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CHAPITRE 3. INCERTITUDES LIEES A L’AGE : DE LA QUESTION DU

I. LE MINEUR VICTIME : AGE ET CONSENTEMENT

3. Ce que les âges font de la question du consentement

La notion de consentement touche aux droits fondamentaux de la personne humaine et aux mœurs d’une société. Son importance est plus cruciale dans les sociétés modernes individualistes (au sens que Louis Dumont donne à ce terme) que dans les sociétés traditionnelles holistes car dans les sociétés individualistes la valeur cardinale est l’autonomie et le fondement « sacré » des institutions est la notion de droit de l’homme. C’est ce que rappellent les réflexions philosophiques sur la démocratie chez Rousseau290F

291 .

De façon générale, la particularité du consentement est d’être une modalité de réponse : on consent à faire quelque chose que l’on nous a demandé ou proposé, on répond à une requête, à une sollicitation. D’autre part, pour qu’un consentement soit « véritable » on s’attend à ce qu’il soit « libre et éclairé », comme par exemple dans le domaine de la santé291F

292.

Or, en droit pénal de la sexualité, cette notion est complexe. Ainsi le législateur a opéré une distinction entre un non-consentement situationnel, lié aux conditions de l’infraction (violence, contrainte, menace ou surprise) et qui participe des éléments constitutifs de la catégorie générique des agressions sexuelles (dont le viol)292 F

293, et un non-consentement statutaire, lié à la qualité

291Jean-Jacques. Rousseau, (1762) 1963. Du contrat social ou Principes du droit politique

(1762). Union Générale d’Éditions. p.88 « Il n’y a qu’une loi qui, par sa nature, exige un

consentement unanime ; c’est le pacte social : car l’association civile est l’acte du monde le plus volontaire ; tout homme étant né libre et maître de lui-même, nul ne peut sous quelque prétexte que ce puisse être, l’assujettir sans son aveu ». URL :

http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/contrat_social/Contrat_social.pdf [Consulté le 5 juillet 2017]

292Dans le domaine de la santé, le consentement est visé à l’article L.1111-4 al.3 du code de la

santé publique : « aucun acte médical ou aucun traitement ne peut être pratiqué sans le

consentement libre et éclairé de la personne ». Il est la clé de voute de la relation médecin-

patient « aucun acte médical ou aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement

libre et éclairé de la personne », propos introductifs d’Olivier Guillot. p.1. Consentement et

santé. Sous la direction de l’association française et de droit de la santé. Anne Laude Président. Collection Dalloz. Avril 2014. 386 pages.

293Visée à l’article 222-22 du code pénal « constitue une agression sexuelle toute atteinte

de mineur (moins de 15 ou 18 ans), et fait de l’âge un critère de l’atteinte sexuelle293F

294. Pour le mineur victime transparaît très clairement un statut de « non-librement consentant », lié à l’âge. Mais en référence à quels âges et avec quelle force de présomption ? Sur quel continuum de la minorité ? Avec quelles modalités d’application ?

a) Le non-consentement statutaire lié à l’âge du mineur victime

Nous employons le terme statutaire en référence à l’article d’Irène Théry déjà cité (« Les trois révolutions du consentement ») et à la façon du sociologue américain David Finkelhor (2007294F

295), c’est-à-dire en référence à l’âge légal du

consentement : 15 ans. Ce critère signifie que pour le législateur, en dessous de 15 ans, le mineur est considéré comme « non-librement consentent » : c’est le

non-consentement statutaire lié à l’âge. En fixant un seuil d’âge à 15 ans, le

législateur a implicitement introduit une « majorité sexuelle » : il reconnait au mineur de plus de 15 ans, un statut social où le consentement à l’acte sexuel est juridiquement valable mais pas totalement (il y a des exceptions). Ce seuil, comme nous allons voir a été élevé progressivement, selon des modalités et justifications différentes.

