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Maîtrise de l’urbanisation

2 CHAPITRE I : Vers une maîtrise des risques industriels axée sur la formation

2.2 Maîtrise des risques industriels

2.2.3 Maîtrise des risques d’accidents majeurs

2.2.3.5 Maîtrise de l’urbanisation

Afin d’être proche de leurs lieux de travail les employés de sites industriels ont tendance à chercher à s’en rapprocher. Les entreprises elles-mêmes ont également tout intérêt à rechercher cette proximité des villes afin de minimiser les coûts de transports et de se rapprocher géographiquement des différents acteurs (e.g., clients, sous-traitants, fournisseurs,

etc.).

L’histoire a montré une évolution de la position de l’administration vis-à-vis des sites considérés à hauts risques. C’est suite à l’accident de la poudrerie de Grenelle en 1789 que naquit le décret impérial du 15 octobre 1810 qui avait pour objet « la nécessaire conciliation

au cours de cette période était d’éloigner les usines de la ville. Suite à la loi du 19 décembre 1917 sur les « établissements dangereux, insalubres et incommodes » qui a eu comme objectif de développer une police d’inspection pour ces établissements, la tendance s’est inversée car les missions de cette police n’ont pas été clairement définies. On observe un mouvement de rapprochement des usines chimiques vers les zones urbaines qui s’opère entre les années 1950 et le début des années 1970. Bonnaud et Martinais (2005, p. 9), illustrent ce constat « A la fin

des années 1960, dans le couloir de la chimie lyonnais, la ville et les usines se sont finalement rejointes pour s’intégrer dans le même paysage urbain. Les installations dangereuses et polluantes, regroupées le plus souvent dans de vastes plates-formes industrielles, côtoient désormais les quartiers d’habitat populaire. […] La cohabitation des industries à risque et des aires urbaines n’apparaît véritablement comme un problème qu’à partir des années 1970, avec l’émergence des préoccupations environnementales et le constat d’une sensibilité accrue aux accidents industriels, perçus comme manifestation tangible des dégâts du progrès ».

Pour répondre aux questions soulevées par la proximité des usines chimiques ou pétrolières et des espaces résidentiels de la plupart des grandes agglomérations françaises un programme d’action publique va être lancé comprenant deux axes (Gilbert, 2003) :

• La prise en compte de l’environnement dans les activités industrielles à risque qui se traduit sur le plan réglementaire par l’imposition d’exigences plus fortes en matière de sécurité et de protection de l’environnement au travers de la loi du 19 juillet 1976 relative « aux installations classées pour l’environnement » et au travers de la directive dite « Seveso ».

• La possibilité de maîtriser l’urbanisation dans le voisinage des installations dangereuses (i.e., loi du 22 juillet 1987).

Ces nouveaux outils ont pour objectif de permettre que les établissements dangereux puissent continuer de se développer à la périphérie des villes (Bonnaud et Martinais, 2005).

La catastrophe d’AZF, le 21 septembre 2001 a relancé le débat sur la place des industries à risque dans la ville. A la suite de cet événement va naître la loi du 30 juillet 2003 qui va chercher au travers de deux outils à maîtriser l’urbanisation autour des sites à risque. Le premier outil concerne la mise en œuvre de servitudes d’utilités publiques23 qui peuvent être appliquées pour tout risque nouveau engendré par l’extension ou la création d’une installation industrielle à hauts risques qui nécessiterait une restriction supplémentaire de l’utilisation des sols. Le second outil concerne la mise en œuvre de plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Ces plans ont pour objectif de délimiter des zones (réalisées à partir

de l’étude de dangers fournie par l’industriel) à l’intérieur desquelles des prescriptions sur le bâti présent et futur pourront être appliquées. Ces prescriptions ont pour objectif de limiter l’exposition de la population en cas d’accident au travers de la définition de secteurs à l’intérieur desquels l’expropriation est possible, d’autres à l’intérieur desquels les communes peuvent donner aux propriétaires un droit de délaissement, et enfin certains à l’intérieur desquels les communes peuvent préempter les biens à l’occasion de transferts de propriétés. Au travers de cette loi du 30 juillet 2003 on observe une inversion pour le traitement de la maîtrise de l’urbanisation : « Alors que la catastrophe d’AZF avait vu quelques édiles locaux

réclamer la délocalisation des Seveso les plus dangereuses, la loi Bachelot écarte totalement ces dispositions au profit d’un départ programmé des voisins exposés au risque » (Deharbe,

2003, p. 236). L’idée est maintenant de créer une zone de « vide » entre les usines et la ville en éloignant les habitants des zones les plus exposées aux dangers des usines. Cependant, si la philosophie originale a bien été conservée (i.e., éloigner les populations des nuisances), la méthode a changé puisque ce ne sont plus les usines que l’on délocalise mais les individus (Bonnaud et Martinais, 2005).

Pour conclure, il est possible de distinguer quatre axes pour la maîtrise des risques d’accidents majeurs. Concernant le premier (i.e., réduction du danger à la source et maîtrise des risques), c’est principalement sur la maîtrise du risque procédé qui permet de travailler sur les comportements. Les plans d’urgences (i.e., POI et PPI) renvoient également spécifiquement à des comportements pour les acteurs de la maîtrise des risques et le public. Ce public reçoit une information, mais celle-ci ne se préoccupe pas du lien entre connaissance du risque et comportement vis-à-vis des risques. La maîtrise de l’urbanisation se prête peu aux comportements individuels mais fait partie de ce dispositif intégré de la maîtrise des risques.

Nous conclurons ce chapitre sur une réflexion sur ces comportements et comment agir pour les modifier dans une optique de sécurité.