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Le 1er septembre 1939, l‟imminence du conflit oblige à prendre des mesures exceptionnelles, même dans les milieux catholiques. Par exemple, onze postulantes de la congrégation Sainte- Chrétienne à Metz interrompent leur retraite préparatoire à la vêture et prennent précipitamment l‟habit344

.

La France active son plan de mise en protection de la population civile située dans la « zone rouge », c‟est-à-dire entre la frontière franco-allemande et la ligne de défense, dite ligne Maginot.

335Pour les chrétiens, une croisade est une ligue, voire une expédition, contre les hérétiques comme les croisades du

Moyen Age contre les musulmans ou les Albigeois. En 1917, lorsque le président américain Thomas Woodrow Wilson engage les Etats-Unis dans la guerre, il parle de croisade, de guerre du droit, pour mettre les démocraties du monde hors de danger.

336Le Lorrain, 25 février 1940, p. 1. Editorial de Mgr Louis sous le titre « Vers la victoire… par les forces spirituelles ». 337En mars 1937, le pape Pie XI publie deux encycliques : Divini redemptoris qui condamne le communisme athée et

Mit brennen der Sorge qui met en garde contre le néo-paganisme hitlérien. Le 20 octobre 1939, dans sa première

encyclique, Summi Pontificatus, le nouveau pape Pie XII explique les malheurs des temps par l‟idolâtrie soit des faux progrès de la raison libérale sans Dieu, soit d‟un État survalorisant la nation, l'ethnie ou la lutte des classes.

338Dans La Semaine religieuse de Paris de fin septembre 1939, il est rappelé que le pape Pie XI a condamné le racisme

et le bolchévisme : « …C’est vraiment une croisade que nos soldats commencent, la croisade de la vraie liberté, de la

fraternité chrétienne, la croisade de notre civilisation. »

339Voir Le Lorrain, et La Libre Lorraine - Lothringer Volkszeitung septembre 1939-juin 1940. 340Le Lorrain, 25 février 1940, p. 1.

341ADM 29J088, Lettre pastorale n°8, p. 2. 342

ADM 29J2018, lette de l‟abbé Hallinger replié à Oyré (Vienne), 19 septembre 1939.

343Pour rappel, parole du pape Pie XI en 1937.

Dès le 1er septembre, environ 210 000 Mosellans sont emmenés essentiellement dans la Vienne et la Charente345. Sur le chemin de l‟exil, plusieurs centaines d‟évacués trouvent refuge au pensionnat de l‟abbaye bénédictine d‟Oriocourt réquisitionnée comme hôpital civil qui compte jusqu‟à 175 malades et impotents. Les valides poursuivent leur chemin alors que les malades restent à l‟abbaye jusqu‟au 8 septembre. Une quarantaine de sœurs de Peltre et de Saint-Jean-de-Bassel, qui se trouvent dans le flot de l‟évacuation, y trouvent également refuge avant de regagner leur maison mère ou d‟autres destinations en Moselle346

.

Dans la mesure du possible, dans les églises abandonnées de la zone évacuée, les biens d‟église sont sauvegardés. Des objets de culte et ornements sont déposés au pensionnat Sainte-Chrétienne au 9 rue Saint-Gengoulf à Metz et chez les sœurs de la Providence à Thionville, du mobilier d‟église chez les Sœurs de Sainte-Chrétienne au 60 rue Dupont-des-Loges à Metz, des effets d‟église au couvent de Lettenbach à Saint-Quirin. Les calices des paroisses de l‟arrondissement de Thionville- Est, des reliques et objet des arrondissements de Thionville-Est et de Saint-Avold sont emmenés à l‟évêché347

.

Près de la moitié des petits séminaristes soit 157 élèves de Bitche et 70 de Montigny-lès- Metz sur un total de 493 petits séminaristes, et près d‟un tiers des grands séminaristes, soit 35 élèves sur un total de 108, partent avec leurs parents lors de l‟évacuation348. La difficulté pour l‟autorité épiscopale est de les repérer et de les rassembler dans un séminaire. Soixante-dix petits séminaristes sont rassemblés au château de Richemont (Charente)349. D‟autres sont à Arras ou à Lyon350. Le Grand séminaire d‟Angoulême est prévu pour accueillir les séminaristes mosellans évacués mais les séminaristes sont dispersés en fonction du lieu d‟accueil, soit 26 à Angoulême (Charente), 2 à Arras (Pas-de-Calais), 2 à Bordeaux (Gironde) et 5 à L‟Houmeau (Charente-Maritime) 351.

