• Aucun résultat trouvé

« J'ai un autre frère [au Mali]. Il a essayé d'avoir le visa, trois fois. Ça fait cinq ans qu'il est en train de chercher [un visa] pour venir [en France]. L'ambassade de France ne lui donne pas de visa. (…) Il ne viendra pas. Il n'a pas de chance pour venir » [Karounga, Malien, 35 ans et agent d’entretien

dans le secteur du nettoyage en CDI au moment de l’entretien].

Ce que dit Karounga ressemble à ce que d'autres m'ont dit aussi. Dans l’entreprise migratoire, la chance est une variable, certes hasardeuse, mais dont il faut tenir compte. La sémantique du jeu s'étend à l'infini. Si l'obtention d'un visa est la voie d'accès au territoire européen, avec tous les jeux qu'elle comporte pour ce qui est de la population étudiée, une autre voie, terrestre-maritime, se substitue à elle, par défaut et redynamise dans le même temps d'anciens tracés173. Certains des migrants rencontrés (soit, neuf au total : Diadié, Diaye, Doumbe, Fily, Komisouko, Massiré, Samba, Seydou, Silamakan) n'ont pas eu d'autres choix que de prendre la route, soit parce qu'ils n'avaient pas réussi à obtenir un visa (c'est le cas de Seydou et de Samba, qui depuis son village de Bouaré Koné est parti en Mauritanie pour travailler et

171 D'une manière toute relative, l'Espagne se dote actuellement d’une politique d'intégration à l'égard de ses

immigrés, notamment avec la mise en place du « Plan Stratégique de Citoyenneté et d’intégration » (PECI) pour les années 2006-2010 et avec la loi du 12 décembre 2009 (la dernière réforme en date). Il s'agit d'une sorte de : « […] programme intégral, visant à étudier l’immigration d’un point de vue sociologique et juridique, avec

l’objectif d’analyser les politiques d’intégration dans l’Union Européenne, en général, et dans l’administration espagnole, en particulier. Ce plan cherche à mettre en œuvre les principes de la politique d’intégration classique : égalité, citoyenneté et inter-culturalité » (La Spina, 2013 : 4).

172 En référence aux travaux d’Anaïk Pian, dont son article paru en 2013 dans la revue Hommes et Migrations, « Des

frontières de la migration aux représentations de l’Europe ». A ce titre, Pian relève l'expression « On a gagné le visa » (p. 12).

173 Voir à ce sujet les articles d'Olivier Pliez (2000, 2002) où il montre comment le Sahara est devenu un espace

d'immigration et de transit par défaut. Les nouvelles configurations migratoires entre l'Afrique noire et le Maghreb imposent une nouvelle lecture méridienne du Sahara.

existe-t-il encore une « noria » de travailleurs immigrés ?

168

chercher un visa qu'il n'a pas obtenu, même après deux ans de recherche), soit parce qu'ils n'avaient pas les moyens de se payer un visa (ce sont les cas de Diadié et de Fily).

« Nouvelles » routes clandestines

Actuellement, l'espace sahélo-saharien (reliant les pays du Maghreb et les pays d'Afrique noire) attire l'intérêt croissant de politiques (notamment dans la priorité accordée à la lutte contre l'immigration clandestine et le trafic d'êtres humains), d’économistes, de sociologues (Antil, Choplin, 2004 ; Bensaâd, 2002, 2003, 2005, 2012 ; Bredeloup, Pliez 2005 ; Pliez, 2000, 2002 ; pour ne citer qu’elles et eux), par les dynamiques urbaines, spatiales et migratoires qui s'y développent. Aussi, dans le même article paru en 2014, déjà cité, Claire Rodier montre-t-elle comment, pour les migrants, les voies d'accès terrestres et maritimes au territoire européen se déplacent en fonction du verrouillage de certains points d'accès. C'est ce qu'elle appelle « l'effet ping-pong »174. De fait, d'un côté, il y a la politique commune de l'UE, qui cherche à se protéger des menaces extérieures (par tout un verrouillage de ses frontières physiques via un arsenal participant d'un tout-sécuritaire) tout en s'acquittant de ses obligations liées aux législations internationales, qui garantissent à tout homme de pouvoir quitter librement son pays175. D'un autre côté, il y a des personnes qui veulent pouvoir partir librement de chez elles (ce que

