DEUXIÈME CHAPITRE : LE CADRE CONCEPTUEL
2. LE CONTE ET LE CONTEUR
PDWXUDWLRQ YRLUH GH O¶KXPDQLVDWLRQ GX SHWLW G¶KRPPH O¶LQVFULYDQW GDQV O¶XQLYHUV symbolique. Ainsi, le langage DSSDUDvWFRPPHOHFKHPLQURLGHO¶KXPDQLVDWLRQGX bébé. En portant soin à son bébé, si elle le peut, ODPqUHQRPPHOHVREMHWVDXWRXUG¶HX[HWOHV remplit G¶DPRXU Lors de son absence, la mémoire de ses paroles, de sa voix et de ses gestes RFFXSH O¶HVSDFH TXL OH VpSDUH GH VD PqUH. Ses paroles, sa voix et ses gestes mémorisés font office de représentants de sa mère. /¶HQIDQW YLW DORUV GDQV XQ PRQGH habité par des substituts sonores, olfactifs et visuels de la relation à la personne aimée et attendue (Winnicot, 2006) ,O Q¶HVW donc pas seul dans le monde TXL O¶HQWRXUH et qui a déjà du sens pour lui. Ainsi, par une injuste place donnée à la nourriture, les autres nourritures affectives, langagières, culturelles, intellectuelles et spirituelles ne sont pas proposées au nourrisson. Il ne peut ainsi les trouver aisément.
À la lumière de la compréhension GHFHTXLHQJHQGUHDXSOXVLQWLPHO¶pWDWGe surcharge pondérale, cette méconnaissance des sensations alimentaires et ces réponses DOLPHQWDLUHVSRXUGHVVHQVDWLRQVDXWUHVTX¶DOLPHQWDLUHVV¶LQVFULYHQWGDQVOD plus grande VHQVLELOLWp GH O¶rWUe au champ des représentations de son parent nourricier ou de son environnement et GDQV O¶échec ou O¶insuffisance de la symbolisation du sevrage ou de toute sorte de séparation. Poursuivons avec le deuxième concept que nous avons libellé sous le titre le conte et le conteur. Indissociables, nous allons explorer comment ils procèdent pour entrer en écho aYHF O¶HQIDQW SUpVHQWDQW XQ pWDW ou en devenir de surcharge pondérale afin dH O¶DLGHU à acquérir son autonomie alimentaire pour tendre vers son homéostasie physique, psychologique et sociale.
2. LE CONTE ET LE CONTEUR
Le conte et le conteur sont en effet indissociables. Pas de conte sans conteur et pas de conteur sans conte notamment dans une FLYLOLVDWLRQGHO¶RUDOLWp. Commençons par le conte oral de tradition populaire GDQVFHTX¶LO évoque analogiquement et offre dans
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son espace de projection en mettant chacun de ses spectateurs et auditeurs en écho et même en miroir avec sa propre vie. Nous poursuivrons notre exposé par un aperçu de la pensée des auteurs Von Franz, Bettelheim et Péju. Enfin, nous terminerons par ce que le conteur DSSRUWHGHVDYRL[HQRXYUDQWXQHQRXYHOOHYRLHGHO¶RUDOLWp
2.1 4X¶HVW-ce que le conte oral de tradition populaire?
