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Des titulaires de second rang par volont é du département

DE LA COM MUNE

1. Des titulaires de second rang par volont é du département

Si le département ne dispose pas d’une totale liberté dans l’accomplissement de sa politique de protection des espaces naturels sensibles, il n’est pas non plus le seul à pouvoir intervenir en la matière car divers acteurs peuvent y prendre part avec son consentement.

B. Les autre s acteur s du droit de préemption : l’influence d u département

Le droit de préemption des espaces naturels sensibles fait intervenir un nombre important d’acteurs696.

Bien évidemment, le département ne saurait être écarté de cette procédure, mais il existe différentes possibilités pouvant amener certaines personnes morales ou physiques à prendre part à cette procédure.

Ainsi, il existe des titulaires subsidiaires du droit de préemption (1) et des acteurs qui subissent l’exercice du droit de préemption des espaces naturels sensibles ou encore des acteurs concurrents au titre d’un autre droit de préemption (2).

1. Des titulaires de second rang par volont é du

département

Un acteur particulier jouit d’un droit préférentiel dans certains cas particuliers. Il s’agit du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres qui peut avoir, dans ce cadre, une place importante. Certaines de ces prérogatives existaient déjà lors de la mise en place de la protection des périmètres sensibles (a).

D’autres acteurs n‘interviennent en lieu et place du département, par

695 J.-L. L

ENCLOS, « La taxe départementale des espaces naturels sensibles », op. cit., p. 197.

696 J. C

substitution ou délégation, qu’en dernier ressort, au cas où celui-ci ne souhaite pas exercer lui-même la protection des espaces naturels sensibles (b).

a. Un titulaire du droit de préemption particulier : le conservatoire de l’espace littoral et de s rivages lacustres

Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres a été créé en 1975697. Dès l’année suivante, il se voyait confier une compétence de substitution en matière de protection des périmètres sensibles par la loi du 31 décembre 1976698. La réforme du 18 juillet 1985, qui met en place les espaces naturels sensibles, va reprendre les dispositions le concernant dans l’article L. 142-3 du Code de l’urbanisme. C’est une réforme prévue par la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité qui élargit ses compétences au point d’en faire un acteur disposant d’une relative autonomie en la matière. Cette loi a eu aussi une influence sur le patrimoine du Conservatoire par le biais d’une nouvelle possibilité d’affectation des recettes de la taxe départementale des espaces naturels sensibles dont le département est l’unique bénéficiaire699, afin de participer « à l’acquisition, à l’aménagement et à la gestion des terrains du Conservatoire », comme nous l’avons vu précédemment.

Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres peut intervenir dans le cadre de deux procédures distinctes. La plus importante lui confère une certaine autonomie en lui reconnaissant une capacité d’initiative et d’intervention sur les espaces naturels sensibles, même si le département exerce lui-même cette compétence sur son territoire. La seconde est conditionnée par l’absence de volonté du département d’exercer lui-même une protection des espaces naturels sensibles.

Le pouvoir d’initiative du Conservatoire, reconnu par l’article L. 142-3 al. 9, s’exerce en parallèle et en dehors du droit de préemption du département et est très encadré quant à son application territoriale. Cet article précise que « lorsqu’il est

territorialement compétent le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres peut prendre l’initiative de l’institution de zones de préemption ». Cette référence faite

697 Loi n° 75-602 du 10 juillet 1975 relative au conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, J.O.R.F. du 11 juillet 1975, p. 7126.

698 J. B

ASCHWITZ, « La préemption dans les Z.I.F., les Z.A.D. et les périmètres sensibles », op. cit

699 C. D

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à sa compétence territoriale700 correspond plus ou moins aux territoires des premiers départements concernés par les périmètres sensibles tels qu’ils étaient prévus par la loi de 1960. Toutefois, cette capacité est limitée dans l’espace par l’action du département puisque le Conservatoire ne peut intervenir qu’en dehors des zones de préemption délimitées par ce dernier. Ce n’est pas la seule limitation spatiale, l’intervention du Conservatoire doit s’exercer en dehors des « zones urbaines ou à urbaniser délimitées par les plans d’urbanisme locaux et des zones constructibles délimitées par les cartes communales »701. La justification de cette interdiction semble être la traduction d’une volonté du législateur de ne pas voir le droit de préemption des espaces naturels sensibles entrer en concurrence avec le droit de préemption des communes. L’objectif n’est que partiellement atteint puisque les communes pourvues d’une carte communale peuvent choisir de préempter en dehors des zones constructibles702. Une seconde catégorie de limites à ce droit de préemption du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres réside dans les autorisations nécessaires à son exercice. Deux collectivités sont concernées dans cette procédure.

