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CONCLUSION DU TITRE

Paragraphe 2. Les contributions de la Commission des clauses abusives

A. Le pouvoir arbitraire

378. Comme nous l’avons déjà vu, les contrats bancaires et les contrats d’assurance sont

des contrats d’adhésion. Par conséquent, les deux établissements concernés ont un pouvoir arbitraire qui surgit surtout dans les contrats qu’ils signent, que cela soit en matière bancaire (a) ou bien en matière d’assurance (b).

a. En matière bancaire

379. Trois clauses sont à étudier dans cette partie : celle relative à la délivrance du chéquier

(1), celle qui est relative aux paiements permanents (2), et enfin, la dernière qui concerne les dépôts dans les guichets automatiques (3).

1. La clause concernant la délivrance du chéquier (Recomm. pt. 3)438

380. Dans beaucoup de conventions de compte, l’organisme de crédit se réserve le droit de

refuser de délivrer un chéquier à son client. Ce droit n’est pas contesté par la Commission mais celle-ci recommande que ce refus soit motivé. En effet, ne pas motiver le refus de délivrer le chéquier relève de l’arbitraire de l’établissement de crédit. Le client peut légitimement croire que le fait de déposer son argent auprès d’un établissement de crédit implique le droit de disposer d’un chéquier alors que cet établissement peut l’en priver sans indication de motifs.

438 Recommande que soient éliminées des conventions de compte de dépôt souscrites par des consommateurs ou non professionnels, les clauses ayant pour objet ou pour effet : « 3 - d'accorder à l'établissement de crédit le

droit de refuser la remise de chéquier, sans motiver sa décision», Recomm. relative aux conventions de compte

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2. La clause concernant les paiements permanents (Recomm. pt. 5)439

381. Ces paiements permanents concernent soit des autorisations de prélèvement bancaire,

soit des virements permanents en faveur de tel ou tel bénéficiaire. Pour que le titulaire du compte puisse interrompre ces paiements permanents, les établissements de crédit exigent un préavis, ce qui se comprend sans difficulté. Ce que demande la Commission, c’est que les délais des préavis correspondent aux impératifs qu’impose la technique.

3. La clause concernant les dépôts dans les guichets automatiques (Recomm. pt. 7)440

382. Lors d’un tel dépôt dans les guichets automatiques, il est délivré un ticket qui est censé

indiquer le montant du dépôt. Le droit de la preuve conduirait à dire qu’il appartient à l’établissement de crédit de démontrer que le montant inscrit sur le ticket de dépôt ne correspond pas à la réalité. Ce ticket doit en effet être assimilé à un reçu délivré par le dépositaire puisque c’est une « machine » lui appartenant qui le délivre. Mais, la clause critiquée par la Commission refuse à ce dépôt valeur de preuve et décide que le montant ne sera établi que par l’établissement au vu de l’inventaire qu’il en fera. On voit par cette clause, le peu de confiance que l’établissement fait à l’automatisme. Qu’il y ait méfiance, ou doute, que le ticket ne puisse faire preuve à lui seul, que l’établissement de crédit veuille inverser la charge de la preuve, on peut le comprendre mais de là à refuser que le ticket de dépôt ait une quelconque valeur de preuve, la Commission n’a pu l’admettre. C’est pourquoi elle considère que le déposant doit pouvoir rapporter la preuve que le montant inscrit sur le ticket de dépôt est exact et correspond au montant déposé. Prétendre le contraire serait trop favoriser de possibles manœuvres frauduleuses.

439 Recommande que soient éliminées des conventions de compte de dépôt …, les clauses ayant pour objet ou pour effet : «5 - De prévoir des délais de préavis pour la résiliation d'un ordre permanent de paiement du client,

d'une durée non justifiée par des impératifs techniques », Recomm. relative aux conventions de compte de dépôt.

440 Recommande que soient éliminées des conventions de compte de dépôt …, les clauses ayant pour objet ou pour effet : «7 - De prévoir que le montant du dépôt à un guichet automatique sera fixé exclusivement par

l'inventaire de l'établissement de crédit, sans laisser au client la possibilité de rapporter la preuve de la véracité des mentions du ticket de dépôt », Recomm. relative aux conventions de compte de dépôt.

HAMMOUD May| Thèse de doctorat | décembre 2012

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b. En matière d’assurance

383. Les clauses mentionnées dans la recommandation relative aux contrats d'assurance de

protection juridique et qui tombent sous le champ du pouvoir arbitraire concernent deux domaines distincts : la déclaration du sinistre (1) et le déroulement du procès (2).