Pour les prêtres352, la consigne de l‟évêque est de suivre les populations évacuées353. Ainsi, au moins 262 prêtres354 sont évacués le 1er septembre 1939. Deux cent trente-cinq prêtres355 quittent

345Voir sur ce sujet : Paul-E Glath, Du Pays de Bitche en Charente-Maritime, Niederbronn, imprimerie commerciale,

1954 ; Henri Hiegel, « L‟évacuation de la zone rouge du département de la Moselle en 1939-40 », dans Mémoires de

l’Académie nationale de Metz, 1982, pp. 57-69 ; Marcel Neu, L’évacuation en Lorraine 1939, Sarreguemines, éditions

Pierron, 1989 ; Christine Guth, La première évacuation de la population de l’arrondissement de Thionville-est, mémoire de master sous la direction de François Cochet, université de Metz, 2006-2008 ; Christine Odent-Guth, Les

évacués de Pays thionvillois de septembre 1939 à novembre 1940, Metz, éditions Serpenoise, 2010 ; sous la direction de

Jean-Eric Iung, Un exil intérieur, Lyon, éditions Libel, 2009.

346Anonyme, L’abbaye bénédictine d’Oriocourt, Metz, imprimerie Le Lorrain, 1960, p. 23. 347

ADM 29J1781, rapport sur la récupération des objets de culte et lettre, 12 octobre1939.

348

ADM 84J14, rapport Lallier, Supérieur du Grand séminaire, 1er décembre 1939.

349Le Lorrain, 18 mai 1940, p. 3.

350Bulletin Confrérie de Marie Immaculée du diocèse de Metz, 1959, p. 12.

351ADM 84J14, rapport Lallier. Le Lorrain, 18 mai 1940, p.3. Les séminaristes ne sont plus que 22 en avril 1940. 352Sur le déroulement de l‟évacuation de prêtres ou de religieux, voir ADM 40J, journal et albums photos de l‟abbé

Meyer de Bouzonville. AM Sarreguemines 76X3, journal abbé Friederich de Rouhling. ACSC, non coté, journal de sœur Sainte-Jeanne-Marguerite de Saint-Avold et cahiers anonymes en vers et illustrés sœurs de Rustroff. AP conseil fabrique Montbronn, journal de l‟abbé Spitz de Montbronn. Ascomémo, journal Le Lien, janvier 1940 pp. 1-3, récit de l‟abbé François Goldschmitt de Rech. François Goldschmitt, Tragédie vécue par la population de l’Est sous

l’occupation nazie, tome 1, chez l‟auteur, Rech 1948, pp. 8-9. Le récit de l‟abbé Goldschmitt est repris dans Les Cahiers du Pays d’Albe n°10, Sarralbe 1979, pp. 37-40.

la Moselle en laissant généralement les objets du culte et l‟argent des fabriques. Quatre prêtres s‟installent dans les départements limitrophes, deux en Meurthe-et-Moselle et deux en Alsace. Vingt-sept prêtres, même s‟ils quittent leur paroisse, restent en Moselle mais s‟éloignent de la « zone rouge ». Par exemple, l‟abbé Louis Ichtertz, vicaire de Stiring-Wendel, se rend chez son frère à Charleville-sous-Bois. La plupart de ces 27 « restés » sont âgés : 10 d‟entre eux ont plus de 80 ans356 et sont donc retraités ; 6 ont entre 70 et 80 ans. D‟autres sont malades357. Quatre professeurs du collège de Bitche évacué se réfugient avec des élèves à Vigneulles dans la commune de Lorry-lès-Metz. Un autre abbé du Petit séminaire s‟installe à Basse-Bévoye dans la commune de Peltre, sa famille contzoise étant évacuée. Les prêtres évacués en France sont tous de la zone dialectophone, comme la population. Pendant une année, les communautés paroissiales vont vivre loin de leur église et de leur cimetière.

