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N Corniche des Cévennes

II LES VARIATIONS DANS L'ORGANISATION DU QUARTIER 2.1 A L ’ ECHELLE LOCALE

2.2 A U NIVEAU REGIONAL

2.2.1 Les variations selon des règles générales d'organisation (Fig 18)

2.2.1.1 Un modèle d'étagement

Compte tenu du découpage en profondeur des vallées et de la relative faiblesse de l'altitude des Cévennes, les gradients d'altitude observés au niveau local de la petite vallée s'observent également dans une vallée principale qui produit les même types de variations, de climat et de végétation, ce qui conduit à considérer le concept de vallée indépendamment de l'échelle de définition comme le propose J.-P. CHEYLAN (1979, 1986). Cependant au niveau régional, ce modèle d'étagement est assez important pour que les variations climatiques ne soient que partiellement compensées par des effets de versants et se traduisent par des étages de végétation.

Le gradient altitudinal induit des orientations de terroir et des spécialisations agricoles entre le haut et le bas de la vallée. Sur les parties sommitales des vallées, l'exploitation se spécialise vers l'élevage sur des pâturages extensifs, dès le XVIème siècle. Les parcelles se groupent autour des hameaux devenus fermes. La châtaigneraie est utilisée pour l'engraissement des moutons et des porcs. Victime de maladies et de son manque d'entretien depuis la fin du XIXème siècle, elle est transformée en taillis ou remplacée localement par des boisements de résineux.

Dans le bas des vallées, l'exploitation se spécialise vers l'élevage intensif, la viticulture, l arboriculture ou les cultures maraîchères sur les terres les plus propices à l'agriculture. C'est l'économie de plaine, présentant une économie de type méditerranéen, marquée par la présence de la vigne et de l'olivier, qui remonte les gardons au début du XXème siècle (SMOTKINE, 1966). A la différence des hautes vallées, l'orientation des versants n'est plus un critère fondamental de mise en valeur de l'espace.

La structure en bande joue également sur la démographie et sur l'accessibilité de la vallée. Les densités de population diminuent avec l'altitude, à l'exception du bassin minier d Alès. L'indicateur d'enclavement augmente avec l'altitude, les hautes vallées étant caractérisées par une très mauvaise accessibilité aux équipements.

Le gradient de pente est le modèle d organisation spatial dominant à l échelle régionale, qui joue aussi bien pour les faits naturels (climat, végétation) (Cf. Annexe 2) que sociaux (démographie, enclavement, mise en valeur agricole) (Cf. Annexe 3). Ce modèle en bande est combiné avec un modèle axial de vallée qui lui est adjacent.

2.2.1.2 Un modèle urbain et industriel

Les Cévennes, marche entre la haute plaine languedocienne et les hautes terres du sud du Massif Central, présentent un tissu urbain peu développé, sinon à leurs marges, au débouché des vallées. Il existe cependant des centres urbains situés le long de l'axe des vallées, qui s'organisent suivant le modèle suivant :

- au débouché des vallées, une ville (Ganges, St-Hippolyte, Anduze, Alès, St Ambroix, Les Vans, Largentière), couplée le plus souvent avec une bourgade intermédiaire qui fait relais, et généralement située à la jonction entre deux grandes vallées, (Le Vigan, St-Jean-du-Gard, La Grand'Combe, Bessège, Villefort) ;

- une bourgade de fond de vallée (St-Jean-de-Bruel, Vallerauges, St-André-de- Valborgne, Ste-Croix-Vallée-Française, St-Germain-de-Calberte, Le-Collet-de- Dèze, Le Chamborigaud, Génolhac).

A ce modèle urbain correspond un bassin de fréquentation. Les villes au débouché des vallées sont caractérisées par la présence d'une banque. Les bourgades intermédiaires sont le centre de commande d'un système hiérarchique local d'équipements, à l'exception des Vans et de Villefort qui sont le centre de bassins de fréquentation vastes et peu concurrencés. A l'intérieur de ces bassins, peuvent être distingués des sous-bassins centrés sur les bourgs de fonds de vallée et caractérisés par la présence d'un médecin généraliste et par une population jeune.

Ce modèle urbain prend ses racines dans l histoire industrielle des Cévennes. Au contact des ressources hydrauliques, les quartiers en bas de pente développent des moulins pour la forge (martinets) dès le XIème siècle, puis des ateliers de moulinages et de filature de la soie, généralement communs à plusieurs quartiers, essentiellement à partir du XVIIème siècle (Fig. 17, puis 18). A partir du XVIIIème siècle, le développement industriel descend les vallées (moulinage, travail de la soie) en créant des sites d'activité le long des cours d'eau, d'autant plus importants et structurés qu'on va vers le débouché de la vallée, la ville accueillant les industries lourdes. Des villages-rues prennent alors forme le long des cours d eau, comme Lasalle ou Saint-Jean-du-Gard. Le réseau de chemins et de canaux s'intensifie dans l'axe de la vallée. Ce développement industriel engendre un exode rural par transfert de population, d'abord saisonnier dans les périodes les plus anciennes puis définitif, des hautes vallées vers les parties basses (LAMORISSE, 1975). Il induit également une diversification des activités du quartier qui intègre des travaux d'artisanat de la soie, en complément de la polyculture-élevage. Durant les XVIIIème et XIXème siècles, des terrasses ont été construites pour y planter du mûrier dont les feuilles nourrissent les vers à soie, parfois loin des lieux d'habitations dans la châtaigneraie. Les bâtiments ont été aménagés pour y construire des magnaneries. L histoire de la soie en Cévennes a ainsi organisé les vallées, des magnaneries individuelles aux industries de fond de vallée, créant un flux de marchandises et de personnes, selon un modèle que l urbanisation et les voies de communication soulignent.

Il est toutefois remarquable de noter qu historiquement, c est probablement davantage la variation du quartier à l échelle locale qui crée le système urbain détectable à l échelle régionale, que le modèle urbain qui crée des variations du modèle de quartier. Les centres urbains intra-Cévennes ne sont, à l'origine, qu une valorisation commune des ressources à la disposition de plusieurs quartiers, qui finissent par créer une structure urbaine, renforcée par la suite par des services.

Actuellement, la présence d un bourg joue sur les potentialités de transformation des quartiers, en particulier grâce à l accessibilité et la proximité des services (école, boulangerie, etc.). Les quartiers proches des bourgs sont plus ouverts, accueillant davantage de résidents, que les quartiers éloignés qui sont plus fermés.