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Le conflit mobile dans les opérations de fusions transfrontalières

Chapitre I : les problématiques caractérisitiques de la fusion transfrontalière et du transfert de siège social avec changement

Section 1 : Les problématiques communes à la fusion transfrontalière entre SA et au transfert de siège social d’une SA vers un autre Etat

B) Le conflit mobile dans les opérations de fusions transfrontalières

105. Une société participant à une fusion transfrontalière n’est jamais soumise

successivement à deux lois, dans le cas où la société absorbée disparait et que la société absorbante, ou la société nouvelle, est régie par la loi ayant présidé à sa constitution. En revanche, l’engagement des associés est soumis lui à deux lois successives. Leurs engagements sont soumis à un conflit mobile167, puisque les associés deviennent obligatoirement, et de plein droit, membres de la société, continuant leurs engagements pris avec la société dissoute168. Il n’y a donc pas dualité d’engagements.

106. D’une part, dans le cadre d’une fusion absorption, il faut distinguer les

associés de la société absorbée et ceux de la société absorbante. Dans le premier cas de figure, l’engagement des associés de la société absorbée peut augmenter, il sera soumis à la loi applicable à la société absorbante. En conséquence, le consentement de tous les associés est exigé. En effet, le changement de loi applicable de la société169, du fait de son absorption par une société dont le siège est situé dans un autre Etat, justifie l’exigence d’une unanimité des associés pour la prise de décision de l’opération. L’engagement des associés étant soumis à deux lois successives170, chacun d’entre eux doit donc pouvoir consentir à ce changement de loi applicable, au contrat de société.

167 Un conflit mobile suppose la modification du point de rattachement pour un même support donné, cf. M

MENJUCQ, Droit international et européen des sociétés, op. cit., n° 312, p. 335 ; M. MENJUCQ, La

mobilité des sociétés dans l’espace européen, op. cit., n° 87, p. 60 ; H. BATTIFOL et P. LAGARDE, Traité de droit international privé, tome 1, LGDJ, 8e éd., 1993, n° 318 et s. ; P. MAYER et V. HEUZE, Droit

international privé, op. cit., n° 250.

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Il existe « un problème identique à celui du transfert de siège, surtout si l’on se situe par rapport aux associés qui, dans un cas comme dans l’autre, perdent le bénéfice de la loi en vertu de laquelle ils se sont engagés », cf. M. MENJUCQ, La mobilité des sociétés dans l’espace européen, op. cit., n° 82, p. 57 ; M. MENJUCQ, Droit international et européen des sociétés, op. cit., n° 312, p. 335.

Selon G. BEIZTKE, « dans le cas de la fusion, la société à absorber doit terminer son existence dans son pays d’origine selon son propre statut personnel. Mais il s’agit pour elle de poursuivre désormais les buts sociaux à l’étranger par le moyen de la participation à la société absorbante, et cela pose des problèmes analogues à ceux du transfert de siège », cf. G. BEIZTKE, « Les conflits de lois en matière de fusions de sociétés (droit et droit international privé) », Rev. Crit. DIP, 1967, p. 1 s. Dans le même sens, H. SYNVET, « Enfin la société européenne ? », op. cit., p. 253 s., spéc. p. 261, note 17.

169 Il ne semble pas qu’il y ait de changement de nationalité puisque la société est dissoute. Soit parce

qu’elle est absorbée soit parce qu’elle disparait lors de la création d’une société nouvelle issue de l’opération.

Il faut préciser dès à présent qu’une fusion suppose la réunion de trois éléments constitutifs. La dissolution d’au moins une des sociétés, la transmission universelle de son patrimoine et de ce fait l’acquisition de la qualité d’associés des sociétés bénéficiaires, par les associés des sociétés qui disparaissent.

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Leurs engagements sont soumis à un conflit mobile, M. MENJUCQ, Droit international et européen des

sociétés, op. cit., p. 335.

Un conflit mobile suppose une modification du point de rattachement pour un même support donné. L’engagement des associés est bien soumis à ce conflit, puisque les associés deviennent de plein droit associés membres de la société bénéficiaire des apports et qu’ils poursuivent ainsi leur engagement.

107. En revanche, dans le second cas de figure, la fusion transfrontalière

n’occasionne pas de changement de loi applicable. La décision des associés de la société absorbante n’a pas besoin d’être prise à l’unanimité.

108. D’autre part, dans le cadre d’une fusion avec constitution de société nouvelle,

c’est au cas par cas. L’engagement des associés ne va pas augmenter si le lieu d’immatriculation de la société issue de cette fusion, est celui du lieu de la société disparue.

109. Quant à la création d’une SE par voie de fusion, le Règlement ne précise ni le

quorum, ni la majorité requise, pour y aboutir. Ainsi, chaque société promouvant l’opération, est soumise à la législation applicable à la fusion de SA de l’Etat dont elle relève. C’est le cas pour toutes les modalités de constitution d’une SE par voie de fusion non couvertes, ou partiellement couvertes par le Règlement171.

110. En droit français, lorsqu’une fusion (interne) intervient entre SA, la décision

des actionnaires est soumise aux conditions requises pour la modification des statuts par l’assemblée générale extraordinaire de chacune des sociétés qui participent à l’opération172. Aux termes de l’article L 225-96 alinéa 3 du Code de commerce, elle statue à la majorité des deux tiers des voix des actionnaires présents ou représentés173. Sauf si la fusion aboutit à une augmentation de leurs engagements primitifs174.

111. Depuis que la directive européenne de 2005 relative aux fusions

transfrontalières, a été transposée en France par la loi de 2008, la prise de décision de l’opération ne devra plus se faire à l’unanimité des associés175. L’opération ne se heurte

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Aux termes de l’article 18 du Règlement SE, pour les matières non couvertes par la présente section ou, lorsqu'une matière l'est partiellement, pour les aspects non couverts par elle, chaque société participant à la constitution d'une SE par voie de fusion est soumise aux dispositions du droit de l'État membre dont elle relève qui sont applicables à la fusion de SA conformément à la directive 78/855/CEE.

Cet article renvoie aux dispositions du droit de l'État membre dont elle relève qui sont applicables à la fusion de SA.

172 Articles L 236-2 alinéa 2 et L 236-9 alinéa 1er Code de commerce.

173 Le quorum est traité au 2ème alinéa, « elle ne délibère valablement que si les actionnaires présents ou

représentés possèdent au moins, sur première convocation, le quart et, sur deuxième convocation, le cinquième des actions ayant le droit de vote. A défaut, la deuxième assemblée peut être prorogée à une date postérieure de deux mois au plus à celle à laquelle elle avait été convoquée. Dans les sociétés dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé, les statuts peuvent prévoir des quorums plus élevés ».

174 C’est ce qu’il ressort des articles L 236-5 et L 225-96 alinéa 1er du Code de commerce.

175 Bénéficiant du dispositif issu de la directive du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières, la

décision unanime des associés n’est plus requise en matière de fusions transfrontalières. Elle est prise comme pour une fusion interne, dans les conditions prévues pour la modification des statuts. C’est ce qu’il

donc plus à aucun obstacle juridique de principe176. En revanche, cette unanimité est toujours requise dans les transferts de siège sociaux transfrontaliers.

112. D’autres problématiques existent et peuvent entraver la possibilité de mettre

en œuvre une fusion transfrontalière entre SA ou un transfert de siège social d’une SA dans un autre Etat membre des opérations transfrontalières. Elles différent selon l’opération envisagée.

Section 2 : Les problématiques distinctes de la fusion transfrontalière

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