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CONCLUSION DU TITRE

Paragraphe 1. La structure de la commission

362. Avant d’aborder la structure de la commission, il convient de noter que cette entité a

créé un site internet sonorisé et très bien fourni. S’y trouvent mis en ligne les textes, les recommandations, les rapports de la Commission et des centaines de décisions judiciaires accompagnées de sommaires analytiques. Pour revenir à notre sujet, nous consacrerons cette partie à la présentation générale de la commission, telle que définie par la loi, quant à son organisation et à sa mission d’une part (I), et à ses modalités de fonctionnement d’autre part (II).

I. L’organisation et les missions

363. Il convient de développer l’organisation de cette Commission (A) avant d’envisager

les attributions et rôles qui lui ont été confiés par le Code de la consommation (B).

A. L’organisation

364. Nous aborderons la composition (a) et les nominations ayant lieu (b) en vue de la

formation de cette commission.

a. La composition

365. C’est l’article R. 132-3 du Code de la consommation qui détermine la composition de

la Commission des clauses abusives, instituée par l'article L. 132-2. Celle-ci est composée de treize membres : des magistrats, des personnalités qualifiées en droit ou technique des contrats, des représentants des consommateurs (quatre) et des représentants des professionnels

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(quatre). « La fonction de commissaire du Gouvernement est exercée par le directeur général

de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou son représentant ».

b. Les nominations

366. Créé par le décret n° 2010-1221 du 18 octobre 2010, l’article R. 534-2 du Code la

consommation dispose que « le président et les membres de la Commission sont nommés par

arrêté du ministre chargé de la consommation pour un mandat de trois ans renouvelable une fois. Cet arrêté désigne un suppléant pour chaque membre titulaire à l'exception du président. La nomination des magistrats est faite sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice ». Cet article ajoute que « tout membre de la Commission ne peut prendre part aux délibérations lorsqu'il a un intérêt personnel à l'affaire qui en est l'objet ou s'il représente ou a représenté moins de cinq ans avant la délibération une des parties intéressées».

B. Les missions

367. Avant d’aborder les trois missions exercées par la Commission des clauses abusives

(b), nous expliquerons les raisons pour lesquelles cette mission a été qualifiée de préventive (a).

a. Une mission préventive

368. M. Dominique Ponsot met en lumière « l’originalité de l’approche française

initiale »425. Il explique cette originalité par le« fait que, au départ, le dispositif français de

lutte contre les clauses abusives a reposé sur une approche préventive et administrative : à l’origine, en effet, le législateur français a préféré une réponse administrative à une réponse judiciaire ». Il poursuit : « Les contrats dans lesquels se retrouvent les clauses abusives sont, dans l’écrasante majorité des cas, des contrats types proposés par des professionnels (…), il faut une réponse qui ne soit pas seulement individuelle, au cas par cas, mais une réponse d’ensemble et, surtout une réponse unique ». À ce souci d’unanimité, s’ajoute un souci de

pédagogie qui « permettr [ait] aux professionnels de connaître par avance les clauses à

425 Dominique Ponsot, La protection du consommateur des clauses abusives, Colloque francophone régional La

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éviter, et donc de renforcer la sécurité juridique, mais aussi mieux alerter les consommateurs, par l’intermédiaire des associations de consommateurs ».

b. La triple mission

369. Depuis l’origine, une triple mission est assignée à la Commission : celle d’aviser le

Conseil d’État (1), celle d’examiner les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels (2) et enfin celle d’aviser la juridiction à l'occasion d'une instance (3).

1. L’avis adressé au Conseil d’état

370. Suivant les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, la

Commission est appelée à donner son avis, préalablement à l’adoption de décrets en Conseil d’État, ayant pour objet de déterminer des types de clauses devant être regardées comme abusives au sens de la loi. La Commission avait rarement exercé cette mission426 jusqu'à la loi

de modernisation de l’économie précitée, qui a modifié l’article L. 132-1 du Code de la consommation, en annonçant l'arrivée de dispositions réglementaires fixant des clauses noires et des clauses grises. Par application de cette modification, un décret427 a été pris au sein du

Conseil d'État après avis de la Commission « déterminant une liste de clauses présumées

abusives ; en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse. Un décret pris dans les mêmes conditions détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa » (article L. 132-1 du Code de la consommation).

En conséquence de ces deux alinéas, sont énumérées les clauses « interdites » ou « présumées

abusives » des articles R. 132-1 et R. 132-2 du Code de la consommation.

2. L’examen des modèles de conventions

371. De plus, la Commission connaît des modèles de convention habituellement proposés

par les professionnels aux consommateurs afin de rechercher si ces documents contiennent

426 Elle l’avait faite par un décret interdisant deux types de clause (1978) et par un autre interdisant un seul type de clause (2005).

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des clauses abusives. Elle est ainsi appelée à émettre des recommandations (non pas des avis), dont nous observerons ultérieurement l’effet normatif, et ce, en vue de la suppression ou de la modification des clauses qui, dans ces modèles de convention, présentent, selon son appréciation, un caractère abusif, selon les articles L. 134-1 et L. 534-3 du Code de la consommation. La Commission doit alors établir chaque année un rapport de cette activité. À ce jour, celle-ci en a émis 74 dans des domaines très variés, allant aussi bien des achats de biens de consommation courante, que de biens immobiliers ou encore d’activités de services qui connaissent une expansion considérable et nécessitent une vigilance particulière du point de vue de la protection des consommateurs, tels les services bancaires et les services

d’assurance428. Une recommandation de synthèse no 91-02 du 23 mars 1990, publiée le 6

septembre 1991429, semble plus particulièrement importante, même si elle a été publiée avant

la réforme de 1995.

