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Chapitre 1. Contexte et émergence de la problématique

1.1. Le concept de systèmes de produits-services

1.1.2. Le concept de système de produits-services

1.1.2.2. Types de systèmes produits-services

Comme nous l’avons défini précédemment un système de produits-services intègre en une même offre aussi bien des produits que des services, le tout dans l’objectif de répondre au besoin d’un client. Cette approche reste très générale et ne précise pas dans quelle mesure un service peut venir en apport d’un produit ou réciproquement. C’est pourquoi nous souhaitons ici caractériser un système de produits-services. Pour cela nous nous appuyons sur la littérature qui a identifié des types de systèmes de produits-services, permettant de répondre à des besoins clients de nature différente.

L’intégration de produits ou de services dans une offre de produits ou de services peut prendre trois formes8 (Geum and Park, 2011):

- l’ajout : si un produit ou service est ajouté à un service ou un produit ;

- la substitution : si un produit ou un service substitue la fonction existante d’un service ou d’un produit ; - le management : si un produit ou un service aide à gérer une fonction courante.

7 Citation originale (p.18) : A product service system (PSS) is a marketable set of products and services capable of

jointly fulfilling a user's need

8 Citation originale (p.1611): The integration types as threefold: add (If a product or service is additive to the service

or product), substitute (if a product or service substitutes the existing function of the service or product), and management (if a product or service helps to manage the current function)

La prépondérance de produits ou de services dans les offres de systèmes de produits-services permet de répondre à des besoins de nature différente : besoin de fonctionnalité, d’usage ou de résultat. Plus il y a de services dans un système de produits-services, plus il y a de chance pour que le client ne soit plus propriétaire de l’offre et pour que l’entreprise qui fournit le système de produits-services garde sous sa responsabilité le cycle de vie de l’offre.

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Ces trois formes répondent à des besoins différents. Dans le premier cas, l’ajout de produits ou de services répond à un besoin complémentaire du client. Dans le second cas, il remplace une fonction existante. Enfin, la dernière forme d’intégration de produits et de services permet d’aider au management d’une fonction existante. L’offre répond ainsi à un besoin de support. Cette typologie nous permet de distinguer la complémentarité des produits et des services inclus dans un système de produits-services, ainsi que le besoin auquel l’ensemble répond.

Une autre typologie de systèmes de produits-services a été proposée par Tukker (2004) (Figure 1-2). Trois types de systèmes de produits-services ont été définis suivant le degré de produits ou de services que l’offre contient. Cette définition a été développée sur les bases de celle de Mont (2002) qui, le premier, a utilisé les termes de use- oriented et result-oriented. Nous proposons par la suite de décrire chacun de ces trois types. Cette description s’appuie sur les définitions proposées par Tukker (2004), mais aussi par celle effectuée par Reim et al. (2014). Ces derniers ont analysé chacun des trois types de systèmes de produits-services définis par Tukker suivant trois critères : la valeur créée (value creation) qui précise la responsabilité de l’entreprise porteuse de l’offre, la valeur délivrée au client (value delivery) qui stipule ce qui est délivré par le système de produits-services et la valeur capturée (value capturing) qui présente la manière dont l’entreprise se rémunère. La description de chacun des trois types de systèmes de produits-services que nous proposons par la suite s’appuie sur ces trois éléments de comparaison.

Figure 1-2

Page 42 sur 312 Type A : systèmes produits-services orientés produits (product-oriented)

Cette catégorie intègre des systèmes de produits-services dont les produits sont au cœur de l’offre et auxquels sont associés des services. Ici le client achète le produit et est responsable de son bon fonctionnement. Dans ce cas, des contrats de service type Maintenance Réparation Opérations (MRO) peuvent par exemple être souscrits pour assurer la bonne continuité de fonctionnement des produits. Ou bien encore le client peut souscrire des contrats de service type consultation, par lesquels l’entreprise peut apporter au client son expertise sur un sujet particulier. Même si les produits et les services sont séparés, le client achète un ensemble de produits et services, c’est la raison pour laquelle le type A est orienté produits, parce que le besoin principal du client est satisfait principalement par les produits et non par les services. Les services sont ainsi ajoutés à l’offre (Geum and Park, 2011), qui procurent un « plus » pour le client final.

Un exemple typique de système de produits-services type A est l’achat d’une voiture avec un contrat de maintenance. Le client est propriétaire de la voiture. L’entreprise reçoit de l’argent lors de l’achat du bien, mais aussi de manière régulière par le contrat de maintenance. Le cycle de vie de la voiture est sous la responsabilité du client (revente après N années et décote du prix).

Type B : systèmes produits-services orientés usage (use-oriented)

Cette catégorie inclut des systèmes de produits-services dont les produits et les services contribuent au même niveau à satisfaire le besoin client. Ici le client n’achète plus le produit, il achète une utilisation. C’est la raison pour laquelle ce type de systèmes de produits-services se nomme use-oriented parce que l’entreprise porteuse de l’offre s’engage sur le bon fonctionnement du système de produits-services. Le client en est l’usager et bénéfice en permanence d’un produit en état de fonctionner et évite ainsi la gestion de la maintenance (contrainte de coût de personnel par exemple). La valeur délivrée est donc un usage.