174 Pour une illustration de cet effet « ping-pong », soulignons qu’ en 2005, après les assauts de l'automne qui ont vu

des milliers de migrants se font fait interpellés, la ville de Ceuta est devenue une voie difficile d'accès. En 2006, et puisque les passages par Ceuta et le détroit de Gibraltar ont été verrouillés par la mise en place d'un Système Intégré de Surveillance Extérieure (SIVE), qui combine des unités terrestres, maritimes et aériennes avec des technologies très performantes (radars sensoriels, caméras thermiques et infrarouges). Quelques mois plus tard, et parce que là encore les migrants déplaçaient leurs itinéraires vers les îles Canaries à bord de cayucos (pirogues de pêche au Sénégal), l'opération Hera a été lancée, sous l'égide de l'agence Frontex et a impliqué plusieurs États membres (dont l'Espagne, l'Italie et la France). En 2008, et parce que les itinéraires ne cessent d'être déplacés, l'opération Minerva a été lancée pour stopper les flux migratoires illégaux en direction des îles Baléares. Tarissement effectif des flux migratoires en direction de l'Espagne, les itinéraires ne font que se diversifier, notamment en direction de la Libye, de Malte et du sud de l'Italie. L'opération Nautilus a alors été mise en place, par une coopération entre l'agence Frontex, la Libye et l'Italie. On notera ici une autre opération de ce genre, l'opération Poséidon, requise par la Grèce en 2010. Cette fois, il n'y eut pas moins de vingt navires, de six avions et de quatre hélicoptères, quadrillant et survolant la mer Égée. Notons que la Turquie voisine, qui n'est pas encore dans l'UE, jouit d'une position qui lui permet plus ou moins de gérer les flux migratoires venus d'Europe de l'Est et de plus loin. Tout comme la position de la Libye en Afrique. Alors : « L'Italie finance des

infrastructures en Libye tandis que l'Union européenne légitime le régime de Mouammar Kadhafi sur la scène internationale en rétablissant des relations diplomatiques et en négociant sur ces questions [de gestion concertée des flux migratoires à destination de l'Europe passant par la Libye] » (Guiraudon, 2010 : 18). On

pourrait aussi citer l'article d'Azita Bathaïe, paru en 2013 dans la revue Hommes et Migrations, et dans lequel elle décrit comment les itinéraires migratoires de jeunes Afghans sont fonction des potentialités offertes sur la route et s’adaptent aux logiques de fermeture des frontières européennes.

175 A ce sujet, dans un article paru en 2008, Jocelyne Streiff-Fénart et Philippe Poutignat examinent le registre de

l’assistance humanitaire et montrent alors comment tout un répertoire d’action est construit autour des mots « assister », « refouler », « enfermer », « sauver », « punir », applicable à des types d’acteurs allant du travailleur immigrés, clandestins, passeurs, trafiquants (p. 206). Qui plus est, nous disent les auteurs, ces processus d’identification des acteurs et de légitimation des politiques migratoires passe par un processus d’illégitimité des migrants (p. 213).

existe-t-il encore une « noria » de travailleurs immigrés ?

169 garantissent les conventions internationales).

Aussi, les itinéraires terrestres et maritimes empruntés par neuf des migrants rencontrés recoupent-ils deux principaux axes. Le premier couvre le départ depuis des capitales d'Afrique subsaharienne (ici, Dakar, Bamako et Nouakchott) jusqu'au Maroc, en Algérie, ou encore en Mauritanie. Le second itinéraire emprunte les routes qui mènent en Libye. Dans les deux cas, il s'agit d'une remontée du continent noir par étapes prenant des allures d'épreuve initiatique, comme l'a souligné ailleurs Sylvie Bredeloup (2008 : 298).

