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Analyse des contextes qui présentent plusieurs marqueurs différents ( vrode , kažetsja , poxože ,

VRODE EN TANT QUE PRÉPOSITION LIÉE À L’APPROXIMATION

5.4. Vrode particule face à certains autres marqueurs de sens proche

5.4.4. Analyse des contextes qui présentent plusieurs marqueurs différents ( vrode , kažetsja , poxože ,

budto, naverno, etc.)

Dans les exemples de notre corpus qui permettent de mettre en contraste vrode avec ses synonymes relatifs, les plus intéressants sont ceux où l’on observe un jeu discursif dû à la présence de

vrode parmi d’autres mots modaux. Cf. :

(11) Ešþë izdali on primetil þto-to rasplyvþato-tëmnoe vperedi, naverno opjat’ kustarnik, i povernul k nemu. Kriki pozadi na kakoe-to vremja umolkli, vystrelov poka ne bylo. Poxože bylo na to, þto oni s Sotnikovym uže skrylis’ iz polja zrenija tex, na doroge. No vot sklon prigorka okonþilsja, stal glubže sneg, i Rybak, oxvaþennyj novoj zabotoj, glajnul nazad. Sotnikov otstal tak daleko, þto pokazalos’ : vot-vot ego sxvatjat živ’ëm. Vproþem, tot i teper’ kak budto sovsem ne spešil - ne bežal, a edva tašþilsja v snegovom sumrake. I samoe skvernoe bylo v tom, þto Rybak niþem ne mog posobit’ emu, on tol’ko bezostanovoþno stremilsja vperëd, tem samym uvlekaja tovarišþa. Nado bylo dobežat’ do kustarnika, kotoryj vrode uže nedaleko þernel vperedi. (BS : 26)

Déjà de loin, il remarqua devant lui quelque chose de vaguement sombre, probablement encore des buissons ; et il tourna dans cette direction. Pour le moment, il n’entendait plus les cris derrière, ni les coups de feu. Il semblait que Sotnikov et lui avaient réussi à se décrocher de ceux qui étaient sur la route. Mais arrivant au bout de la pente, la neige devint plus profonde, et Rybak jeta un regard derrière lui, pris d’une inquiétude nouvelle. Sotnikov était resté si loin derrière, qu’il lui sembla que l’on allait l’attraper. D’ailleurs, Sotnikov n’avait pas l’air d’être pressé, même maintenant il ne courait pas, mais il se traînait péniblement dans l’obscurité de la neige tombante. Le plus ennuyeux, c’était que Rybak ne pouvait point l’aider - il continuait à foncer, en entraînant de cette façon son camarade en avant. Il fallait atteindre les buissons, dont les contours noirs semblaient déjà proches.

Cet exemple est particulièrement intéressant, car il présente quatre marqueurs : naverno, poxože,

kak budto, vrode (plus un pokazalos’, qui est un prédicat verbal). Leur rôle dans le contexte est assez significatif.

Naverno introduit une supposition qui sert à identifier la masse sombre que le héros a aperçu. Cette supposition est basée sur une expérience antérieure, de type objectif : le héros avait déjà rencontré des massifs de buissons qui, vus de loin, ressemblaient à des tâches sombres.

Poxože19 introduit une supposition qui découle logiquement d’une observation parfaitement objective : cette observation n’est pas suceptible d’être mise en doute (on n’entend plus les cris des miliciens qui poursuivent les personnage ; il n’y a plus de coups de feu).

Pokazalos’ apparaît dans une proposition introduisant une autre proposition équivalente à une subordonnée complétive, qui exprime une hypothèse (Rybak suppose que Sotnikov va être capturé). Cette structure complexe est à son tour mise en relation au moyen de la conjonction þto à la proposition précédente, de telle sorte que la séquence avec pokazalos’ fait figure de consécution (« Sotnikov était resté si loin, qu’il lui sembla : ... »).

Kak budto, dont le sens est très proche de celui de vrode (cf. le schéma de Jakovleva 1994, supra) introduit une interprétation modale « figurée » de la situation décrite, sur un mode en quelque sorte fictif : on sait très bien que Sotnikov faisait tout son possible pour échapper à la poursuite ; tout en disant qu’il

avait l’air de ne pas être pressé, on tient compte du fait qu’en réalité, il était pressé (il ne pensait qu’à échapper aux poursuivants, mais il ne pouvait plus courir, car il était épuisé). La proposition comportant

kak budto constitue une interprétation fictive de la séquence qui suit ; à noter aussi que cette séquence présente un fort contraste : « il ne courait pas, mais se traînait péniblement ». De ce point de vue, kak budto s’oppose à vrode : on va de l’indiscernabilité apparente Y/X à la négation de cette indiscernabilité (kak budto), à la différence de vrode qui marque un mouvement inverse.

