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Chapitre 5 – Une méthodologie qualitative pour saisir un objet complexe

5.3 Le recrutement

Le recrutement s’est échelonné sur une période de près de deux ans (du printemps 2015 à l’automne 2016) et plusieurs stratégies ont été utilisées : une relance auprès de personnes répondantes à une enquête quantitative, une diffusion d’une annonce sur Facebook, par l’entremise d’organismes communautaires, des démarches auprès de notre réseau élargi et la méthode boule-de-neige. Cette section présente ces divers modes de recrutement, les stratégies utilisées pour pallier les difficultés de recrutement, ainsi que la prise de contact avec les personnes intéressées à participer à notre projet de recherche.

5.3.1 Divers modes de recrutement

Le recrutement a commencé à l’aide d’une liste de noms de personnes ayant participé au volet quantitatif de l’enquête Unions et désunions conjugales au Québec35 et ayant accepté l’invitation

à participer à un volet qualitatif. Treize personnes correspondant aux critères de sélection ont été contactées, et sur l’ensemble, une femme et son conjoint ont accepté de participer, de même qu’une autre femme.

Une annonce auprès de quatre groupes Facebook de parents de la ville de Montréal36 a aussi été

diffusée. Une vingtaine de personnes se sont montrées intéressées, mais peu d’entre elles correspondaient au profil. Ce moyen a permis de recruter 10 personnes, soit trois femmes, un homme, ainsi que trois couples (trois hommes et trois femmes).

35 Belleau, Hélène et Carmen Lavallée, Unions et désunions conjugales au Québec : regards croisés sur les pratiques et les représentations sociales et juridiques de la vie à deux, Projet de recherche financé par le CRSH (2014-2017),

Institut national de la recherche scientifique (INRS).

36 Il s’agit de groupes Facebook permettant à des parents de partager des trucs liés à la vie familiale : Parents Hochelaga-Maisonneuve, Parents de Rosemont, Parents de Verdun-Lasalle et Parents de Mercier-Anjou.

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La Fédération québécoise des organismes communautaires Famille (FQOCF) a également été sollicitée afin qu’elle invite ses groupes membres des régions de Montréal, de Laval et de la Montérégie à recommander des parents potentiellement intéressés. Nous avons aussi communiqué directement avec quelques organismes dans Lanaudière, ayant un contact dans cette région. Après quelques relances, six entrevues ont été réalisées, soit avec une femme, un homme et deux couples.

Comme nous tenions à rencontrer le plus possible autant d’hommes que de femmes et que l’échantillon était majoritairement composé de femmes après un an de recrutement, un appel a aussi été lancé à des organismes communautaires œuvrant particulièrement auprès de pères ou ayant des activités qui s’adressaient directement à eux. Trois hommes ont ainsi pu été rencontrés. Enfin, les personnes constituant notre réseau élargi ont été mises à contribution afin qu’elles transmettent notre demande dans leur entourage. Quatre femmes et un couple ont ainsi été recrutés. Nous ne connaissions pas ces personnes avant de les rencontrer pour l’entrevue. Il est à noter que l’effet boule-de-neige n’a pas été concluant pour notre projet puisque seulement un couple a été recruté de cette façon. Une affiche a aussi été apposée dans un café à vocation familiale, mais aucune réponse n’a été reçue et l’expérience n’a pas été tentée dans un autre lieu du genre.

5.3.2 Les stratégies pour pallier les difficultés de recrutement

Vouloir rencontrer des personnes moins diplômées, à plus faibles revenus, très occupées, n’est pas chose facile. Une quantité non négligeable d’études qualitatives sur la famille ou les couples, au Québec comme ailleurs au Canada, aux États-Unis ou en Europe37, rapportent les difficultés à

recruter des personnes correspondant à ce profil. Plusieurs chercheurs et chercheuses se contentent donc d’un échantillon moins diversifié que prévu initialement. Cette difficulté explique en partie la durée de la période de terrain. Deux stratégies ont été utilisées afin de pallier les difficultés de recrutement : l’assouplissement de certains critères et l’offre d’une compensation financière.