Je n’en dirai plus sur ces itinéraires migratoires car cela nous dévierait quelque peu de l’objet du présent chapitre (voir le chapitre 10). Cependant, notons que dans ces traversées des déserts et des mers survient aussi la figure du coxeur, autant pour le passage par la Libye que par celui par la Mauritanie ou le Maroc. Et si le coxeur, dans ces itinéraires, apparaît fortement lié à des réseaux mafieux, il ne faudrait pas criminaliser seulement tous les acteurs de cette économie du passage. Car c’est aussi des politiques migratoires européennes dont il s’agit, celles qui construisent, édifient une Europe forteresse et laissent aux limes du monde Schengen (Bensaâd, 2005), des personnes qui semblent enfermées au–dehors. Tout cela participe alors de la production de nouveaux lieux, d’espaces de relégation qui se (re)dynamisent et ordonnent quelque peu une économie florissante de la frontière. Rien est alors à détacher, les choses s’entremêlent, et j’invite ici les lectrices et lecteurs à se reporter au chapitre 10.

Enfin, à l’influence des « identités de papiers » sur le cours des itinéraires et des trajectoires migratoires, qui ont obligé certains des migrants rencontrés à prendre la route, celles- ci se logent, là encore, dans quelques interstices de jeux qui permettent l’arrivée aux portes de l’Europe.

L’arrivée en Europe ou la traversée de pays européens

« Le checkpoint représente un point de transformation dans l’espace public ; ce n’est pas un lieu ; c’est une bordure, une frontière, un point de passage, un début et une fin en ce même point de l’espace public. C’est un déplacement au bord de l’abîme. […] C’est un lieu de domination et de despotisme. C’est un site et une fortification, visibles uniquement de l’extérieur. Le voir est permis, le traverser ou le toucher est prohibé. Ce n’est pas un espace public. C’est un espace qui contrôle l’espace public » (Ritaine, 2009b : 29).

Comme le rapporte ci-dessus Évelyne Ritaine, le checkpoint, ou si l’on préfère le poste de contrôle, matérialise la frontière, autrement que la délivrance d’un visa ou la traversée des déserts et des mers. Elle souligne alors l'importance du checkpoint, qui est autre qu'une barrière car il ne peut être détourné (p. 27). Si de premiers jeux de papiers dans des interstices de jeux ont commencé dans la recherche d’un visa, si les « identités de papiers » ont influencé les itinéraires et trajectoires migratoires et que d’aucuns se sont résignés aussi à prendre la route, l’arrivée en

existe-t-il encore une « noria » de travailleurs immigrés ?

170

Europe amorce d’autres interstices de jeux. Dans le passage à la douane, les identités de papiers et les interstices de jeux deviennent concurrents. Autant les personnes que j’ai rencontrées n’ont pas mentionné avoir été transférées pour un temps en zone d’attente, autant c’est ce qui arrive à d’autres. Dans les parcours qui n’ont pas emprunté la voie aérienne, la zone d'attente pour entrer « librement » sur le territoire européen est un passage obligé.

Aux beaux jours, les départs en pirogues s’intensifient et les îles de Lampedusa et de Pantelleria, petites îles de la Sicile, voient débarquer de nombreux migrants (trompés dans leur destination et croyant arriver tout de suite en Italie), qui seront, bientôt, tantôt refoulés/rapatriés, tantôt admis (Lombardo, 2003). Arrivé le 4 août 2011 sur l’île de Lampedusa, Diaye (Malien, 25

ans et sans emploi au moment de l’entretien) a demandé l’asile (et selon ce que le Règlement

Dublin II oblige, à savoir faire sa demande d’asile dans le premier pays européen traversé). Passant par cette procédure pour pouvoir rester en Italie et ne pas être refoulé, il a obtenu des récépissés en attendant la fin de l'instruction de son dossier. Sa période de rétention étant arrivée à son terme, Diaye a fini par obtenir un titre de court séjour italien. C'est à partir de là qu'il est venu en France, ne trouvant que peu de travail en Italie. En novembre 2012, Diaye est reparti pour l'Italie, dans la région de Calabria, pour y renouveler son titre de séjour. Il est revenu à Paris en février 2013.