Les mineurs en deçà du seuil de 11 ans, 13 ans et 15 ans depuis 1945

En 1832, comme nous l’avons vu dans le chapitre 1, l’âge est devenu un critère constitutif de la nouvelle infraction d’attentat à la pudeur sans violence. Le législateur l’a fixé à 11 ans « parce qu’un enfant en dessous de cet âge

n’était jamais considéré comme ayant donné un consentement, alors même que par le fait il aurait consenti, c’est cette présomption de violence, quoique non réelle, que consacre notre article 295F

296

». En fixant ce seuil d’âge, le législateur a introduit une classification nouvelle de la minorité de la victime avec les moins de 11 ans, présumés ne jamais consentir librement en raison de leur âge. Dans ce contexte, tout attentat commis sans violence sur mineur de 11 ans est puni aussi sévèrement que l’attentat avec violence296F

297

. La société ne tolère plus les crimes sexuels d’enfants qui sont restés longtemps impunis faute de preuve de violence. Parallèlement, il y a eu débat dans la doctrine de l’époque, pour élever ce seuil à 15 ans, considérant cette fois la question sous l’angle de la séduction facile du mineur de 12 à 15 ans : « l’article qui vous est soumis a pour objet de

punir ces crimes, quoique commis sans violence, quand ils ont eu lieu sur un

294Visée à l’article 227-25 du code pénal, définit à l’inverse des agressions sexuelles « le fait,

par un majeur, d'exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d'un mineur de quinze ans »

295David Finkelhor. 2007. “Statutory sex crime relationships between juveniles and adults: A

review of social scientific research”. Aggression and Violent Behavior 12 (2007). pp. 300–314.

296Joseph André Rogron. 1840. op. cit. p 478. 297Voir le chapitre 1.

individu que sa jeunesse expose à une séduction facile ; mais il ne s’applique qu’aux personnes âgées de moins de 11 ans. Je propose de l’étendre à tous ceux âgés de moins de 15 ans. On a voulu punir l’effet de la séduction, si facile sur un individu qui n’est pas à même d’apprécier toute l’immoralité de l’action à laquelle on lui propose de se soumettre. Eh bien ! Cette séduction n’est-elle pas à peu près aussi à craindre sur un enfant au-dessous de 15 ans que sur celui au-dessous de 11 ? D’un autre côté, l’amendement que je propose mettra l’article en discussion plus en harmonie avec l’article 332 297F

298». Mais la proposition fut rejetée, au motif qu’au-dessus de 11 ans, l’enfant a

«l’intelligence de l’action qu’il commet et peut se défendre298F

299».

Il faudra attendre 1863, pour que le seuil soit élevé à 13 ans, sur la base de nouvelles considérations sociétales et du nouveau regard porté sur l’enfance (fin de l’éducation religieuse pour les enfants et entrée dans la puberté des filles): « vers 13 ans, au contraire, âge où la presque totalité des enfants a fait sa

première communion, où beaucoup de jeunes filles commencent à s'apercevoir de leur sexe, le consentement est mieux accusé ; le sentiment de mal est plus vif. La violence doit se présumer moins aisément299 F

300». Un demi-siècle plus tard, par

l'ordonnance n°45-174 du 9 février 1945, le législateur a rehaussé le seuil statutaire à 15 ans, en se conformant cette fois sur les possibilités légales accordées aux filles de se marier300 F

301 (article 144 du code civil). La dissonance

dans les âges légaux du mariage ne sera levée que tardivement, dans le contexte de nouvelles préoccupations sur les mariages forcés par la loi du 4 avril 2006301F

302 : la loi a fixé une égalité d’âge de mariage à 18 ans pour les filles

comme pour les garçons. En revanche, une disposition tout à fait singulière dans le cadre des dispenses à mariage30 2F

303 pour motifs graves

303F

304 pouvait conduire le

parquet à arrêter d’éventuelles poursuites pénales pour attentat à la pudeur sur mineur de moins de 15 ans, conformément à une circulaire ministérielle de 1952304F

305 : « J’ai constaté que certains Parquets me rendaient compte qu’ils

298Chauveau Adolphe et Faustin Hélie, 1851. op. cit. p 200. 299Ibid.

300Commentaires de la loi des 18 avril-13 mai 1863 portant modification de soixante-cinq

articles du Code pénal, par Albert Pellerin, docteur en droit. p.172. URL :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k61324646/f192.item.r=inceste.zoom [Consulté le 5 juin 2016].

301Depuis le code civil Napoléonien, et plus précisément la loi du 17 mars 1803 (promulguée le

27 mars 1803), l’âge minimum du mariage pour les filles est fixé à 15 ans.

302Loi n°2006-399 du 4 avril 2006 « renforçant la prévention et la répression des violences au

sein du couple ou commises contre les mineurs », JORF 5 avril 2006.

