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L’intégration née de la protection de cert ains espaces particuliers des départ ements et des communes renforcé e

par la décentralisation

Avec la prise de conscience de la spécificité du littoral naît la possibilité d’apporter une certaine protection pour les espaces sensibles de plusieurs départements. Cette procédure, néanmoins, ne sera étendue à tout le territoire national que postérieurement à la décentralisation (a). Les communes rurales, quant à elles, pourront, selon certaines conditions, envisager la mise en place d’une zone d’environnement protégé qui succombera à une proximité trop évidente avec les P.O.S. et à la décentralisation des compétences (b).

a. La protection des périmètre s sensible s de certains départements

Cette possibilité a été ouverte par le décret du 26 juin 1959 pour la protection du littoral de la région Provence Côte d’Azur239 évoqué précédemment. Elle sera étendue au bénéfice de la Corse par le décret du 7 décembre 1960240 avant d’être reprise par l’article 65-I de la loi portant loi de finances pour 1961241 qui va étendre cette procédure à d’autres départements, principalement côtiers242. Divers décrets vont intervenir pour compléter la liste des départements sans qu’aucun n’ouvre cette possibilité à tous les départements243. Les premières possibilités de préemption de

239 Décret n° 59-768 du 26 juin 1959 tendant à préserver le caractère du littoral Provence-Côte d’Azur, op. cit..

240 Décret n° 60-1321 du 7 décembre 1960 étendant au département de la Corse les dispositions du décret

n° 59-768 du 26 juin 1959, J.O.R.F. du 13 décembre 1959, p. 11153.

241 Loi n° 60-1384 du 23 décembre 1960 portant loi de finances pour 1961, J.O.R.F. du 24 décembre

1960, p. 11619.

242 En 1961, seuls sont concernés les départements des Alpes-Maritimes, de l’Aude, des Bouches-du-

Rhône, la Corse, le Gard, l’Hérault, les Pyrénées-Orientales et le Var.

243 En 1974, la procédure est étendue aux départements du Calvados, de la Charente-Maritime, des

Côtes-du-Nord, du Finistère, de la Gironde, d’Ille-et-Vilaine, des Landes, de Loire-Atlantique, du Morbihan, du Nord, du Pas-de-Calais, des Pyrénées-Atlantiques et de la Vendée (décret n° 74-831 du 26 septembre 1974, urb, J.O.R.F. du 5 octobre 1974, p. 10189). L’année suivante, le département de la Manche accède à cette procédure (décret n° 75-917 du 2 octobre 1975 urb rendant applicable au département de la Manche les dispositions du code de l’urbanisme relatives à la protection du caractère

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périmètres sensibles prévoyaient que la délimitation des zones ouvertes à la préemption revenait à l’État. La déconcentration de cette procédure entre les mains du préfet interviendra tardivement par la loi du 31 juillet 1976 et sera rendue effective par la mise en œuvre de son décret d’application du 7 juillet 1977244.

La procédure relative aux périmètres sensibles était légèrement différente de celle que l’on connaît actuellement245 et requérait trois étapes pour que la préemption d’un espace sensible soit rendue possible.

Le préalable à la détermination des zones de préemption était l’inscription par décret sur la liste des départements autorisés à appliquer les dispositions des articles L. 142-1 à L. 142-3 du Code de l’urbanisme246. En vertu du décret précité du 7 juillet 1977, le préfet devait consulter, dans un délai d’un mois suivant la parution du décret rendant éligible à cette procédure, le Conseil général et les conseils municipaux des communes intéressées par le projet de délimitation. Puis, en fonction des avis émis, il procédait à la délimitation du ou des périmètres sensibles247.

de certains départements, J.O.R.F. du 10 octobre 1975, p. 10466). Les départements de l’Essonne, de l’Indre-et-Loire, du Loir-et-Cher, du Loiret, de la Savoie et de la Haute-Savoie bénéficieront de cette procédure en 1977 (décret n° 77-229 du 8 mars 1977 urb modification du III de l’article R. 142-1 du code de l’urbanisme relatif à la protection du caractère de certains départements, J.O.R.F. du 16 mars 1977, p. 1442), alors que les départements de l’Isère, du Jura, de la Moselle et du Bas-Rhin attendront deux ans pour être portés sur la liste (décret n° 79-93 du 24 janvier 1979 urb. rendant applicables aux départements de l’Isère, du Jura, de la Moselle et du Bas-Rhin les dispositions du code de l’urbanisme relatives à la protection du caractère de certains départements (art. R. 142-1), J.O.R.F. du 2 février 1979, p. 307), tout comme les départements de la Seine-Maritime et de la Somme (décret n° 79-339 du 18 avril 1979 rendant applicables aux départements de la Seine-Maritime et de la Somme les dispositions du code de l’urbanisme relatives à la protection du caractère de certains départements, J.O.R.F. du 24 avril 1979, p. 997). Les derniers départements concernés sont la Côte d’Or, le Doubs, la Nièvre, le Puy-de- Dôme, la Saône-et-Loire et l’Yonne en 1980 (décret n° 80-389 du 21 mai 1980 rendant applicable aux départements de la Côte d’Or, le Doubs, la Nièvre, le Puy-de-Dôme, la Saône-et-Loire et l’Yonne les dispositions du code de l’urbanisme relatives à la protection du caractère de certains départements, J.O.R.F. du 1er juin 1980, p. 1362).