Il s’agit premièrement du département, ce qui confirme son statut de titulaire de plein droit en la matière, puisque les textes n’ont prévu aucun moyen de surmonter un refus du Conseil général.

Le second avis doit être recherché auprès de la commune sur le territoire de laquelle devrait s’exercer le droit de préemption ou de l’établissement public de coopération intercommunale. Contrairement à la procédure prévue pour l’établissement des zones de préemption par le département, en cas de refus, la procédure continue mais en ce cas, la zone sera définie par décret en Conseil d’État et non plus par le préfet703. Il est à noter que les avis des différentes collectivités peuvent être tacites car ils sont réputés favorables en l’absence de réponse négative dans un délai de trois mois704.

Une troisième limite dans l’exercice du droit de préemption intervient dans la

700 Article L 322-1 du Code de l’environnement, cette compétence territoriale s’exerce « dans les cantons

côtiers, dans les communes riveraines des mers, des océans, des étangs salés ou des plans d’eau intérieurs d’une superficie supérieure à 1000 hectares, dans les communes riveraines des estuaires et des deltas lorsque tout ou partie de leurs rives sont situées en aval de la limite de salure des eaux. ».

701 Article L. 142-3 al. 9 du Code de l’urbanisme. 702 R. H

OSTIOU, J.F. STRUILLOU, « Expropriation et préemption », op. cit., p. 192.

703 Article L. 142-3 al. 9 du Code de l’urbanisme. 704 ibid.

délimitation de la zone de préemption qui appartient non pas au Conservatoire mais à l’État. En effet, c’est le préfet qui après l’accord des collectivités déterminera les zones dans lesquelles le droit de préemption du Conservatoire pourra s’exercer. Une fois la zone de préemption déterminée, le Conservatoire exerce ses compétences selon une procédure identique à celle prévue pour le département705.

L’article L. 142-3 al. 8 prévoit la possibilité pour le Conservatoire d’intervenir dans le cas où le département n’exercerait pas son droit de préemption. Nous développerons les principes liés à la substitution dans le point suivant, mais il est tout de même important de mettre en exergue la primauté du Conservatoire. Les autres intervenants ne pourront agir qu’en cas de non-exercice de ce droit par le Conservatoire. Dans le cas où le département ne souhaiterait pas exercer lui-même sa compétence en matière de préemption des espaces naturels sensibles, il peut la déléguer notamment au Conservatoire.

Le Conservatoire n’est certes pas le seul à pouvoir bénéficier de la manne financière représentée par la taxe départementale des espaces naturels sensibles ou à pouvoir exercer un droit de substitution, ou encore, à être habilité à recevoir une délégation du département en matière d’espace naturel sensible. Mais dans toutes ces dispositions, il apparaît comme le premier bénéficiaire. L’existence d’un droit spécifique, concurrent de celui du département, fait du conservatoire un acteur tout à fait particulier qui demeure entièrement dépendant de la volonté du département.

b. Des titulaires secondaires nombreux et dépendants de la volonté du département

L’intervention de certains acteurs est conditionnée à la mise en place d’un mécanisme de transfert de compétences. Le Code de l’urbanisme a prévu une double possibilité : il s’agit de la substitution et de la délégation.

La substitution706 évoquée par l’article L. 142-3 du Code de l’urbanisme est un

705 Article R. 142-19 du Code de l’urbanisme.

706 Il ne faut pas confondre la substitution telle que nous l’abordons dans ce point et le pouvoir de

substitution d’action qui relève du pouvoir de tutelle. R. CHAPUS, « Droit administratif général –

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transfert de compétences exercé pour des « raisons pratiques afin d’assurer le bon fonctionnement de l’administration »707. Cette substitution ne s’exerce qu’en cas de renonciation à l’exercice du droit de préemption par le département. Celui-ci dispose d’un délai de deux mois, et chaque éventuel substitué d’un délai de 15 jours pour faire connaître sa décision concernant le bien à préempter708, 709.

