centrale du Chili exercent différents types de pression sur le territoire (tableau 1), con‐ formément à leur poids économique national. En 2002, elles représentent près de 62 % du total du produit géographique brut national (PGB). Parmi les secteurs les plus impor‐ tants, il faut citer les transports (66,36 %), avec notamment le système portuaire central (ports de Ventanas ‐ Quintero, Valparaíso et San Antonio) et la gare routière des Andes ‐
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Libertadores. De par sa localisation, la région est une zone ayant bénéficié d’investis‐ sements dans les infrastructures et le développement immobilier, en raison des activités portuaires, industrielles et de services, et favorise les relations commerciales qui existent avec l’Argentine et les pays du Marché commun du Sud (Mercosur).
L’activité commerciale représente 66 % du PGB et reflète nettement le poids de la popula‐ tion installée dans les régions métropolitaines de Santiago et Valparaíso. Il en est de même avec le tourisme qui atteint également 66 % du PGB. La concentration de l’industrie est de 65 % et le dynamisme de la construction représente 60 % de ce produit, avec d’importantes constructions routières, ferroviaires, d’irrigation et de complexes immobi‐ liers résidentiels populaires, de luxe ou pour les classes moyennes. Enfin, l’agriculture, sur‐ tout l’horticulture (fruits et légumes) et la viticulture, représente 37,7 % du PIB, contre 25,4 % pour l’activité minière.
Les activités de l’agroalimentaire, minières, touristiques et de loisirs ont des impacts phy‐ siques, économiques et sociaux. Ainsi, cette surcharge a des conséquences négatives sur l’environnement, avec une destruction de la flore, une perte de la biodiversité et de la va‐ leur naturelle des zones fragiles qui peuvent affecter durablement les conditions de vie de la région. Le morcellement du territoire est associé à l’établissement de résidences secondaires et au tourisme, dans le cadre du concept de terrains de villégiature, c’est‐à‐dire de terrains ou des petites propriétés de 5 000 m2 environ où l’on trouve des petits vergers, des jardins et
une maison avec piscine. Ce type de développement immobilier est présent sur tout le territoire. La nouvelle ruralité métropolitaine se traduit par une domination des caractéris‐ tiques urbaines et plus particulièrement des infrastructures comme les voies de communi‐ cation, l’eau potable, l’électricité, les services de santé, l’éducation, les nouvelles technolo‐ gies (internet et téléphone portable). Par ailleurs, la main‐d’œuvre est devenue mobile et le statut de travailleur agricole a changé pour celui de travailleur temporaire et/ou presta‐ taire de services environnementaux. La pression exercée sur l’eau se manifeste aussi bien à travers la demande de cette nou‐ velle urbanisation en zone rurale qu’à travers l’irrigation nécessaire aux nouvelles planta‐ tions, conséquence des transformations productives de ces trente dernières années. Cette pression, facilitée par la législation en vigueur sur le droit à l’eau, a entraîné des conflits entre les usagers mais a aussi permis de rationaliser son utilisation et d’éviter les tech‐ niques d’irrigation par inondation. D’autre part, les aquifères souterrains ont commencé à être utilisés grâce à des puits artésiens qui atteignent les eaux fossiles, même s’il n’existe pas encore d’études détaillées sur ces dernières. La pression exercée sur les sols par une activité intensive de plantations agro‐industrielles augmente les risques d’érosion et diminue la biodiversité. La structure des propriétés ac‐ compagne ces transformations. Ainsi, d’une part, les grandes propriétés ont été reconsti‐ tuées et ont mis en valeur les terres communes et les sols non irrigués et non cultivés. D’autre part, de grandes propriétés ont été morcelées en petites et moyennes propriétés, faisant place à un phénomène d’urbanisation en milieu rural plus dense (lotissements) ou à des installations moins denses comme les terrains de villégiature. L’augmentation des lotissements et des terrains de villégiature a occasionné le développement d’activités de proximité et la délocalisation d’activités urbaines, comme le commerce, la santé, l’éducation et les centres de technologie et d’industrie (pôles technologiques).
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Tableau 1 : Principales activités économiques et pressions sur l’environnement
mises en regard avec des scénarios futurs
Activités économiques Scénarios futurs
Pression Agricole et sylvicole Minière De pêche Industrielle Immobilière Commerciale Touristique et de villégiature
Développement de l’activité agricole grâce à l’élargissement et à la moderni- sation des frontières productives ; plus forte pression sur les zones monta- gneuses, cordillère de la côte et vallées sèches.
Passage d’une pêche côtière à des fermes marines.
La mise en place d’une aquaculture con- tinentale est attendue.
Localisation de pôles technologiques en zones périurbaines, le long du couloir andin-portuaire.
L’activité immobilière exerce une forte pression sur les espaces fragiles du litto- ral maritime, les berges des fleuves, les montagnes et les cordillères, à la re- cherche de paysages sauvages. L’activité commerciale suit la tendance
de l’immobilier et des grands axes. Le tourisme et les loisirs s’orientent vers
une harmonisation avec l’environnement, conformément aux objectifs définis par l’Unesco.