Le conte HVWXQUpFLWGHIDLWVRXG¶Dventures imaginaires, destiné à instruire en amusant, nous précise Le Petit Robert. Il est issu du peuple et de sa mémoire collective transmise par la parole de générations en générations en les rassemblant. Saintyves, précurseur des études folkloriques françaises du début du XXème siècle le qualifiait de « savoir du peuple ». Il a traversé les millénaires SRUWpSDUODVHXOHSDUROHGRQWO¶HIIHWD YDULpVHORQOHSXEOLFHWO¶pSRTXH,Oest dit de tradition orale. En effet, tradition du latin
traditio, tradere signifie transmettre et orale car il est transmis par la parole. /¶KLVWRLUH
nous montre que ces contes RQW IDLW O¶REMHW j SDUWLU GX ;9,,qPH VLqFOH HQ (XURSH GH FROOHFWDJHG¶pFULWXUHVHWGHUppFULWXUHVSDUGHVpFULYains comme Perrault21 puis ont été fixés fin XIXème siècle dans leur forme et leur contenu, en version et transformés en un genre littéraire écrit. Ainsi les écrivains se sont alors détachés peu à peu des sujets, des structures et des thèmes des contes oraux dont ils s'inspiraient. 5DSSHORQV TX¶j cette époque en Europe, un grand bouleversement tant scientifique, artistique et littéraire, est en cours. Dans ce PRPHQW FKDUQLqUH GH O¶KLVWRLUH entre le Moyen Age et le début des temps modernes, la diffusion des connaissances FRPPHQFH j V¶RSprer dans le milieu lettré.
Bricout22 regroupe les fonctions diverses du conte depuis le jeu, le loisir, le VSHFWDFOHHQSDVVDQWSDUODIRQFWLRQG¶H[SUHVVLRQGHODPpPRLUHDQRQ\PHHWFROOHFWLYH depuis le mythe GHVRULJLQHVO¶KLVWRLUHGHVVLqFOHVSDVVpVOHWHmps mélancolique de la
21 Perrault 1628-1703, connu pour ses collectes et retranscriptions des contes issus de la tradition orale
française, formalisateur du genre littéraire écrit du conte merveilleux.
22 3URIHVVHXU GH OLWWpUDWXUH RUDOH j O¶8QLYHUVLWp GH 3DULV 9,, HW VLJQDWDLUH GX GRFXPHQW © Conte » dans
jeunesse et la famille. Le conte a aussi IRQFWLRQ G¶LQIRUPDWLRQ. Dans une interview, Gougaud23 dit : « un FRQWH QH VH WURPSH SDV SDUFH TX¶LO QH SDUOH SDV j QRWUH WrWH LO V¶HQWHQGDYec les sens »,ODDXVVLGHVIRQFWLRQVHQOLHQDYHFODQRUPHVRFLDOHO¶pWLRORJLH GHV FKRVHV GH OD YLH MXVTX¶j O¶LQLWLDWLRQ HQ SUpSDUDQW j OD YLH G¶DGXOWH SDU O¶XWLOLVDWLRQ G¶XQ ODQJDJH V\PEROLTXH GX GHYHQLU HW GH la métamorphose comme le destin des femmes dans le Petit Chaperon Rouge.
Poursuivons par une brève revue de littérature des pratiques du conte et de son intérêt au regard des pertinences sociale et professionnelle concernant notre objet de recherche. Les explorations de nombreux chercheurs nous confortent dans cette voie. Bettelheim (1976) spécifiait que « OHFRQWHGHIpHVWRXWHQGLYHUWLVVDQWO¶HQIDQWO¶pFODLUH sur lui même et favorise le développement de sa personnalité ». Plus loin, il écrit : « les FRQWHVGHIpHVFRQWULEXHQWG¶XQHIDoRQLPportante et positive à la croissance intérieure GHO¶HQIDQW ». Monzani (2005) dans sa revue de la littérature, Adamo, Serpieri, De Falco, Di Cicco, Foggia, Giacometti et Siani (2008) DLQVL TX¶Auvrignon, Fasola, Loedec, Aumont, Nomdebeu, Landman-Parker, Gervaise, Vaudre, Renolleau et Leverger (2006) DXSUqVG¶HQIDQWVSRUWHXUG¶XQHPDODGLHFDQFpUHXVHSURFKHGHOHXUILQGHYLH&RXUQR\HU (2007) auprès de parents analphabètes, Desprats-3pTXLJQRW DXSUqV G¶HQIDQWV hospitalisés dans un service de chirurgie réparatrice dont le corps est mutilé, montrent en effet, GLIIpUHQWV FKDPSV G¶DSSOLFDWLRQ /¶LQLWLDWLYH GH /DEULH ORUVTX¶HOOH pWDLW porte parole du collectif « Pour un Québec sans pauvreté », a de son côté, par la médiation du conte, stimulé une série d'ateliers sur l'économie.
