• Aucun résultat trouvé

Procédure des expérimentations

4 CHAPITRE III : La formation « Culture de Sécurité » : Concevoir, mettre en place et

4.3 Expérimentation

4.3.1 Procédure des expérimentations

Nos expérimentations n’ont pas été réalisées en laboratoire mais dans le cadre de nos formations. Nous avons donc porté toute notre attention afin d’obtenir des conditions « toutes

choses étant égales par ailleurs ». Même si cet objectif est quasiment impossible à atteindre,

nous avons veillé à ne pas exposer des groupes à des messages supplémentaires. Bien qu’il soit évident que sur trois jours des éléments de discours sont différents. Lorsque des requêtes spécifiques nous étaient soumises, notamment sur le visionnage de vidéos, nous les proposions à la fin du séminaire, c’est-à-dire après le questionnaire de fin.

Toutes nos expérimentations se sont déroulées en résidentiel (i.e., hôtel) sur des groupes de 14 à 20 personnes. Ainsi, notre première expérimentation, constituée de la formation avec un

message considéré comme de faible vividité (notée FAIBLE) représente 25 individus (n = 25) répartis sur deux formations. Notre seconde expérimentation, constituée de la condition précédente et de l’ajout d’un message considéré comme de forte vividité (notée FORTE) représente 35 individus (n = 35) répartis sur deux formations. Notre troisième expérimentation, constituée de la condition FORTE, et d’une modification portant sur la communication engageante (notée FORMENG pour formation engageante) représente 31 individus (n = 31) répartis sur deux formations. Ce total représente donc six sessions de formation présentant le même schéma et le même contenu à l’exception des modifications liées au protocole expérimental85.

Dans notre condition FORTE, il aurait été idéal de remplacer le message de faible vividité par celui de forte. Mais il n’était pas possible de supprimer le message de faible vividité, celui-ci étant intrinsèquement lié à la formation. Nous avons cherché à modifier initialement notre support pour produire plus de vividité mais pour des raisons structurelles relatives au support, ce choix n’aurait a priori pas permis un éveil émotionnel suffisant. Nous avons donc pris en compte ce point que nous détaillerons plus tard.

Nous avons réalisé des pré-tests afin de tester les réactions émotionnelles aux messages. Ils ont nécessité chacun deux sessions de formation. Les deux populations séparées sont composées de 33 individus (n = 33) pour le premier pré-test (i.e., faible vividité) et de 39 individus (n = 39) pour le second pré-test (i.e., faible et forte vividité).

Seuls ont été conservés les sujets ayant effectué les trois jours pleins et n’ayant bien évidemment manqué aucune étape. En cas de manquement à une étape de la formation les stagiaires participent à l’ensemble des éléments (e.g., réponses questionnaires) mais le matériel est ciblé afin de ne pas être intégré dans le traitement des questionnaires.

Au total nous avons donc effectué dix sessions de formation de trois jours. Soit trente jours pleins de formation afin de réaliser l’ensemble de nos expérimentations.

4.3.1.1 Messages de faible et forte vividité

Afin d’obtenir le maximum de réponses émotionnelles et dans une visée de prévention86, nos messages doivent prendre en compte les trois critères définis par notre modèle, à savoir

85 L’animateur chargé de réaliser l’ensemble de la formation était le même pour la totalité des sessions (i.e., pré-

test et expérimentation) ; seuls les experts (et bien évidemment les stagiaires) étaient changés. Il était impossible de mobiliser les mêmes experts pour dix sessions consécutives.

86 Il est important de concevoir ces messages persuasifs dans le cadre d’une optique de prévention des accidents

majeurs. Il est évident qu’il est possible d’obtenir des réactions émotionnelles avec d’autre types de message (e.g., images de guerres) mais ils ne présenteraient pas d’intérêt pour notre objectif de maîtrise des risques d’accidents majeurs.

présenter distinctement le danger, montrer aux personnes qu’elles peuvent être vulnérables et présenter des conséquences importantes. Nous nous intéressons à ces critères pour chacun de nos messages.

Confrontés à un choix de conception ou d’utilisation de support pour générer de la peur, nous avons choisi divers supports vidéo portant sur différentes catastrophes industrielles. En effet, nous étions à la recherche des supports en rapport avec les accidents majeurs, thème de cette formation. Les vidéos présentent également l’avantage de pouvoir être coupées afin de présenter sensiblement le même temps d’exposition pour les individus. Nous présenterons ces supports un peu plus tard.

Afin d’évaluer les réactions émotionnelles liées au visionnage de ces vidéos, nous avons procédé à la mesure par questionnaires. Cinq items mesuraient les réactions émotionnelles. Les sujets devaient indiquer à quel point ils se sentaient tendus, mal à l’aise, nerveux, anxieux et effrayés. Ces cinq adjectifs sont empruntés à Mewborn et Rogers (1979) et sont fréquemment utilisés dans le cadre de l’appel à la peur (e.g., Keller et Block, 1996 ; Priolo, 2005). Les effets de ces différents éléments étaient mesurés à l’aide de questionnaires constitués d’échelles en 7 points (1 = pas du tout ; 7 = tout à fait).

