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Les compétences relatives aux propriétés du texte Les compétences linguistiques

La première catégorie regroupe des éléments relevant de la grammaire, de la syntaxe et du lexique85. Ces trois domaines correspondent à la manière traditionnelle d’enseigner la

compréhension de textes et le français, en général ; c’est-à-dire celle que la plupart des enseignants de l’enquête ont connue en tant qu’élèves : élucider le lexique et analyser la structure syntaxique et grammaticale des phrases. Cette catégorie est très présente dans les entretiens (surtout le lexique et la syntaxe) mais les outils d’analyse paraissent paradoxalement peu opérants.

Grammaire

Du point de vue de la grammaire, la difficulté majeure du texte de Colette tient peut-être avant tout dans l’emploi des pronoms.

85 Par « grammaire », nous entendons la grammaire de phrase (natures et fonctions des mots, principalement) ;

la syntaxe, quant à elle, renvoie plutôt à l’analyse logique (qui s’intéresse aux propositions et à la nature simple ou complexe des phrases). En didactique, l’analyse logique est postérieure à la grammaire traditionnelle ; elle a connu un essor dans les années soixante-dix et quatre-vingts.

Comme nous le voyons, les pronoms sont nombreux dans ce texte et de natures diverses :

- Plusieurs pronoms remplacent le même mot (ceux-là, les, y remplacent les grands bois) - Le référent est parfois assez éloigné du pronom (« ces grands bois…les traversent » avec, entre les deux, la présence de deux groupes nominaux pluriels « de hautes herbes » et « des sources »).

- On trouve à deux reprises le pronom double « en…un » qui permet d’extraire un individu du groupe.

- Par un processus de généralisation qui englobe le lecteur, Colette utilise les pronoms vous et on (en rouge). Ce phénomène sort de l’analyse grammaticale à proprement parler mais peut engendrer des incompréhensions fortes chez un apprenti-lecteur qui peut s’interroger sur le référent des pronoms.

À partir de cette analyse, il est remarquable de noter qu’un seul enseignant sur quinze emploie spontanément le terme de « pronom » (et encore : S08 parle de pronom personnel au sujet du questionnaire et non du texte) qui constitue pourtant un phénomène saillant de cet extrait et qui, comme nous venons de le voir, représente une difficulté majeure.

Cependant, les enseignants pointent largement cette difficulté de compréhension mais parlent plus volontiers de problème de « référents ». Nous y reviendrons plus tard car nous avons classé les référents parmi les compétences textuelles, ce terme de référent renvoyant également, dans leurs propos, à la cohésion du texte, c’est-à-dire à des éléments de grammaire de texte. Nous pouvons donc en conclure qu’ils ne conçoivent pas toujours cette difficulté au niveau de la grammaire de phrase.

1° Et puis, il y a mes préférés, les grands bois qui ont seize et vingt ans, ça me saigne le cœur d’en voir couper un ; pas broussailleux ceux-là, des arbres comme des colonnes, des sentiers où il fait presque nuit à midi, où la voix et les pas sonnent d’une façon inquiétante. 2° Dieu, que je lesaime ! 3° Je m’y sens tellement seule, les yeux perdus loin entre les arbres, dans le jour vert et mystérieux, à la fois délicieusement tranquille et un peu anxieuse, à cause de la solitude et de l’obscurité vague… 4° Pas de petites bêtes, dans ces grands bois, ni de hautes herbes, un sol battu, tour à tour sec, sonore, ou mou à cause des sources ; des lapins à derrières blancs les traversent ; des chevreuils peureux dont on ne fait que deviner le passage, tant ils courent vite ; de grands faisans lourds, rouges, dorés ; des sangliers (je n’en ai pas vu) ; des loups – j’en ai entendu un, au commencement de l’hiver, pendant que je ramassais des faînes, ces bonnes petites faînes huileuses qui grattent la gorge et font tousser. 5° Quelquefois des pluies d’orage vous surprennent dans ces grands bois-là : on se blottit sous un chêne plus épais que les autres, et sans rien dire, on écoute la pluie crépiter là-haut comme sur un toit, bien à l’abri (…).