Ainsi le conte de tradition orale se présente comme une voie pertinente dans la médiation pour O¶DFTXLVLWLRQGHO¶DXWRQRPLHDOLPHQWDLUH
23 Conteur, écrivain français : http://www.psychologies.com/Culture/Philosophie-et-
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)? =IHN? @;CN M?FIH *IHT;HC >eA4<7F >? L?=B?L=B?M ?N >? NBYILCM;NCIHM =FCHCKO?M HIN;GG?HN ?H JMS=BIJ;NBIFIAC? ;O =LICM?G?HN >?M =IH=?JNM >? GY>C;NCIH JMS=BCKO? ?N >? H;LL;NCIH &F ?MN J;L FV O >eAD;9;@7 67 BD3F;CG7E F:RD3B7GF;CG7E CH>CPC>O?FF?M ?N ALIOJ;F?M HIP;NLC=?M &F MIOFCAH? KO? F? =IHN? ?MN J;LNC=OFCZL?G?HN CH>CKOY JIOL NL;CN?L F?M J;NBIFIAC?M >? F; JIMN GI>?LHCNY FCY?M F? JFOM MIOP?HN V >?M @;CFF?MCGJILN;HN?M>?F;MSG<IFCM;NCIH&F=IH=FON
-;L M; =IH>?HM;NCIH GYN;JBILCKO? ?N GYN;JBILCM;HN? F? =IHN? J?LG?N V >e3G6;F7GD6e;67@FC@C?LM?MJLIJL?M;@@?=NM G[G?F?MJFOMN?LLC<F?M ;CHMCKO? >?M;MJ?=NM>?MIHJMS=BCMG?NION?HF?MG?NN;HNV>CMN;H=?-;LF?<C;CM>? =?NN?gMNL;NYAC?>?>YNIOLhKOCFOC?MNJLIJL? CFDIO?OH?@IH=NCIH>?J;L? 7J5;F3F;A@CG7>7EBEK5:ABR639A9G7E0^ IHN;JJLCMV?RJFICN?L*IHT;HC J CHMC F?=IHN?JLI=Z>?J;LYPI=;NCIH3@3>A9;CG767E;FG3F;A@E7F6eRBD7GH7E67 F; PC? >IHN F?M NBZG?M JILN?HN EGD >e3>;?7@F3;D7 F? =IG?MNC<F? F? =LO ?N F? =OCN F?M L?=?NN?M F?M@CAOL?M>?HIOLLCMM;A? F;>YPIL;NCIH>?MIAL?M IAL?MM?M MIL=CZL?M?NFIOJM F?M ;FCG?HNM F?M M?HM;NCIHM ?N =IGJILN?G?HNM =IGG? F; @;CG ?N M?M LCMKO?M ?H@CH F?M LCNO?FM>?B3EE3977F6e;@;F;3F;A@5A??76?MYJL?OP?MV>YJ;MM?L ?MLCNO?FM@IHNY=BI;O M?PL;A? J;L F; GILN >? F; GZL? >7 6RB3DF BAGD >3 8ADTF AG 6e3GFD7E KO[N?M 7@ 6e3GFD7E FC?OR&F ;JJ;L;\N FVGI<CFCM;N?OL>?>e3FF7@F;A@6OJO<FC=NION?HFOCI@@L;HN?HJFOMOH ?MJ;=?>?JLID?=NCIH YFYG?HN>?B;ON?CGJILN;H=?>;HMF?KO?F>e3G6;F7GD?MNVG[G?>? L?MM?HNCL>?MM?HM;NCIHM >?M;@@?=NM?N>?MYGINCIHM >e7@F7@6D7>75A@F7GD>7E@A??7D >? F?M ;==O?CFFCL ?N >? F?M ;==?JN?L ?H FOC CHMC J;L M; H;LL;NCIH ?N MIH M=BYG; V F; @;P?OL>?MCMMO?M?N>?M>YJ;MM?G?HNMKO?F?=IHN?I@@L??NMOAAZL? CF?MNJFOM;CMY>? Ee7@6;EF3@5;7D-;L=IHMYKO?HN G[G?F?MG?MM;A?MF?MJFOM>OLMPICL?=LO?FM JIOLLIHN [NL??HN?H>OM>;HM=?N?MJ;=? ?J?H>;HN ?T?7Ee;>E=BIKO?HN CFMM?LIHNCHNYALYM>;HM >e7JBRD;7@57 6G 5A@F7 CG; >7E 34EAD47@F 7F >7E 6RB3EE7@F G 5AGDE 6eRHS@7??HNM OFNYLC?OLM >? F?OL PC? F?M ;O>CN?OLM M?LIHN ;CHMC ?HNL;\HYM V F?M L?=IHH;\NL? ?H ?OR ?N JIOLLIHNGC?ORF?MNL;CN?L F?MFD3@E8AD?7D7F>7EEG4>;?7D7F7EB35783;FR5:AO>e7EB357
