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6 Étude de la fréquence fondamentale (F0)

6.3. La variation de F0 dans le contexte /pu/

Dans l‟analyse des effets des traits tonals dans /pu/, nous avons appliqué la même méthodologie que celle dans les études des contextes /pa/ et /pi/ (cf. Sections 6.1. et 6.2.). La figure 60 illustre les courbes F0 absolu dans /pu/, définies à partir des Moy Inter de F0. Cette figure nous donne une vision globale sur l‟effet du ton sur la variation de F0.

Dans cette figure, nous avons constaté un écart entre les courbes T1-T4 et les courbes T2-T3. Cet écart apparaît dans toutes les phases de la voyelle. Autrement dit, malgré les différentes formes, les courbes T1 et T4 se situent toujours plus haut que les

0% T1 T2 T3 T4 20% T1 T2 T3 T4 40% T1 T2 T3 T4

T1 *** *** ** T1 *** *** ns T1 *** *** ns

T2 ns *** T2 ns *** T2 ns ***

T3 *** T3 *** T3 *** * = p ≤ 0,05

T4 T4 T4 ** = p ≤ 0,01

*** = p ≤ 0,001 60% T1 T2 T3 T4 80% T1 T2 T3 T4 100% T1 T2 T3 T4 ns = p > 0,05

T1 *** *** *** T1 *** *** *** T1 *** *** ***

T2 *** *** T2 *** ns T2 *** **

T3 *** T3 *** T3 ***

T4 T4 T4

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courbes T2 et T3 sur l'échelle des valeurs en Hz. Cela dit, une exception existe. C‟est le croisement entre la courbe T2 et la courbe T4 à la fin de la voyelle.

Cet écart entre les courbes nous paraît corrélé aux traits [+/-U], car il nous indique deux zones de registre séparées qui ont des étendues similaires (environ 100 Hz). Dans la zone plus haute sur l‟échelle des valeurs s‟étendent les courbes F0 des tons au trait [+U], et dans la zone plus basse les courbes des tons au trait [-U]. En outre, à l‟intérieur de chaque zone, au début de la voyelle, les courbes sont proches l‟une de l‟autre. Cela démontre l‟effet des traits [+/-U] sur la valeur de F0 dans cette phase. Les traits [h/l] nous paraissent en corrélation avec un écart entre les courbes à la fin de la voyelle. Cet écart apparaît entre les courbes au même trait à registre. Il s‟élargit graduellement jusqu‟au-dessus de 60 Hz. Le croisement entre la courbe T2 et la courbe T4 observée à la fin de la voyelle est d‟ailleurs également dû aux traits [h/l].

Figure 60 : Courbes F0 de /u/ sur les quatre tons, définies à partir des moyennes interindividuelles des valeurs de F0.

La figure 61 donne les courbes de variation de F0 relatif (définies d‟après les Moy Inter des décalages entre F0 initial (0%) et F0 des autres phases). En observant cette figure, nous avons formulé les remarques suivantes. Premièrement, dans /pu/ comme dans les deux autres contextes, il existe un écart important entre les valeurs de F0 sur T1-T4 et les valeurs sur T2-T3 à 20% de la voyelle. Ces premières valeurs sont de 5-8 Hz inférieures à F0 initial alors que ces dernières sont de 16-20 Hz inférieures à F0 initial. Cet écart se serre à 40% de la voyelle. À partir de 60% de la voyelle, les valeurs de F0 sur T1 et T2 sont supérieures à celles sur T3 et T4. Deuxièmement, entre 60% et 100% de la voyelle, les courbes T1 et T2 se rapprochent alors que les courbes T3 et T4

100

Courbes F0 de /u/ sur les quatre tons en voix modale

T1

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se rapprochent. Dans les mêmes phases, ces premières se situent plus bas que ces dernières sur l‟échelle des valeurs. Toutefois, les écarts entre les groupes de courbes s‟élargissent au fur et à mesure.

Ces remarques nous donnent à constater que les courbes F0 de /u/ sur les quatre tons ne correspondent pas à la description du pitch tonal sur l'échelle des 5 partitions. De surcroît, ces courbes présentent des formes plus complexes que les contours tonals prescrits ([fall/rise/even]). Prenons par exemple la courbe T2, sa forme n‟est pas simplement montante et elle ne présente non plus un parcours du pitch entre les partitions 3-5 ou 2-5. En fait, sa forme observée est plutôt descendante-montante, ressemblant davantage à la trajectoire du pitch d‟un ton complexe. En revanche, la courbe T3 connaît un cas contraire à celui de T2.

