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L’intégration au service de la protection écologiq ue de la montagne et du littor al

Incontestablement, le droit de l’urbanisme a devancé la formulation juridique d’obligations générales liées à la prise en considération des préoccupations écologiques qui ne sont apparues qu’à l’heure de la décentralisation. Le caractère particulier et fragile de certains espaces a été reconnu dès la fin des années 1960. Il en est ainsi de la découverte des spécificités de la montagne (a) et du littoral (b) qui a été le « fer de lance » de l’intégration des préoccupations écologiques en droit de l’urbanisme.

a. La reconnaissance juridique de la se nsibilité écologique de la montagne

L’existence du statut particulier de la montagne tel que nous le connaissons aujourd’hui relève d’une loi postérieure à la décentralisation. Néanmoins, le droit de l’urbanisme a perçu la nécessité d’une approche différenciée plusieurs années auparavant devant permettre une protection écologique d’espaces particulièrement sensibles.

Le premier texte soucieux de la préservation de la montagne, « dans le cadre d’une politique globale de son aménagement »218, est le décret du 22 novembre 1977

218 M. D

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approuvant la directive d’aménagement national relative à la protection et à l’aménagement de la montagne219. Cette directive imposait une urbanisation en continuité des constructions nouvelles ou regroupées en hameaux nouveaux pour préserver quantitativement les espaces écologiques. L’intérêt de cette directive, quant à la protection écologique, réside principalement dans les articles 3.1. et 3.2.. Le premier met en place la préservation des plans d’eau avec l’interdiction de prévoir le tracé d’une route à moins de 300 mètres des rivages. Le second affirme qu’il « convient de préserver l’état naturel » des plans d’eau et que les zones de marais, tourbières ou forêts devront être « laissées intactes ». Malgré une applicabilité insatisfaisante, cette directive aura permis d’initier une protection écologique dans un milieu où la consommation d’espace est problématique220.

L’idée qui a longtemps dominé et qui perdure encore aujourd’hui est que « le territoire montagnard tire sa spécificité non pas d’un lieu, mais de la complexité de la gestion de ce lieu »221. Antérieurement, il n’y avait pas de protection écologique de la montagne prise dans sa globalité et au regard de la particularité de son milieu, mais un ensemble de textes axés sur la protection des activités en montagne, notamment de l’agriculture222. La loi de 1985, codifiée aux articles L. 145-1 et suivants du Code de l’urbanisme, tente d’établir un équilibre entre la protection et l’aménagement223, ce qui demeure toujours assez complexe à mettre en place. On retrouve cette ambivalence dans la conception de la protection du littoral dès son origine224.

b. La reconnaissance de la nécessaire protection du littoral

On peut apercevoir les prémices du souci de préservation du littoral dans le

219 Décret n° 77-1181 du 22 novembre 1977 approuvant la directive d’aménagement nationale relative à

la protection et à l’aménagement de la montagne, J.O.R.F. du 24 novembre 1977, p. 5513.

220 M. D

EVEZE, « Le zonage en milieu montagnard », op. cit., p. 20.

221 H. C

HARLES, « Urbanisme et montagne », A.J.D.A., 20 mai 1993, numéro spécial, p. 125.

222 Notamment le décret n° 77-566 du 3 juin 1977 sur l’agriculture de montagne et de certaines zones

défavorisées, J.O.R.F. du 4 juin 1977, p. 3124.

223 P. B

ILLET, « Le droit à l’assaut de la montagne : de la directive « montagne » à la loi sur le

développement des territoires ruraux », Environnement, mai 2005, étude n° 9, p. 15.

224 J.-P. R

OBIN, « Le conflit environnement / développement dans les documents d’urbanisme : l’exemple

des S.D.A.U. et des P.O.S. dans la bande littorale et le moyen-pays des Alpes Maritimes », thèse, Université de Nice, 1984, p. 3 et suivantes.

décret du 26 juin 1959 pour la protection du littoral en région Provence Côte d’Azur225 qui correspond aussi aux modifications de l’usage du littoral notamment dues au tourisme. Ce décret sera le berceau de deux protections écologiques distinctes : celle des périmètres sensibles des départements et celle du littoral.

Le début des années 70 sera révélateur d’une prise de conscience de la nécessaire sauvegarde du littoral et des rivages lacustres par l’encadrement des politiques d’aménagement226.