De façon assez surprenante, le terme-même de grammaire est très peu utilisé spontanément par les enseignants de l’enquête (cinq enseignants de fait) pour caractériser les difficultés du texte de Colette. La terminologie de la grammaire de phrase traditionnelle est, de manière générale, peu présente dans les propos des enseignants, et si elle apparaît de manière ponctuelle dans la partie concernant le questionnaire, elle est quasiment absente de la partie concernant le texte. Pour décrire les propriétés et les difficultés du texte, les enseignants font très rarement référence à la nature et encore moins à la fonction des mots.

nb d'occurrences nom 2 verbe 5 adjectif 5 adverbe 0 déterminant 0 pronom 1 Préposition 0 conjonction 0

Tableau 2: Nombre d'occurrences des catégories grammaticales dans l'ensemble des entretiens d'enseignants

Les termes les plus courants de l’analyse grammaticale de phrase (noms, verbes, adjectifs) sont certes présents, bien que relativement peu employés et parfois tout juste mentionnés comme difficulté par leur nombre (pour les adjectifs) ou leur place (pour les verbes : « on a souvent les verbes qui viennent en fin » S15). Parmi les cinq enseignants mentionnant les adjectifs, S02 est le seul à parler d’adjectif qualificatif, par exemple ; elle met, à juste titre, en exergue la difficulté à identifier le nom auquel l’adjectif se rapporte. À première lecture, on peut effectivement se demander si tranquille se rapporte à un bois/arbre (S02) ou « au jour vert et mystérieux » qui précède tout juste (S04) ; l’ambiguïté vient du caractère épicène86 de

l’adjectif. Mais « à la fois délicieusement tranquille et un peu anxieuse » formant un syntagme

86 Adjectifs qui « ont une seule forme pour le masculin et le féminin : une règle/un précepte immuable » (Riegel,

et l’adjectif « anxieuse » étant marqué, on comprend que les deux adjectifs se rapportent bien au même nom, au personnage en l’occurrence : « Pour un élève qui ne fait pas tellement attention aux marques du féminin et du masculin... c'est compliqué » (S04).

Si la nature des mots est peu présente dans les propos des enseignants de l’enquête, la fonction des mots et de groupes de mots est, elle, totalement absente. En résumé, nous pouvons avancer l’idée que la grammaire constitue rarement un outil d’analyse pertinent aux yeux des enseignants pour caractériser la difficulté du texte.

Nous émettons l’hypothèse que les enseignants n’ont peut-être pas pensé à la convoquer : la consigne des entretiens renvoyant explicitement à la compréhension de textes, il leur a peut-être semblé peu probant d’avoir recours à la grammaire de phrases. N’ayant pas posé explicitement des questions à ce sujet, nous ne pouvons pas juger plus avant de la pertinence de cette hypothèse dans le cadre de ce travail.

Syntaxe

Cinq enseignants de l’enquête la mentionnent spontanément ; huit enseignants en parlent sur sollicitation de notre part ; enfin, un enseignant ne porte pas son attention sur des éléments relevant de la syntaxe et n’a pas eu de notre part de relance à ce sujet (S11 qui cite comme difficultés majeures des phénomènes de langue apparentés au lexique, au figement et à la stylistique) et un autre enseignant juge explicitement et après sollicitation de notre part que le texte ne présente pas de difficulté de ce point de vue (S06). En somme, treize enseignants sur quinze élaborent un discours concernant les difficultés syntaxiques. La grande majorité des enseignants interrogés soulèvent donc avec pertinence une des sources de difficultés majeures du texte de Colette sans toutefois lui accorder systématiquement le primat puisque seulement cinq enseignants sur quinze mentionnent la syntaxe dans les trois premiers arguments. Pourtant, le texte de Colette est, sans aucun contexte, spécialement complexe de ce point de vue :

