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DÉVELOPPEMENT SOCIAL DURABLE DES ÉLEVAGES

Comme nous l’avons montré et de façon générale, les études sur les élevages se limitaient  à analyser leurs indicateurs productifs et économiques ; elles étaient ainsi partielles, secto‐ rielles  ou  monodisciplinaires.  Néanmoins,  l’exploitation  d’élevage  est  un  système  ouvert,  soumis aux influences de l’environnement qui, géré par l’éleveur, doit remplir des objectifs.  Dans  ce  sens,  les  élevages,  en  tant  que  systèmes  sociaux,  sont  dynamiques,  réactifs  ou  évolutifs, ce qui signifie que les caractéristiques les plus importantes apparaissent avec le  temps. Par conséquent, l’étude des systèmes d’élevage exige une prise en compte de ces  variables. 

Un  récent  travail  de  recherche  (Malaquín,  2009)  corrobore  le  fait  que  les  systèmes  d’élevage sont dynamiques. Ils ne sont pas en équilibre et font apparaître des indicateurs,  résultats des décisions qui sont prises. Les transformations de l’élevage mixte dans la ré‐ gion  du  Basalte  uruguayen  ont  été  étudiées  dans  le  cadre  d’une  étude  comparative  d’informations  obtenues  sur  un  ensemble  d’exploitations  en  1994  et  2008  (DIEA‐MGAP,  2008).  Il  s’agit  d’utiliser  une  enquête  qui  a  eu  lieu  sur  15  ans.  En  résumé,  nous  pouvons  affirmer  que  les  caractéristiques  des  familles  d’éleveurs  jouent  un  rôle  fondamental  sur  l’évolution des élevages à long terme.  Les résultats suggèrent l’existence de facteurs qui menacent la continuité des exploitations  d’élevage à long terme et donc le développement durable des écosystèmes pastoraux du  Basalte (Malaquín, 2009). Les exploitations qui se sont maintenues sur la période prise en  compte sont affectées par la présence de facteurs sociaux, comme l’âge des propriétaires  et l’absence de successeurs. Dans de nombreux cas, les successeurs ne sont pas intéressés  par le projet d’exploitation, ils ont un regard très différent sur la conduite de l’élevage, ce  qui devrait sûrement avoir une influence sur l’évolution des propriétés.  

Sur  ce point,  le phénomène  le plus  fréquent est  celui du fractionnement de la  propriété  agropastorale, car l’absence de propriétaire exploitant entraîne des difficultés de gestion et  donc de continuité de l’élevage. L’augmentation significative du prix de la terre et les va‐ leurs  actuelles  des  prix  de  fermages  des  terres  agricoles  et  d’élevage,  qui  dépassent  les  bénéfices obtenus par l’activité d’élevage, ont accentué le phénomène d’atomisation et de  parcellisation  et  menacent  la  continuité  des  exploitations.  D’après  les  propriétaires,  ces  facteurs  ont  été  présents  dans  les  exploitations  qui  ont  cessé  leur  activité,  comme  dans  celles qui perdurent. 

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Ces  résultats  soulèvent  la  question  selon  laquelle  la  continuité  des  élevages  sur  le  long  terme n’est associée qu’à des variables économiques et patrimoniales conventionnelles qui  décrivent les élevages en termes techniques seulement, par exemple la dotation en capital  (terres  et  stocks)  et  l’intensité  d’utilisation  des  sols  (superficies  agricoles,  améliorations  fourragères, etc.). 

Les attentes liées à la succession d’un système d’exploitation dépendent aussi d’un bien‐ être  économique  et  au  sein  du  travail,  ainsi  que  de  la  perception  sociale  qu’ont  d’eux‐ mêmes  les  éleveurs  et  leurs  familles.  Les  bénéfices  obtenus  en  dehors  de  l’exploitation  sont également importants. En effet, ce qui est obtenu grâce à plusieurs activités permet  de renforcer les liens de la famille avec  la ruralité,  y  compris avec la  condition  d’éleveur.  Cela  a  lieu  parce  que  ces  activités  apportent  des  entrées  financières  et  des  liens  sociaux  qui  contribuent à  la  pérennité des  exploitations.  Ce  phénomène  se  manifeste également  dans les régions où l’élevage doute sur son avenir et où les capacités d’augmenter les re‐ venus économiques de la famille, dans ou en dehors de l’exploitation, sont rares, voire là  où la perte des racines culturelles et d’identification avec le métier d’éleveur est plus im‐ portante. 