La délégation prévue à cet article correspond à une délégation de pouvoir car les trois critères nécessaires à cette qualification710 sont remplis :

- l’autorisation par un texte : elle est prévue par l’article L. 142-3 al. 11 du Code

de l’urbanisme.

- l’autorisation doit être explicite : elle relève d’une décision du Conseil général ou

du bureau si cette compétence lui a été déléguée711.

- l’autorisation ne doit pas être totale : elle concerne soit un bien particulier

soumis au droit de préemption, soit un ou plusieurs secteurs de la zone de préemption. Mais elle ne concerne jamais l’intégralité du droit de préemption du département.

L’autorisation réalise un transfert juridique de compétence, ce qui indique que le délégataire n’a pas obligation de préempter mais traduit une simple possibilité d’exercer ce droit.

En matière de substitution, on constate qu’une hiérarchie entre les possibles intervenants est mise en place par le Code de l’urbanisme. L’article L. 142-3 al. 8 précise qu’en l’absence d’exercice de son droit de préemption par le département, le premier à pouvoir se substituer à lui est le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres territorialement compétent, confirmant ainsi son statut d’intervenant privilégié dans cette procédure.

Les seconds acteurs possibles, ne pouvant intervenir qu’en cas de non- préemption par le Conservatoire, sont les établissements publics chargés d’un parc national ou régional à condition que le bien à préempter se situe sur le territoire du

707 G. D

UPUIS, M.-J. GUÉDON, P. CHRÉTIEN, « Droit administratif », 8ème édition, Armand Colin, 2002,

p. 438.

708 H. P

ERINET-MARQUET, « Le droit de préemption dans les espaces naturels sensibles », R.J.E., 2/1997,

p. 179.

709 Article R. 142-11 du Code de l’urbanisme prévoit les délais en cas de substitution du département

par le Conservatoire du littoral (75 jours) ou par la commune (trois mois).

710 R. C

HAPUS, « Droit administratif général »,op. cit., pp. 1078 à 1082.

parc ou dans une réserve naturelle dont la gestion leur est confiée712. Enfin, si aucun des intervenants précédents n’a usé de son droit à préempter, ou s’ils ne sont pas territorialement compétents, la commune pourra se substituer au département.

La possible substitution du département par l’établissement public en charge d’un parc national ou régional soulève une interrogation. On relève une lacune importante dans le texte qui a prévu cette compétence particulière713. En effet, aucun délai n’a été prévu pour l’exercice de cette substitution. Cette omission semble pouvoir générer des difficultés puisque la commune pourra exercer ce droit de préemption uniquement si l’établissement public en charge d’un parc ne souhaite pas préempter le bien concerné. Or aucun délai n’est spécifié pour la réalisation de cette opération alors que l’exercice de ce droit par la commune est enfermé dans un délai de trois mois. Une particularité concerne les parcs naturels régionaux qui, s’ils souhaitent pouvoir exercer ce droit de préemption, doivent rechercher l’accord explicite du département714. Cette procédure spécifique est, de ce fait, plus proche de la délégation que de la substitution715.

Cette condition supplémentaire signifie qu’un département peut choisir d’exclure un parc naturel régional de la protection des espaces naturels sensibles. L’article L. 142- 3 du Code de l’urbanisme a aussi prévu le cas de l’expiration ou du non-renouvellement du décret de classement d’un parc naturel régional. Dans une telle situation, les biens acquis par l’exercice du droit de préemption deviennent propriété du département716. Cette disposition est valable tant pour les biens acquis par substitution que pour ceux acquis par délégation du département.

La délégation de compétence, prévue par l’article L. 142-3 al. 11 du Code de l’urbanisme, peut intervenir à l’occasion de l’aliénation d’un bien, comme pour la substitution, mais aussi sur un ou plusieurs secteurs de la zone de préemption. Parmi les acteurs pouvant bénéficier d’une délégation, on retrouve ceux qui peuvent se substituer au département auxquels s’ajoutent l’État, les autres collectivités

712 J. M

ORAND-DEVILLER, « Commentaire de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement

de la protection de l’environnement », A.J.D.A., 20 juin 1995, p. 439.

713 Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, J.O.R.F. du 28 février,

p. 3808.

714 Article L. 142-3 al. 8 du Code de l’urbanisme. 715 R. H

OSTIOU, J.F. STRUILLOU, « Expropriation et préemption », op. cit., p. 268.

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