Quant à Komisouko (un Mauritanien, 23 ans et sans emploi au moment de l’entretien), une fois arrivé, à Santa Cruz de Tenerife, il m'a raconté que les passagers clandestins du bateau ont dû descendre et se livrer à la police. Il a alors été placé dans un centre de rétention, pendant six mois. Mais comme il était mineur à son arrivée en Espagne, il a pu rester dans une maison pour Mineurs Isolés Étrangers (MIE), à Ponferrada, dans la province de León, au nord-ouest de l'Espagne. Là, il a suivi différentes formations dans le jardinage, la taille de pierre, comme frigoriste. Depuis, il a reçu une carte de séjour espagnole qu'il doit aller faire renouveler une fois par an à Barcelone. Arrivé en France, Komisouko a tenté de poursuivre sa demande d'asile mais n'a pas continué. Il ne savait plus comment faire car il ne connaissait personne qui puisse lui écrire, une nouvelle fois, son récit. C'est un peu sans en avoir réellement conscience que Komisouko a fait une demande d'asile. Car la demande d'asile est un des moyens de s'assurer une entrée sur le territoire européen. C'est ce qu'a fait Massiré, lui aussi arrivé par l’Espagne. N’étant pas mineur, comme Komisouko, Massiré a déposé une demande d’asile à ceci près :

« [Débarquant sur les côtes espagnoles] Bon pour les soixante-trois personnes, je sais pas ce qu’elles sont toutes devenues. Je sais qu’il y a trente personnes qui ont été libérées. [...] Parce que tous ceux qui sont Sénégalais et Maliens, [la police] devait les retourner, mais pas les Mauritaniens. Parce qu’ils [les policiers] savent qu’il y a des problèmes en Mauritanie. C’est à cause du président Sidi. Ils [le CMJD] ont fait un coup d'état. Et du coup, comme il y a eu un coup d'état, les Mauritaniens restent là. » [Massiré, Malien, 28 ans et plongeur en CDI au moment de l’entretien].

existe-t-il encore une « noria » de travailleurs immigrés ?

171

Dans cet extrait, Massiré se dit mauritanien, or ce n’est pas le cas. A son arrivée en Espagne, sur l’île de Las Palmas, il s’est présenté aux autorités en tant que ressortissant mauritanien. Il savait que s’il voulait rester en Espagne et ne pas se faire refouler, il lui fallait demander l’asile et au vu de la situation en Mauritanie, il était préférable de se faire passer pour un Mauritanien plutôt de dire qu'il était Malien. Massiré a alors troqué son identité de papiers de migrant malien (soit, d’étranger) pour celle de demandeur d’asile mauritanien (soit, éventuellement une identité à protéger). Alors que je demandais à Massiré pourquoi il avait fait une demande d’asile, il m’a dit que c’était là une pratique courante, que tout le monde faisait ça. C’est en effet une pratique courante que j’ai pu moi-même observer. La grande majorité des migrants que j’ai rencontrée, que ce soit à Autremonde ou à la permanence des « TSP », a déposé à l’arrivée en Europe, une demande d’asile, sans toutefois savoir pourquoi et en quoi cela consistait, à l'instar de Komisouko. Usant d’interstices de jeux leur permettant le départ pour l’Europe, ils usent d’autres interstices leur permettant une prolongation de leur séjour en essayant de convertir leurs identités de papiers en d’autres. Massiré n’a pas obtenu le statut de réfugié mais a néanmoins reçu différents récépissés autorisant son séjour le temps de l’instruction de sa demande, pendant environ un an.

Si la demande d'asile, dès l'arrivée en Europe, semble être une pratique partagée et courante, celle du passage par un camp est son corollaire. Ainsi, Massiré m'a rapporté être resté deux mois dans un camp en Espagne, à Las Palmas :

« J'ai fait deux mois là-bas mais en tout, j'ai fait quarante jours. C'est comme la prison parce que c'est la police mais c'est pas la prison » [Massiré, Malien, 28 ans et plongeur en CDI au moment de

l’entretien]

Cela a aussi été le cas de Komisouko qui a passé six mois dans un camp en Espagne, et le cas de Diadié (un Sénégalais de 22 ans et sans emploi au moment de l’entretien), qui a passé cinq mois dans un camp : « Après mon arrivée en Espagne, je suis allé là-bas [dans un camp]. J'ai fait cinq mois dans ce campo. J’ai pas travaillé : y a rien là-bas ». C'était un camp géré par la Croix Rouge, d'où il est sorti à la fin de l'année 2011. Il est sorti, dit-il, car les autorités espagnoles n'ont pu que constater qu'il n'avait pas de famille au pays (si ce n'est sa grand-mère et ses deux frères et sœurs : sa mère étant décédée et son père travaillant comme maçon au Mali). C'est en quelque sorte pour raisons humanitaires que Diadié a pu sortir de ce camp. À la fin de son récit sur son parcours migratoire, il m’a dit que c'était grâce à Maria, une Espagnole qu’il a rencontrée lors de sa rétention en Espagne, qu'il a pu venir en France. Maria l'a aidé à passer la frontière, en lui achetant le billet de train nécessaire.

