En Bolivie, la population indigène, par sa condition ethnolinguistique, comprend près de 5 360 000 personnes, soit 66,4 % de la population totale. La population indigène est majo‐ ritairement quechua (50,3 %) et aymara (39,8 %) ; elle est surtout installée dans les dépar‐ tements de l’Altiplano. Ces communautés sont organisées en ayllus et markas. Des organi‐ sations comme le Conseil des Ayllus et Markas du Qullasuyu (Conamaq) ont commencé un processus de retour à des gouvernements autochtones dans certains départements comme ceux d’Oruro, de La Paz, de Cochabamba, de Chuquisaca et de Potosi.
Au troisième trimestre 2007, l’économie nationale a enregistré une croissance du produit intérieur brut de 4,03 %. Les principaux acteurs à l’origine de cette croissance étaient le bâtiment, les établissements financiers, les assurances, l’immobilier, les services aux en‐ treprises, les transports et les communications, et l’industrie manufacturée. Toutefois, les activités agricoles, d’élevage, de sylviculture, de chasse et de pêche ont subi une chute en raison du phénomène el Niño et du retour de l’hiver (IICA, 2007).
L’état environnemental du pays est très compliqué car lié à des problèmes nécessitant beaucoup d’attention, mais qui, au contraire, dans un contexte de développement, sont sous‐estimés, voire méprisés, ce qui les aggrave. On pourrait dire, non sans sarcasme, que le pays est en phase avec la grave crise environnementale mondiale.
Les ressources naturelles des forêts (flore et faune), dont les espèces se comptent par mil‐ liers sur l’ensemble de la Bolivie, se trouvent souvent en situation de risque, avec un grand nombre d’espèces dans un état critique, quasiment au bord de l’extinction. Ainsi, sur les 3 000 espèces de vertébrés sylvestres dans le pays, la totalité est menacée et environ 70
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espèces sont dans un état critique. Ces proportions sont les mêmes pour les espèces de plantes (Ibisch et Merida, 2003).
Certaines études macrogéographiques de la FAO (Brockman, 1986 ; Montes de Oca, 1997 ; Muñoz Reyes, 1980), ainsi que d’autres recherches et évaluations spécifiques réalisées par différents auteurs dans quelques zones de la région andine bolivienne, montrent comment la région andine bolivienne, en étant très vaste, renferme des sols très variés, aux condi‐ tions différentes et avec des degrés de conservation contrastés. Cependant, dans la plus grande partie de la région, un processus d’érosion est incontestable, concernant près des deux tiers des terres, avec, selon des évaluations récentes, des caractéristiques dyna‐ miques, voire accélérées dans certaines régions. Les terres dégradées de la Bolivie couvri‐ raient près de 12 % de la superficie totale du territoire (12,8 millions d’hectares). Parmi ces terres, 73 % présentent une perte de la couche superficielle à cause, pour les deux tiers, de l’érosion hydrique et pour le reste de l’érosion éolienne. De plus, 13 % ont subi des pertes en nutriments dus à une détérioration chimique du sol. Toutefois, l’érosion par la déforma‐ tion du terrain, la détérioration physique, comme le compactage, l’encroûtement des sols ou la salinisation, semblent affecter moins de régions.
D’autre part, parmi les principales causes de détérioration des sols, il faut mentionner la déforestation de 4,4 millions d’hectares (35 % du total détérioré), le surpâturage avec près de 7 millions d’hectares (54 %) et les activités agricoles sur 1,2 million d’hectares (10 %). Ces dernières activités seraient responsables de l’érosion hydrique de 0,7 million d’hectares et de la détérioration chimique de 0,5 million d’hectares (Morales, 2002). Dans le même temps, l’Altiplano central et du Sud ont des sols qui présentent des pro‐ blèmes localisés de salinisation. Dans cette première région, des sols salins se trouvent dans une sous‐zone près de la rivière Desaguadero, avec une augmentation qui passe de 0,14 gramme de sel par kilogramme de sol, dans la sous‐zone arbustive des collines, à 40 grammes. Dans les plaines où la végétation est dispersée, il existe un risque d’expansion des sols salins en cas d’utilisation intensive de ces derniers (Salm et Gehler, 1987).
