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Plaidoyer pour la conception de formations spécifiques à la maîtrise des risques

2 CHAPITRE I : Vers une maîtrise des risques industriels axée sur la formation

2.3 Apprentissage de la maîtrise des risques

2.3.2 Maîtrise des risques à travers la formation des acteurs

2.3.2.3 Plaidoyer pour la conception de formations spécifiques à la maîtrise des risques

Au vu des différentes actions de maîtrise par rapport aux différents risques nous en arrivons à la conclusion qu’une réflexion importante doit être menée pour la conception de formations.

Mettre en place un référentiel, uniquement pour connaître le strict nécessaire des connaissances à acquérir dans le domaine de la sécurité pour un type d’industrie est en soi un travail colossal.

De plus, nous avons vu que l’objet « risque » est un objet complexe et polysémique qui ne s’apparente pas aux autres notions qu’il est possible d’enseigner dans les écoles et universités. Cette raison est principalement à lier à ses propriétés intrinsèques qui font de lui un objet de projection dans l’espace et le temps.

Ainsi, concevoir des formations à la maîtrise des risques doit différer de la conception des formations pour les sciences de l’ingénieur. En effet, des facteurs liés à la représentation du risque doivent être pris en compte, notamment la réponse émotionnelle face à un risque important (Specht, Denis-Rémis, Chevreau, Wybo, Guerrillot, Guinet et Rangamie, 2005). Tous ces points nous amènerons à nous intéresser à comment concevoir des formations et quels mécanismes psychologiques devons nous prendre en compte.

La conception de formations doit nous amener à répondre à notre problématique de modification des comportements des individus. Pour cela, nous devons nous interroger sur le cheminement qui peut amener des individus à adopter ou non des comportements de sécurité.

Kouabenan (2006) souligne la nécessité pour des campagnes de prévention de mettre en place un modèle de comportement. Selon l’auteur ce type de modèle présente l’avantage de

proposer une démarche rationnelle et cohérente mais également plus simple à évaluer : « En

l’absence d’un modèle théorique, les campagnes risquent de « naviguer à vue » et de ne pas atteindre leurs objectifs ou des les atteindre « par accident ». » (p. 286). Nous rejoignons ici

ces propos, les éléments que nous avons présentés nous invitent à nous focaliser sur les comportements, mais en prenant en compte les spécificités de chaque danger. Nous devrons également prendre en compte les différents contextes des risques associés à ces dangers afin de définir au mieux les comportements de sécurité appropriés.

2.3.3 Conclusion

L’apprentissage de la maîtrise des risques peut être caractérisé comme l’étape indispensable d’appropriation. Un des principaux moteurs de l’apprentissage de la maîtrise des risques est caractérisé par le retour d’expérience qui peut être considéré comme un outil de management, utilisé pour identifier les causes de dysfonctionnement par l’analyse des faits et pour en tirer des leçons. Pour les différents risques que nous avons présentés, le retour d’expérience permet de réaliser un apprentissage à condition que les enseignements effectués soient partagés auprès des différents acteurs.

Ce partage peut être effectué de différentes manières, la formation étant la plus utilisée. Moteur de prévention, la formation s’intéresse généralement peu aux comportements de sécurité à mettre en place. Nous pensons pourtant que nous devons impérativement cibler spécifiquement les comportements appropriés. En outre, nous avons à notre disposition tous les outils nécessaires pour cette identification. Nous postulons que la formation est un outil approprié pour modifier les comportements à condition de concevoir spécifiquement les formations en fonction des risques à maîtriser.

Cependant, nous pensons que les formations actuelles partent du principe qu’un individu informé sur les risques se comportera comme un acteur de la sécurité. Pourtant si de simples brochures distribuées ou une simple campagne de prévention avaient permis de modifier durablement et efficacement les comportements, nous n’aurions pas besoin de nous interroger. Il convient donc de se questionner sur les liens entre danger, représentation du risque et comportements de sécurité.

2.4 Conclusion

Dans une première partie nous nous sommes intéressés au lien qui unit le danger et le risque. Si le premier à l’origine des risques est matériel, le second n’existe que par la représentation que s’en font les individus. Dans le cadre de notre travail ce sont les risques

industriels qui attireront notre attention. Nous les avons classifiés avant d’aborder la démarche générale de maîtrise des risques fondée sur un système dynamique cherchant d’une part à les évaluer et d’autre part à les gérer. Les propriétés intrinsèques de l’objet risque font que cette maîtrise doit passer par une prise en compte de la représentation des individus dans un objectif de modification comportementale.

Au cours d’une deuxième partie, reprenant notre typologie des risques industriels, nous nous sommes plus particulièrement intéressés à la maîtrise des risques d’accidents du travail en proposant une méthodologie adaptée au poste de travail qui porte une première réflexion sur les comportements. Nous avons détaillé la maîtrise des risques d’accidents majeurs qui repose sur quatre stratégies fondées sur des mesures de prévention et de protection. Nous avons également brièvement évoqué les stratégies de maîtrise des risques de crises et de prévention des maladies professionnelles. Lors du détail de ces différentes stratégies nous avons apporté une attention particulière sur les comportements de sécurité spécifiques participant à la gestion des risques.

Pour terminer nous avons abordé la question de l’apprentissage de la maîtrise des risques en développant le principal moteur à savoir le retour d’expérience. Nous avons illustré l’apport du retour d’expérience pour les différents risques que nous avons décrits précédemment. Néanmoins, pour que ce retour d’expérience puisse bénéficier aux individus il doit être partagé. Ainsi, la formation peut être considérée comme le vecteur de ce partage. Cependant, si nous souhaitons que les individus deviennent acteurs de la maîtrise des risques cela sous-entend qu’ils devront mettre en place des comportements de sécurité appropriés.

Si l’on souhaite modifier les comportements il convient de s’interroger sur le lien entre représentations et comportements. L’information sur les risques modifie-t-elle les représentations des individus ? Ce changement de représentation entraîne t-il une production comportementale rendant de fait les individus acteurs de la maîtrise des risques ?

Dans notre prochain chapitre nous nous intéressons aux liens possibles entre le danger et les comportements associés. Pour répondre à cette exigence nous proposerons une démarche de modélisation qui s’intéressera aux représentations du risque. Cette démarche sera réalisée non pas dans un objectif de modélisation de ce phénomène complexe mais dans un objectif d’utilité pour l’action, à savoir une aide pour la conception de formations visant à faire produire des comportements sécuritaires.

3 CHAPITRE II : Des dangers aux comportements de