244 Loi n° 76-1285 du 31 décembre 1976 portant réforme de l’urbanisme, J.O.R.F. du 01 janvier 1977,

p. 4 et décret n° 77-758 du 7 juillet 1977 modifiant le code de l’urbanisme et pris en application des dispositions relatives aux périmètres sensibles du chapitre IV de la loi 76-1285 du 31 décembre 1976,

J.O.R.F. du 10 juillet 1977, p. 3656.

245 Issue de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en œuvre de principes

d’aménagement, J.O.R.F. du 19 juillet 1985, p. 8152.

246 Ancien article R 142-2 du Code de l’urbanisme (Code de l’urbanisme, Dalloz, 3ème édition,

commentaires de F. MODERNE et H. CHARLES, 1982, p. 311). On dénombrait une quarantaine de

départements autorisés à appliquer les dispositions des anciens articles L. 142-1 à L. 142-3 du Code de l’urbanisme (ancien article R. 142-1), les décrets d’inscription sur la liste de l’ancien article R. 142-1 s’échelonnant sur une quinzaine d’années.

247 J. B

ASCHWITZ, « La préemption dans les Z.I.F., les Z.A.D. et les périmètres sensibles », Répertoire

Au sein de ces périmètres sensibles, le préfet pouvait établir les zones de préemption après consultation du Conseil général, des conseils municipaux ou des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’urbanisme248. Les zones de préemption pouvaient ne pas correspondre exactement aux périmètres sensibles déterminés au préalable et ne recouvrir qu’une «partie seulement des terrains délimités par lesdits périmètres »249.

À l’issue de cette longue procédure, le préfet bénéficiait du pouvoir d’exercer, au nom du département, le droit de préemption250. La motivation des actes marquant les différentes étapes de cette procédure était obligatoire depuis la circulaire du 10 janvier 1980251, ce qui ne sera pas le cas pour certains actes de la procédure issue de la réforme sur les espaces naturels sensibles de 1985.

Le préfet pouvait, par arrêté, prévoir des interdictions de construire, de démolir ou encore de prévoir l’exécution de certains travaux à l’exception de ceux nécessaires à l’amélioration des exploitations agricoles au sein des périmètres sensibles252. Si la protection apportée à ces espaces était importante, il n’existait pas de définition de la qualité intrinsèque des espaces pouvant être concernés à l’exception de leur caractère sensible253. Cette procédure sectorielle n’est pas la seule, certaines communes pouvant bénéficier d’un traitement particulier par l’instauration de zones d’environnement protégé.

248 Ancien article R. 142-6 du Code de l’urbanisme (Code de l’urbanisme, op. cit., p. 313). 249 Rép. Min. J.O.R.F. Déb. Ass. Nat. 10 juillet 1963, p. 3984.

250 Ancien article R. 142-10 du Code de l’urbanisme (Code de l’urbanisme, ibid, p. 315).

251 Circulaire du 10 janvier 1980 relative à la détermination des actes administratifs à motiver en

application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, J.O.R.F. 15 janvier 1980, p. 475.

252 Ancien article L. 142-3 du Code de l’urbanisme.

253 Cette particularité subsiste après la réforme de 1985 comme nous le démontrerons dans le chapitre

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b. L’instauration de zones d’environne ment protégé dans les communes rurales

La zone d’environnement protégé a été mise en place par la loi du 31 décembre 1976 portant réforme de l’urbanisme254. La condition prérequise était que la commune ne soit pas préalablement couverte par un autre document, tel un projet d’aménagement, d’un plan d’urbanisme, ou un P.O.S.255. Si tel était le cas, le préfet pouvait, sur demande ou après avis de l’organe délibérant de la commune ou du groupement de communes ayant compétence en matière d’urbanisme, instituer de telles zones. Ces dernières avaient, notamment, « pour objet la protection de l’espace rural, des activités agricoles et des paysages ». On constate que, comme pour la protection écologique de la montagne, la préservation des terres agricoles figure dans un même outil. La protection écologique offerte par ce zonage ne réside pas simplement dans les possibilités ouvertes par le caractère non limitatif de l’objet de cette zone, mais aussi de la préservation des paysages. En effet, comme aura l’occasion de le souligner François PRIET256 à propos des directives, on peut affirmer qu’une protection des paysages permet, en règle générale, une protection des habitats naturels qui s’y développent.