19 Ici, poxože (‘il semble, on dirait’, littéralement ‘ça ressemble’) n’est pas un vvodnoe slovo (mot à emploi parenthétique), mais il fait partie du prédicat nominal. Certes, l’effet de sens serait proche avec un poxože fonctionnant comme un vvodnoe slovo, cf. Oni s Sotnikovym , poxože, uže skrylis’ iz polja zrenija tex, na doroge.

On voit que ces marqueurs participent, chacun à sa façon, à la problématique du « vrai-faux » et du garant. On y retrouve certains des schémas modaux décrits par (Jakovleva 1994).

Quant à vrode, il apparaît à la fin de ce contexte, comme étant dissocié des schémas du « vrai-faux » et du garant ; il s’inscrit dans un mécanisme distinct, plus complexe. Rybak (l’énonciateur), en se disant qu’il n’a pas le droit de s’arrêter pour aider son camarade à marcher, se justifie en quelque sorte en pensant que le seul moyen de se sauver est d’atteindre le plus vite possible les buissons (dont il est question au début de ce contexte). Si les buissons étaient encore trop loin, cette stratégie ne serait pas tenable : les deux hommes n’auraient aucune chance d’échapper à la poursuite, et Rybak devrait, en bon camarade, s’arrêter pour aider Sotnikov (même s’ils devaient être tués ou capturés tous les deux). Or, les buissons paraissent proches. Cette proximité (fortement souhaitée par l’énonciateur) justifie donc la nécessité de courir jusqu’aux buissons sans s’arrêter. Du moment que la décision de courir sans s’arrêter est prise par l’énonciateur, l’état de choses décrit par Les buissons sont déjà proches est pris hors toute problématique du « vrai-faux ».

On voit que dans ce contexte, vrode ne met nullement en jeu le caractère, vrai ou faux, de la proposition Les buissons sont déjà proches. Cette proposition n’a pas à être mise en doute, confirmée ni infirmée. Son statut est en quelque sorte irrationnel : vrode signifie que dans l’optique de l’énonciateur, Y

(la distance réelle entre lui est les buissons) est indiscernable de X (la distance souhaitable, celle que l’énonciateur espère être une distance suffisamment courte, pour avoir le temps d’échapper à la poursuite). Il y a, derrière le fonctionnement de vrode, une sorte de logique binaire, un dilemme imposé par la force des circonstances. Le personnage ne pense qu’à une chose : échapper à la poursuite. Dans cette situation, la proximité ou l’éloignement des buissons (où l’on peut se cacher) constitue une alternative dont l’importance est vitale.

Par ailleurs, vrode est lié à un savoir venant de l’observation directe : Rybak voit les buissons. La perception directe est un deuxième facteur important pour comprendre la spécificité de vrode.

Analysons un autre exemple de contexte, qui se caractérise par l’apparition de deux naverno ; leur fonctionnement nous semble assez caractéristique sur fond de présence dans le contexte de trois vrode,

plus une combinaison vrode by. Par ailleurs, le même contexte présente un poxože et un požaluj :

(12) Vperedi na sklone prigorka v edva serevšem prostranstve noþi tusklo temneli krajnie postrojki derevni. Kak ona vygljadela otsjuda, Rybak uže ne pomnil : kogda-to, v naþale oseni, oni proxodili storonoj po doroge, no v derevnju ne zaxodili. Vproþem, sejþas èto ego malo interesovalo - važnee bylo ugadat’, net li tam nemcev ili policaev, þtoby nenarokom ne ugodit’ v zapadnju. Minutu on postojal vozle kustarnika, prislušivajas’, no niþego podozritel’nogo v derevne vrode ne bylo slyšno. Doneslos’ neskol’ko razroznennyx, priglušënnyx noþ’ju zvukov, lenivo protjavkala sobaka, po-prežnemu uprugo i nastojþivo dul veter, tixo posvistyvaja rjadom v mërzlyx vetvjax, paxnulo dymom - gde-to, naverno, topili. Tem vremenem szadi podošël Sotnikov i, ostanovivšis’, tože vsmotrelsja v sumerki. – « Nu þto ? » - « Vrode tixo, - negromko skazal Rybak. - Pošli pomalu ». [..]

