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V IEILLISSEMENT ET VARIABILITÉ INTRA - INDIVIDUELLE

CHAPITRE 4. DIFFÉRENCES D’ÂGE, VARIABILITÉ INTRA-INDIVIDUELLE EN

4.3. V IEILLISSEMENT ET VARIABILITÉ INTRA - INDIVIDUELLE

4.3.1. Variabilité intra-individuelle dans les épreuves de temps de réaction

La plupart des études sur la variabilité intra-individuelle et les différences d’âge ont porté sur des épreuves de temps de réaction. Par exemple, Hultsch et al. (2002) ont montré que les personnes

14 Il serait recommandé d’utiliser cet indice lorsque les moyennes et écart-types intra-individuels corrèlent positivement.

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âgées présentent une variabilité intra-individuelle dans les temps de réponse plus importante que les jeunes adultes, à la fois dans une tâche de temps de réaction simple, une tâche de temps de réaction à choix, une tâche de décision lexicale et une tâche de décision sémantique (voir également, MacDonald et al., 2003). Les résultats de Duchek et al. (2009) attestent que les adultes âgés ont des temps de réponse plus variables que les jeunes adultes dans trois épreuves d’attention sélective (Stroop, Simon, task-switching). La différence d’âge a été encore répliquée dans d’autres tâches, comme des épreuves motrices (Nesselroade et Salthouse, 2004), des épreuves exécutives (de Ribaupierre, Ghisletta et Lecerf, 2006) et lorsque la variabilité intra-individuelle est mesurée au travers de plusieurs sessions (Salthouse et Berish, 2005 ; West, Murphy, Armilio, Craik et Stuss, 2002).

Les effets d’âge semblent toutefois plus marqués dans les épreuves de temps de réaction à choix que dans les épreuves de temps de réaction simple. Il arrive même que l’amplitude de la variabilité intra-individuelle ne change pas avec l’âge dans les épreuves de temps de réaction simple (Anstey, 1999 ; West et al., 2002). Dans un échantillon d’adultes âgés de 60 à 90 ans, Anstey (1999) n’a pas découvert de relation entre l’âge et la variabilité intra-individuelle dans une épreuve de temps de réaction auditive simple alors que cette chercheuse montre une corrélation positive entre l’âge et la variabilité intra-individuelle dans deux épreuves de temps de réaction à choix. West et ses collaborateurs (2002) ont montré que les temps de réponse des adultes âgés sont plus variables que les temps de réponse des jeunes adultes dans une épreuve de mise à jour mais pas dans une épreuve de temps de réaction à choix. Par contre, dans l’étude de Bunce, MacDonald et Hultsch (2004), il apparaît que les différences d’âge dans la variabilité intra-individuelle sont de même magnitude dans une épreuve de temps de réaction à choix dans laquelle le nombre de choix possibles (2, 4 ou 8) a été manipulé.

Malgré le nombre important d’études montrant que la variabilité intra-individuelle dans les temps de réponse est plus importante chez les adultes âgés que chez les jeunes adultes, certains auteurs ont suggéré que cela puisse être dû au fait que les adultes âgés sont plus lents que les jeunes (Shammi, Bosman et Stuss, 1998). En effet, ces derniers ont conduit une étude dans laquelle 18 jeunes adultes (20-35 ans) et 18 adultes âgés (60-75 ans) ont réalisé une épreuve de temps de réaction à choix. Ils montrent que la variabilité intra-individuelle est plus élevée chez les adultes âgés, mais une fois contrôlée l’influence de la moyenne des temps de réponse, il n’y a plus de différence entre les deux groupes d’adultes. Les données de l’étude de Deary et Der (2005) vont dans le même sens. Sur un échantillon représentatif de trois groupes d’âge de la population écossaise (16, 36 et 56 ans), ils montrent des effets d’âge sur l’amplitude de la variabilité intra-individuelle dans les temps de réponse mais ces derniers disparaissent une fois que l’influence de la moyenne a été contrôlée.

Toutefois, d’autres travaux montrent que même une fois contrôlées les différences d’âge dans les temps moyens, les temps de réponse fluctuent davantage chez les adultes âgés que chez les jeunes adultes (Hultsch et al., 2002 ; Williams, Hultsch, Strauss, Hunter et Tannock, 2005).

A la lumière des travaux qui viennent d’être décrits, nous pouvons constater que les temps de réponse des adultes âgés fluctuent davantage que ceux des jeunes adultes. Plusieurs études ont ensuite été entreprises avec l’espoir de voir apparaître des différences d’âge en ce qui concerne l’amplitude de la variabilité intra-individuelle dans des épreuves de mémoire.