Pour les congrégations, des dispositions pour protéger leur ordre sont prises dès les évènements de 1938. Par exemple, le noviciat des sœurs de Sainte-Chrétienne de Metz se réfugie à Henrichemont (Cher)358 et ne revient à Metz qu‟après les accords de Munich tout en aménageant la maison d‟Henrichemont dans l‟éventualité d‟un nouvel exode359

. Le 26 avril 1939, une lettre circulaire aux mères supérieures de la congrégation Sainte-Chrétienne indique non pas des directives, mais des conseils pratiques en cas d‟évacuation en signifiant clairement de « partir avec

la population dans la direction indiquée ». Il est aussi recommandé de « faire partir les sœurs

vraiment souffrantes ou infirmes avant l’évacuation forcée360

». Le 27 août 1939, Mgr Heintz en tournée dans l‟est du département recommande aux sœurs de ne pas quitter la population361

. Ainsi environ 40% des sœurs de la congrégation de Saint-Jean-de-Bassel sont évacuées en septembre 1939, la plupart d‟entre elles se trouvant hors « zone rouge », soit 42 communautés souvent de deux à quatre sœurs, mais aussi des établissements comme l‟hôpital de Bitche et ses vingt-quatre sœurs. Par contre, les huit sœurs de cette congrégation attachées à l‟ouvroir de Bitche, les dix-sept de l‟externat Saint-Joseph de Merlebach, les dix-sept du pensionnat de Siersthal sont simplement déplacées en Moselle et réparties dans les différentes communautés non évacuées362 .

353ADM 84J14 : selon le témoignage écrit de l‟abbé Lallier, supérieur du Grand séminaire, c‟est notamment la consigne

donnée par Mgr Heintz le 24 août 1939 à des retraitants au Grand séminaire. ADM 29J2088, circulaire de Mgr Heintz aux prêtres évacués mi-septembre 1939 : « Nous vous avions donné avec netteté une direction… : quoi qu’il arrive, le

pasteur accompagne ses ouailles. »

354Nous n‟avons pas réussi à déterminer la date d‟évacuation pour 3 prêtres. Henri Hiegel indique 242 prêtres

catholiques de la zone rouge évacués dans « Les mesures antireligieuses du national-socialisme en Moselle de 1940 à 1945 » dans Mémoires de l’Académie de Metz, 1982, p. 70.

355Annexe CD2, corpus.

356L‟abbé Georges Scheffer retraité demeurant à Sarreguemines est le doyen des prêtres évacués. Il a 87 ans. Il se rend à

Morhange. Annexe CD2, corpus.

357C‟est le cas de l‟abbé Jean-Jacques Evrard, curé de Monneren qui se rend à Illange. AE Metz, corpus, annexe CD2. 358L‟école Sainte-Marthe de Henrichemont achetée en 1874 et fermée depuis 1904 est propriété de la congrégation. 359ACSC, non coté, journal manuscrit écrit par les novices.

360

ACSC, non coté, lettre circulaire de la supérieure générale de la congrégation Sainte-Chrétienne de Metz.

361ACSC, non coté, journal de sœur Sainte Jeanne-Marguerite, 1939.

Sœurs de Saint-Jean-de-Bassel évacuées en septembre 1939363 Départements d’accueil Nombre Vienne 71 Charente 133 Charente-Inférieure 9 Meuse 5 Moselle 4 Total 222

Pour les sœurs enseignantes qui logent dans les communes, la consigne de l‟évêque est bien d‟accompagner la population, malgré la mise à disposition par la préfecture de véhicules pour transférer les sœurs enseignantes dans leur maison mère364

et malgré l‟avis contraire de l‟inspecteur académique de la Moselle : « Ne poussez pas les religieuses à aller avec leur commune à l’intérieur

parce qu’à l’intérieur elles ne pourront faire école puisqu’il faut respecter l’école laïque. Elles ne pourront y être qu’interprètes ou relever le moral ». Finalement, celles qui partent à « l‟intérieur »

ont pour consigne de ne rester que trois à cinq jours avec la commune et de se présenter ensuite à l‟inspecteur de l‟école primaire du secteur d‟accueil pour retourner en Moselle365. D‟autres

accompagnent les villageois jusqu‟aux centres de recueil366

puis se présentent à l‟inspection académique de la Moselle où elles sont immédiatement affectées sur des postes vacants dans la

363ACSJB, non coté, liste nominative manuscrite et liste dactylographiée des lieux d‟accueil.