intermédiaire que Caillé et Rey (2006) nomment « objet flottant ». Ils disent de ces objeWVIORWWDQWVTX¶LOV© sont des aimants qui attirent en surface le savoir présent dans la profondeur et le rendent efficace ».
3DU H[HPSOH j O¶pYRFDWLRQ DQDORJLTXH GX VHYUDJH pYRTXp GDQV OH SUHPLHU concept, dans cet espace de projection, les émotions, les affects et les pensées affleurent. Ainsi dedans, ils seront éprouvés, vécus, revécus et identifiés. Alors leur accueil et leur acceptation en soi permettront de mieux les distancier de soi et même hors de soi et rendront disponible aux solutions suggérées par le conte dans la suite parce que nommées et légitimées par le conteur. Ils sont le plus souvent nommés dans un langage symbolique par le conteur ou la conteuse se substituant ainsi à la mère. Par conséquent, la voix et les mots amèneront au fil du conte issues, apaisements et alternatives par O¶RXYHUWXUHjG¶DXWUHVLPDJHV
De plus, dans le cadre de sa démarche, la chercheure Labrie (Cornu, 2008) a constaté que la transmission orale des contes faisait appel à une cartographie mentale SOXW{W TX¶jODPpPRULVDWLRQ G¶XQGLVFRXUVOLQpDLUH. En effet, cette vision cartographiée des idées et dHV pOpPHQWV G¶KLVWRLUH GH FRQWH rejoint le concept de mind map que le psychologue anglais Buzan (2004) a développé lors de ses recherches sur les PpFDQLVPHV G¶DSSUHQWLVVDJH HW GH PpPRULVDWLRQ &HWWH IDoRQ GH SRVHU OHV LGpHV RX éléments G¶KLVWRLUH VRXV IRUPH GH pictogrammes sur un schéma évoque une carte géographique représentant un pays et ses villes ainsi que les différentes routes et itinéraires possibles pour les relier entre elles. Ainsi, ces routes et itinéraires reliant les villes entre elles représentent les différents chemins mentaux liant les idées ou les pOpPHQWVGHO¶KLVWRLUHHQWUHHX[, que le conteur peut suivre pour conter. Par son travail, Propp (1946), a montré que la structure des contes était toujours proche voire similaire quelle que soit son origine. Labrie24 a aussi remarqué en cartographiant le conte « Bonnet vert, bonnet rouge ªjO¶DLGHGHs pictogrammes sus nommés, TX¶LODSSDUDLVVDLW