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4.3.2. Variabilité intra-individuelle dans les épreuves de mémoire

A ma connaissance, seules sept études se sont penchées sur la question des différences d’âge et de la variabilité intra-individuelle dans les performances en mémoire (Li, Aggen, Nesselroade et Baltes, 2001 ; Miller et Odell, 2007 ; Murphy, West, Armilio, Craik et Stuss, 2007 ; Robertson, Myerson et Hale, 2006 ; Salthouse, 2007 ; Salthouse, Nesselroade et Berish, 2006 ; Wegesin et Stern, 2004).

Les études réalisées jusqu’à présent parviennent à des conclusions très différentes puisque certaines montrent que les adultes âgés sont plus variables que les jeunes adultes (Miller et Odell, 2007 ; Wegesin et Stern, 2004), d’autres montrent qu’il n’y a pas de différences d’âge (Salthouse, 2007), et d’autres présentent des résultats qui varient d’une épreuve à l’autre (Li et al., 2001 ; Robertson et al., 2006). Relevons toutefois que ces études ont mesuré la variabilité intra-individuelle sur un nombre réduit d’occasions (trois chez Salthouse, 2007 ; Salthouse et al., 2006 ; quatre chez Murphy et al., 2007 ; et cinq chez Robertson et al., 2006) alors qu’un minimum de 7 occasions de mesure a été recommandé dans la littérature (Schmiedek, 2006 ; cité par MacDonald, Li et Bäckman, 2009).

Certaines études utilisent un nombre important d’occasions de mesure mais lors de sessions séparées, ce qui ne permet pas de distinguer la variabilité intra-individuelle intra-session de la variabilité intra-individuelle inter-session (Miller et Odell, 2007). Parfois, la taille de l’échantillon est très petite (18 chez Murphy et al., 2007), d’autres fois les épreuves administrées sont trop faciles, occasionnant un effet plafond et une variabilité intra-individuelle réduite chez les jeunes adultes (Salthouse, 2007 ; Wegesin et Stern, 2004). Par ailleurs, l’étendue d’âge des participants diffère entre les études, tout comme la manière dont l’âge est traité (en tant que variable continue ou en tant que groupes extrêmes), les épreuves de mémoire utilisées ou encore les indices de variabilité sur lesquels portent les analyses statistiques.

A ma connaissance, aucune étude n’a été publiée depuis 2007 sur la différence entre jeunes adultes et adultes âgés quant à l’amplitude de la variabilité intra-individuelle en mémoire. Cela vient probablement du fait que les résultats des études sont jusqu’à aujourd’hui si contradictoires. Il est aussi intéressant de relever que la variabilité intra-individuelle a rarement été mesurée dans des épreuves de mémoire épisodique hormis dans les recherches de Salthouse. Ce dernier a malheureusement utilisé des listes de 6 paires de mots pour mesurer la variabilité intra-individuelle, ce qui limite la possibilité d’observer une variabilité intra-individuelle importante. Il conviendrait donc de mener d’autres études sur les différences d’âge dans l’amplitude de la variabilité intra-individuelle en mémoire épisodique en utilisant des épreuves comportant un nombre d’items plus important. Ce sera l’un des objectifs de notre travail empirique.

Après avoir exposé les résultats de différents travaux relatifs à la variabilité intra-individuelle, nous avons montré que la variabilité intra-individuelle mesurée dans les épreuves de vitesse de réaction n’est pas adaptative, dans le sens où une variabilité intra-individuelle importante est associée à des événements négatifs. Nous avons également montré que les performances des adultes âgés sont plus variables que les performances des jeunes adultes dans les épreuves de temps de réaction. Dans les épreuves de mémoire, nous ne pouvons pas encore apporter de réponse claire sur cette question.

Jusqu’à présent, seules des questions de nature empirique ont été soulevées. Nous n’avons pas encore soulevé la question de la signification théorique de la variabilité intra-individuelle. L’objectif des deux prochaines sections est d’apporter un début de réponse à ces questions. Nous allons donc tout d’abord considérer les processus qui pourraient être impliqués dans la variabilité

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individuelle dans les épreuves de temps de réaction. Ensuite, nous nous intéresserons au rôle que les stratégies d’encodage peuvent jouer dans la variabilité intra-individuelle en mémoire épisodique.