La Commission a aussi « « stigmatisé » environ 1.000 clauses, notamment dans les domaines

de la téléphonie, de la banque, de l’assurance, du commerce électronique, de l’enseignement,

des voyages, de l’hébergement des personnes âgées »430. « Ces recommandations étaient

logiquement destinées avant tout au Ministre chargé de la consommation auprès duquel la Commission était – et est toujours – placée. Pourquoi lui adresser ces recommandations ? Pour que celui-ci puisse, le cas échéant, enclencher le processus d’édiction de décrets d’interdiction de clauses par le pouvoir réglementaire. La seule source formelle de ces interdictions de clauses abusives était les décrets, et les recommandations étaient appelées à se trouver en amont de ceux-ci : elles n’avaient nullement vocation à être elles-mêmes des

sources formelles » 431 . En revanche, bien qu’aucune recommandation n’ait eu le

428 * En ce qui concerne l’assurance :

- Recomm. no 80-02 sur la continuation de l’assurance en cas de vente immobilière. - Recomm. no85-04 sur l’assurance multirisque habitation, BOCC 6 déc. 1985. - Recomm. no 89-01 sur l’assurance des véhicules de tourisme, BOCC 14 juill. 1989. - Recomm. no 90-01 sur l’assurance complémentaire à un crédit, BOCC 28 août 1990. - Recomm. no 90-02 sur l’assurance dommages-ouvrages, BOCC 28 août 1990.

- Recomm. no 2002-03 relative aux contrats d’assurance de protection juridique, BOCC 3 juin 2002. • En ce qui concerne les conventions de compte de dépôt :

- Recomm. no 2005-02, BOCCRF 20 sept. 2005. • En ce qui concerne les cartes bancaires :

- Recomm. no 94-02 relatives aux contrats porteurs des cartes de paiement assorties ou non d’un crédit, BOCCRF 27 sept. 1994.

429 BOCCRF 6 sept. 1991, p. 271.

430 Colloque du trentenaire de la Comm. clauses abusives, Contribution de Françoise Kamara, préc. no 52. 431 Colloque du trentenaire de la Comm. clauses abusives, Contribution de Laurent Leveneur, préc. no 52.

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prolongement réglementaire que le système permettait, M. Patrice Jourdain432 observe que

dans ses recommandations, la Commission des clauses abusives cherche si l’équilibre contractuel est réalisé entre le professionnel et le consommateur, notamment en ce qui concerne le consentement de ce dernier, et les abus de pouvoir de professionnel soit dans la formation du contrat soit dans son exécution.

3. L’avis adressé aux juridictions

372. « La Commission peut être saisie pour avis lorsque à l'occasion d'une instance le

caractère abusif d'une clause contractuelle est soulevé. Le juge compétent demande à la commission, par décision non susceptible de recours, son avis sur le caractère abusif de cette clause tel que défini à l’article L. 132-1. L’avis ne lie pas le juge, comme nous allons le voir en ce qui suit. La Commission fait connaître son avis dans un délai maximum de trois mois à compter de sa saisine. Il est sursis à toute décision sur le fond de l’affaire jusqu'à réception de l'avis de la Commission ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai de trois mois susmentionné. Toutefois, les mesures urgentes ou conservatoires nécessaires peuvent être

prises », ainsi précisé par l’article R. 534-4 du Code de la consommation433.

II. Les modalités de fonctionnement

373. En plus des articles du Code de la consommation, la Commission établit un règlement

intérieur publié au Bulletin Officiel de la Concurrence et de la consommation434, qui définit

les conditions dans lesquelles elle fonctionne, et tout cela variant autour de deux points essentiels : la tenue des séances d'un côté (A) et la répartition des tâches de l’autre côté (B).

A. La tenue des séances

374. La Commission siège en formation plénière ou en une ou plusieurs formations

restreintes composées du président ou du vice-président et d'au moins six autres de ses membres désignés à cet effet, et ceci d'après l'article R. 534-3 du Code de la consommation.

432 P. Jourdain, La doctrine de la commission, La protection des consommateurs contre les clauses abusives, Rev. Conc. Consom., sept.-oct. 1998, no 105, p. 23.

433 L’usage de cet avis par les juges sera largement analysé dans la 2ème partie de notre recherche : § no 603s. 434 BOCC 28 janv.1994, p. 31.

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En outre, des rapporteurs particuliers peuvent être désignés par le président à raison de leurs compétences. Ajoutons que les parties intéressées peuvent demander à être entendues avant le délibéré sauf lorsqu’est examinée une saisine judiciaire. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante.

B. La répartition des tâches

375. Le président répartit les affaires qu'il n'entend pas réserver à la formation plénière

entre les formations restreintes. Il répartit avec le secrétaire général les affaires entre les rapporteurs. Les membres de la Commission et les rapporteurs peuvent entendre toute personne susceptible d'apporter des informations sur les affaires dont ils ont la charge et se faire communiquer tout document nécessaire à l'accomplissement de leur mission. L’article R. 534-2 du Code de la consommation précise que « tout membre de la Commission ne peut

prendre part aux délibérations lorsqu'il a un intérêt personnel à l'affaire qui en est l'objet ou s'il représente ou a représenté moins de cinq ans avant la délibération une des parties intéressées ».