24 Ouvrage à paraître.
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GHVUDSSURFKHPHQWVHQWUHGHVpOpPHQWVWUqVGLIIpUHQWVLQFRPSUpKHQVLEOHVjO¶DXGLWLRQGX FRQWHGRQFSRXYDQWSDVVHUSDUOHFDQDOGHO¶LQFRQVFLHQW. Cette notion fait écho à ce qui, dans le langage de la culture gourmantchée au Burkina Faso, est nommé O¶LQYLVLEOH (Lewandoski, '¶DLOOHXUVOHVFRQWHVpWDLHQWVRXYHQWUDFRQWpVOHVRLUjODYHLOOpHWHO un passage à un autre monde. De même, les incipits comme « il était une fois » ou « au- delà des montagnes » invitent j O¶HPEDUTuement en G¶DXWUHV WHPSV HW G¶DXWUHV OLHX[, induisant la sortie des discours rationnels et prescriptifs auxquels il est bien difficile G¶DGKpUHU SDUIRLV Ils stimulent O¶LPDJLQaire MXVTX¶j SHUPHWWUH OH FRQWRXUQHPHQW GHV résistances.
Présentement, déplaçons-nous et approchons nous des angles de vue des trois auteurs sus nommés Von Franz (2007), Bettelheim (1976) et Péju (1981) : d¶DERUG O¶DQJOHSV\FKDQDO\WLTXHVHORQ%HWWHOKHLPSXLVFHOXLGHO¶DQWKURSRORJLHDYHF9RQ)UDQ] /¶°XYUHGH3pMXHVWYHQXHapporter un troisième regard plus pondéré par rapport à celui de Bettelheim.
(Q HIIHW %HWWHOKHLP IRUPp j O¶pFROH GH SV\FKDQDO\VH GH 9LHQQH explique comment les contes transmis de génération en génération, évocateurs métaphoriquement de très nombreux thèmes de vie, répondent aux angoisses du jeune enfant. Il écrit « $XMRXUG¶KXLFRPPHMDGLVODWkFKHODSOXVLPSRUWDQWHHWDXVVLODSOXV GLIILFLOHGHO¶pGXFDWLRQHVWG¶DLGHUO¶HQIDQWjGRQQHUXQVHQVjVDYLH » (p.16). Plus loin, il évoque le potentiel du conte : « Pour ne pas être à la merci des hasards de la vie, il doit GpYHORSSHUVHVUHVVRXUFHVLQWpULHXUHVDILQTXHOHVVHQWLPHQWVO¶LPDJLQDWLRQHWO¶LQWHOOHFW V¶DSSXLHQWHWV¶HQULFKLVVHQWPXWXHOOHPHQW » (Ibid., p.16). Cependant, Péju (1981) invite à ne pas trop creuser dans leur interprétation pour ne pas les réduire à quelques modèles, en dévoilant un squelette structural ou des rouages fonctionnels. Il met en garde sur leur interprétation par la psychanalyse car selon lui : « Croyant y découvrir des finalités thérapeutiques ou éducatives XQLYHUVHOOHPHQW pODERUpHV SDU O¶LQFRQVFLHQW FROOHFWLI OD
psychanalyse tend à uniformiser les contes. Elle pose une grille non seulement sur la IRUPH GHV FRQWHV PDLV VXU O¶pFRXWH » (p. 264). À travers sa pensée, nous comprenons WRXWHO¶LPSRUWDQFHGHODLVVHUO¶LPDJLQDWLRQYR\DJHU3DUDLOOHXUVLOpYRTXHOH © rapport WUqV SDUWLFXOLHU TXL V¶pWDEOLW HQWUH FRQWHXU HW DXGLWHXU » dans lequel il écrit que « de nombreux désirs trouvent à se réaliser ª ,O UHFRPPDQGH G¶pFRuter les bruits que les contes font en nous, de nous laisser emporter sur les traces, les pistes ou les cartes de lieux merveilleux des opérations magiques, des métamorphoses qui se perdent et égarent. Pour lui, « O¶HVSULW GH PpWDPRUSKRVH FHWWH FLUFXODWLRn incessante à travers les IRUPHV OHV PDWLqUHV HW OHV UqJQHV WpPRLJQHQW GDQV OHV FRQWHV G¶XQH DXWUH YLH GH O¶LQFRQVFLHQW &HWWH DXWUH YLH GH O¶LQFRQVFLHQW SDOSLWH GDQV OHV QR\DX[ GH O¶HQIDQFH » (Ibid., p. 265)