303Article 145 du Code Civil

304Le plus souvent elles étaient accordées en raison de la grossesse de la mineure

305Circulaire du Garde des sceaux du 13 mai 1952 (JCP 1952 III 17415), adressée aux magistrats

du Parquet. URL : http://ledroitcriminel.free.fr/dictionnaire/lettre_c/lettre_c_ci.htm [Consulté le 26 mai 2016].

exerçaient des poursuites pénales contre des séducteurs de mineurs de moins de quinze ans, du chef d’attentat à la pudeur. J’estime que de telles poursuites – au cas où le mariage semble souhaitable et où les intéressés paraissent effectivement disposés à le contracter – sont en principe inopportunes. Aucune information ne devra à l’avenir être, en principe, ouverte dans ce domaine sans qu’un rapport circonstancié m’ait été soumis. Vous voudrez bien veiller à la stricte observation des présentes instructions ». Cette disposition peu commune

avait fait de la possibilité de mariage d’une jeune fille de moins de 15 ans une condition d’annulation de poursuite pénale pour attentat à la pudeur. Cette circulaire passée inaperçue dans notre droit (Malabat, 2013, op cit.), en dit long sur l’ordre patriarcal que nous avons présenté au chapitre 1.

Les grands-mineurs de 15-18 ans et le non-consentement statutaire

En fixant un seuil de non-consentement statutaire à 15 ans, le législateur a délimité une frontière au sein de la minorité, avec d’un côté, la catégorie des mineurs de moins de 15 ans, supposés toujours vulnérables et ne jamais être en mesure de consentir librement, et de l’autre, la catégorie des grands mineurs, les 15-18 ans, à qui le droit reconnaît une relative autonomie sexuelle et le droit à disposer de leur corps, dès lors que leur consentement situationnel est respecté. Ainsi, dans la logique du législateur de protéger la sexualité du mineur y compris passé le seuil de la majorité sexuelle, il a prévu deux seuils de non- consentement statutaire aux grands mineurs de 15-18 ans, liés à la nature du lien avec le partenaire (ascendant, personne ayant autorité) et son genre (délit d’homosexualité abrogé depuis 1982).

Le droit a commencé à s’intéresser à la catégorie des grands mineurs dès 1863, comme nous l’avons vu dans le chapitre 1. Il a en effet considéré qu’un mineur de plus de 13 ans (puis 15 ans à partir de 1945) ne pouvait consentir librement à une relation sexuelle avec un ascendant ou une personne ayant autorité. Comme nous le verrons dans le chapitre suivant, il s’est agi surtout d’incriminer par ce biais l’inceste intergénérationnel. Il est évidemment question d’inceste, mais pas seulement. De façon plus générale, la définition de l’infraction inclut tous les cas où la différence d’âge se double d’un rapport particulier de dépendance ou d’abus d’autorité sur un mineur. Le code pénal de 1994 a suivi le même raisonnement dans l’atteinte sexuelle sur mineur de plus de 15 ans par un ascendant, une personne ayant autorité ou une personne qui abuse de l’autorité que lui confère sa fonction. C’est du reste la seule incrimination sexuelle à faire du lien d’ascendance ou d’autorité un élément constitutif de l’infraction. Elle a également toujours été la moins sévèrement punie (dans l’ancien code et le nouveau code).

En outre, au milieu du XXe siècle, le législateur a considéré que les grands-mineurs ne pouvaient consentir librement à une relation homosexuelle. Ainsi, sous le gouvernement de Vichy, la loi n°744 du 6 août 1942 fait entrer la pénalisation de l’homosexualité305F

306 en visant l’incrimination de l’atteinte sexuelle sur mineur de plus de 15 ans par une personne de même sexe306 F

307. Dès lors il n’y avait plus une mais deux majorités sexuelles : une majorité hétérosexuelle à 15 ans et une majorité homosexuelle à 21 ans. Les relations homosexuelles avec un mineur de 15 à 21 ans se trouvaient pénalisées mais pas les relations hétérosexuelles avec les mêmes mineurs (Jackson, 2006307F

308). Tout un ensemble de dispositions vont aller dans le sens d’une pénalisation accrue de l’homosexualité308 F

309 et il faudra attendre le contexte de libération sexuelle des années 1970 pour qu’elle commence à être remise en question publiquement. Parallèlement, de nouvelles questions vont se poser sur la majorité sexuelle du mineur et le non-consentement statutaire du mineur.

