• Aucun résultat trouvé

Réglementation et institutionnalisation

Sportivisation et différenciation sportive : du canotage à la course à l’aviron

1. Le processus de sportivisation du canotage

1.2 Réglementation et institutionnalisation

Pont) s’entendent pour partager le territoire sur lequel elles peuvent organiser des régates. L’ensemble des articles révèle à la fois une négociation féconde, bien que ponctuelle, autour des conditions de pratique et, plus particulièrement, un accord social permettant d’écarter toute mésentente concurrentielle148. Les trois sociétés s’engagent ainsi à ne pas prendre l’adhésion d’un sociétaire qui aurait été exclu d’une autre de ces sociétés ; à ce que chaque course publique organisée par l’une soit ouverte aux deux autres ; et à ne pas diriger de régates en dehors des zones délibérées. C’est ainsi que la Société Nautique de la Marne prend la direction de la Marne et de la Haute Seine, à l’Est de Paris. Le Rowing-Club de Paris, quant à lui, s’occupe de la Basse Seine et de l’Oise, à l’Ouest. Et enfin, le Cercle Nautique de France garde l’organisation du Championnat de la Seine. Sous cette alliance se conditionnent également les prémices d’un code commun, dans le cadre de l’élaboration des régates internationales. Le comité, arrêté à trois membres de chacune des trois sociétés parisiennes, montre le centralisme de la capitale dans l’organisation du rowing français. Pourtant, l’unification parisienne est bien mince par rapport à toutes les sociétés implantées en France. Le monde nautique, durant les années 1870-1880, est marqué par un mouvement en faveur d’un « rowing national », idée largement soutenue dans la presse sportive et notamment dans Le Yacht149. Mais certains clubs restent hermétiques à cette idée et les regroupements régionaux, qui se multiplient avec l'entente parisienne mais aussi l'apparition de l'Union Nautique des Sociétés du Sud-Ouest en 1880150, constituent des obstacles à cette ascension.

Le premier leitmotiv d’une organisation nationale est l’harmonisation du code des courses. En effet, les différentes codifications des embarcations, notamment, contraignent les sportifs à s’adapter aux règlements de chacun, donnant parfois lieu à certaines difficultés pour participer aux régates. De plus, certaines questions restent encore floues et les rameurs se rendent aux compétitions sans connaître la catégorie dans laquelle ils vont être intégrés, voire même s’ils auront la possibilité de participer à la course.

1.2 Réglementation et institutionnalisation

- Vers une règlementation commune sur les embarcations

Les innovations des ateliers de construction sont sources de conflits. L’engin donnant un avantage considérable aux rameurs, l’accès aux dernières technologies engage les chances de victoire dans les courses. Or, les constructeurs sont nombreux puisque le nombre d’emplois liés à la fabrication des embarcations de loisir mobilise près de 1500 travailleurs151 sur le territoire français, même si ces emplois sont majoritairement saisonniers. Parmi eux, les plus réputés sont considérés comme des ingénieurs, dont le talent est indispensable à la performance. Dossunet et Tellier, deux ateliers parisiens, se distinguent particulièrement.

148Le Boa, n°5, dimanche 19 mai 1878.

149Le Yacht, n°192, samedi 12 novembre 1881.

150Code des courses de la Fédération Française des sociétés d'avirons, 30 mars 1893.

151Tissandier, G. (1892). Les exercices physiques. Le canotage ou l’aviron. La Nature, 21 mai 1892, n°990, pp. 391-394

Aussi, certains règlements spécifient les dispositifs à employer et en interdisent d’autres… parfois sans les déterminer à l’avance ! Par exemple, le règlement des courses organisées par la ville de Brest, le 16 août 1868, précise :

« Le jury fera le classement des bateaux par catégorie, aura la faculté, même après inscription, d’exclure les embarcations qui ne lui paraîtraient pas conformes à l’esprit du programme, de changer ou d’annuler les compensations en temps dans les courses qui y sont astreintes »152.