364Sœur Marie-José Gruber, « Le couvent de la Divine Providence de Saint-Jean-de-Bassel pendant la deuxième guerre

mondiale », dans Annuaire de la SHAL, Metz, 1979, p. 131.

365ADM 29J1172, notes manuscrites de mars 1939 et lettre de l‟inspecteur d‟académie de la Moselle, 15 mars 1939. 366

Les habitants des villages évacués rejoignent comme ils peuvent des communes désignées qui ont des gares et des salles pour les accueillir. Ainsi, par exemple, Hagondange est centre de recueil pour les évacués du secteur de Bouzonville, Maizières-lès-Metz du secteur de Sierck, la vallée de l‟Orne du secteur de Koenigsmacker…

zone non évacuée367 car de nombreux enseignants sont mobilisés368. Toutes les sœurs du canton de Sierck sont évacuées le 1er septembre et ne sont pas remplacées. Pour la première fois, des sœurs de Peltre, de Sainte-Chrétienne369 et de Saint-Jean-de-Bassel sont nommées dans des classes de garçons370. D‟autres regagnent leur maison-mère, voire plus rarement leur famille.

Pour les établissements scolaires privés, le plan d‟évacuation établi par l‟inspection d‟académie en juin 1939 est activé pour le personnel non mobilisable, pour les élèves internes après accord de leurs parents et pour le matériel de première urgence371. Ainsi les élèves des pensionnats de Bouzonville , Forbach, Peltre et Thionville tenus par les sœurs de Peltre sont orientés vers Saint- Mihiel (Meuse) pour les enfants restés en Moselle et vers le château de Dieuzy (Maine-et-Loire) pour les évacués372. Les pensionnats de Rustroff et Sarreguemines tenus par les sœurs de Sainte- Chrétienne sont dirigés respectivement vers Salvert (Vienne) et Lectoure (Gers) 373. Le collège mariste de Sierck trouve refuge au château de Buy à Margency (Val-d‟Oise)374 alors que les sœurs de Sainte-Chrétienne de l‟externat de la rue Chatillon à Metz s‟installent à Poitiers (Vienne)375. Une soixantaine d‟élèves du collège épiscopal de Bitche se replient dans la maison de Vigneulles à Lorry-lès-Metz.376 Les pères professeurs au collège de Bitche retournent au couvent de Sigolsheim (Haut-Rhin) 377. Une vingtaine d‟étudiants du Petit séminaire replié à Cuvry s‟installent à côté de Dax (Landes) dès 1939 sur la base du volontariat378. Tous ces établissements fermés ne se situent pas forcément dans la zone rouge, loin s‟en faut, mais il s‟agit bien de mettre en sécurité les populations fragiles et leurs accompagnantes. Le danger existe. Sœur Ignace-André, de la

367ACSJB, lettre de sœur Marie-Chantal d‟Hémilly, 4 septembre 1939 évacuée de Longeville-lès-Metz : « …Dimanche

nous nous sommes présentées chez Monsieur l’inspecteur avec notre lettre de cachet. Là nous devions faire le plus grand sacrifice : accepter à nous séparer… Un camion nous a reconduites à Rémilly. Là le chef d’état-major a mis à notre disposition deux autos pour nous conduire à nos postes que l’académie nous a assignés… Monsieur l’inspecteur nous a dit : si la population de nos nouveaux postes devait évacuer, il faudrait encore une fois les suivre. Pour le costume religieux, nous ferons l’impossible pour le porter tel quel. Nous n’avons pas beaucoup de linge… Le costume religieux nous protège…».