Il pouvait être prévu une interdiction de construire, de démolir ou d’exécuter certains travaux à l’exception de ceux destinés à l’amélioration des exploitations agricoles257. On retrouve là les mêmes possibilités de protections que celles offertes dans le cadre de la préservation des périmètres sensibles des départements avec une prévalence des travaux agricoles sur la protection écologique. Michel DISTEL évoque le glissement terminologique de cette zone, puisque le projet de zone à largement évolué durant les débats à l’Assemblée nationale pour passer de « zone de protection des paysages » à « zone de protection de l’espace rural, des activités agricoles et des paysages », avant d’aboutir à la zone d’environnement protégé258. L’emploi du terme environnement pour qualifier cette zone n’est donc pas sans conséquences et traduit la

254 Loi n° 76-1285 du 31 décembre 1976 portant réforme de l’urbanisme, J.O.R.F. du 1er janvier 1977,

p. 4.

255 Ancien article L. 143-1 du Code de l’urbanisme. 256 F. P

RIET, « les directives de protection et de mise en valeur des paysages », Revue juridique du

Centre-Ouest, n° 15, 1995, p. 15.

257 Ancien article L. 143-1 du Code de l’urbanisme. 258 M. D

ISTEL, « les zones d’environnement protégé, commentaire du décret n° 77-754 du 7 juillet 1977 »,

forte vision anthropocentrique de cette zone, même si une vision écologique peut aussi y trouver sa place. Cette conception a été confirmée dès l’origine. En 1978, Antoine GIVAUDAN, chef du service de l’Urbanisme au ministère de l’Équipement et de l’Aménagement du territoire, affirmait que cette zone d’environnement protégée devait comprendre « les grands espaces, apparemment vacants, non cultivables, mal ou non boisés, apparemment dépourvus d’intérêts dominants, néanmoins utiles, voire indispensables du point de vue écologique »259.

Marie-Élisabeth CHASSAGNE260 affirmait en 1981, qu’en pratique, il y avait une infinie variété de zones d’environnement protégé. Certaines étaient limitées à la poursuite d’un seul objectif, telle la protection des paysages ; d’autres, au contraire concouraient à l’accomplissement d’une pluralité d’objectifs. Le territoire de la commune n’était pas toujours couvert intégralement. L’arrêté de classement de ces zones prévoyait parfois des règles particulières d’urbanisme, d’autres se contentaient de renvoyer aux règles en vigueur applicables. Il s’agissait donc d’un outil excessivement souple permettant une approche renouvelée du territoire des communes rurales et de poser les bases de la protection écologique qui se développera par la suite.

Le dossier de la zone ressemblait à celui d’un P.O.S. puisque, selon l’ancien article R. 143-13 du Code de l’urbanisme, il devait comporter un rapport de présentation, un règlement et des documents graphiques. Ces derniers devant, notamment, faire apparaître les secteurs « à l’intérieur desquels sont autorisés, réglementés ou interdits les divers modes d’occupation du sol, les espaces boisés classés à conserver ou à créer, les zones à protéger en raison de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels »261. Selon l’auteur précité, le critère de choix entre les deux outils résidait principalement dans le critère de pression de l’urbanisme. Cet auteur a largement souligné la similitude entre les deux instruments en qualifiant la zone d’environnement protégé de « P.O.S. rural »262. La similitude avec le P.O.S. est d’ailleurs soulignée par l’article qui préside à la suppression de cette zone, puisque l’ancien article L. 143-1 du Code de l’urbanisme dans sa dernière rédaction issue de la

259 A. G

IVAUDAN, « La Z.E.P. Quelque chose de simple pour l’espace rural ? », Revue de droit rural,

1978, p. 94.

260 M.-E. C

HASSAGNE, « Aménagement de l’espace rural : la zone d’environnement protégé », Études

foncières, été 1981, n° 12, p. 10.

261 Ancien article R. 143-15 du Code de l’urbanisme. 262 M.-E. C

HASSAGNE, « L’urbanisme au village, réforme de l’urbanisme et aménagement rural »,

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loi du 7 janvier 1983263 précisait que ces zones devaient être remplacées par un P.O.S. dans un délai de trois ans après l’entrée en vigueur de ladite. À l’issue de ce délai, ces zones ne pouvaient plus produire d’effets264. Ainsi, la décentralisation consacre la prévalence du P.O.S. pour parvenir à une protection écologique dans les communes, fussent-elles rurales.

La décentralisation aura, à bien des égards, une influence considérable et bénéfique sur l’intégration des considérations écologiques par le droit de l’urbanisme. Néanmoins, on peut constater que cette intégration ne cessera d’être renforcée postérieurement à la décentralisation et requiert de plus en plus le recours aux zonages écologiques

B. Le renforcement ultérieu r d u principe d’intég ration de s préoccupations écolo gique s en droit de l’urbanisme par le recours prédominant aux zonage s écolo gique s

La prise en considération des préoccupations écologiques en droit de l’urbanisme est indubitablement marquée par le sceau de la décentralisation. Le législateur a procédé au renforcement constant de l’intégration du souci écologique en créant diverses obligations notamment dans la mise en œuvre des différents documents d’urbanisme (1).

Ce renforcement se traduit principalement par le recours à l’instauration de zonages écologiques (2).

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