Les individus devaient noter leur état émotionnel avant et tout de suite après la projection. Nous disposions donc d’une variable indépendante intra-sujet (i.e., message) à deux modalités (avant vs après). Ce plan de recherche a été utilisé pour deux pré-tests, un pour la faible vividité et un autre pour la forte vividité. Dans un cas comme dans l’autre, les stagiaires disposaient d’une feuille présente devant eux (disposée au retour du repas) qu’ils ne devaient retourner qu’après le visionnage de la séquence accidentelle (cf. annexe 4).

Avant la projection, il était précisé oralement au sujet que ce questionnaire avait pour objectif d’évaluer leur état à l’instant t et que ce n’était pas un test de personnalité.

Les populations sont constituées de cadres de production du groupe pharmaceutique. Il est intéressant de prendre en compte le fait que ces populations puissent avoir une réponse émotionnelle plus importante à ce type de problématique qu’une autre population non exposée quotidiennement aux risques majeurs.

Pour rappel, les deux populations séparées sont composées de 33 individus pour le premier pré-test (i.e., faible vividité) et de 39 individus pour le second pré-test (i.e., forte vividité). Chaque pré-test a nécessité deux sessions de formation.

4.3.1.2 Evaluation de l’impact de la formation

Nous avons décidé de réaliser un questionnaire permettant de nous intéresser à différentes composantes de notre modèle.

Nous n’avons pas choisi d’évaluer l’identification des dangers car il aurait fallu indiquer précisément dans notre questionnaire le type de danger (e.g., chlore, ammoniac, etc.) relatif au risque d’accident majeur.

Concernant la vulnérabilité perçue et la gravité perçue nous avons construit pour l’évaluation de chaque dimension trois items. Ces deux dimensions (i.e., vulnérabilité perçue et gravité perçue) déterminent la menace perçue.

Concernant l’efficacité des recommandations, l’auto-efficacité, le rapport « bénéfice vs coût », l’intention comportementale ainsi que le comportement passé, nous avons construit pour chacun d’eux quatre items. Les trois premiers portant sur des éléments généraux de la sécurité. Pour chacune de ces dimensions le dernier item portait spécifiquement sur le retour d’expérience (cf. annexe 3 ; questions 10, 14, 18, 22, 26).

L’efficacité des recommandations et l’auto-efficacité déterminent l’efficacité perçue.

Concernant le rapport « bénéfice vs coût », nous avons-nous même construit nos items. Nous n’avons donc pas utilisé la formule mathématique87 proposée par Witte, Cameron, McKeon et Berkowitz (1996 ; p. 321) permettant de connaître le rapport entre efficacité perçue et menace perçue. Dans un souci d’homogénéité, nous avons préféré utiliser une mesure par questionnaires pour toutes les composantes de notre modèle.

Nous avons également mesuré le comportement passé avant et après. Celui-ci, ne devrait en théorie pas être modifié, puisque entre avant et après la formation, les individus ne sont pas retournés sur site et donc n’ont pas changé leurs comportements. Cependant, nous étions intéressés par la perception des stagiaires sur leurs propres comportements passés.

Nous rappelons que l’objectif de notre formation est la maîtrise des risques d’accidents majeurs à travers la mise en place de certains comportements sécuritaires. Dans le cadre de notre travail nous nous sommes focalisés sur la participation des acteurs au retour d’expérience comme comportement sécuritaire. Ce comportement général peut être décomposé en une chaîne de comportements plus précis et plus explicites : identifier, collecter, analyser les incidents, mettre en place des actions correctives et partager sur les

87 Selon cette formule il convient de faire la somme des items de l’efficacité perçue et la somme des items de la

menace perçue, puis ces deux sommes sont standardisées. Pour terminer, on retranche le score Z de la menace perçue au score Z de l’efficacité perçue afin d’obtenir une valeur critique : Valeur critique = z (efficacité perçue)

étapes précédentes. Nous n’avons pas souhaité détailler beaucoup plus les comportements liés au retour d’expérience et rester au niveau du concept « retour d’expérience » au niveau de l’efficacité perçue, de l’auto-efficacité, du coût-bénéfice et de l’intention. Ces 4 items représentent la dimension « retour d’expérience » (cf. annexe 3 ; questions 10, 14, 18, 22).

Le fait de faire répondre les sujets avant et après la formation, nous permet de disposer d’une variable indépendante intra-sujet (i.e., formation) à deux modalités (avant vs après).

En début de formation, les individus reçoivent le questionnaire permettant d’évaluer les dimensions. Celui-ci est également distribué à la fin de la formation, au bout des trois jours.