Oni pošli vdol’ stëžki k izbe. Oni ešþë ne dostigli sarajþika, kak do ix sluxa javstvenno donëssja stuk, - poxože, kto-to rubil drova, rubil vrode by s neoxotoj, vpolsily. Rybak obradovalsja : esli rubjat drova - znaþit, v derevne, naverno, vsë tixo, þužix net. V temnovato-seryx sumerkax dvora on ne srazu razgljadel sgorblennuju ženskuju figuru u ogrady. Zaslyšav šagi, zenšþina ispuganno vskriknula. – « Tixo, mamaša ! » - negromko skazal Rybak. Rasterjavšis’, ona stojala pered nim - nizen’kaja požilaja tëtka v grubom, tolsto povjazannom na golove platke - i ne mogla vymolvit’ slova. Rybak iz predostorožnosti vzgljanul na vedušþuju v seni dver’, ta byla zakryta, bol’še vo dvore vrode nikogo ne bylo. Vproþem, on ne oþen’ i opasalsja, tak kak uže rešil, þto v ètoj derevne spokojno. Policai, požaluj, zaseli za samogon, a nemcy vrjad li tut pojavljalis’. (BS : 14)

Droit devant lui, sur le flanc de la colline, il apercevait des maisons sombres situées en bordure du village, qui étaient à peine visibles dans l’obscurité grisâtre de la nuit. Rybak ne se rappelait plus comment ce village se présentait, vu d’ici : un jour, au début de l’automne, ils étaient passés par la route en contournant le village. D’ailleurs, il ne s’en souciait guère - ce qui était plus important, c’était de

comprendre s’il y avait là-bas des Allemands ou des miliciens, pour ne pas tomber dans un piège. Il resta une minute près des buissons, tendant l’oreille, mais il ne crut entendre rien de suspect. Il entendit quelques bruits isolés, assourdis par la nuit, un chien lâcha un jappement peu énergique ; le vent continuait à souffler avec la même force, en sifflant doucement dans les branches gelées tout près de lui ; il sentit une odeur de fumée : probablement, on faisait du feu dans un poêle. Sotnikov venait de le rattraper et s’arrêtant, scruta lui aussi les ténèbres. - « Alors ? » - « Ça a l’air d’être calme, - répondit Rybak à voix basse. - On y va doucement ». [...]

Ils suivirent le sentier qui menait à l’isba. Ils n’étaient pas arrivés ux abords de l’isba, lorsqu’ils entendirent distinctement un bruit de coups de hache : vraisemblablement, quelqu’un cassait du bois, et il le faisait comme sans conviction, sans s’y adonner à fond. Rybak s’en réjouit : si l’on cassait du bois, cela signifiait qu’au village, tout était probablement calme, qu’il n’y avait pas d’intrus. Il eut du mal à distinguer dans l’obscurité de la cour une silhouette féminine courbée près de la haie. En entendant les pas, la femme poussa un cri de frayeur. - « Pas de bruit, ma petite dame ! » - lui dit Rybak à voix basse. Elle se tenait devant lui, décontenancée, sans pouvoir dire un mot : une bonne femme plutôt âgée, de petite taille, coiffée d’un gros châle. Par précaution, Rybak jeta un regard à la porte qui communiquait avec l’entrée de l’isba : la porte était fermée ; dans la cour, il n’y avait apparemment personne d’autre. D’ailleurs, il agissait avec moins de crainte, car il avait déjà décidé que le village ne présentait aucun danger. Les miliciens étaient peut-être en train de boire du tord-boyaux, quand aux Allemands, il était peu probable qu’ils eussent jamais mis les pieds ici.

Certes, on pourrait essayer d’expliquer l’apparition de vrode, face à d’autres mots du discours à effets de sens proches (cf. poxože, naverno) en termes de la prototypicalité ou de la normalité de la situation décrite. Pourtant, la deuxième occurrence de naverno semble présenter les mêmes particularités du point de vue de la normalité de la situation.

