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d D E Cooper: l’élément pertinent de la responsabilité collective est moins à chercher dans l’intention de groupe que dans la description adéquate des actions

I. 1 Deux détracteurs de la responsabilité collective: H D Lewis et S Sverdlik

I.2. d D E Cooper: l’élément pertinent de la responsabilité collective est moins à chercher dans l’intention de groupe que dans la description adéquate des actions

Pour D. E. Cooper, l’identité collective ne consiste pas dans l’identité des membres. C’est au contraire quelque chose de plus et de différent, qui ne se réduit pas aux identités individuelles,

qu’on ne peut décrire les activités des individus au sein d’un collectif sans faire référence au collectif. Par exemple, les employés d’une banque n’agissent pas à titre personne, mais en

tant qu’employés d’une banque. Par conséquent, on perdrait quelque chose de l’action en ne

la décrivant qu’en termes purement individuels. Et c’est là que réside pour Cooper le cœur de la responsabilité collective: on ne peut en rester à l’examen des responsabilités individuelles, il faut encore analyser ce qui lie les membres entre eux. C’est cet éclairage supplémentaire qui renvoie à la responsabilité collective. Cependant, une fois rendu à ce point, Cooper avoue qu’on ne peut déduire clairement les liens individuels de la structure collective.

II -Deuxième difficulté: la structure de la responsabilité collective

Le second point fondamental des débats sur la responsabilité collective, déjà esquissé précédemment, concerne la nature de cette responsabilité collective. La question centrale concerne notamment le caractère distributif ou non distributif de cette responsabilité. Sur ce point, Feinberg est sans doute celui qui a le plus clairement systématisé la nature de la responsabilité collective:

Dans son article «Collective Responsibility», Feinberg commence par rappeler les trois conditions nécessaires à l’attribution de la responsabilité individuelle: la personne responsable doit avoir commis l’acte qu’on lui reproche ou du moins son action ou son omission doivent y avoir apporté une contribution causale substantielle. Ensuite le comportement ayant contribué causalement à la production du dommage doit être une faute. Enfin, le dommage doit vraiment être la faute du responsable: une connexion causale doit exister entre son comportement fautif et le dommage.

De ceci, on peut envisager la responsabilité sous trois aspects. Le premier est la responsabilité stricte, qui ne requiert pas de faute contributoire ou qui accepte une faute contributoire faible (c’est le cas par exemple de la responsabilité contractuelle et de certaines formes de responsabilité collective). Le deuxième est la responsabilité par substitution [vicarious

liability], dans laquelle l’auteur de la faute n’est pas celui qui assumera la responsabilité (c’est

le cas par exemple de la responsabilité des parents envers leur enfant). Et enfin, la responsabilité collective, véritable responsabilité de groupe.

Ces distinctions permettent à Feinberg de proposer une cartographie de la responsabilité collective13

. Selon lui, quatre types de responsabilité collective peuvent être envisagés:

1- La responsabilité collective sans faute contributoire

Ici, la responsabilité est attribuée à des collectifs sans qu’il ne soit besoin de prouver qu’un membre au moins a commis une faute. Par exemple, il est inscrit dans la charte professionnelle des producteurs de lait que, au cas où un de leurs produits serait altéré et causerait des dommages à quelqu’un, ce serait à eux d’en payer le prix. Ceci s’explique par le fait que les producteurs, ayant le devoir et le pouvoir de vérifier la salubrité des produits vendus, sont tenus d’en garantir inconditionnellement la qualité.

2- La responsabilité collective avec faute non contributoire

Cette responsabilité est une responsabilité du groupe par substitution, alors que la faute ne revient qu’à certains des membres du groupe. Elle survient dans les cas où tous les membres du groupe auraient pris le même risque, mais pour des raisons contingentes, seulement certains de ces actes auraient entraîné un dommage. L’exemple donné ici est celui des conducteurs en état d’ivresse: seuls certains d’entre eux provoqueront un accident, mais tous ont bien la même responsabilité morale. Autrement dit, la chance qu’ont eue certains de ne pas provoquer d’accident ne peut les dédouaner de leur faute: le hasard ne peut être considéré comme un facteur de déresponsabilisation.

3- La responsabilité avec faute contributoire collective et distributive

Chaque membre du groupe a ici contribué à la commission du dommage. Conçue en ce sens, la responsabilité collective est constituée de la somme des responsabilités individuelles. L’exemple donné par Feinberg est celui d’une personne en train de se noyer devant une foule de vacanciers se reposant sur la plage. Si aucun ne lui porte secours, alors que tous auraient pu individuellement le sauver, alors nous pouvons penser une responsabilité de tous pour n’avoir pas agi, responsabilité qui renvoie bien à une faute de la part de chaque individu.

4- La responsabilité avec faute contributoire collective et non distributive

La faute ici est celle du groupe en tant que groupe et ne renvoie à personne en particulier. Ceci signifie qu’on peut attribuer une faute au groupe en vertu de son nombre, mais qu’on ne peut attribuer cette même faute à aucun des membres du groupe, pris dans son individualité. Par exemple, une personne ne peut résister seule à un envahisseur. Ceux qui dans l’histoire l’ont fait peuvent être considérés comme des héros, mais ne pas être un héros ne peut constituer sérieusement une faute. Par contre, en alliant et coordonnant leurs forces, un nombre important de personnes pourraient empêcher une invasion. On peut dès lors penser une responsabilité collective pour ne pas avoir fait quelque chose en groupe.

L’intérêt de la pensée de Feinberg est non seulement d’avoir proposé une cartographie des différents types possibles de responsabilité collective, mais également de nous avoir proposé des modèles pour penser les structures de répartition des responsabilités à l’intérieur du groupe. Le rapport entre responsabilités collectives et responsabilités individuelles est en effet un des points les plus discutés du champ de la responsabilité collective. Nous verrons dans le prochain chapitre comment ces distinctions nous permettent d’éclairer notre recherche.

III- La responsabilité collective et son rapport avec les responsabilités individuelles des

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