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N Corniche des Cévennes

IV LES MARGES DE LA MISE EN VALEUR DU TERRITOIRE 4.1 L A CHENAIE DE C HENE BLANC ET ROUVRE

5.4 T YPOLOGIE DES CHATAIGNERAIES

5.4.2 Construction de la typologie

La châtaigneraie est soumise à des processus de :

- dynamiques naturelles des peuplements à la suite de l abandon d exploitation ;

- perpétuation de pratiques paysannes "traditionnelles" (écobuage, pâturage sous forêt, élevage de porc, etc.) qui disparaissent cependant progressivement ;

- apparition de pratiques modernes de réhabilitation faisant suite à l'abandon, qu'elles soient agricoles ou sylvicoles (voir à ce propos les travaux de l'ULRAC et du CRPF).

Compte tenu de cette combinaison de facteurs où le travail de l'homme joue un rôle essentiel, la typologie des châtaigneraies cévenoles doit intégrer les données suivantes :

- les pratiques paysannes compensent les contraintes du milieu ; ces pratiques actuelles ou passées doivent donc tenir une place importante dans la construction de la typologie, même si elles ne sont pas toujours faciles à détecter sans enquête de terrain ;

- la modification ou l'abandon de ces pratiques se fait lentement sentir sur la structure spatiale et, par suite, sur les paysages, dont les éléments arborés, présentent une rémanence forte entre la structure actuelle et les faits qui l ont mise en place.

Cette typologie doit faire le lien entre deux niveaux d organisation spatiale, régional et local. Sa construction doit donc être imaginée avec deux niveaux de finesse, le premier à moyenne échelle s appuyant sur les structures spatiales facilement perceptibles, le second à grande échelle intégrant plus fortement l action de l homme, donc le fonctionnement de la châtaigneraie.

5.4.2.1 Le niveau régional

La première étape de la construction est de se placer à moyenne échelle géographique (1/50 000) et de distinguer les grands types de châtaigneraies par l'analyse des images télédétectées. Les images satellitaires étant encore peu opérantes dans ce milieu au relief tourmenté (JAPPIOT, 1992 ; GAUTIER, 1993), il convient d exploiter les photographies aériennes.

A ce niveau d observation, l'Inventaire Forestier National, dont une partie de l activité consiste à cartographier les peuplements forestiers sur la base de photo-aériennes I.R.C., est une source d information importante. Les documents produits par l I.F.N. cartographient des unités spatiales par essence prépondérante et par structure de la végétation. Pour l essence prépondérante Châtaignier , le premier ordre de distinction en Cévennes est le verger et le taillis, ce qui correspond aux deux structures forestières élémentaires. Cette distinction se fait sur les photo-aériennes par la forme des couronnes, en boule pour les vergers, en touffe pour les taillis.

Pour le département du Gard où le châtaignier est une essence dominante(2), la typologie établie par l I.F.N. distingue plus précisément les

peuplements à châtaignier dominant suivants : le verger de châtaignier ; le taillis ; le maquis ou la garrigue à châtaignier ; le mélange châtaigniers-pins ; ces deux derniers types étant issus d un abandon prononcé et pouvant être considérés comme deux sous-types du type verger .

Prenant pour référence la base de donnée de l I.F.N. et avec une certaine habitude du terrain et de la photo-interprétation qui permet d adapter les données I.F.N. à notre problématique, une première typologie de la châtaigneraie cévenole peut être proposée :

- la châtaigneraie verger intensive, issue de plantation (alignement des arbres bien distinct) ;

- la châtaigneraie verger traditionnelle (houppiers distincts avec alignement irrégulier dû au vieillissement des souches) ;

- la châtaigneraie en taillis ou en taillis-futaie, de production forestière ou d'abandon agricole (houppiers jointifs) ;

- la châtaigneraie envahie par les pins (enrésinement distinct) ; - le maquis ou la garrigue à châtaignier.

Ces grands types, excepté la châtaigneraie envahie par des pins qui est un type récent datant du début du siècle, peuvent être considérés comme l'héritage des châtaigneraies recensées par MESTRE (1992) sur des documents historiques de 1640 :

- la châtaigneraie intensive arrosée ;

- la châtaigneraie pure certainement assez dense ;

- la châtaigneraie médiocre généralement associée à des hermes, etc.;

- la châtaigneraie très médiocre associée à des pâturages ou à du chêne vert. Cette réalité historique conforte le premier niveau de la typologie puisqu elle correspond à une période de l histoire, l apogée des Cévennes, où tous les types de châtaigneraie étaient dus à des mises en valeur effectives, et non pas à des héritages du passé, avec les stades d abandon ou de réhabilitation dont il est aujourd hui question.

Ce premier niveau de la typologie génère des informations spatiales pertinentes à l échelle régionale. Elle est facilement observable et cartographiable. Elle permet une estimation des surfaces couvertes par les grands types de châtaigneraie et fournit des éléments d analyse pour l organisation spatiale des Cévennes et ses types de paysages.

(2) : Les types de peuplement cartographiés par l IFN sont établis par département. Le choix des types

est fonction des peuplements dominants au niveau du département et se répercute sur toutes les régions forestières du département concerné. Le résultat en est qu il n y a pas nécessairement une harmonie des typologies de peuplements forestiers entre deux départements voisins et entre deux de leurs régions forestières, comme par exemple les Basses-Cévennes à Châtaignier lozériennes et les Basses-Cévennes à Châtaignier gardoises, appartenant pourtant toutes deux à la même entité physique et sociale des Cévennes. Les types cartographiés ne sont pas les mêmes dans les deux régions, plus détaillés dans le Gard.

5.4.2.2 Le niveau local

Le deuxième niveau de la typologie permet d'intégrer plus finement les pratiques (ou les non-pratiques) à ces grands types de même morphologie. Les façons de faire des exploitants sont multiples. Elles varient en fonction des facteurs de production, de leurs objectifs et de l'état du marché. Elles intègrent : dans le meilleur des cas, des pratiques de greffage, d'entretien, de pâturage, d'irrigation et de fumage ; et dans le plus mauvais, un abandon total par absence de l'exploitant. Ces pratiques se combinent diversement et la châtaigneraie présente en fait une série d'états variant, suivant un continuum allant :

- du verger bien entretenu avec des variétés de qualité et des arbres présentant une bonne vigueur ;

- à la châtaigneraie convertie en taillis, envahie de pins ou évoluant vers du maquis à châtaignier.

Entre ces états, il existe des stades intermédiaires d'entretien et d'abandon, qu'il faut essayer d identifier ou de caractériser afin de les rendre opérationnels pour la gestion durable de la châtaigneraie. La détection de ces types et leur cartographie nécessite une bonne connaissance du terrain, tant pour les potentialités du milieu que pour les modes de mise en valeur, anciens et actuels, qui s expriment en particulier par la vigueur des arbres et leur architecture, donc par leur densité, ainsi que par la présence d une flore spécifique. C est donc à des connaissances d expert que fait appel la typologie fine de la châtaigneraie qui, à une structure, permet d associer un fonctionnement passé et actuel.