L’observation des exemples cités ci-dessus montre par ailleurs que l’emploi de vrode est souvent subordonné à une sorte de choix, d’alternative, de dilemme. Ainsi, les trois occurrences de vrode semble liées au dilemme : «Y a-t-il, oui ou non, un danger ici ? ». En revanche, l’emploi de požaluj, dans ce même exemple, ne suppose pas de choix alternatif : l’énonciateur peut faire un nombre assez important d’hypothèses quant à la question de savoir ce que les miliciens sont en train de faire.

Les trois vrode se rapportent clairement au dilemme (l’alternative) : « Y a-t-il, oui ou non, des Allemands au village ? ». Ce dilemme est exprimé au début du contexte, avec une précision importante : l’aspect extérieur du village et tout ce qui pourrait être important dans la vie du village dans une autre situation, n’intéresse pas Rybak et Sotnikov. Ce qui les intéresse, c’est de ne pas tomber entre les mains des ennemis. Par conséquent, tout le reste est subsidiaire ou subordonné à cette préoccupation première. On notera aussi que dans les trois cas, vrode est associé à des prédicats de perception (prislušalsja, vsmotrelsja, vzgljanul) se trouvant à gauche. Ceci n’est certainement pas un hasard (voir supra nos remarques concernant ce type de prédicats par rapport à vrode).

Le premier naverno apparaît dans une structure classique exprimant la conséquence logique : si on sent la fumée, cela signifie presque certainement que quelque part dans le village, un poêle est allumé pour le chauffage. Le fait que l’on fasse chauffer une maison est en soi assez banal et ne permet en rien de se prononcer sur la présence ou l’absence des Allemands.

Le second naverno apparaît lui aussi dans une structure analogue : de plus, l’idée de conclusion logique, rationnelle est accentuée par znaþit (‘par conséquent’). Par ailleurs, l’énoncé est précédé de deux séquences (comportant vrode) qui indiquent l’idée « Tout semble calme ». Cela signifie que le dilemme premier est affaibli vers ce passage, en faveur de X (« tout est calme »). Ce qui explique par ailleurs la réaction du personnage. Sa joie vient du fait que l’événement constaté (quelqu’un coupe du bois) est considéré comme un argument quasi définitif (vu les observations précédentes) en faveur de la non présence des Allemands dans le village.

Quant au troisième vrode, qui est à la fin de ce contexte, son apparition nous semble justifiée dans la mesure où le dilemme réapparaît, mais sous une forme modifiée : « Y a-t-il, oui ou non, quelqu’un

d’autre dans la cour ? » On voit la différence entre naverno et vrode dans cet exemple : naverno est lié à un raisonnement logique, non immédiat. Vrode suppose l’absence de tout raisonnement de type logique, il est plutôt lié à une perception immédiate, non-rationnelle. De plus, vrode suppose une alternative nettement exprimée, cette alternative ayant une importance vitale pour les personnages dans la situation décrite.

C’est ce dernier trait qui pourrait expliquer la différence entre vrode et poxože20 (qui suppose aussi une perception immédiate et dont le sens est très proche de celui de vrode). Remarquons que dans ... do ix sluxa javstvenno donëssja stuk, - poxože, kto-to rubil drova..., on pourrait facilement substituer vrode à

poxože.

Peut-on supposer que l’apparition de poxože est justifiée essentiellement par le désir d’éviter une répétition trop fréquente de vrode (seul ou combiné à d’autres opérateurs) ? Oui, mais la réalité contextuelle suggère une autre explication : on s’aperçoit que la situation décrite par cet énoncé n’est liée à aucune alternative importante pour les personnages. Le problème n’est pas posé en termes de on entend un bruit // on n’entend aucun bruit ; le texte dit d’ailleurs clairement qu’ils entendaient distinctement un bruit de coups de hache. On voit que poxože ne gère pas une problématique de distinction en termes d’alternative, comme le fait vrode. Sachant qu’on entend sûrement un certain bruit (stuk), la séquence introduite par poxože sert surtout à spécifier hypothétiquement ce bruit (ou l’origine de ce bruit) en précisant que le bruit en question ressemble à celui que fait une personne qui coupe du bois ; So joue sur l’inférence : le bruit en question est l’indice du fait que quelqu’un coupe du bois21.