De son côté Von Franz, élève et collaboratrice de Jung qui V¶DSSXLH VXU O¶RULJLQHGHVFRQWHVGHIpHVa une vision plus anthropologique. Elle écrit : « les contes de fées expriment de façon extrêmement sobre et directe les processus psychiques de O¶LQFRQVFLHQW FROOHFWLI » (Von Franz, 2007, p. 11). 7DQGLV TXH O¶LQFRQVFLHQW personnel contient les souvenirs subliminaux, RXEOLpV RX UHIRXOpV GH O¶LQGLYLGX O¶LQFRQVFLHnt FROOHFWLI V¶pWHQG VHORQ -XQJ (dans Von Franz, 2007, p.11) au-delà, SXLVTX¶LO HVW IRUPp GHV G\QDPLVPHV FRQVLGpUpV FRPPH OH IRQG FRPPXQ GH O¶KXPDQLWp HQWLqUH &HV dynamismes aussi nommés archétypes, sont « OHVV\PEROHVFRPPXQVjWRXWHO¶KXPDQLWp et sont à la base des religions, mythes et contes de fées. Ils structurent le psychisme humain et apparaissent dans les rêves et les phantasmes et sont les fondements de la plupart des attitudes humaines face à la vie » (Ibid., p. 11). Dans les contes de fées, « les archétypes sont représentés dans leur aspect le plus simple, le plus dépouillé, le plus concis » (Ibid., p.11). Sous cette forme pure, les images archétypiques nous fournissent les clefs de compréhension des processus de la psyché. Ainsi, le conte parle de lui même VLO¶RQVHUpIqUHjO¶DPSOLILFDWLRQGHO¶LPDJHDUFKpW\SLTue. Elle conclue « les contes de fées sont les créations poétiques du conteur populaire qui puise son inspiration à la source qui est celle de tous les poètes O¶LQFRQVFLHQWFROOHFWLI » (Ibid., p. 35).
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Par ailleurs la tradition écrite remontant à environ 3000 ans, les thèmes de base Q¶RQWSUDWLTXHPHQWSDVFKDQJp'DQVOHVpFULWVGH3ODWRQGDQV9RQ)UDQ]2007, p. 14), les vieilles femmes telles des éducatrices racontaient aux enfants des histoires symboliques. Mais, les contes ont parfois subi des transfoUPDWLRQVjW\SHG¶RPLVVLRQRX de mélange de plusieurs versions.
Ainsi, le conte oral de tradition populaire procède par évocation analogique G¶ppreuve de la vie et de situation et offre un espace de projection des ressentis et émotions à leur écoute. Cependant, pour porter le conte, pour être écouté et entendu, une voix, celle du conteur, est requise.
2.3 4X¶HOOHHVWODSDUWGXconteur ?
&RPPHQRXVO¶pFULYLRQVHQLQWURGXFWLRQGHFHGHX[LqPHFRQFHSWpas de conte sans conteur et pas de conteur sans conte. Le conte vit par le conteur. Le conteur se place ici comme un médiateur du conte.
Cependant, le conteur VH WURXYH DX FHQWUH G¶XQH WULDGH SDUFH TXH SRXU TX¶XQ conte soit conté, il lui faut un auditoire, un public'¶XQF{Wp, le conte, dont le conteur, de sa voix porte la voie et son contenu'HO¶DXWUHOHSXEOLF reçoit le conte dans le même temps. Le conteur porte aussi le conte de son corps entier, de par sa mobilisation corporelle qui se voit et par lD VHQVLELOLWp TX¶LO émet. De SOXV LO DSSDUDvW TX¶HQWUH OH conteur et son auditoire, il y a O¶HVSDFHGHSURMHFWLRQTXLV¶DQLPHSDUFHTXHO¶DXGLWRLUH renvoie ou pas GH VHV UHVVHQWLV j O¶pFRXWH GX Fonte et que le conteur perçoit. Nous pourrions même dire TXH FKDFXQ G¶HX[ FRQWHXU HW SXEOLF VH UHQYRLHQW PXWXHOOHPHQW quelque chose dans cet espace.
