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La voie vers une théorie plus consistante de l’activité socio sémantique et des points de vue51

2. Méthodologie et objectifs

2.3. Approche méthodologique de la thèse

2.3.3. Le point d’entrée « par le modèle »

2.3.3.3. La voie vers une théorie plus consistante de l’activité socio sémantique et des points de vue51

Selon [GAUDUCHEAU 05] il est ainsi possible d’utiliser cette approche comme méthode de conception de l’outil collecticiel que l’on cherche à produire et à valider: permet-il de produire un système plus acceptable par les utilisateurs, plus adapté à leurs besoins, aux processus de travail ? Cela inclut la possibilité d’évaluer la pertinence ou l’acceptation de la méthode proposée pour accompagner l’outil. Ces possibilités nous semblent très importantes en particulier dans notre cas d’étude, en raison de la complexité de l’activité collective qui est nécessaire pour la construction d’ontologie sémiotique.

En partant du modèle d’activité instrumentée permettant au groupe de co-construire et de maintenir l’artefact, il n’est plus nécessaire de compter uniquement sur une évaluation à partir d’une description de besoins, grâce à des critères d’adéquation définis en amont, comme dans « l’entrée par le système ». En nous basant sur le modèle de l’activité, nous pouvons conduire au contraire une approche d’évaluation à la fois sociale et sémantique, intervenant dans une boucle de conception itérative, selon l’unique cycle de la Figure 2.3 permettant:

de concevoir un outil qui supporte ce modèle d’activité socio sémantique,

de concevoir le dispositif d’expérimentation (sur la base des scénarii évoqués au paragraphe précédent) équipant cet outil de fonctions d’observation et de trace,

d’interpréter les résultats de cette expérimentation dans les termes de ce modèle d’activité socio sémantique.

Dans notre cas, pour l’appliquer ce cadre méthodologique, l’activité que nous prendrons pour cible sera donc l’activité de co-construction sémantique, instrumentée ou non14 par l’artefact « ontologie sémiotique ». C’est pourquoi nous parlons de modèle d’activité socio sémantique, et nous verrons que ce modèle pourra être exprimé par les acteurs eux-mêmes, sur la base du modèle Hypertopic, que nous proposerons comme invariant15 générique et réutilisable permettant de décrire les modèles d’activité socio sémantiques, adaptés à chaque fois aux différentes communautés étudiées. A partir de la base de ce schéma général, caractéristique des apports récents du TCAO, il nous faudra décliner plus précisément à chaque étape de notre travail (notamment lors de la conception

d’applications à but d’expérimentation) comment nous comptons appliquer cette méthodologie à l’activité de co-construction sémantique, à l’outil que nous proposerons et aux conditions particulières de notre étude.

2.3.3.3. La voie vers une théorie plus consistante de l’activité socio sémantique et des points de vue

Si l’on examine de plus près la figure 2.3, on voit que ce cycle fait une place aux théories des Sciences Humaines et Sociales, qui constituent en quelque sorte l’entrée « royale » dans le cycle vertueux de conception et d’évaluation des outils qui est proposé. Dans le cas des ontologies sémiotiques, comme d’ailleurs dans beaucoup de situations étudiées par le TCAO, nous sommes dans un cas où nous ne disposons pas – c’est le moins qu’on puisse dire – du point d’entrée d’une théorie existante totalement consistante. Au mieux pouvons nous agréger, comme nous le ferons dans les chapitres 3 à 6 un « puzzle » d’éléments théoriques plutôt difficile à unifier.

Nous constaterons en effet dans la suite, à mesure de la progression de cet Etat de l’Art, qu’il n’existe pas à l’intersection des sciences humaines interrogées, de théorie complète de la co-construction sémantique, comme phénomène social, que nous pourrions directement utiliser « en amont » d’un modèle comme proposé dans la Figure 2.3. Nous parlons de phénomène, car comme nous l’envisagerons (au §3.3.5), il semble possible de partir d’une vision de l’activité, qui soit une vision non-prescriptive des individus et des groupes co-construisant en permanence « naturellement »

14 Nous pouvons à ce niveau espérer progresser dans la modélisation descriptive de la façon dont l’activité de co-conception sémantique est effectuée « normalement » par les groupes avec l’aide de la simple parole, de l’écrit ou d’autres artefacts basés ou non sur les NTIC. Cette progression vers une meilleure compréhension du problème de la sémantique collective et du rapport aux artefacts dans cette activité peut s’effectuer indépendamment de toute référence aux outils NTIC.

des structures sémantiques partagée impliquant divers points de vue. Cette approche considère dans une certaine mesure la co-construction sémantique comme un phénomène « naturalisable » et donc justiciable d’une approche des sciences humaines.

Nous marquons donc qu’il est nécessaire de considérer cette activité socio sémantique comme un phénomène relevant d’un questionnement scientifique, et que les outils et les expérimentations que nous pouvons proposer peuvent permettre d’alimenter aussi la construction théorique, selon le schéma de la figure 2.3. Dans la perspective d’ingénierie qui est par ailleurs la nôtre, postuler l’existence d’une théorie de la co-construction sémantique permanente, qui expliquerait ce phénomène dans l’activité « naturelle » du groupe, tient lieu d’un palliatif en attendant de réunir les pièces du puzzle actuel. Cela permettrait ensuite de mieux penser théoriquement l’activité et donc de mieux modéliser l’activité de groupe autour de l’usage d’artefacts particuliers tels que des ontologies sémiotiques.