Cette « pratique » de l'internement (enfermement) des étrangers à travers la matérialisation du camp soulève un certain nombre de questions. Dans un article paru en 2005,

existe-t-il encore une « noria » de travailleurs immigrés ?

172

dans la revue Cultures et Conflits, Caroline Intrand et Pierre-Arnaud Perrouty synthétisent les recherches du réseau Migreurop sur la diversité des camps d'étrangers/ères en Europe. Pour Migreurop176, la notion de camp d'étrangers/ères ne doit pas uniquement être définie par les camps de rétention, de détention ou de prison. Il faut aussi prendre en considération des lieux de relégation où l'étranger/ère est privé de l'ensemble ou d'une partie de ses droits, dont par exemple des centres d'accueil ou d'hébergement177. Malgré leur diversité (de fonctionnement, de conditions de vie, de durée de détention allant de quelques dizaines de jours à plusieurs mois, d'encadrement juridique constituant bien souvent une violation des droits fondamentaux, etc.), les camps pour étrangers/ères en Europe partagent des caractéristiques communes, notamment parce qu'ils sont les conséquences des politiques européennes d'asile et d'immigration, qui les utilisent comme outil de gestion des migrations. Celles et ceux qui sont enfermés dans ces camps partagent le même délit : le franchissement illégal d'une frontière. De plus en plus, ces centres cherchent à augmenter leur capacité d'accueil et leur gestion est déléguée à des compagnies privées178. Il existe alors tout un marché de la rétention/détention, alors même que ces centres affichent de nombreuses difficultés dans l'exécution des mesures d’éloignement. La question de leur réelle efficacité se pose alors179, tandis que des projets de camps dans les pays qui font office de « garde-frontières » se mettent en place, comme dans le cas de l'Italie et de la Libye. L'Espagne compte neuf Centres d'Internement pour Étrangers (CIE), dont les premiers mis en place datent de 1985, et d'autres lieux plus informels comme la zone d'attente de l'aéroport de Lanzarote. Toujours d'après le réseau Migreurop, jusqu'en 1999 il n'y avait aucune réglementation sur ces centres. Actuellement, la durée de rétention ne peut excéder les quarante jours. Côté français, fort de ses vingt-cinq Centres de Rétention Administrative (CRA), mis en place depuis 1992, cette durée ne peut dépasser les trente-deux jours. Toutefois, il faut noter que selon une directive européenne dite de « retour » de juin 2008, cette période peut être prolongée

176 Migreurop est un réseau africain et européen de militants et de chercheurs traitant des thématiques de l’enferment

des étrangers principalement.

177 Cette séquence n’est pas sans rappeler l’ouvrage de Michel Agier, Gérer les indésirables. Des camps de réfugiés

au gouvernement humanitaire, paru en 2008 aux éditions Flammarion. Dans cet ouvrage, l’anthropologue émet plusieurs critiques de l’action humanitaire, action qui finit par être prise dans une logique totalitaire par la mise en place de dispositifs qui vise la mise à l’écart des « indésirables ». Dans cet état des choses, la notion de « protection » est supplantée par celle de « contrôle ». Le monde de l’humanitaire a alors le pouvoir de vie et de mort sur les indésirables qu’il gère (dans le tri des personnes au nom d’une gestion qui n’est autre qu’un contrôle), au profit des États en guerre.

178 Voir à ce sujet l'article de Raffaela Consentino et al., (2014). « Centres de rétention : le marché italien », in Plein droit, 2014/2 n°101, pp. 14-18.

179 Dans ce même article paru en 2005, Caroline Intrand et Pierre-Arnaud Perrouty rappellent que sur les statistiques

calculées sur dix ans, soit de 1992 à 2002, en 1992 50% des mesures d’éloignement avaient été exécutées contre

Outline

Documents relatifs