Les  résultats  de  cette  étude  indiquent  que  l’une  des  qualités  essentielles  d’un  projet  d’exploitation pour pouvoir exister dans la durée est d’être transmissible d’une génération  à une autre. D’autre part, les caractéristiques présentées par l’élevage à temps partiel, ain‐ si que la diversification des activités de l’unité familiale au sein des élevages étudiés mon‐ trent qu’il y a une perte d’identification croissante de la famille avec l’exploitation. Les ex‐ ploitations  d’élevage  sont  influencées  par  des  activés  hors  propriété,  même  lorsque  la  principale  source  de  revenus  des  propriétaires  provient  encore  de  l’élevage.  En  même  temps,  la  réduction  des  activités  hors  propriété  a  coïncidé  avec  un  processus  évident  de  vieillissement des propriétaires, sans changement significatif des comportements adminis‐ tratifs. Dans la plupart des cas, les enfants des propriétaires ne participent pas au projet de  l’exploitation et leurs revenus ne proviennent pas de l’exploitation d’élevage. 

Une évaluation efficace d’un système d’élevage extensif requiert, en plus d’une mesure de  la valeur des indicateurs biotechnologiques (que nous pourrions appeler « sous‐systèmes  de  production »),  une  mesure  du  degré  de  satisfaction  de  l’éleveur  et  de  son  environne‐ ment social immédiat. Il faut également mesurer le degré de contrôle du producteur sur le  fonctionnement du système (sous‐système de décision). 

Un  facteur  additionnel  menace  la  continuité  des  exploitations  d’élevage  à  long  terme.  Il  s’agit  du  manque  de  disponibilité  et  de  la  faible  qualification  du  personnel  salarié.  Cette  étude  montre  que  la  disponibilité  et  la  qualification  de  la  main‐d’œuvre  travaillant  dans  l’élevage peuvent être restrictives pour les élevages, surtout lorsqu’il s’agit d’améliorer le  degré  de  contrôle  du  système  opérationnel  ou  d’incorporer  des  technologies  intensives  demandant de la main‐d’œuvre. 

Dans ce sens, les institutions liées au changement technique, en accord avec les organisa‐ tions d’éleveurs et les décideurs politiques du secteur, font face à une situation complexe,  surtout parce que les salariés ne sont pas attirés par des emplois en zone d’élevage inten‐ sif.  Ce  facteur  est  particulièrement  important  dans  des  régions  faiblement  peuplées  où  l’absence  d’activités  alternatives  contribue  à  l’affaiblissement  du  tissu  social,  tissu  néces‐ saire à la permanence des habitants. 

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CONCLUSION

La prise en compte des facteurs économiques et productifs est insuffisante lorsqu’il s’agit  de  comprendre l’évolution d’un  écosystème social.  Comme nous l’avons montré, le  fonc‐ tionnement  social  est  un  facteur  d’influence  important.  Le  manque  d’attractivité  pour  l’activité d’élevage auprès des nouvelles générations, aussi bien salariées que propriétaires,  joue un rôle croissant, ce qui permet d’affirmer que d’importants changements affecteront  le fonctionnement des exploitations de cette région dans les années à venir. Ces change‐ ments, qui ont déjà eu lieu dans d’autres régions du pays, soulèvent des interrogations très  sérieuses  sur  le  développement  écologique  et  social  durable  d’une  activité  économique  qui paraît aujourd’hui florissante. 

Le développement durable semble être une propriété émergente du système, sur laquelle  les acteurs actuels peuvent influer par leurs actions. Récemment, Knapp et Fernandez Gi‐ menez  (2009)  ont  déclaré  que  la  vitalité  des  réseaux  sociaux  en  milieu  rural  permet  des  échanges et une accumulation de connaissances écologiques qui contribuent au dévelop‐ pement durable de l’écosystème. Dans le même temps, Sabourin (2007) a montré que les  familles rurales sont dépositaires d’une série de valeurs (solidarité) et de pratiques (réci‐ procité) qui sont nécessaires et désirables dans le fonctionnement de la société. À la suite  de ces auteurs, nous pouvons affirmer qu’aussi bien le développement durable écologique  que certaines valeurs sociales sont menacées par les processus de changement que nous  avons décrits. 

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https://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/