Compte rendu de ces remarques, nous serions gênés dans l‟explication du timing de l‟organisation des traits tonals si nous adoptions la description des 5 partitions ou les concepts des contours tonals dans notre analyse. Néanmoins, une définition du ton sur la base des cibles tonales s‟adapterait aisément à l‟explication des résultats analytiques. C‟est-à-dire qu‟à 20% de la voyelle, le pitch de T1 et le pitch de T4 atteignent la même cible tonale alors que le pitch de T2 et le pitch de T3 atteignent la même cible. Cette dernière cible est inférieure à la première en valeur. À 80% de la voyelle, le pitch de T1 atteint la même cible tonale que celui de T2, et le pitch de T3 atteint la même cible tonale que celui de T4. Cette dernière cible est inférieure à la première en valeur.

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Figure 61 : Courbes F0 du /u/ sur les quatre tons, définies à partir des moyennes interindividuelles des décalages entre F0 initial et F0 des autres phases, normalisées au niveau du temps.

La figure 62 montre la hauteur mélodique de F0 en fonction du ton dans /pu/, sur l‟échelle de demi-tons. Dans cette figure, nous avons remarqué que les courbes s‟inscrivent dans une étendue à 12 demi-tons (équivalente à une octave). La courbe T1 débute à 16,5 St et s‟étend entre 16 et 16,5 St dans toutes les phases de la voyelle /u/.

La courbe T4, avec son début à 17,5 St, présente une forme descendante qui arrive à environ 11 St à la fin de la voyelle. Les courbes T2 et T3 commencent à des valeurs proches, celle de T2 à 12 St et celle de T3 à environ 13 St. La courbe T2 descend jusqu‟à environ 10 St à 40% de la voyelle et remonte à 13 St. En revanche, la courbe T3 descend à 6,5 St vers 80% de la voyelle et remonte vers 7 St à 100% de la voyelle.

Ces variations sur l‟échelle de demi-tons s‟inscrivent à peine au cadre à 5 partitions que Chao (1930) propose.

-100 -80 -60 -40 -20 0 20

Ecart (Hz)

0% 20% 40% 60% 80% 100%

Courbes F0 par rapport à F0 initial dans /u/ de /pu/ sur les quatre tons

T1 T2 T3 T4

172

Figure 62 : Hauteur relative de F0 (par rapport à un son à 100 Hz) dans le contexte /pu/ sur les quatre tons en voix modale.

Une analyse One-Way ANOVA de la variation de F0 sur les quatre tons, effectuée avec ton comme facteur analysé et sujet comme variable aléatoire, montre que le ton a un effet significatif sur F0 (F(3, 312) = 20,53, p < 0,0001).

Tableau 53 : Significativité des variations de F0 entre les tons en voix modale, dans toutes les phases de la voyelle dans le contexte /pu/.

Le tableau 53 présente davantage de détails de cette analyse ANOVA, avec les différents types de contrastes tonals marqués en différentes couleurs.

En observant ce tableau, nous avons remarqué que les divergences significatives de F0 entre les tons se trouvent dans toutes les phases. Plus précisément, entre les tons en contraste [+/-U] (c‟est-à-dire entre T1 et T2, et entre T3 et T4), les différences au niveau de F0 sont significatives dans toutes les phases de la voyelle /u/ (p < 0,001).

Entre les tons en contraste [h/l] (c‟est-à-dire entre T1 et T4, et entre T2 et T3), les différences au niveau de F0 sont significatives entre 60% et 100% de la voyelle (p <

0,001). Quant aux tons en contraste avec les deux types de traits (c‟est-à-dire entre T1

6

Hauteur relative de F0 dans le contexte /pu/ sur les quatre tons

173

et T3, et entre T2 et T4), les différences au niveau de F0 entre T1 et T3 sont significatives dans toutes les phases de la voyelle /u/ (p < 0,001) tandis que celles entre T2 et T4 sont significatives entre 0% et 60% de la voyelle, ainsi qu‟à 100% de la

Les résultats de ces analyses montrent que la variation de F0 a peu de corrélations avec le contexte syllabique. La figure 63 illustre les courbes F0 dans les trois contextes sur le même plan et ce, sur les quatre tons. En observant cette figure, nous avons remarqué que dans chaque partie de la figure, sur le même plan F0-temps normalisé, les courbes F0 dans les trois contextes ne présentent pas de différence remarquable entre elles, ni au niveau de la valeur ni au niveau de la forme.

Figure 63 : Comparaison des courbes F0 dans les trois contextes /pa/ /pi/ /pu/ sur chaque ton en voix modale.

Les analyses Two-Way ANOVA ont été effectuées sur l‟ensemble des valeurs de F0 dans les trois contextes, avec contexte et ton comme facteurs analysés et avec sujet comme variable aléatoire. Les résultats de ces analyses confirment ce que nous avons observé dans la figure 63.

Courbes de F0 dans les contextes /pa/ /pi/ /pu/

sur T1

Courbes de F0 dans les contextes /pa/ /pi/ /pu/

sur T2

Courbes de F0 dans les contextes /pa/ /pi/ /pu/

sur T3

Courbes de F0 dans les contextes /pa/ /pi/ /pu/

sur T4

Courbe de F0 /pa/ T4 Courbe de F0 /pi/ T4 Courbe de F0 /pu/ T4

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