Dans le contexte de libération des mœurs et d’émancipation sexuelle, la question du consentement du mineur a été malmenée par les défenseurs de la liberté sexuelle (en particulier les homosexuels pour l’abrogation du délit d’homosexualité) et d’autres encore pour des raisons différentes, les défenseurs de pratiques pédophiles (pour la liberté sexuelle avec des mineurs). Ce sont d’abord les militants homosexuels, libertaires, les psychanalystes et intellectuels en France dans les années 1970 qui ont voulu supprimer le seuil d’âge de la majorité sexuelle dans un contexte de lutte contre la pénalisation de l’homosexualité. Ainsi, dans le sillage des mouvements féministes qui ont proclamé avec force que le critère majeur de l’interdit sexuel devait être l’absence de consentement à l’acte, les mouvements homosexuels (CUARH, GRED309F

310) ont défendu l’idée d’un possible mineur et d’un droit à lui reconnaître sa liberté sexuelle : ce qui est consenti est permis ; « c’est la loi qui

se moque du consentement310F

311». De même, Michel Foucault, devant la

306Pour rappel, le premier code pénal de 1791 avait supprimé le crime de sodomie, qui était

autrefois considéré comme un péché capital par l’Eglise. Il en était de même pour l’inceste.

307Ordonnance du 8 février 1945 à l’alinéa 3 de l’article 331 de l’ancien code pénal : « sera puni

d’un emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende de 60 à 15 000 F, quiconque aura commis un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe âgé de plus de 13 ans ». Age de plus 15 ans à partir de 1945, comme on vient de le voir.

308

Julian Jackson. 2006. « Le mouvement Arcadie », Revue d’histoire moderne et

contemporaine, octobre décembre 2006, 4, n° 53, pp. 150-174.

309Tel que l’excitation de mineur à la débauche, article 334 : « …quiconque aura, pour satisfaire

ses propres passions, commis un ou plusieurs actes impudiques ou contre nature avec un mineur de son sexe, âgé de moins de 21 ans »

310Comité d’Urgence Anti Répression Homosexuelle ; Groupe de Recherche pour une Enfance

différente.

311Extrait dans la revue Homophonies, n°2, décembre 1980. Mouvements intellectuels et

commission de réforme du droit pénal, a considéré que la loi ne permettait pas de graduer distinctement le régime de violence ou de consentement auquel l’enfant a été soumis, rapportant ainsi que « de toute façon, une barrière d’âge

fixée par la loi, n’a pas beaucoup de sens. Encore une fois, on peut faire confiance à l’enfant pour dire si oui ou non il a subi une violence311F

312 ».

Parallèlement, le mouvement de libération des pédophiles, a fait brièvement irruption en 1977 dans le débat public. En rejet des cadres sociaux traditionnels de la sexualité, un éphémère « Front de libération des pédophiles » (FLIP) voit le jour312F

313

: il dénonce la sévérité d’une législation à leur encontre et celle des enfants et conteste la place de la majorité sexuelle dans la loi.

Au tournant des années 1980, la question de la majorité sexuelle du mineur a été recadrée en 1981 par Robert Badinter, lors du débat parlementaire sur le projet de dépénalisation de l’homosexualité : « Nous disposons dans nos lois

d’un ensemble très complet et très rigoureux de textes permettant d’assurer la protection des mineurs de quinze à dix-huit ans contre toutes les formes d’attentats aux mœurs. Sans reprendre le détail des textes, je rappellerai simplement à l’Assemblée que des peines sévères punissent, dans notre Droit : le proxénétisme sous toutes ses formes, et notamment à l’égard de mineurs ; l’incitation de mineurs à la débauche ; le détournement de mineurs ; l’attentat à la pudeur commis avec violence contre des mineurs ; l’attentat à la pudeur commis sans violence à l’égard d’un mineur de plus de quinze ans par un ascendant ou par une personne ayant autorité sur lui ; enfin, depuis la loi du 23 décembre 1980, le viol lui-même, dans sa nouvelle définition, qui s’applique aussi bien lorsque auteur et victime sont du même sexe. Affirmer donc que l’abrogation du deuxième alinéa de l’article 331 livrerait nos adolescents sans défense aux atteintes à leur intégrité ou à leur dignité est encore une contre- vérité juridique, ou une hypocrisie, selon que le propos relève de l’ignorance ou du mensonge313F

314 ». Dans cette logique, la protection des grands mineurs, les

adolescents, relève d’un domaine autre que celui de la pénalisation de la sexualité, mais il faudra attendre la loi n° 82-683 du 4 août 1982 pour que soit abrogé le délit d’homosexualité avec un mineur. Dès lors, il n’y aura plus deux, mais une seule majorité sexuelle du mineur.

délit d’homosexualité et la majorité sexuelle du mineur.