L’exemple typique d’un système de produits-services de type B est la location d’une voiture. Le client loue une voiture pour une durée déterminée avec un nombre de kilomètres défini à l’avance. Le client est donc un utilisateur temporaire du produit, ce dernier ne lui appartenant pas. L’entreprise s’engage à ce que la voiture soit propre, entretenue et équipée lors de la location. Sur cet exemple la valeur créée est la valeur délivrée. Quant à la valeur capturée, l’entreprise se rémunère à chaque utilisation de la voiture et prend la responsabilité de son cycle de vie. Un second exemple de système de produits-services de type B est celui d’une location de poussettes entre particuliers étudié par Mont et al. (2006). Les auteurs ont mis en avant l’intérêt d’une telle offre pour les jeunes parents. Ces derniers peuvent pour un moindre coût de location détenir une poussette haut de gamme pour une période donnée. Le système de location leur permet de ne pas devoir revendre la poussette une fois celle-ci devenue inutile.

Page 43 sur 312 Type C : systèmes produits-services orientés résultats (result-oriented)

Cette catégorie fait référence aux systèmes de produits-services ayant le plus haut degré de services. Les produits restent au cœur de l’offre, ce sont en partie eux qui assurent la satisfaction du besoin, mais bien souvent ils ne sont pas connus du client. Dans les systèmes de produits-services de type C l’entreprise s’engage sur un résultat. Elle est donc responsable des moyens à mettre en œuvre pour obtenir ce résultat.

Si l’on reprend le monde du transport, un système de produits-services de type C qui existe aujourd’hui est celui proposé par un fabricant de pneus français vis-à-vis de ses clients transporteurs. L’entreprise s’engage à ce que les camions aient toujours des pneus en bon état, adaptés aux saisons climatiques. Le client paye pour chaque kilomètre parcouru et l’entreprise qui vend le système de produits-services contrôle régulièrement les pneus des poids-lourds et intervient si besoin. Pour le transporteur, c’est une offre « clé en main » dans le sens où il n’a plus à gérer les commandes de pneus, de leur installation et de leur vérification.

Pour bien comprendre cette catégorie de système de produits-services de type C, nous prenons un exemple vers lequel Schneider Electric est en train de tendre dans le domaine des centres de données (data center). Schneider Electric pourrait, à terme, s’engager à ce qu’en permanence le centre de données soit alimenté en électricité et fonctionne suivant les conditions adéquates (comme par exemple une climatisation opérationnelle). C’est ainsi que des moyens de secours, notamment des groupes électrogènes, seraient installés pour compenser une coupure d’électricité de moyenne durée. A chaque seconde d’arrêt du centre de données, des pénalités seraient payées par Schneider Electric au client. Le client achèterait ici l’assurance que son centre de données serait toujours alimenté en électricité et en bon état de fonctionnement, ou dans le cas d’une coupure longue durée de l’électricité, le client disposerait d’un laps de temps suffisant pour éteindre correctement les serveurs de données. Ces élements représentent ainsi la valeur délivrée par l’entreprise au client.

Nous avons vu que la proposition de valeur (value proposition) de chacun des types A, B et C de systèmes de produits-services est différente (Durugbo and Riedel, 2013). La proposition de valeur est ce qu’amène l’offre pour répondre à un besoin. Le type A product-oriented tend à fournir au client un moyen de satisfaire une fonctionnalité, le type B use-oriented permet au client de satisfaire un usage, enfin dans le type C result-oriented le client attend de l’entreprise un résultat. Cela tend à modifier la responsabilité de l’entreprise porteuse de l’offre suivant le type d’offres. Adrodegari et al. (2015) insistent sur la propriété du système de produits-services. En effet plus il y a de services dans une telle offre, plus il y a de chance pour que le client ne soit plus propriétaire de l’offre. Par conséquent l’entreprise qui fournit le système de produits-services garde sous sa responsabilité le cycle de vie de l’offre. La Figure 1-3 illustre différents types de systèmes de produits-services. Même si leur dénomination n’est pas la même que celle proposée par Tukker (2004), la compréhension du schéma reste la même : plus nous nous dirigeons vers la droite, plus le degré de services est élevé. Cette illustration met en avant le point de vue du client. Dans les deux premiers cas (product-focused et product and processes-focused), le client s’oriente vers un système

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de produits-services où il doit acheter les produits et donc initialement débourser une somme d’argent importante. Dans les trois autres cas (access-focused, use-focused et outcome-focused) le client s’oriente vers des offres de services où la manière de rémunérer l’entreprise diffère. Le client n’a plus à acheter le système de produits- services, mais paye régulièrement pour son utilisation ou la garantie de ses résultats. Néanmoins, nous analysons que ce type de démarche peut être à risques pour le client. En effet ce dernier devient dépendant de l’entreprise qui fournit le système de produits-services. Par exemple la décision de mettre à jour ou de remplacer les produits et les services n’est plus du ressort du client, mais de celui de l’entreprise responsable du système de produits- services (cela dépend du contrat). Ceci peut nuire aux relations entre l’entreprise et le client si ce dernier n’est pas satisfait de la continuité de service proposé.

Figure 1-3

Différents types de systèmes de produits-services (Adrodegari et al., 2015, p.248)

Cette évolution de l’offre nous questionne quant à ses conséquences sur l’entreprise : quels sont les nouveaux défis que celle-ci doit relever pour toujours être en mesure de proposer des solutions aux besoins des clients ? Cela impacte-t-il son organisation, ses manières de développer une nouvelle offre ? Nous apportons dans le paragraphe suivant des éléments de réponse à ces questions.