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participation de la victime à la procédure pénale selon le code de procédure pénale

D. Appréciation critique

1. Appréciation générale

Bien que l’idée du législateur de codifier sur le plan fédéral l’institution de l’ac-tion civile jointe soit très honorable et totalement justifiée, s’agissant des nom-breux avantages que présente cette procédure, il n’en demeure pas moins que l’application de l’article 38 I LAVI se heurte toujours à certains obstacles

398 Kropholler,adart. 5 CL N 85 ;Kurth/ Ber ne t,adart. 28 LFors N 9. Larticle 5 ch. 4 CL nen reste pas moins une disposition importante lorsque lauteur de linfraction doit être recherché à létranger ; en effet, cela épargne à la victime de devoir engager un procès civil dans lEtat étranger du domicile du défendeur, où ses biens sont plus souvent situés que dans l’Etat du lieu de commission de l’infrac-tion :Hause r, Opferhilfe, p. 336.

399 Il s’agit avant tout de prétentions civiles invocables en matière d’accidents de la circulation routière : Kropholler,adart. 5 CL N 85. La compétence fondée sur larticle 5 ch. 4 CL est, par ailleurs, plus étroite que celle instaurée par larticle 28 LFors, puisque le juge pénal dun Etat partie à la Convention n’est compétent pour statuer sur des prétentions civiles, autres que celles mentionnées à l’article 5 ch. 4 CL, que si un for conventionnel est applicable :Romer io,adart. 28 LFors N 23.

400 Dans le cadre de la CL, il n’y a, en effet, en principe pas d’examen de la compétence indirecte du juge qui a statué: cf. articles 31 et 34 CL.

401 Le juge de l’Etat requis peut, en effet, à l’égard d’un défendeur domicilié sur son territoire et poursuivi pour une infraction volontaire, tenir compte, au regard de la clause de lordre public visée à larticle 27 ch. 1 CL, du fait que le juge de lEtat dorigine a refusé à ce dernier le droit de se défendre sans compa-raître personnellement : arrêt de la CJCE,Kr ombachc.B a mb ers ki du 28 mars 2000, aff. C-7/98, Rec.

2000 p. I-1935.

D. Appréciation critique

difficiles à surmonter402, qui rendent son application peu fréquente en pra-tique403; reprise quasiment à l’identique par le code de procédure pénale suisse, cette tendance semble difficile à inverser à l’avenir404.

D’un point de vue purement pratique, il ne peut être que constaté que le jugement simultané de deux prétentions s’inscrivant dans des contextes très différents n’est pas aisé405. A cela, s’ajoutent des considérations « techniques » qui entravent, à l’heure actuelle, la mise enœuvre de l’article 38 I LAVI. Les tri-bunaux pénaux peuvent, en effet, parfois être composés de juges laïques sié-geant aux côtés de magistrats professionnels qui n’ont pas reçu de formation spécifique concernant l’évaluation du montant des dommages-intérêts à oc-troyer406. A cet égard, même un magistrat pénal professionnel peut éprouver certaines difficultés à appréhender les subtilités du droit de la responsabilité ci-vile, notamment causale, avec laquelle il n’est pas familier, s’agissant surtout des probatoires à ordonner ou du dommage à estimer407. Les résultats de l’en-quête menée par le CETEL dans les milieux professionnels concernés408, dé-montrent que les juges interrogés, chargés de l’instruction des aspects civils des prétentions des victimes, n’établissent, en principe, pas le montant exact du dommage subi, les avocats de la défense ne se privant d’ailleurs pas d’invo-quer, sans autre motivation, le caractère « illiquide » des prétentions civiles de la victime409. Ceci résulte, selon eux, de la mauvaise préparation du dossier par l’avocat, de la complexité des questions de droit privé à régler et de la diffi-culté à apprécier le dommage ou à le chiffrer, certains considérant que cette ap-préciation entraîne un allongement de la procédure et des frais supplémen-taires, sans parler du mélange de deux débats410. Du point de vue des avocats interrogés, les difficultés proviennent, d’une part, de l’inexpérience des juges

402 Certaines difficultés dapplication subsistent en effet : Deuxième rapport, p. 3.

403 Br önnimann, p. 150.

404 Reet z, p. 29.

405 Que ce soit du point de vue des maximes applicables ou de la position des parties dans le procès : Rusconi, pp. 542-543.

