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6 Étude de la fréquence fondamentale (F0)

6.2. La variation de F0 dans le contexte/pi/

La même perspective d‟analyse a été appliquée dans cette section et dans la section précédente. Nous avons étudié les courbes de variation de F0 absolu afin d‟avoir une vision globale sur la variation de F0 sur chaque ton, et les courbes de variation de F0 relatif afin de mettre en lumière les rapports entre les formes des courbes et le type de traits tonals corrélé à leurs formes.

La figure 57 donne les courbes F0 absolu dans /pi/ définies à partir des Moy Inter des décalages entre F0 initial (0%) et F0 des autres phases de /i/. Dans cette figure, nous avons remarqué une séparation sur le plan général entre les courbes T1-T4 et les courbes T2-T3. Cette séparation persiste dans toutes les phases de la voyelle. Les courbes T1 et T4, malgré leur différente forme, se situent toujours plus haut que les courbes T2 et T3 sur l'échelle des valeurs, cependant avec un croisement exceptionnel entre la courbe T2 et la courbe T4 à la fin de la voyelle.

Cette tendance de séparation nous paraît corrélée aux traits [+/-U], pour la raison qu‟elle semble nous indiquer deux zones de registre séparées. Sur l‟échelle des valeurs, ces zones ont des étendues similaires (environ 100 Hz) et enferment respectivement les courbes F0 au trait [+U] et les courbes F0 au trait [-U]. D‟une part, à l‟intérieur de chaque zone, les courbes au même trait de registre sont proches l‟une de l‟autre au début de la voyelle. Ceci est dû à l‟effet des traits [+/-U]. D‟autre part, les traits [h/l] nous paraissent mener à une séparation aux courbes au même trait de registre. Cette séparation s‟accroît progressivement et arrive jusqu‟au-dessus de 60 Hz

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vers la fin de la voyelle. Le croisement entre la courbe T2 et la courbe T4, observée à la fin de la voyelle, pourrait être dû à l'effet des traits [h/l].

Figure 57 : Courbes F0 de /i/ sur les quatre tons, définies à partir des moyennes interindividuelles des valeurs de F0.

La figure 58 illustre les courbes F0 relatif sur la base des décalages entre la Moy Inter de F0 initial et de F0 dans les autres phases. En observant cette figure, nous avons remarqué qu‟à 20% de la voyelle est apparue une séparation importante entre les courbes F0. Plus précisément, dans cette phase, la courbe T1 est la plus haute sur l‟échelle des valeurs en Hz, ce qui correspond à un niveau approximatif de 3 Hz inférieur à F0 initial, alors que les courbes T2 et T4 se rapprochent, avec un niveau approximatif de 8 Hz inférieur à F0 initial. Quant à la courbe T3, elle est située plus bas que les autres sur l‟échelle des valeurs, ce qui correspond à un niveau 11 Hz environ inférieur à F0 initial. À partir de 60% de la voyelle, les valeurs de F0 sur T1 et T2 deviennent plus importantes que les valeurs sur T3 et T4. Les courbes T1 et T2 sont proches l‟une de l‟autre entre 60% et 100% de la voyelle, tandis que les courbes T3 et T4 se rapprochent, situées plus bas que les courbes T1 et T2 sur l‟échelle des valeurs. L‟importance des écarts entre les courbes augmente progressivement.

Ainsi, nous constatons que les courbes F0 relatif de /i/ sur les quatre tons ne

Courbes F0 de /i/ sur les quatre tons en voix modale

T1

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exemple, elle ne présente ni une simple courbe montante ni une variation qui chevauche les partitions 3-5 ou 2-5. En fait, sa forme est descendante-montante, comme celle d‟un ton complexe. En revanche, la courbe T3 connaît un cas contraire à celui de T2. Le ton complexe T3 présente, entre 0% et 80% de la voyelle, une courbe F0 descendante et connaît, au lieu d‟une phase montante, une phase courte de stagnation à la fin de la voyelle.