Certes, on doit remarquer un vrode by dans la suite : nous l’analysons ici comme une trace de l’interprétation subjective, faite sur un mode hypothétique par So, des particularités non explicités dans le contexte (mais explicitables) du bruit de la coupe du bois. Dire que quelqu’un semble le faire sans conviction (à mi-force), sans s’y adonner à fond signifie que So interprète un bruit caractéristique qui émane de cette opération lorsqu’elle est faite par une personne faible, malade ou par une personne inexpérimentée, qui n’a pas l’habitude de faire ce genre de travail physique relativement pénible (en effet, le contexte ultérieur nous apprend au’il s’agit d’une villageoise âgée).

Tout à la fin de cet extrait, il y a encore un mot modal exprimant l’incertitude : požaluj. Sans pouvoir, dans le cadre de ces remarques, expliciter toutes les différences entre požaluj et vrode, notons que dans ce contexte, le remplacement de požaluj par vrode nous semble difficile. En effet, la supposition selon laquelle les miliciens pourraient être en train de boire de l’alcool, ne découle pas, directement ou indirectement, des faits observables dans la situation en question. Rien de tout ce que les personnages ont vu, entendu, senti, etc., ne leur permet de se prononcer sur les occupations, les faits et les gestes des miliciens (en supposant que ces derniers sont au village). Cette supposition ne peut venir que de l’expérience des personnages centraux (Rybak et Sotnikov), d’une sorte de savoir généralisé, typifié, préexistant.

Le schéma de raisonnement est à peu près le suivant : « même si les miliciens sont au village, ils ne sont pas dangereux, car à cette heure-ci, ils doivent se soûler, d’après ce qu’on sait sur les habitudes des miliciens locaux en général ». Voir l’étude de E. Razlogova sur požaluj, dont les conclusions nous semblent proches de nos observations présentes, cf. : « Požaluj est associé à une sorte de choix mental, c’est l’image même du processus mental ; il reflète une attitude modérée, celle d’un homme qui pense »22.

20 Dont la forme interne implique clairement la similitude, la ressemblance, cf. On poxož na otca ‘Il ressemble à son frère’.

21 V. Plungjan (2000 : 324) considère poxože comme un « inférentif », c’est-à-dire un mot grammaticalisé qui marque que So décrit la situation en se basant sur l’inférence : si So voit que la porte de son appartement est défoncée, il peut dire Zdes’, poxože, kto-to pobyval ‘On dirait que l’appartement a été visité’. Vrode y serait à notre avis mon bon.

22 Cf. sa glose formalisée dans son article sur ce modalisateur, publié dans l’ouvrage collectif (Kiseleva, Paillard 1998 : 331-336) : « Požaluj indique que l’énonciateur, tout en se positionnant sur P, tient compte d’autres possibilités ». Le problème est que cette glose, de caractère trop abstrait, peut s’appliquer à un grand nombre de

A titre de brève conclusion du chapitre V, notons que nos observations justifient l’apparition de

vrode dans la plupart des contextes, et expliquent les différences entre vrode et certains opérateurs à effets de sens proches. Certes, pour aboutir à des conclusions définitives et absolument fiables, il faudrait analyser, pour chaque opposition, des centaines de contextes présentant vrode en concurrence avec d’autres marqueurs de sens proche. On comprend que cela demanderait une étude à part qui dépasserait le cadre de la présente recherche.

Néanmoins, on peut dégager certaines tendances. Vrode particule n’est pas un mot sémantiquement vide, ni un simple substitut d’autres mots modaux comme kažetsja. Quelques conclusions s’imposent :

- vrode est souvent associé à un choix alternatif entre deux possibilités opposées (X/X’) ; ce contraste (présent contextuellement ou dans la situation) peut être plus ou moins fort ;

- vrode est souvent associé à la perception immédiate, directe de l’état de choses décrit par X ; - l’énoncé comportant vrode tend à privilégier la valeur normale, positive, souhaitable pour l’énonciateur (ce qui s’accorde avec l’idée selon laquelle dans cette opération, Y est posé comme indiscernable de X, X étant la situation « prototypique ») ;

- dans beaucoup de cas, l’énoncé comportant vrode n’est pas sémantiquement (ni même quelquefois syntaxiquement) indépendant ; au contraire, il est mis en rapport avec des énoncés renvoyant à des opérations mentales plus abstraites ou à un savoir de type indirect ;

- parfois (cf. notamment 5.3.2), vrode ne fonctionne plus comme un adverbe modal de sens épistémique se rapportant au contenu prépositionnnel de l’énoncé et notamment au prédicat (Smotrju : on