Dans une autre course, une solution est trouvée sur place. En 1880, le Cercle de régates de Bruxelles avait contraint un rameur français à démonter ses row-locks dont était équipée son embarcation pour concourir, pour les remplacer par des dames fixes. L’année suivante, le Cercle des régates de Bruxelles a adopté le principe de « libre construction », partiellement amorcé par la SRP, qui permet aux constructeurs d’exprimer tout leur talent et de consacrer toute leur intelligence « pour obtenir de leurs embarcations la plus grande vitesse possible. Ce qui est le véritable but des courses à l’aviron »153.

Le principe de libre construction est réclamé par certains rameurs mais de nombreuses Unions conservent des règlements différents sans les uniformiser car la mise en œuvre d’un règlement unique est susceptible de compromettre la tenue de certaines régates. En effet, chaque ville ne peut offrir les mêmes conditions de pratique, et chaque société nautique n’a pas nécessairement les embarcations qui répondent aux critères des différentes catégories. Aussi, dans la mesure où les participants sont majoritairement issus d’un environnement proche, les règlements locaux peuvent paraître les plus inclusifs, sinon les seuls viables à l’esprit de la manifestation pensée par les organisateurs154.

Les compétiteurs les plus mobiles sont handicapés et la question de réunir les sociétés nautiques pour discuter de ces questions d’harmonisation est de plus en plus pressante. Enfin émerge l’idée d’organiser un congrès à Lille en 1875155, avec l’objectif d’unir les sociétés nautiques autour d’un traité international. Le caractère nouveau de cette initiative, les invitations ciblées156, ainsi que l’absence d’un programme précis, expliquent, selon le rédacteur du Yacht, l’essoufflement presque immédiat de ce congrès. Au final, peu de décisions majeures sont enterrinées. Néanmoins, une première réglementation sur la construction des Yoles-gigs lève le voile sur des qualifications qui avaient été trop abstraites jusque-là, laissant libre cours à certaines fraudes lors des régates (notamment par un agencement particulier des bosses de nages157).

Ce premier élan marque les prémices de l’institutionnalisation de l’aviron et soulève une ambivalence, entre particularisme et centralisme, à propos des diverses stratégies engagées par les nombreuses sociétés nautiques. Un an plus tard, en 1882, le Cercle Nautique de France, présidé par M. Fleuret, se lance dans l’organisation d’un congrès national afin de discuter des grandes questions qui agitent le monde de l’aviron et d’initier la fondation de l’Union des sociétés françaises d’aviron158. Son objectif est

152Le Yacht, n°18, mardi 4 août 1868, p. 2.

153Le Yacht, n°166, samedi 14 mai 1881, p. 160.

154 Le Yacht, n°246, samedi 25 novembre 1882.

155Le Yacht, n°191, samedi 5 novembre 1881.

156Ibid.

ambitieux mais nécessaire : « populariser le sport nautique et contribuer à son développement en établissant des rapports suivis entre toutes les sociétés des divers points de France »159. La création d’un comité d’initiative160, exclusivement composé de sociétés parisiennes, traduit la mainmise de la capitale dans ce projet de regroupement. Il est, à ce titre, original, compte tenu du rayonnement géographique de l’aviron associatif (Carte 4) à cette période. Une réunion extraordinaire se tient le 11 avril 1882, durant laquelle sont rédigés le règlement et le programme. Les règlements et codifications de l’aviron sont au cœur des objectifs de ce projet d’institutionnalisation.

La coopération de l’ensemble des sociétés nautiques est nécessaire au succès de ce projet. L’envoi du programme, la publicité de cet évènement relayé par la presse161, ainsi que l’assurance d’une prise en compte des règlements déjà établis par l’Union du Sud-Ouest, montrent l’enjeu auquel le monde de l’aviron est confronté : une institution nationale pour un code de course partagé par tous.

