produits bancaires, mais aussi aux produits financiers qui donnent lieu à beaucoup plus de risques. C’est ce qui a donné, l’avènement des sukuk et du takaful.

2) Le contrôle des produits financiers islamiques par l’autorité des marchés public 298. Le système islamique aura besoin d’être soumis à un contrôle autre que celui exercé par

l’autorité de contrôle prudentiel. Pour des raisons liées au caractère des produits mis en service, et qui relèvent plus de la banque d’investissement ce qui nécessite le contrôle de l’autorité des marchés financier, cette idée de contrôle des activités est au cœur du projet de réforme de la loi bancaire conduit par le ministre de l’économie P. Moscovici. le rôle d’intermédiation et sa mondialisation515 de la banque islamique ont donné lieu à la création de nouveaux produits516, qui en plus du fait qu’ils modernisent le système islamique permet de concurrencer le système classique, ou occidental. Ces produits seront soumis au contrôle exercé par l’autorité des marchés financiers qui, de surcroit, veille au contrôle de l’information des investisseurs et exerce même un regard sur les professionnels intervenant sur ce marché517. Contrairement à l’autorité de contrôle prudentiel, l’autorité du marché financier, cumule le pouvoir de sanction et celui de contrôle et, en ce sens, il a le statut de policier et de juge518. Ces deux autorités, au-delà du fait qu’elles exercent des contrôles aussi bien sur les produits financiers que bancaires, fournir des informations aux institutions habilitées à lutter contre le blanchiment des capitaux.

514 J. François Rycx, « systèmes juridiques et économique islamique », in Les capitaux en islam, op. cit. p . 67. 515 S. Dhafer, La finance islamique à l’heure de la mondialisation, 2e éd., 2011, op .cit. p. 12.

516 Sukuk et Takaful

517 L’article L. 621-6 du Code monétaire et financier. 518 Th. Bonneau, Le droit bancaire, op. cit. p. 145.

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299. Les banques islamiques qui s’installeront en France seront soumises aux contrôles des

organes européens comme celui exercé par la banque centrale européenne, en ce sens la banque centrale européenne joue comme son nom l’indique un organe de contrôle externe. Au terme de ce paragraphe nous pouvons noter que le système islamique, une fois installé en France, ne pourra pas échapper au mécanisme et à l’arsenal de contrôle déjà mis sur pied par le législateur. D’ailleurs, les banques et les institutions islamiques seront doublement contrôlées aussi bien par les organes religieux que par les instances nationales ou communautaires519. Sur ce point, il ne serait pas facile de refuser la qualité de banque sur le seul fondement du contrôle. Toutefois, la forme ou la structure de la banque en est un élément déterminant pour la qualification de banque au sens de la loi du 24 janvier 1984.

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Chapitre II) La structure bancaire : définition de la banque