1. La déclaration du sinistre

i. Les obligations de l'assuré (Recomm. pt. 1)441

384. « Certains contrats laissent à l'appréciation de l'assureur le délai pendant lequel

l'assuré est tenu de faire sa déclaration de sinistre sous peine de déchéance de la garantie, alors que l'article L. 113-2 du Code des assurances prévoit un délai minimum d'ordre public qui ne peut être inférieur à cinq jours ouvrés ». La Commission des clauses abusives conclut

qu'une telle clause est de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et par conséquent, elle l’a déclaré comme clause abusive.

ii. Le délai imposé à l'assuré pour déclarer le sinistre (Recomm. pt. 2)442

385. Sachant que dans les contrats d’assurance, le point de départ du délai imposé à l'assuré

pour déclarer le sinistre sous peine de déchéance de la garantie est “l'origine du sinistre” ; qu'une telle clause a pour effet de priver l'assuré du bénéfice de la garantie dans le cas où il n'aurait pas eu connaissance de la survenance du sinistre dès son origine ; qu'en outre, conformément à l'article L. 113-2 du Code des assurances, la déchéance ne peut être prononcée que si l'assureur prouve que le retard lui a causé un préjudice et si l'assuré ne se prévaut pas de la force majeure ; qu'en conséquence, cette clause crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur et est déclarée abusive par la commission.

441 Recommande que soient éliminées des contrats d'assurance de protection juridique les clauses ayant pour objet ou pour effet : « 1 - De laisser croire au consommateur qu'il doit, à peine de déchéance, déclarer son

sinistre dans un délai inférieur à celui de cinq jours prévu par la loi», Recomm. relative aux contrats

d’assurance de protection juridique.

442 Recommande que soient éliminées des contrats d'assurance de protection juridique les clauses ayant pour objet ou pour effet : « 2 - d'imposer, sous peine de déchéance automatique de la garantie, "l'origine du sinistre"

comme point de départ du délai pour la déclaration de sinistre par l'assuré», Recomm. relative aux contrats

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iii. La déchéance automatique de la garantie (Recomm. pt. 2)443

386. Nous notons que certains contrats d’assurance stipulent fréquemment, par exemple,

que « vous devez respecter les obligations énumérées ci-après ; à défaut vous perdrez le

bénéfice des garanties de votre contrat ; vous devez déclarer à (votre assureur) les litiges dont vous avez connaissance dans les meilleurs délais et par écrit. Les déclarations tardives ou postérieures à la date de résiliation du contrat ne sont pas garanties », laissent croire à

l'assuré que la déchéance de la garantie est automatiquement encourue, même en l'absence de préjudice pour l’assureur et si l’assuré ne se prévaut pas de la force majeure. Un autre exemple de clauses qui mènent à la déchéance de la garantie se retrouve dans la majorité de contrats, prévoyant que l'assuré ne peut pas saisir d'avocat sans avoir préalablement soit déclaré le sinistre, soit consulté le spécialiste de l'assureur, à peine de déchéance de la garantie. Parce qu’en contradiction avec les dispositions de l'article L. 113-2 du Code des assurances, la Commission les considère comme clauses abusives.

2. Le déroulement du procès

i. Le libre choix de l’avocat (Recomm. pt. 5)444

387. Considérant que la liberté de choix de l'avocat par l'assuré est expressément prévue par

l’article L. 127-3 du Code des assurances, la Commission considère que les clauses qui portent atteinte au libre choix de l’avocat sont illicites, et que, maintenues dans les contrats, elles sont abusives. Parmi ces clauses, il y a celle qui prévoit que le choix de l’avocat appartient à l’assureur dès lors que plusieurs assurés ont des intérêts identiques dans le même différend, ou bien même, celle qui prévoit que, si plusieurs assurés ont des intérêts identiques dans un même litige, l’assureur leur impose un avocat unique. De même, certaines clauses prévoient que l'assuré ne peut pas choisir son avocat si les honoraires de celui-ci ne sont pas préalablement acceptés par l’assureur, ou que le montant susceptible d'être accepté par l'assureur n'est pas toujours connu par l’assuré lors de la souscription du contrat ; quelques- unes prévoient même que la prise en charge par l'assureur des frais d'avocat est fondée sur une

443 Recommande que soient éliminées des contrats d'assurance de protection juridique les clauses ayant pour objet ou pour effet : « 3 - De laisser croire au consommateur que la déchéance de la garantie peut être

automatique, sans que l'assureur ait à justifier d'un préjudice», Recomm. relative aux contrats d’assurance de

protection juridique.

444 Recommande que soient éliminées des contrats d'assurance de protection juridique les clauses ayant pour objet ou pour effet : « 5 - De limiter, de quelque manière que ce soit, la liberté de choix de l'avocat par

HAMMOUD May| Thèse de doctorat | décembre 2012

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évaluation non connue par l'assuré lors de la formation du contrat; qu'ainsi il est stipulé que « l'assureur remboursera ou prendra en charge les honoraires d'avocat dans la limite du

barème librement négocié, à la vue du dossier, entre l'avocat et celui de l'assureur ».

ii. La direction du procès (Recomm. pt. 11)445

388. Considérant qu'un contrat confère au seul assureur la direction du procès ; qu'une telle

clause, qui ne réserve pas à l'assuré la possibilité d'intervenir pour faire valoir ses droits, s'il y a intérêt, est de nature à créer un déséquilibre significatif, et est abusive par conséquent.