- Vers une institution nationale

Ainsi naît, suite au congrès national, l’Union des sociétés d’avirons de France (USAF), en 1882. Les six sociétés parisiennes162, l’Union des Sociétés du Sud-Ouest163, ainsi qu’une dizaine de sociétés, composent l’USAF. Dès l’année 1883, l’USAF ne semble pas réussir à maintenir son quota d’adhérents puisqu’on en dénombre seulement douze, puis neuf jusqu’en 1886 (figure 4). Après quatre années de fonctionnement, l’existence de l’USAF dépend d’une minorité : sur les neuf sociétés adhérentes, six proviennent de la capitale et deux, situées en province, sont représentées par un membre parisien qui n’est autre que M. Fleuret, précurseur du groupement164. Seul le comité des régates de Nice semble finalement rompre cette unité. Dans ces conditions, le regroupement de l’ensemble des sociétés nautiques soulève des réticences et des résistances que l’USAF tente de pallier. Elle entreprend de faciliter les inscriptions en réduisant progressivement les cotisations mais les résultats sont modestes : après la réduction de la cotisation annuelle à 25 francs en 1886, l’Union compte six membres supplémentaires l’année suivante. En presque huit ans d’activité, l’USAF n’atteint pas la vingtaine d’adhésions, ce qui représente tout juste le quart de l’ensemble des sociétés nautiques en France recensées dans l’annuaire du Yacht165. En cela, comment imposer un règlement qui, même voté à l’assentiment général, ne concerne qu’une minorité de sociétés nautiques sur l’ensemble du territoire français ?

159Le Yacht, n°206, samedi 18 février 1882, p. 55.

160Le Yacht, n°199, samedi 31 décembre 1881, p. 424 : ce comité est constitué d’un président, de plusieurs membres, et d’un secrétaire, tous affiliés à une société parisienne (le Cercle Nautique de France, le Rowing-Club, la Société Nautique de la Marne, la Société d’Encouragement, le Cercle d’aviron de Paris, et le Joinville Boat-Club).

161La rédaction du journal le Yacht est assurée en partie par le président de la Société nautique de la Marne, qui est aussi membre du comité d’initiative du congrès.

162Le Cercle nautique de France, le Rowing Club de Paris, la Société nautique de la Marne, la Société d’encouragement, le Cercle d'Aviron de Paris, et le Joinville Boat Club.

163Ibid.

164 La Revue des Sports, n°14, samedi 3 avril 1886.

Figure 4. Évolution du nombre de sociétés adhérentes à l’Union et du prix de l’adhésion annuelle appliqué par l’Union (1882-1889).

Plus qu’un ajustement économique, ce regroupement dépend de tout un processus d’adaptations et de contestations d’application des règles. Chaque société, chaque cercle, détient une organisation et des intérêts qui lui sont propres et qu’il tente de préserver. Le modèle de gouvernance décrit dans les statuts s’apparente à celui de la République française. Établi sur un modèle démocratique ascendant, chaque société élit un représentant (en 1883, une même personne peut être le porte-parole de trois sociétés au maximum). La délégation des pouvoirs se fait par écrit et doit être signée du président et du secrétaire de chaque société puis légalisée par le maire de la ville où les sociétés ont leur siège. Toutes les décisions prises, ainsi que l’élection du bureau, renouvelé tous les ans, sont décidées au vote et à la majorité des délégués166. Enfin, conformément au modèle de la IIIe République, le président détient une forte capacité décisionnelle. Il préside et dirige toutes les séances, veille à la stricte exécution des règlements et, en cas de partage des votes, sa voix est prépondérante. Le manque de popularité de l’USAF peut s’interpréter au regard des promoteurs de cette institution qui, finalement, en régulent les orientations. Plus particulièrement, la stabilité de l’instance bureaucratique parisienne, mise en place dès 1882, permet aux délégués des sociétés parisiennes de contrôler l’ensemble des décisions. Chacun d’eux se voit attribuer l’une des quatre fonctions principales au sein du bureau jusqu’en 1888 : la présidence et le déroulement des réunions sont constamment menés par M. Fleuret, président du Cercle nautique de France ; M. Vieira, président et délégué du Rowing-Club de Paris, le seconde en tant que vice-président ; M. Régnier, membre fondateur et délégué de la Société nautique de la Basse-Seine, s’occupe des comptes ; et enfin M. Philippe, président de la Société nautique de la Marne, dont la succession sera assurée par d’autres membres de cette même société, occupe le poste de secrétaire. Lors des différentes réunions annuelles, les diverses propositions de modifications de règlement et de statut, tout au long de l’existence de l’USAF, sont essentiellement engagées par ces mêmes membres alors que s’intègrent des sociétés de provinces. Par exemple, la