368

ADM 29J1172, compte rendu de la réunion à l‟inspection académique de la Moselle, 5 septembre 1939. A cette date, une vingtaine de religieuses ont déjà leur nomination pour remplacer des instituteurs mobilisés, comme à Lorry- Mardigny, Luppy ou Raville. Selon le rapport de la supérieure de Saint-Jean-de-Bassel après le 12 septembre 1939, les sœurs institutrices d‟Hundling, Walschbronn et Wiesviller évacuées avec la population en Charente sont rappelées en Moselle pour remplacer des mobilisés.

369ADM 29J1172, lettre circulaire évêché, 2 septembre 1939 : 120 sœurs de Sainte-Chrétienne sont utilisées en Moselle

dans l‟enseignement et les hôpitaux après l‟évacuation.

370

ADM 29J1172, rapport supérieure de Saint-Jean de Bassel, 12 septembre 1939.

371ACSC, non coté, lettre circulaire de l‟inspecteur d‟académie de Metz, 17 juin 1939. 372Le Lorrain, 12 octobre 1939, p. 3.

373ADM 29J1172, lettres, 17 octobre 1939 et 26 février 1940. Le Lorrain, 14 mars 1940. Le pensionnat de Rustroff

déménage en mars 1940 au château de Breil (Maine-et-Loire).

374

Alphonse Gambs, Sierck et son collège, Thionville, éditions Klopp, 1991, pp. 162-164. La Libre Lorraine, 13 octobre 1939, p.1.

375ADM 29J1172, lettre 3 septembre 1939.

376Information communiquée par François Courtade, président de l‟association Lorry-lès-Metz, au fil du temps, lettre du

26 mai 2012.

377François Goldschmitt, Le Commissaire épiscopal, Rech, chez l‟auteur, 1948, p. 9.

congrégation de Peltre, est tuée le 6 novembre 1939 à Plappeville par un avion qui s‟écrase dans la cuisine de la maison des sœurs379

.

En dehors des enseignantes, des infirmières380, de quelques sœurs qui s‟occupent des établissements épiscopaux et des sœurs âgées et souffrantes381

, toutes les autres sœurs sont priées de partir de la zone de guerre et de trouver refuge dans les congrégations à «l‟intérieur382

». Le 4 septembre, une liste de 849 sœurs susceptibles d‟être évacuées sur Poitiers est dressée pour les arrondissements de Metz, Thionville, Boulay et les cantons de Saint-Avold, Merlebach et Rosbruck383. « A la gare de Poitiers, chez le commissaire spécial était déposée une liste de 30

congrégations religieuses de Poitiers qui devaient recevoir les différentes congrégations mosellanes384 ». Les établissements dont elles s‟occupent (asiles, hospices, orphelinats,…) sont

généralement transférés avec les personnes principalement en Charente et dans la Vienne385, mais aussi dans le Cher, la Gironde, le Maine-et-Loire, le Gers et le Val-d‟Oise386. Le maire de Metz, Gabriel Hocquard, demande aux carmélites de Metz « d’évacuer de suite car leur rôle social de

prière peut se faire pour Metz de l’autre côté de la France ». Il leur est signifié que « si les carmélites qui restent actuellement à douze sont tuées, le Carmel de Metz ne pourra plus subsister après la guerre. » A cause du voltage électrique qui n‟est pas le même à Limoges et qui par

conséquent ne permet pas le fonctionnement des fers à repasser, seulement cinq d‟entre elles se réfugient finalement au Carmel de Limoges (Haute-Vienne) où elles continuent d‟assurer la fabrication des hosties du diocèse de Metz par roulement de jour et de nuit387. La même demande est faite aux sœurs de la Visitation388

.Les sœurs de la prison de Metz se réfugient dans la maison mère des sœurs de Sainte-Philomène à Salvert (Vienne). Quatre-vingt sœurs de Sainte-Chrétienne seraient placées dans les congrégations389. Les sœurs de Saint-Jean-de-Bassel quittent également Metz : sept infirmières sont affectées à l‟hôpital militaire d‟Etain (Meuse), trois autres du foyer des

379Marie André, Ils cherchaient des pierres, Paris, éditions Lethielleux, 1957, p. 114. Témoignage de sœur Véronique-

Marie communiqué par Yvette Illy, présidente de la société d‟Histoire de Plappeville. AM Plappeville, état-civil. ADM 29J1172, lettre de la supérieure de Peltre, 6 novembre 1939.