D’une part, la jurisprudence, par le célèbre arrêt « Schwetzoff »227 et dans un souci de limitation du développement de l’urbanisme littoral, a rendu nécessaire la compatibilité des travaux entrepris sur le domaine public maritime avec les documents locaux d’urbanisme228. Cet arrêt marque véritablement une césure. En effet, « de zone spécialisée, régie par un droit particulier, le littoral va devenir progressivement une zone incluant l’ensemble des espaces proches du rivage et soumis à un droit « de proximité de la mer » qui ajoutera des règles et des procédures communes aux règles spécifiques de chacun des espaces concernés »229.

D’autre part, Michel PIQUARD rendait, au gouvernement, le rapport du groupe de travail chargé de déterminer les perspectives de l’aménagement du littoral et des rivages lacustres dans lequel se trouvent les bases de la protection actuelle230. Ce rapport sera suivi d’une instruction231 posant les bases des objectifs de la protection actuelle du littoral et des rivages lacustres : « l’urbanisation linéaire du bord de mer doit être évitée, les constructions doivent être reportées le plus en arrière possible du

225 Décret n° 59-768 du 26 juin 1959 tendant à préserver le caractère du littoral Provence-Côte d’Azur, J.O.R.F. 27 juin 1959, p. 6424.

226 J.-F. D

AVIGNON, « La condition juridique des lacs – Domanialité publique et protection de la

nature », A.J.D.A., novembre 1979, p. 12-13.

227 CE, 30 mars 1973, Ministre de l’aménagement du territoire, de l’équipement, du logement et du

tourisme c/ Schwetzoff (Vladimir), req. n° 88151, Rec., p. 1149.

228 J. D

UFAU, « Note sous CE, 30 mars 1973, Ministre de l’aménagement du territoire, de l’équipement,

du logement et du tourisme c/ Sieur Schwetzoff et autres, req. n° 88151», A.J.D.A., juillet-août 1973, p. 366.

229 J.-M. B

ÉCET, D. LE MORVAN, « Le droit du littoral et de la mer côtière », Économica, 1991, p. 6.

230 M. P

IQUARD (Dir.), « Perspectives pour l’aménagement du littoral français », Rapport au

gouvernement, novembre 1973, La Documentation française, 1974, 266 pages.

231 Instruction du 4 août 1976 concernant la protection et l’aménagement du littoral et des rivages des

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rivage de la mer, des zones naturelles doivent séparer les zones urbanisées »232.

Ces objectifs seront repris par le décret du 25 août 1979 approuvant la directive d’aménagement national relative à la protection et à l’aménagement du littoral233. On trouve dans cette directive l’objectif de protection et de mise en valeur des milieux naturels. Dans ce dessein, l’article 3.1. b) oblige le maintien en l’état des marais, vasières et toutes zones humides ou milieux constamment ou temporairement immergés. Cependant, cette directive souffrait d’un problème d’applicabilité puisque le Conseil d’État avait déterminé qu’elle n’était pas opposable à un P.O.S.234, 235.

Ce problème subsistera jusqu’à la réforme apportée par la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences236 qui institue un lien de compatibilité entre les documents d’urbanisme local et les directives de prescription nationale237.

La loi du 3 janvier 1986 va reprendre les principes de cette directive qui seront codifiés aux articles L. 146-1 et suivants du Code de l’urbanisme ainsi qu’aux articles L. 321-1 du Code de l’environnement238. Cette loi tente de concilier l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, ce qui explique l’existence d’exceptions aux diverses limitations de l’urbanisme dans les différents espaces concernés par cette loi.

232 L. P

RIEUR, « Droit et littoral : recherches sur un système juridique », thèse, Université de Bretagne

Occidentale, 2001, p. 22.

233 Décret n° 79-716 du 25 août 1979 approuvant la directive d’aménagement nationale relative à la

protection et à l’aménagement du littoral, J.O.R.F. du 26 août 1979, p. 2098.

234 CE, 24 juillet 1981, Association pour la sauvegarde du pays de Rhuys, req. n° 22129, 27868, Rec.,

p. 341.

235 Y. P

ITTARD, « La « loi littoral » et la réglementation de l’urbanisme », R.F.D.A., septembre-octobre

1986, p. 688 et suivantes.

236 Loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les

départements et les régions de l’État, J.O.R.F. du 9 janvier 1983, p. 215.

237 H. C

OULOMBIE, J.-P. REDON, « Le droit du littoral : domaine public maritime, loi littoral, ports

maritimes », Litec, 1992, p. 35.

238 A.-H. M

ESNARD, « La « loi littoral » : nature et portée », R.F.D.A., septembre-octobre 1986, p. 677

2. L’intégration née de la protection de cert ains espaces

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