Sur les bords des lacs Titicaca (La Paz) et Poopó (Oruro), ainsi que de la rivière Desaguade‐ ro qui les relie, il y a de nombreuses petites rivières (par exemple Escoma, Mauri, Turco, Lauca) issues de la fonte des glaces des cordillères orientale et occidentale qui traversent une partie de l’Altiplano. Il existe aussi quelques petits lacs d’altitude alimentés par des glaciers, dont les eaux s’écoulent sur le plateau, ainsi que de nombreux ruisseaux et sources qui surgissent à différents endroits de l’Altiplano. Le potentiel en eaux souterraines est également important, même si d’après des études, les principales nappes aquifères se trouvent entre 40 et 160 mètres de profondeur, ce qui complique leur utilisation par des méthodes et des énergies conventionnelles. Dans de nombreuses localités, il est possible de trouver des eaux minérales et chaudes, comme à Viscachani, Capachos et Ollague. Aujourd’hui, sur l’Altiplano, il existe 30 000 hectares irrigués, dont 3 800 correspondent à des systèmes de développement (Huarina‐Peñas et Araca) et 4 500 se situent dans l’ancien système d’irrigation de Tacagua, en cours de réhabilitation. La plupart des systèmes exis‐ tants sont petits, avec une irrigation saisonnière très peu efficace. Les méthodes de captage sont rudimentaires, généralement en prise directe sur les cours d’eau. Les conduits sont pour la plupart des canaux en terre sans revêtement, et la distribution est surtout réalisée à l’aide de sillons et de rigoles, d’où une faible efficacité de l’irrigation dans son ensemble. Il existe aussi quelques problèmes isolés de qualité de l’eau, du fait de la contamination
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causée par des résidus provenant des mines et des problèmes de salinité dus à l’utilisation de l’eau de la rivière Desaguadero, surtout dans le complexe d’irrigation de Tacagua. Cer‐ tains auteurs considèrent que le faible captage des ressources du bassin qui couvre l’Altiplano cache un potentiel considérable de ressources hydriques non utilisées à cause d’un manque d’investissements, d’études spécifiques, de soutien technique et de déve‐ loppement de l’irrigation (Morales, 2002).
Parmi les pâturages caractéristiques de l’Altiplano, on trouve la toundra bofedales ou les tourbières, petites zones de sols hydromorphes (saturés régulièrement d’eau) recouvertes de plantes aquatiques (disticha et plantain), formant un tapis de quelques centimètres d’épaisseur, parsemé de nombreuses flaques où poussent quelques monocotylédones rhi‐ zomateuses des genres Carex, Calamagrostis, Gentiana et Werneria, et d’autres plantes, comme la plante fourragère caractéristique des bords du lac Titicaca, le jonc Scirpus ripa‐ rius (Lara, 1985, cité par Brockman, 1986). Les données de l’Institut national des statistiques (INE, 2002) montrent une hausse record de la couverture en eau potable entre 1996 et 2002, mais elles indiquent aussi une diffé‐ rence entre les zones urbaines et rurales. La distribution des grandes villes et des agglomé‐ rations intermédiaires provient de réserves superficielles et souterraines, alors qu’en zone rurale il est plus difficile d’améliorer la couverture à cause de la dispersion des communau‐ tés et du manque de moyens pour faire face à ce problème. De plus, il y a peu de données sur l’usage industriel des eaux de la région andine, les prin‐ cipaux utilisateurs industriels étant les tanneurs, les fabriques de détergents, les industries textiles, les producteurs de levures et de bières, ainsi que les mines qui rejettent en zone rurale 31,5 millions de mètres cubes par an de déchets. Il est d’ailleurs difficile d’en déter‐ miner la quantité car tout dépend du type de processus et du minerai traité. Les espèces végétales les plus communes de l’Altiplano sont la tola (Baccharis tola), la sa‐ cha tola (Baccharis microphylla), l’añahuaya (Adesmia spinosissima), l’ichu (Stipa ichu), la cebadilla (Bromus unioloides), le queñua (Polylepis incana), la zapatilla (Calceolaria parvi‐ folia), la tacarcaya (Cassia hookeriana), la yarteta (Azorella glabra), le cactus achuma (Tri‐ chocereus bridgesii), la paja brava (Stipa pungens) et la muña (herbe à perdrix) (Marga‐ rycarpus stesus) (Montes de Oca et Colque, 1989 ; Muñoz Reyes, 1980). Il existe de grandes variétés, surtout de tubercules, dont la biodiversité est conservée au sein des communau‐ tés paysannes de la région andine, même si les terribles sécheresses de ces dernières an‐ nées ont probablement contribué à en faire disparaître quelques‐unes. D’autre part, dans la région andine, et plus particulièrement dans les départements Occi‐ dentales‐Potosi, La Paz et Oruro, se trouvent les plus grandes richesses minérales du pays avec entre autres des mines d’étain (quatrième producteur mondial), d’argent, de cuivre, de tungstène, d’antimoine et de zinc
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En ce qui concerne les hydrocarbures, le pays possède la deuxième plus grande réserve de gaz naturel du monde après le Venezuela, avec 1 300 milliards de mètres cubes de réserves en 2005, dont 700 milliards avérés et 600 milliards probables (surtout dans la zone andine), l’équivalent de 150 000 millions de dollars. Actuellement, l’activité gazière est la principale source de devises de l’économie, et le gaz est essentiellement exporté vers le Brésil et l’Argentine. Traditionnellement, Santa Cruz et Cochabamba étaient les régions avec le plus gros potentiel, mais depuis ces dernières années Tarija s’est lancée dans la production de gaz et concentre les plus grands champs gaziers, avec 87 % des réserves de gaz naturel duAltiplano, Bolivie
pays, même si les données de la société YPFB indiquent que seulement 10 % des zones po‐ tentielles ont été exploitées. Il est donc presque certain que des réserves encore plus grandes existent, aussi bien en gaz qu’en pétrole. Parmi ces zones se trouvent le nord de La Paz, le Pantanal, la région sous‐andine nord et sud, Beni et également l’Altiplano (El Diario, 2008). La Bolivie possède en outre le plus grand gisement de lithium au monde, situé dans le désert de sel d’Uyuni, la plus grande plaine de sel de la planète. L’aridité est le résultat de l’utilisation inappropriée de la terre, notamment avec la surex‐ ploitation des ressources naturelles, et d’un contexte climatique difficile. Quatre activités humaines en sont les causes les plus directes : les cultures excessives qui usent les sols, le surpâturage et la déforestation qui détruisent la couverture végétale qui protège les sols de l’érosion, et les drainages incorrects des systèmes d’irrigation qui provoquent la salini‐ sation des sols. De plus, le manque d’éducation et de connaissances adaptées, la petite propriété, les mauvaises conditions commerciales, typiques des pays en développement, et d’autres facteurs socioéconomiques et politiques contribuent à amplifier le processus de désertification. Par conséquent, les habitants de la région andine de l’Altiplano n’ont pas d’autre alternative que celle d’exploiter leurs ressources, ce qui est considéré comme une avancée de l’agriculture mais qui les oblige à migrer vers les villes. En l’absence de stratégies de remplacement, les agriculteurs utilisent de façon intensive les ressources naturelles (comme les cultures de subsistance, l’eau pour l’hygiène et se désal‐ térer, voire le bois comme source d’énergie) qui sont peu à peu surexploitées et ne peu‐ vent plus se régénérer naturellement. Ainsi, la dégradation environnementale s’accroît et la désertification comme la pauvreté progressent. En Bolivie, les surfaces érodées par l’action humaine représentent environ 46 % du total ; il s’agit principalement des activités agricoles et d’élevage (qui entraînent la déforestation) des populations humaines des Andes (concentrées dans la puna humide, la puna semi‐ humide, la puna sèche et les bois secs interandins). Ces dernières années, ces activités ont très fortement détérioré les écosystèmes naturels.