406 Rusconi, p. 543. Cest notamment le cas dans le canton des Grisons: Domenig, p. 27.

407 Dans ce sens, voirBrönnimann, p. 150 etRe et z, p. 29. La possibilité derreur de jugement quant à la détermination des quote-parts de responsabilité civile est, par conséquent, un facteur de risque pour la victime :Dähler/Schaffhause r, Verkehrsunfall, pp. 541 et 548; Ko lle r, p. 589, qui préconise d’utiliser la voie civile, par exemple, en cas de questions complexes ou de dommages d’une certaine importance en matière dinfractions à la LCR.

408 VoirRoth/Kelle rhals/ Ler oy/ Mathe y/ Maugué, pp. 38-39.

409 Reet z, p. 28.

410 Il est intéressant de relever qu’aucun des magistrats interrogés n’a évoqué sa propre (in)compétence concernant le jugement des prétentions civiles :Roth/ Ke llerhals/Le roy/Mathey/Maugué ,p. 38.

IV. Le jugement de laction civile jointe

pénaux dans ce domaine411, et d’autre part, du fait que les victimes craignent que l’on pense qu’elles agissent au pénal uniquement pour faire valoir leurs prétentions civiles. D’un point de vue pratique, certains avocats invoquent également la persistance d’une certaine méfiance envers « l’intrusion » de la partie civile dans le procès pénal, s’étant notamment vus enjoints à ne solliciter que les actes d’instruction strictement nécessaires412.

De plus, outre la surcharge des tribunaux répressifs qui ont matériellement peu de temps à consacrer à la résolution de questions civiles épineuses413, un autre inconvénient pourrait résider dans le fait de confier la compétence d’oc-troyer des dommages-intérêts pour des montants élévés à un juge unique, ce qui est souvent le cas414.

La mise en œuvre de l’action civile jointe telle que prévue, à l’heure ac-tuelle, par l’article 38 I LAVI n’est pas non plus exempte de difficultés sur le plan du fond. Régie par les principes de procédure civile, elle se doit d’être en-cadrée par des dispositions qui concrétisent ces derniers de manière précise, les codes de procédure cantonaux étant souvent lacunaires à ce sujet415, le droit fé-déral unifié n’apportant pas d’amélioration sensible à cet égard. Il en résulte, par conséquent, une certaine insécurité juridique qui n’est pas favorable au prononcé d’un jugement tranchant à la fois les conclusions civiles et pénales.

Par ailleurs, participer à un procès pénal, notamment dans le but de faire tran-cher ses prétentions civiles, est pour la victime une épreuve très douloureuse, ne serait-ce qu’en raison de la longueur de la procédure et du risque de victimi-sation secondaire ; si l’issue du procès s’avère insatisfaisante, la victime n’a sou-vent plus la force de s’investir dans une procédure d’appel ou un procès civil ultérieur416.

Enfin, on peut se demander ce qu’il advient lorsque, une fois que le juge pénal a statué sur les prétentions civiles de la victime, cette dernière décide d’intenter une action civile pour des éléments du dommage non invoqués

411 A ce propos, le fait que le choix de lavocat dagir par le biais de laction civile jointe puisse être contre-carré par le peu d’interêt que les magistrats pénaux manifestent, en règle générale, à approfondir leurs connaissances en matière de responsabilité civile, peut paraître choquant :Zehntner, Sparwut der Experten, p. 25.

412 Reet z, p. 28.

413 Ho fer, p. 119 ;Koller, p. 588 ;Rusconi, note de bas de page 30, p. 543.

414 Rusconi, p. 543. Notamment dans le canton de Fribourg (Kolly, p. 40) et en matière d’infractions à la LCR (Koller, p. 588).

415 Rusconi, p. 543. Voir, par exemple, en droit actuel, larticle 372a II CPP VD, qui se contente de préci-ser quen cas de report du jugement de laction civile jointe, seul le Président du tribunal doit statuer, devant alors procéder « aux mesures dinstructions nécessaires » et trancher « après avoir entendu les parties ». De même, s’agissant du canton de Neuchâtel, qui instaure deux voies de recours différentes : cf.supranote de bas de page 365.

416 Reet z, p. 28.

D. Appréciation critique

précédemment, alors qu’aucun renvoi ou réserve expresse ne figure dans le jugement du juge pénal. Dans ce cas, il semble que l’adageelecta una via non datur recursus ad alteram s’applique pleinement417 et que l’action civile de la victime ne devrait pas pouvoir être tranchée, l’ayant déjà été.

2. La situation particulière des victimes d’infractions

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