380Match 4 avril 1940, reportage photos sur l‟hôpital militaire de Phalsbourg. Deux photos concernent des sœurs. 381ADM 29J1172, lettre 21 septembre 1939. Cent quarante-cinq sœurs malades ou âgées de Sainte-Chrétienne peuvent

rester à Gorze, Rémilly et Argancy

382L‟expression « intérieur » désigne la France autre que les départements alsaciens et mosellans. On parle aussi de

« Français de l‟intérieur », notamment dans une directive du Kreisleiter de Thann de juillet 1940, qui désignent les Français nés en France en dehors des trois départements recouvrés.

383

ADM 29J1172. Cela concerne les congrégations suivantes : Sainte-Chrétienne, 130 ; Peltre, 332 ; Congrégation des petites sœurs franciscaines de la Charité chrétienne Thal, 43 ; Dominicaines, 49 ; Plappeville, 32 ; St-Charles, 42 ; Servantes Ste-Chrétienne, 86 ; Doctrine chrétienne, 30 ; Filles de la Charité, 23 ; St-Jean-de-Bassel, 18 ; Charité Strasbourg, 20 ; Niederbronn, 17 ; Flauville, 15 ; Vigneulles, 6 ; Herrenwald, 6.

384ACSJB, lettre de sœur Marie-Chantal Weislinger réfugiée à Nieuil-l‟Espoir (Vienne), 15 octobre 1939.

385ACSC, début 1941, 99 sœurs de Sainte-Chrétienne sont en Charente, 45 dans la Vienne. L'Ami des Foyers Chrétiens,

27 octobre 1974 : les sœurs de Rettel et de Sierck partent avec plus de 200 enfants de 6 à 14 ans et de 110 vieillards. L'hospice de Sarreguemines se réfugie en Charente.

386

Voir annexe 8, Evacuation des établissements tenus par des religieux septembre 1939 Ŕ mai 1940. ADM 29J1172, selon des notes manuscrites, le départ concerne à Metz : Petites-Sœurs des Pauvres : 20 religieuses et 230 vieillards ; Bon-Pasteur à Metz : 40 sœurs, 120 enfants ; Borny : 27 religieuses, une centaine d‟enfants.

387ADM 29J1178, lettres du carmel de Metz 8, 9 et 11 septembre 1939. En moyenne, 60 000 hosties sont fabriquées par

jour pour tout le diocèse sauf pour Château-Salins qui se fournit à Nancy.

388ADM 29J1178, lettre de Gabriel Hocquard, maire de Metz, 8 septembre 1939. 389ADM 29J1172, lettre circulaire évêché, 2 septembre 1939.

jeunes ouvriers vont à Charly et une autre en place à l‟évêché est envoyée au château de Sillegny390

. Ce repliement des « non-indispensables » concerne aussi celles qui sont en formation spirituelle. Onze novices des sœurs de la Sainte-Enfance-de-Jésus-et-de-Marie et le personnel du noviciat sont ainsi envoyées à Henrichemont (Cher) chez les sœurs de Sainte-Chrétienne le 1er

septembre 1939391. Une vingtaine de scolastiques messines392 de Sainte-Chrétienne encadrées par douze religieuses se réfugient au château d‟Ainay-le-Vieil (Cher).

Dès septembre 1939, le diocèse de Metz est écartelé entre les évacués réfugiés essentiellement dans le Sud-Ouest et les restés en Moselle devenu zone de guerre, à l‟abri de la ligne Maginot. En une journée, le diocèse est éclaté en deux entités géographiques distantes de 650 kilomètres. Le diocèse devient bicéphale. Mais en plus de cela, comme ailleurs en France, de nombreux prêtres doivent également quitter leur paroisse pour répondre à leur ordre de mobilisation.