2.3.3.4. La place des modèles

En nous référant toujours au schéma de la figure 2.3, l’outil rend possible des expérimentations sociales de co-construction et d’utilisation d’ontologies sémiotiques, sur le terrain ou en laboratoire. Il rend également possible l’exploitation des informations de traces, c’est à dire le traitement des résultats qualitatifs et quantitatifs de ces expérimentations. Ces expérimentations et ces résultats nous aident non seulement à penser et à améliorer le modèle d’activité instrumentée, mais aussi à remonter au niveau théorique pour penser le modèle de description lui-même, en amont de toute instrumentation.

Pour cet ensemble de raisons, nous avons développé les modèles KBM et Hypertopic (cf. en première approche les Figures 2.4 et 2.5, ces modèles et l’architecture de leurs relations respectives étant détaillés ultérieurement). Ils constituent une troisième sorte de modèle, fournissant les clés16 de la « cellule de base » du modèle d’activité.

Les composants du modèle Hypertopic , dont nous avions vu une première illustration dans l’application Agora (cf. Figure 1.1), vont être les « briques » de base permettant de construire à la fois le modèle d’activité instrumentée et le modèle de conception, pour toutes sortes de situations. Comme le montre la figure 2.5, le modèle KBM (cf. §6.2) intervient en complément de Hypertopic pour des formes stéréotypées de co-construction dans certains types d‘espaces de coopération, inclus dans notre périmètre d’études. KBM et Hypertopic sont des modèles génériques qui constituent une hypothèse, dans notre périmètre de recherche (cf. §2.4), sur la possibilité d’organiser et d’instrumenter suivant un formalisme de réseau sémantique à la fois l’artefact d’ontologie sémiotique et le modèle d’activité associé. En particulier le modèle Hypertopic, avec le concept de Points de Vue multiples sur une entité qui est au coeur de ce modèle, constitue une sorte de « grammaire de base » pour décrire le modèle de l’activité pour l’utilisation et la co-construction de l’ontologie sémiotique.

16 En anglais « the keys » renvoient notamment aux composants de la « légende » d’une carte, par exemple l’échelle, les éléments iconiques ou d’autres règles de représentation permettant de figurer de objets sur la carte ou d’abstraire des connaissances (par exemple une route comportant de très nombreux virages sera figurée avec seulement 2 ou 3 virages, cf. [MUSTIERE 00]). Nous reprenons la notion de « cellule de base » des travaux de l’auteur la théorie de l’activité. [VYGOTSKY 97], cf. §3.3.3)

Fig.2.4 - La cellule de base du modèle Hypertopic (V2) permet de décrire l’activité instrumentée (et le modèle de conception) dans les trois dimensions du domaine, de l’acteur et de l’activité

Fig.2.5 - Les modèles Hypertopic et KBM constituent une grammaire de base pour exprimer l’ontologie sémiotique et le modèle d’activité instrumenté associé

Modèle

générique pour le Web socio sémantique

Modèle spécialisé

d’interaction et de discussion: Ex: « place de marché à base de connaissances » (« Knowledge-Based Marketplace »/KBM

+ microforums)

Modèle générique: HyperTopic

Aide à la

décision KBM Ecriture Collec-tive Educa-tion Anno-tation etc.

Utilisation du système d’information coopératif - accès aux ressources par navigation via le Web

- contribution des acteurs, attachement des informations selon le modèle d’activité Co-construction de l’ontologie sémiotique selon le modèle d’activité:

- particularisation, pour un terrain donné, des Points de vue , Thèmes, Entités, Attributs,

Associations, Rôles… - sert d’appui pour l’indexation de

l’information au niveau supérieur

Ex: Agora,

« carte de thèmes » pour les projets R&D

Application Fig.2.5 Fig.2.4 Action, opération (ex: opérations effectives de « co-construction de l’artefact») Thème Association ACTIVITE Point de Vue Attribut Ressource

Point de Vue (ex: Rôle)

Attribut Ressource Entité (Acteur) Thème (ex: valeur de « Rôle ») Association

Ex : passeport, visa ACTEURS

Entité de domaine Thème Association («pure sémantique domaine » r1 DOMAINE Point de Vue Attribut Ressource Sous-Entité Sous-entité (ex: Groupe, Autorité) Asso ciations «cr oisées » Activité x Domaine Domaine x Acteurs, Acte urs, x Domaine

Cette réflexion théorique, alimentée par les résultats de nos expériences, et l’amélioration du modèle de description qui en résulte, permettront d’affermir les modèles Hypertopic et KBM que nous proposons, respectivement pour la représentation des connaissances et l’organisation des rôles. Nous en aurons l’illustration au §8.3, où nous montrerons comment, autour du problème particulier de la Recherche d’Information (en comparant les performances entre un outil de navigation basé sur une ontologie sémiotique et d’autres solution de RI comme un moteur de recherche), le modèle Hypertopic sert de « grammaire de base » pour aider à décrire le modèle cognitif de l’activité de recherche ou de navigation, instrumenter l’expérience et interpréter les résultats.

2.3.4. Conclusion provisoire sur le cadre méthodologique