L’analyse syntaxique met à jour la grande complexité du texte qu’un des enseignants formule à sa façon : « C'est pas une phrase, tu sais, structurée, avec un sujet, un verbe, dans l'ordre » (S03) ! Sur les cinq phrases du texte, trois sont en effet des phrases complexes. La 1° et la 4° comportent en tout 5 propositions subordonnées relatives (en vert) et deux propositions subordonnées circonstancielles (soulignées). Nous remarquons que certains pronoms relatifs relèvent d’un niveau de langue soutenu (où et dont) et que les propositions indépendantes de ces phrases (1° et 4°) ont des verbes élidés (« ils ne sont pas broussailleux ») dans la phrase 1° ; des chevreuils sous-entendus « les traversent » ; de grands faisans ; des sangliers ; des loups, de même ; cette élision dans la phrase 4° explique la parenthèse « je n’en ai pas vu » dont le sens demeure obscur sans cela. La difficulté à analyser la syntaxe de cet extrait tient évidemment beaucoup à la ponctuation qui en privilégiant le point-virgule permet l’élision des présentatifs (« Il y a ») et fait passer du statut de phrases simples nominales (qu’un point aurait accordé) au statut de phrases complexes juxtaposées (début de phrase 4°).

La phrase 1° recèle une autre difficulté syntaxique qui réside dans la forme à valeur passive « ça me saigne le cœur d’en voir couper un » renforcée par une anacoluthe87. L’exclamative

de la phrase 2° introduite par l’adverbe d’intensité « que » renforcé par « Dieu » est également une forme syntaxique littéraire.

87 « Rupture de cohérence syntaxique » (Fromilhague, 1995, p. 34)

1° Et puis, il y a mes préférés, les grands bois qui ont seize et vingt ans, ça me saigne le cœur d’en voir couper un ; pas broussailleux ceux-là, des arbres comme des colonnes, des sentiers où il fait presque nuit à midi, où la voix et les pas sonnent d’une façon inquiétante. 2° Dieu, que je lesaime ! 3° Je m’y sens tellement seule, les yeux perdus loin entre les arbres, dans le jour vert et mystérieux, à la fois délicieusement tranquille et un peu anxieuse, à cause de la solitude et de l’obscurité vague… 4° Pas de petites bêtes, dans ces grands bois, ni de hautes herbes, un sol battu, tour à tour sec, sonore, ou mou à cause des sources ; des lapins à derrières blancs lestraversent ; des chevreuils peureux dont on ne fait que deviner le passage, tant ils courent vite ; de grands faisans lourds, rouges, dorés ; des sangliers (je n’en ai pas vu) ; des loups – j’en ai entendu un, au commencement de l’hiver, pendant que je ramassais des faînes, ces bonnes petites faînes huileuses qui grattent la gorge et font tousser. 5° Quelquefois des pluies d’orage vous surprennent dans ces grands bois-là : on se blottit sous un chêne plus épais que les autres, et sans rien dire, on écoute la pluie crépiter là-haut comme sur un toit, bien à l’abri (…).

En regard de cette analyse rapide visant avant tout à mettre en exergue les principales difficultés du texte d’un point de vue syntaxique, les enseignants de l’enquête semblent posséder peu d’outils pour décrire cette difficulté. L’absence de terminologie précise est notable de ce point de vue. Un seul enseignant emploie le terme « relative » (S04). Nous trouvons également celui de « proposition » chez trois enseignants (S04, S08, S15) dont un seul parle de « proposition subordonnée » (S08) ; celui de « phrase nominale » chez un seul (S08). D’autres termes sont convoqués mais sans être développés et il est difficile de savoir exactement quelle définition les enseignants ont de la notion : c’est le cas de S08 et S12 qui parlent de « construction syntaxique » ou encore S01, S04 et S08 de « structure de la phrase » ou « structuration » (S02). C’est encore plus flagrant chez S01 et S12 qui répètent l’expression « tournures de phrase » associées à « phrases compliquées » (S01). À plusieurs endroits, la définition des termes paraît floue voire erronée comme pour S15 qui à la question explicite : « Qu’est-ce que vous appelez proposition dans ce texte ? répond : « Enfin proposition… Enfin, c’est pas…c’est tous les compléments, en fait, tous les compléments ‘ les yeux perdus entre les arbres dans le jour vert et mystérieux’, voilà, on pourrait revenir sur la syntaxe de la phrase, le ‘ je m’y sens seule’ suffit, après le reste est uniquement descriptif. Donc si on parle des compléments circonstanciels ; c’est super, on va pouvoir mettre beaucoup de choses là-dedans mais ça sert à mettre l’ambiance du texte, mais pour la compréhension de la phrase, on a juste besoin de ‘ je m’y sens seule’. Voilà, c’est tout ça ; alors, les compléments de phrase, excusez- moi… ».

