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Résistances à l’intérieur des prisons à travers le genre et la sexualité Les prisons : des espaces colonisés par les

Chapitre 4. Colonisation d’espaces masculins et force féminine croissante

3. Les résistances internes individuelles et/ou à plusieurs

3.2 Des résistances individuelles internes

Malgré des limites aux résistances de ces femmes par la force et les stratégies de l’AP, des mouvements d’oppositions individuels opèrent au sein des prisons. Tout comme le fait de vivre sa vie carcérale comme un aspect positif (Levi et Waldman, 2017).

Even if nobody else rewards you, if nobody else is there to pat you on your back, if nobody else is there to say, “Job well done!” it is still a personal victory, a personal accomplishment, and that’s where I’m at right now. Prison did not do it thought it was going to do to me. I won. I won. But even though it’s a place I would not want for my worst enemy, it was a beautiful place for me. It’s where I learned how to prioritize what matters in life. I learned a lot about who I am because I was stripped of everything. That’s where I found my strength, that’s where I found my value. That’s where I found my voice (Sheri Dwight, ancienne prisonnière, dans Levi et Waldman, 2017, p. 55).

Certaines femmes néanmoins restent fières de leur incarcération et arrivent à en tirer des conclusions positives. C’est là où elles arrivent enfin à s’exprimer, faire valoir leurs droits et à prendre conscience de leur valeur. Ces façons positives de vivre la prison reflètent une victoire et une réussite partielle de réhabilitation sociale. Coupées de tout, elles peuvent disposer de davantage de temps personnel et ont parfois accès à des formations, des loisirs, du soutien psychologique : elles seraient alors plus aptes à penser à elles-mêmes et à préparer leur avenir sans faire passer leurs proches avant elles. Des résistances sont visibles dans les cellules d’isolement qui sont pourtant censées réduire à néant ces dernières. De tels exemples indiquent que certaines prisonnières crachent fréquemment sur les gardiens, balancent de l’urine, des excréments et des boissons à travers la fente utilisée normalement pour donner la nourriture à l’incarcérée (Talvi, 2007). Elles recouvrent également parfois la cellule d’excréments ou bien tapent sur les portes, hurlent et balancent les repas en guise de protestation (pp. 128-129). En plus de cracher et autres, elles peuvent détruire des biens, insulter les surveillants et/ou résister aux ordres même si la résistance est souvent sévèrement punie (p. 136). Les résistances activistes85 internes se répandent et coexistent avec des

85 Activisme : « a doctrine or practice that emphasizes direct vigorous action especially in support of or opposition to one side of a controversial issue » (Merriam-Webster, consulté le 23/07/2018).

rapports de force comme leurs témoignages auprès d’acteurs externes sur leurs conditions et leurs expériences et afin de faire entendre leur voix dans la société « libre ». L’activisme c’est donc s’opposer ou soutenir quelque chose en mettant en place des actions visant à défendre des idées et/ou des demandes. Au sein de l’AP, les actions/pensées activistes apparaissent comme des résistances puisqu’elles vont souvent à l’opposé des directives de l’AP. On parle aussi des résistances internes car elles concernent les actions qui ont lieu au sein des prisons et non à l’extérieur (groupes d’ex-prisonnières, médias, etc). Elles agissent pour leur cause et annoncent un activisme qui demande aux lecteurs de se questionner et de changer leur point de vue : d’être compatissant, à l’écoute et d’avoir l’envie de les aider (p. 13). Le but à travers ces témoignages individuels est de combattre les idées reçues à leur sujet comme la violence et la cruauté dont elles sont fréquemment accusées et de mettre en avant ces relations d’amour, de confiance et d’amitié qui circulent entre détenues états- uniennes.

These are women who have forged bonds of community and friendship under the most trying of circumstances. That a feeling of community can develop in these circumstances may be surprising to people used to thinking of prisons as only violent and terrifying places. But the women inside develop warm and loving relationships. They form support groups such as the Two Spirits group, founded by Charlie Morningstar, for lesbian, bisexual, and transgender people. They help one another to survive, and even to flourish, when isolation and despair would have been far more obvious a response (pp. 22-23).

Elles mettent alors en place un double activisme qui cherche à toucher les personnes de l’extérieur depuis les prisons et aussi à afficher les valeurs d’unité et de solidarité qui habitent les prisonnières. Certaines prisonnières résistent contre l’idée qu’elles sont impuissantes et des « moins que rien ». Elles désirent éduquer et devenir activistes afin de changer l’institution. Leur volonté est de réclamer et de défendre les droits humains et civils (Talvi, 2007). Certaines protestent sous forme de grève de la faim. D’autres deviennent militantes politiques à la sortie et travaillent dans des bureaux d’avocats ou des organisations pour les droits des prisonnières en s’engageant à porter plainte contre certaines prisons pour le traumatisme et les abus occasionnés par la prison. Ces résistances montrent que les détenues ont de moins en moins peur, qu’elles savent utiliser les moyens à leur disposition et former des groupes internes face à l’AP. N’étant plus engagés dans le crime et l’illégalité, les femmes utilisent les pouvoirs des institutions états-uniennes : il y a là une transformation des actions de ces femmes. Leur but, pour beaucoup d’entre elles, est d’informer les prisonnières sur les problèmes de la « guerre aux drogues » et des sentences longues injustifiées. Le pouvoir féminin prend parfois le dessus sur celui de l’AP.

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