143 5.3.2.1 L’assouplissement de certains critères

Trois critères ont été modifiés au cours du recrutement. Tout d’abord, les personnes vivant dans un couple où il y avait un ou des enfants issus d’une relation antérieure ont été incluses (cinq couples). Il peut bien sûr y avoir des différences dans la façon de gérer l’argent et de diviser le travail dans ces familles recomposées, mais nous croyons que ces différences, dans le cadre d’une enquête qualitative, n’étaient pas suffisantes pour exclure ces familles. Ensuite, certains couples avaient un revenu combiné plus élevé que 50 000 $/année (entre 60 000 $ et 80 000 $). Ces couples, au nombre de deux, font partie de l’échantillon, puisqu’ils ont effectivement vécu des périodes depuis le début de leur relation où leurs revenus étaient en deçà de ce montant. Enfin, trois personnes ne sont pas nées au Canada : deux hommes sont d’origine latino-américaine et une femme est d’origine française. Seul l’homme d’origine mexicaine est arrivé au Canada adulte. Étant donné les régions facilement accessibles pour la tenue des entretiens (majoritairement la grande région de Montréal), un nombre important de personnes, notamment des familles avec enfants mineurs, sont issues de l’immigration38. Certes, la culture d’origine influence les façons

de voir la famille, l’argent et le travail. Nous avons toutefois remarqué que cette caractéristique ne permet pas, à tout le moins dans notre échantillon, de faire une distinction claire avec les personnes rencontrées nées au Canada.

5.3.2.2 La décision d’offrir une compensation financière

La décision d’offrir une compensation financière de 25 $ aux personnes participantes s’est imposée après les quatre premiers entretiens. Il a été clair après cette première phase de recrutement39 qu’un incitatif financier faciliterait cette partie du travail de terrain : les personnes

rencontrées étant généralement très occupées et ayant des revenus modestes, il semblait pertinent de croire qu’elles participeraient davantage si elles recevaient une compensation pour

38 Selon des statistiques compilées par le ministère de la Famille, « [e]n 2011, 64 % des familles immigrantes avec enfants mineurs au Québec résident dans la région administrative de Montréal […]. En ajoutant les territoires de Laval et de la Montérégie, ces trois régions regroupent 87 % des familles immigrantes avec enfants mineurs ». De plus, les familles immigrantes « représentent près de la moitié des familles avec enfants mineurs à Montréal (48 %) et plus du tiers de celles à Laval (35 %). » (ministère de la Famille, 2016, p. 3)

39 Pour une question d’équité, les quatre premières personnes ayant participé ont reçu rétroactivement la compensation financière. Un appel a été fait pour leur expliquer la situation et organiser la façon de remettre l’argent (en personne à leur domicile ou dans leur boîte aux lettres advenant leur absence).

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leur temps. Un autre facteur a aussi motivé ce choix : étant doctorante et occupant une position privilégiée dans la société, nous trouvions plus équitable de remettre une compensation aux personnes participantes. Le montant remis n’a aucunement changé leur situation financière générale et a plus une valeur symbolique (Piron, 2014). Cependant, la compensation financière a au moins représenté une reconnaissance du temps qu’elles ont généreusement accordé. Une modification au certificat éthique a été proposée et acceptée sur-le-champ avant d’aller de l’avant avec l’offre de compensation financière.

5.3.3 La prise de contact

Selon la façon dont les personnes avaient eu l’information initialement (par un groupe communautaire, par une annonce sur Facebook, par une connaissance commune), le premier contact s’est fait par téléphone, par courriel ou par message Facebook. Il est intéressant de noter qu’à part pour un homme qui a répondu à l’annonce sur une page de parents sur Facebook et les hommes joints par l’entremise d’un organisme communautaire, les autres hommes ont été rencontrés après que leurs conjointes aient pris contact avec nous. Elles organisaient le rendez- vous pour eux et pour elles en même temps40. Tous les hommes semblaient d’accord avec leur

participation.

Au premier contact, nous repassions les critères avec eux ou elles et rappelions l’objectif de la recherche et la durée approximative (plus ou moins 90 minutes, variation selon les personnes et pas de bonne ou de mauvaise durée). Nous offrions aussi de les rencontrer à l’endroit et au moment qui leur convenaient. En général, dès ce moment, le rendez-vous était fixé pour le lendemain ou les jours suivants.