réunion du 27 mars 1887167 est celle pour laquelle sont proposées le plus de modifications. Sur les six propositions soumises au vote, quatre émanent de délégués parisiens (qui sont aussi membres du bureau), une est proposée par M. Fleuret qui représente la société nautique d’Évian mais dont on sait la forte implication dans le rowing parisien et, enfin, seule une proposition est présentée par une société de province : la Société des régates Rennaises. Le mode de gouvernance unilatéral, que semblent vouloir imposer les sociétés parisiennes, limite les possibilités de consensus et donne lieu à des résistances, non seulement culturelles et sociales, mais également normatives. En effet, adhérer à l’USAF signifie participer à la définition de ce code mais surtout s’engager à le respecter et à le faire respecter lors de l’organisation de régates générales. Ces dernières sont ouvertes de droit aux sociétés unies, qui restent libres de programmer des régates particulières pour leurs membres. Les clubs nautiques du Nord rejettent cette institution et marquent leur différence en fondant l’Union des sociétés du Nord en 1882. Cette fronde renforce un peu plus le particularisme de la région du Nord dans l’institutionnalisation du sport en France (Poyer, 2004).

Néanmoins les efforts de l’USAF lui permettent d’obtenir progressivement une reconnaissance élargie. Elle joue le rôle d’arbitre dans un litige qui oppose des clubs non affiliés168, preuve de son assise dans la communauté nautique. Elle engage également des discussions avec les sociétés étrangères, comme le Comité des régates royales de Henley (Angleterre) et le Comité des régates internationales de Vienne (Autriche), dans le but d’organiser des régates internationales, et met en avant son rôle de représentant national de l’activité.

Après huit années d’existence, l’USAF a fait progresser l’institutionnalisation de l’aviron français mais reste encore loin de son but initial de regrouper l’ensemble des sociétés nautiques. Pour ce faire, une nouvelle démarche stratégique intéresse cette fois un ensemble plus large de sociétés (le congrès de 1889 rassemble 35 sociétés nautiques). Même si aucun projet solide concernant la formation d’une fédération n’est déposé, le délégué de la Société des régates Rennaises, M. Philippe, fait voter à l’unanimité une révision complète et absolue des statuts et règlements169. Pour la première fois, en 1890, les principales fonctions du bureau de l’Union sont assurées par des délégués de province dont M. Lepère, de la Société nautique d’Enghien, est le président. Plutôt que de promouvoir une association de sociétés nautiques, l’organe national devra être une coalition des groupes régionaux. C’est par ce nouvel objectif qu’émerge la première ambition sérieuse de créer une Fédération. Pour cela, l’USAF tente de coopérer avec les unions régionales qui, jusqu’ici, se cantonnent à vivre en autarcie. La tâche est difficile, d’autant plus que le poids des mouvements régionaux constitue un frein et achemine parfois, comme c’est le cas de la voile, la tentative de fédérer toutes les sociétés vers une impasse (Jallat, 2003). Ce projet doit faire, une seconde fois, face à l’Union des sociétés du Sud-Ouest, néanmoins partisane de l’USAF dès sa création, mais aussi à l’Union des sociétés du Nord, qui se transforme en Fédération du Nord en 1889, au moment où le monde nautique se prépare à avoir, pour la première fois, une véritable institution nationale.

167Le Yacht, n°473, samedi 2 avril 1887.

168Le Yacht, n°394, samedi 26 septembre 1885.

Figure 5. Les regroupements à l'aube de la Fédération des sociétés d'aviron de France

source : Fleutiaux, Annuaire français de l’aviron, 1899

Conscientes des diverses scissions qui animent le monde nautique, les Unions entrent dans une ère de collaboration. Le 30 mars 1890, l’USAF, l’Union des sociétés du Sud-Ouest et la Fédération des sociétés nautiques du Nord de la France signent une première convention et se donnent une structure commune appelée le « Syndicat », qui peut être considérée comme la véritable origine ainsi que la clef de voûte de la Fédération des sociétés d’aviron de France. Les sociétés d’aviron se retrouvent rassemblées, à l’exception de l’Union du Nord-Est, et des sociétés isolées (figure 5) qui, pour ces dernières, s’allient progressivement à une des Unions existantes, ou forment de nouveaux groupements venant accroitre la force du Syndicat (figure 6). Ainsi, la Fédération d’aviron du Sud-est (FSE), fondée en 1892, la Fédération des sociétés nautiques Parisiennes (FP) en 1893, l’Union des sociétés nautiques de la Loire et de l’Ouest en 1894 (ULO), et la Fédération des sociétés d’aviron de la Méditerranée (FM) la même année, s’allient toutes au Syndicat, quelques mois après leur création.