Nous remarquons souvent, comme ici, un glissement entre la terminologie syntaxique et la sémantique qui se traduit par une sorte de traduction de la notion mentionnée en sa réalisation sémantique : les caractéristiques syntaxiques du texte de Colette deviennent des « énumérations » (S13), « juxtapositions » (S12) ou encore un « mélange de notions » (S14). Les enseignants de l’enquête font souvent preuve d’intuitions précises au sujet des caractéristiques syntaxiques mais ont des outils peu opérants voire erronés quand ils tentent de mener une analyse syntaxique à proprement parler. Pour illustration, S15 mentionne la place finale des verbes dans la phrase 4° à juste titre mais elle le fait à l’aide de périphrases et en assimilant propositions principales, indépendantes et relatives qui expansent le nom : « Par exemple, les lapins à derrières blancs les traversent : donc les … à chaque fois, on a souvent les verbes qui viennent…qui viennent en fin ; par exemple ‘des chevreuils peureux dont on ne fait

que deviner le passage’ : en fait, à chaque fois, on…on cite le sujet et y a une proposition derrière qui vient… qui vient décrire l’action de ce personnage, du sujet. Voilà… Tout raccrocher ».

Le terme de ponctuation semble employé à meilleur escient et mieux maîtrisé mais, de façon assez surprenante, il apparaît en tant que tel dans les propos de trois enseignants seulement (S01, S06, S15). Pour les autres enseignants, des éléments épars de ponctuation sont cités mais pas le terme générique. S01 juge que la ponctuation dans ce texte n’est pas « précise » (le point-virgule n’est ni un point ni une virgule qui, eux, seraient précis en l’occurrence).

En ce qui concerne la syntaxe, comme pour bien d’autres compétences, nous le verrons, le référent des enseignants est très majoritairement l’élève. Ainsi, S15 estime que les élèves « sont plus habitués au point ». D’une manière générale, la plupart des enseignants de l’enquête mentionne la longueur des phrases. Pour certains, les phrases sont « très » longues (S05, S12, S13) pour d’autres elles sont « trop » longues (S01 ; S10 « t’arrives jamais au bout »), ce qui traduit bien le point de vue qu’ils adoptent alors. Ils se mettent à la place de leurs élèves. D’ailleurs, ils sont nombreux à parler en termes de lignes (S07, S08, S09, S14), comme on peut le faire dans le cadre de la lecture en classe. S05 en appelle même aux préconisations d’écriture qu’elle donne à ses élèves « moi, en plus, j'leur dis : ne faites jamais de phrase qui dépasse une ligne, parce que, sinon..., alors évidemment c'est leur écriture- mais là, je vois certaines phrases qui font cinq lignes ». S15 semble se référer à la pratique de la lecture oralisée lorsqu’elle voit une difficulté dans l’enchaînement et le découpage des phrases, de savoir « faire des pauses quand il faut ». Pratiques de classe et point de vue des élèves ont ainsi une forte prégnance dans l’analyse syntaxique que proposent certains enseignants de l’enquête. Parfois même, on assiste à travers certains propos à une véritable inversion de la perspective, comme chez S13 pour qui il s’agit de bien maîtriser la lecture pour maîtriser la syntaxe.

Le lexique

Comme nous l’avons dit en préambule de cette partie, le lexique est avancé comme une difficulté majeure par de nombreux enseignants puisque huit des quinze enseignants le mentionnent dans les trois premiers arguments de difficulté. Or, nous le rappelons également, nous avons délibérément choisi ce texte pour les termes courants qui y sont employés. La difficulté au niveau du lexique dans ce texte se loge donc ailleurs. Elle tient beaucoup plus, selon nous, à :

- l’acception poétique de certains mots et le niveau de langue soutenu, littéraire du texte : emploi de « tant » comme conjonction ou encore de « que » comme adverbe d’intensité, par exemple.