Pour avoir interrogé et lu quelques conteuses et conteurs, de leurs qualités et aptitudes, ils nomment tous en premier lieu O¶DGDSWDELOLWp DX SXEOLF G¶DXMRXUG¶KXi à
travers des mots comme complicité, sensibilité, alchimie et communication. Cette DGDSWDELOLWp SHXW V¶REVHUYHU GDQV GHX[ VHQV FHOXL GX FRQWHXU à son public et celui du répertoire au public. Il nous semble que cette adaptabilité fait écho à ce que le conteur FDSWHGHO¶HVSDFHGHSURMHFWLRQ
Un conteur dit se considérer comme un passeur, mot dans lequel nous entendons la notion de transmission. Ils ont tous évoqué la parole vivante à travers leur voix, son timbre, les silences et les pauses, les accélérations brusques et les lenteurs calculées, les gestes prolongeant le message, le dramatisant ou le nuançant, leur interprétation au service du conte et leur mémoire. Laberge, conteur contemporain québécois, dans une interview25, différencie deux types de conteurs, celui qui transmet la WUDGLWLRQ RUDOH HW FHOXL TXL SDU DGDSWDELOLWp LQWqJUH OD UpDOLWp G¶DXMRXUG¶KXL TXL IDoRQQH O¶KXPDLQHWFUpHGHQRXYHOOHVKLVWRLUHVVHORQOHVHUUDQFHVGHVDPpPRLUHHWO¶LQVSLUDWLRQ GXPRPHQW,OVHGLWKpULWLHUGHO¶LPaginaire québécois car les contes puisent à une même VRXUFH XQLYHUVHOOH 8Q DXWUH PHQWLRQQH OD PLVH HQ VFqQH O¶DUW GX VSHFWDFOH VDQV IDLUH intervenir le public pendant le conte à proprement parler pour servir mieux le conte. Gougaud, de son côté, explique que la parole émeut et enchante. Elle vient de la présence qui relève de O¶pWDWG¶rWUH, ce qui, à notre sens, fait écho à ce que le conteur est et amène de lui-même à ce moment là.
Le conteur vient au plus SUqVGXFRQWHHQO¶DSSUHQDQW pour le rapporter à son public. Pour restituer sa forme de narration, il fait appel à sa mémoire, ses errances, ses inspirations et aux mouvances de sa voix et de sa parole, qui sont toujours en lien avec FHTX¶LOSHUoRLWGHO¶DXGLWRLUHHW GHO¶DWPRVSKqUHGXOLHX Comme dans le spectacle de guignol, le conteur peut interpeller ou être interpellé par son public, plus volontiers un enfant, HWUHPHWWUHXQHVRUWHGHPRXYHPHQWGDQVO¶DWPRVSKqUHRXO¶HVSDFHGHSURMHFWLRQ Ainsi, une sorte de contournement des résistances peut s¶REVHUYHr SDU O¶H[SUHVVLRQ verbale et corporelle.
25 Informations cueillies sur le site personnel de Marc Laberge :
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$YDQWGHFRQFOXUHDERUGRQVODQRWLRQG¶RUDOLWp que le conteur met sur la scène de son spectacle conté. Dans le contexte qui est le nôtre, il nourrit de sa voix O¶DXGLWRLUH En effet, HX pJDUG j O¶HPEU\RJHnèse, le carrefour aéro-digestif dont le dénominateur commun est la bouche, regroupe les organes de la phonation et les quatre sens que sont O¶RGRUDWOHJRWO¶RXwHHWOHWRXFKHU/¶RUDOLWpFRQYRTXHGHVVWUXFWXUHVGHVIRQFWLRQVHW