Autres groupements :

- Fédération des sociétés du Nord-Est (acceptation des clauses du Syndicat en novembre 1890) - Sociétés isolées.

FEDERATION DES SOCIETES D’AVIRON DE FRANCE

Syndicat (1890-1893): - Fédération des Sociétés du Nord (1889) (ancienne Union des Sociétés du Nord, Nord-Ouest et de l’Est (1882-1889))

- Union des Sociétés du Sud-ouest (1879) - Union de France (1882)

Figure 6. Unions régionales en 1899

source : Fleutiaux, Annuaire français de l’aviron, 1899

Les questions sur l’amateurisme et sur la liberté de construction sont toujours au premier plan des discussions. Les rédacteurs du Yacht consacrent plusieurs articles à ces pourparlers. L’objectif est bel et bien d’atteindre un accord général en laissant la possibilité aux unions régionales « d’avoir des règlements spéciaux appropriés aux besoins et nécessités »170. C’est ainsi que le Syndicat écrit un nouveau code de course en 1891, fédérant un ensemble d’articles sur les régates, les rameurs, les embarcations, et l’organisation des courses171. Ce code constitue une étape importante dans l’histoire de l’aviron car il est l’aboutissement des efforts entrepris, près de dix ans plus tôt, pour obtenir une coordination nationale et la possibilité de régater contre tous les clubs du pays. Le Syndicat et son règlement, acceptés par tous pour les régates nationales, constituent une étape clef dans le développement de l’aviron sportif en France car ils portent les éléments fondamentaux d’une pratique physique devenue sportive. En 1893, le Syndicat prend officiellement le nom de Fédération des sociétés d’aviron de France. L’évolution du nom marque la pérennité des changements institués par le Syndicat.

Ainsi, le processus de sportivisation de l’aviron naît dans la recherche de vitesse. Cette quête est largement tributaire des évolutions technologiques liées au profil des bateaux et à l’ergonomie du poste du rameur. Or, la recherche d’une égalité entre les concurrents pour les courses nécessite de les réglementer strictement. Les athlètes aspirent ensuite à des confrontations de plus en plus élargies pour attester de leur supériorité. La détermination d’un champion national exige l’organisation de

170Le Yacht, n°631, samedi 5 avril 1890, p. 120.

compétitions entre clubs issus d’ententes régionales différentes. La construction de ce réseau coordonné est rythmée par les difficultés à s’accorder sur un règlement commun. De l’Union à la Fédération, en passant par le Syndicat, il aura fallu plus de dix années pour arriver à un niveau d’achèvement avancé du processus. L’aviron porte désormais les principales caractéristiques des sports, telles que les a définies Guttmann (1978), mais le processus de sportivisation reste encore inachevé. Si l’élaboration d’un code de course national finit par relier l’ensemble des sociétés nautiques françaises, le rameur amateur, tel qu’il est défini, engendre non seulement des dissidences au sein même de cette nation mais constitue également un frein à l’internationalisation de l’aviron. Le statut d’amateur est, dans un premier temps, critiqué, puis réadapté afin d’aboutir à la constitution d’une institution internationale. Cette dernière étape est marquée par de nouveaux enjeux liés à la spécialisation des athlètes dans l’activité, à ne pas confondre avec la perte du statut d’amateur sur laquelle se cristallisent les tensions entre les pays impliqués.

L’analyse du développement de l’aviron proposée ici, permet de mettre en exergue les liens étroits visibles entre le processus de sportivisation et celui de l’institutionnalisation, dès le milieu du XIXe siècle et jusqu’à l’aube de la Grande Guerre.

Tout au long de cette période, plusieurs éléments témoignent du processus de

Documents relatifs