- la polysémie de certains mots (dénotations de « vague » : adjectif ou nom)

- le rapport hyperonyme/hyponyme « bois/arbre » et l’emploi de l’un pour l’autre dans « d’en voir couper un »

- le figement (sens figuré de « sonnent ; perdus » ; tours littéraires « tour à tour » ; expressions figées et figurées « ça me saigne le cœur »)

En regard de cette analyse succincte, les enseignants possèdent de manière éparse quelques outils pour décrire la difficulté : S08 parle de « référents » ; S15 de « radical » à propos de « huileuses » ou encore S05 de « champ lexical ». Mais souvent, la définition des termes employés semble floue. Le terme de « référent », par exemple, en est une bonne illustration : entre sens linguistique (signifiant/signifié/référent), sens grammatical (le référent d’une reprise anaphorique) et sens culturel (référent/référence), on ne sait pas toujours lequel est convoqué par les enseignants, comme chez S11 « ils savent pas ce qu'est un chevreuil. Donc, on est obligé de leur expliquer que ça peut ressembler à...un cerf, et parfois même, on est obligé d'aller vers certains référents, même jusqu'à Bambi. En cm2 ! Pour leur expliquer ». D’autres enseignants ont recours à des périphrases : « le mot de vocabulaire-là, broussailleux, je suis pas convaincue, non plus, qu'ils y aient accès » (S12) ; « je crois qu’ils auraient pas eu certaines images mentales » (S13) ; périphrases qui semblent renvoyer à l’idée de stock de lexique mental chez le lecteur : si le texte contient des mots qui n’appartiennent pas à ce lexique mental, alors le lecteur ne comprend pas le texte.

L’évocation du caractère polysémique des mots est également présente dans les propos des enseignants. Deux enseignants soulignent en effet les confusions probables chez les élèves entre les deux dénotations du mot « vague » : « l'obscurité vague », euh...vague, ils vont tout de suite penser à...vraiment, c'est peut-être bête, mais c'est comme ça, je le vois tous les jours » (S05) ; « l'obscurité vague ». Je suis pas certaine non plus que, tu vois, eux, y vont penser à une vague » (S06) ou encore du mot « bois » (bien que cette confusion nous semble moins probable) : « Ça pourrait être les grands bois, quand on parle de bois euh...on pense aussi aux bois des, des animaux, les rennes » (S07). C’est surtout le figement de « ça me saigne le cœur » qui fait réagir les enseignants de l’enquête. Ils sont six enseignants à penser que l’expression figée « ça me saigne le cœur » peut générer un problème de compréhension de textes pour certains élèves faibles, comme l’illustrent les propos de S09 : « ça me saigne le cœur, ils vont s'imaginer ça vraiment au premier degré (…) Et puis, oui, on dit que on fait saigner les arbres aussi »88. Enfin, lorsque les enseignants abordent le lexique, ils parlent très souvent du

contexte. On peut penser qu’ils ont pris l’habitude de manipuler la notion de « lexique en contexte » qui est une rubrique à part entière des manuels d’étude de la langue et des évaluations nationales.

En résumé, si certains enseignants possèdent quelques outils opérants pour caractériser la difficulté induite par le lexique, la majorité semble, cependant, survaloriser la part du lexique dans la compréhension de textes, en particulier les moins expérimentés – les jeunes enseignants ou les néo-titulaires (3 enseignants sur 8 qui citent le lexique parmi les trois premières sources de difficulté) - ainsi que les enseignants exerçant en EP (6 des 8) qui, comme S05, pensent que « On est dans...vraiment...dans un milieu, on le dit, on le répète, mais absolument pauvre lexicalement » (S05). La prégnance du modèle didactique traditionnel (lecture du texte/élucidation du vocabulaire/questionnement) semble demeurer forte, comme l’exprime S15 au sujet des élèves : « Alors, y a du vocabulaire – on a beau dire, il faut pas s’attarder sur le vocabulaire – la première chose que les enfants font, même si on leur dit de tout lire, y a quand même pas mal de vocabulaire qui pour moi qu’ils connaissent pas » (S15).

88 Pour ces deux derniers exemples, on peut émettre l’hypothèse qu’il s’agit là plutôt d’une reconstruction de la

difficulté par les enseignants qui la justifient en fonction de leurs propres connaissances : il semble en effet que

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