État Les activités immobilières affectent le sol par leur expansion, et l’eau avec le rejet des eaux usées et des déchets in- dustriels et privés. Cette dynamique s’observe particulièrement dans les zones fragiles du littoral et des pentes de la cordillère de la côte et des Andes. Les conditions environnementales de la
croissance urbaine et de sa distribution spatiale en couches socioéconomiques montrent la ségrégation et l’injustice environnementale (risques naturels et vulnérabilité sociale).
Le processus de transformation de la production modifie l’habitat naturel et les conditions socioéconomiques des ruraux.
Le processus d’urbanisation se diffuse au sein de toute la macrorégion cen- trale.
Le marché apparaît comme le grand responsable de l’usage des sols et des prix du foncier.
Il faut que les ressources hydriques s’améliorent en volume comme en quali- té.
Les monocultures continueront à se dé- velopper de façon durable, surtout sur les pentes montagneuses, jusqu’à des alti- tudes importantes.
Des instruments de planification territo- riale plus intégrés aux objectifs de déve- loppement devraient être créés.
Le respect des nouvelles normes en vi- gueur est attendu, en plus des instru- ments normatifs, indicateurs d’aménagement et de qualité des es- paces urbains et ruraux de la région, ain- si que des conditions de vie des per- sonnes.
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77 Tendance au morcellement des sols
ruraux pour la mise en place de terrains de villégiature.
La croissance et l’expansion urbaines anarchiques montrent l’inefficacité des instruments de planification.
Les nouvelles activités minières profi- tent des cotations des marchés interna- tionaux avec des effets environnemen- taux sur le sol, la flore et la faune. Les activités agropastorales et les im-
portantes monocultures d’avocatiers et de vignes affectent la biodiversité de la région.
La modernisation de l’agriculture (agroalimentaire et agrobusiness) trans- forme l’habitat rural et les conditions socioéconomiques des ruraux. Perte du potentiel agricole des terres
urbanisées.
Réponse Loi-cadre sur l’environnement, règle- ment du contrôle des différents orga- nismes de l’État quant au respect des normes en vigueur, en plus des instru- ments territoriaux.
Il existe des tentatives de participation citoyenne de contrôle, de gestion et de conservation de la biodiversité et du développement durable du territoire. Prise de conscience de la population
pour atteindre un niveau plus élevé de développement durable.
Les relations internationales de com- merce et de coopération technique et financière se développent.
Une plus grande coordination institution- nelle publique sur la gestion de la macro- région est attendue.
Les institutions de l’État se modernisent et se renforcent à partir d’un nouveau schéma de gestion de la macrorégion. Cela devrait permettre de coordonner les entités techniques et politiques chargées de gérer le processus de métropolisation. Une nouvelle loi-cadre sur
l’environnement est attendue, ainsi que des règles qui permettent un meilleur contrôle des différentes activités du pro- cessus de développement.
Un approfondissement du processus démocratique est attendu, sous forme de démocratie participative qui s’implique davantage dans le développement, le contrôle, la gestion et la conservation de la biodiversité, et le développement du- rable du territoire.
Source : Instituto de Geografía, 2008
CONCLUSION
Le cas de la macrorégion centrale du Chili illustre les obstacles d’un développement terri‐ torial intégral et durable. La fragilité environnementale des espaces naturels et la vulnéra‐ bilité sociale et économique limitent de façon plus évidente les possibilités d’activités stric‐ tement locales. Les difficultés de mise en place de mécanismes adaptés de gestion pour mettre en valeur le patrimoine naturel et culturel face aux multiples pressions des activités économiques émergentes se manifestent davantage.
Région centrale, Chili
Construire un développement durable ne passe pas seulement par l’exploitation de nou‐ veaux produits, ni par le suivi de la croissance, mais par la mise en œuvre d’instruments de gestion territoriale qui orientent le développement en fonction des capacités d’utilisation des territoires et des aspirations locales, pour construire le développement avec les popu‐ lations de chacun de ces territoires tout en en assurant la gouvernance. Comme évoqué précédemment, il n’est pas possible de maintenir la situation actuelle des territoires ruraux et d'aller à l’encontre des compétences communales, des instances offi‐ cielles et des élus, principaux acteurs du développement des communes. Le processus de globalisation et de métropolisation va se poursuivre, comme la demande d’espaces natu‐ rels à des fins d’exploitation économique, d’urbanisation et/ou de valorisation socio‐ environnementale. Par conséquent, la gestion des espaces exige une vision territoriale à différentes échelles qui prend en compte la multifonctionnalité et intègre les intérêts des différents acteurs. Pour gérer la diversité naturelle et culturelle des territoires, il est fon‐ damental de construire un dialogue entre les acteurs de la biodiversité comme le suggère l’Unesco. Pour résoudre les conflits présents et futurs, nous devons développer des lan‐ gages et des instruments compris par tous.