Compte rendu de ces remarques, une description des tons sur l‟échelle des 5 partitions ou les concepts des contours tonals prescrits, ne serait pas pertinente pour interpréter les différences entre les courbes F0 et ce, surtout dans le timing de l‟organisation des traits tonals. Pourtant, une définition du ton sur la base des cibles tonales binaires peut s‟adapter aisément aux résultats de nos analyses. C‟est-à-dire qu‟à la fin de la voyelle, le pitch de T1 atteint la même cible tonale que celui de T4 alors que le pitch de T2 atteint la même cible que celui de T3. Cette première cible se définit par le trait [h], et cette dernière par [l].

Figure 58 : Courbes F0 de /i/ sur les quatre tons, définies à partir des moyennes interindividuelles des décalages entre F0 initial et F0 des autres phases, normalisées au niveau du temps.

Sur l‟échelle de demi-tons, nous avons observé la variation de la hauteur mélodique que nos mesures de F0 représentent. La figure 59 illustre cette variation dans /pi/ sur

-100 -80 -60 -40 -20 0 20

Ecart (Hz)

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Courbes F0 par rapport à F0 initial dans /i/ de /pi/ sur les quatre tons

T1 T2 T3 T4

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les quatre tons. Cette figure confirme nos résultats dans l‟observation des courbes F0 absolu et des courbes de F0 relatif supra.

Plus précisément, les courbes s‟inscrivent dans une étendue mélodique à 13 demi-tons, légèrement supérieure à une octave. La courbe T1 débute vers 16 St, et s‟étend autour de cette hauteur dans toutes les phases de la voyelle /i/. La courbe T4, qui débute vers 18 St, descend jusqu‟à 11 St. Le début de la courbe T3 correspond à environ 14 St, et la fin de la même courbe à 5 St. La courbe T3 est descendante entre 0% et 80% de la voyelle, elle reste stagnante toutefois entre 80% et 100% de la voyelle. Quant à T2, sa courbe débute vers 13 St, descend jusqu‟à 11 St à 40% de la voyelle, et remonte à 13 St à la fin de la voyelle. De même que le cas dans /pa/, la variation de la hauteur mélodique de F0, en fonction du ton dans /pi/, ne s‟adapte pas à une transcription tonale à 5 partitions (cf. Section 6.1.)

Figure 59 : Hauteur relative de F0 (par rapport à un son à 100 Hz) dans le contexte /pi/ sur les quatre tons en voix modale.

Selon l‟analyse One-Way ANOVA de la variation de F0 sur les quatre tons dans ce contexte, effectuée avec ton comme facteur analysé, et sujet comme variable aléatoire, le ton a un effet significatif sur F0 (F(3, 312) = 12,12, p < 0,0001).

45 67 89 1011 1213 1415 1617 1819

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Hauteur relative du F0 (St)

Temps normalisé

Hauteur relative de F0 dans le contexte /pi/ sur les quatre tons

T1 T2 T3 T4

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Tableau 52 : Significativité des variations de F0 entre les tons en voix modale, dans toutes les phases de la voyelle dans le contexte /pi/.

Le tableau 52 présente davantage de détails de cette analyse ANOVA, avec les différents types de contrastes tonals marqués en différentes couleurs.

En observant ce tableau, nous avons remarqué que les divergences significatives de F0 entre les tons se trouvent dans toutes les phases. C‟est-à-dire qu‟entre les tons en contraste au niveau du registre (c‟est-à-dire entre T1 et T2, et entre T3 et T4), les différences au niveau de F0 sont significatives dans toutes les phases de la voyelle (p <

0,001). Entre les tons en contraste [h/l] (c‟est-à-dire entre T1 et T4, et entre T2 et T3), les différences au niveau de F0 entre T2 et T3 sont significatives entre 60% et 100%

de la voyelle (p < 0,001) alors que celles entre T1 et T4 sont significatives à 0% et entre 60% et 100% de la voyelle. Quant aux tons en contraste avec les deux types de traits (c‟est-à-dire entre T1 et T3, et entre T2 et T4), les différences au niveau de F0 entre T1 et T3 sont significatives dans toutes les phases de la voyelle (p < 0,001) tandis que celles entre T2 et T4 sont significatives entre 0% et 60% de la voyelle, ainsi qu‟à 100% de la voyelle.

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