312

Michel Foucault. 1994. Dits et écrits. Paris, Gallimard. Tome 3, pp. 763-777. ; « La loi de la pudeur », entretien avec Jean Danet et Guy Hocquenghem, France-Culture, 4 avril 1978 in Foucault (1994, 776).

313Anne-Claude Ambroise-Rendu. 2014. op. cit. Voir le chapitre 7 consacré à l’analyse de

l’argumentaire du mouvement pédophile.

314Assemblée nationale. Compte rendu intégrale. Séance du Dimanche 20 décembre 1981.

p.5370. URL :

http://archives.assemblee-nationale.fr/7/cri/1981-1982-ordinaire1/153.pdf [Consulté le 5 juin 2016]

Cependant, à l’occasion de l’adoption du nouveau code pénal, la question du seuil d’âge de la majorité est de nouveau questionnée. Les discussions à l’Assemblée nationale portent sur cette fois sur l’élévation du seuil de la majorité sexuelle. Soucieux de protéger tous les mineurs de la sexualité adulte, le député de l’époque, Jacques Toubon, suggère d’étendre le délit d’atteinte sexuelle aux mineurs de 18 ans « Il s’agit dans cet article de proposer une

protection supplémentaire au mineur de moins de 18 ans et de plus de 15 ans […]en appliquant à l’ensemble des mineurs civils non émancipés par le mariage la protection réservée par le Sénat aux seuls mineurs victimes d’une atteinte exercée par un majeur du même sexe, je propose un dispositif cohérent qui n’a rien à voir avec l’incrimination de l’homosexualité […] il s’agit désormais de savoir si nous sommes décidés à accorder à tous les mineurs, une protection contre les atteintes. Cela me semble indispensable, et si nous ne sommes pas d’accord là-dessus, je ne vois pas sur quoi nous pourrions être d’accord314F

315». Dans cette logique, les grands-mineurs sont perçus comme étant

aussi vulnérables que les autres « Je ne vois pas quel argument on peut lui

opposer si l’on veut bien admettre que la jeunesse, ce n’est pas seulement la jeunesse sexuelle, c’est aussi l’adolescence et donc la fragilité, la vulnérabilité315F316 ». Or, l’Assemblée a refusé de faire passer la majorité sexuelle de 15 à 18 ans. De plus, d’autres débats lors des travaux préparatoires du nouveau Code relatifs aux infractions sexuelles, ont porté cette fois sur la séparation des infractions. Ainsi, le Sénat avait considéré que les agressions sexuelles sur toutes victimes (mineures et majeures) et les atteintes sexuelles commises sans violences sur mineurs étaient des infractions de même nature et de même gravité car « elles sont imposées à une victime qui n'y a pas

consenti316F

317

». A ce titre, il préconisait, qu’elles devaient être regroupées ensemble. Mais la commission paritaire a tranché en faveur de la position du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, et a dissocié les agressions des atteintes, comme nous les connaissons aujourd’hui. Ce faisant, le législateur a fait de l’atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans, une infraction de moindre gravité : la peine encourue est passée de 5 ans à 2 ans d’emprisonnement317F

318 , alors que simultanément, l’agression sexuelle sur mineur de 15 ans est passée de 5 à 7 ans d’emprisonnement.

Toutes ces évolutions montrent la complexité à appréhender le non- consentement statutaire du mineur en matière sexuelle, ses hésitations et recouvrements variés en différenciant les moins de 15 ans des plus de 15 ans.

315Extrait de la 3ème séance du 21 juin 1991 à l’assemblée nationale. Jacques Toubon. p3566 316Extrait de la 3ème séance du 21 juin 1991 à l’assemblée nationale. Jacques Toubon. p3566 317Valérie Malabat. 2013. op. cit. n°2.

Au-delà, la certitude de protéger le mineur de toute sexualité adulte. Or, tout se

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