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Modification des comportements

4 CHAPITRE III : La formation « Culture de Sécurité » : Concevoir, mettre en place et

4.2 Le module de formation « culture de sécurité »

4.2.5 Evaluation de la formation « culture de sécurité »

4.2.5.3 Modification des comportements

Un an et demi après la formation (i.e., quinze sessions de formation effectuées) et avant de lancer nos expérimentations, nous avons réalisé un questionnaire par e-mail, portant sur les

comportements rapportés par les individus. Nous avons interrogé de manière anonyme79 238 stagiaires ayant suivi la formation (n = 238). Nous avons obtenu un retour de 130 personnes (n = 130). Il est intéressant de noter que de nombreuses personnes nous ont indiqué ne pourvoir se connecter80 pour répondre au questionnaire et nous ont demandé une solution alternative. Nous avons donc envoyé un questionnaire en version électronique (i.e., format .pdf) mais comme celui-ci ne garantissait plus l’anonymat, nous n’avons pas comptabilisé ces réponses. En outre, un renvoi par courrier aurait pu être possible mais la modification des conditions de réponses devenant très importante par rapport à celles initialement prévus (i.e., Internet, sans contact avec l’expérimentateur, etc.), nous en sommes restés au retour par mail.

A la question 1 (i.e., Selon vous, cette formation a-t-elle changé votre manière de

travailler ?). Ils sont 51% (n = 66) à indiquer que cette formation a changé leur manière de

travailler.

A la question 2 (i.e., Pensez-vous que cette formation vous a aidé dans votre travail ?). Ils sont 83 % (n = 108) à déclarer que cette formation les a aidés dans leur travail.

A la question 3 (i.e., Avez-vous donné une suite à cette formation dans votre travail ?). Ils sont 64 % (n = 83) à déclarer avoir donné une suite dans leur travail après la formation. Si à cette question les stagiaires répondaient par l’affirmative, ils avaient la possibilité d’affiner leurs réponses81 :

• 43 % (n = 56) « En discutant sécurité avec vos collègues ».

• 17 % (n = 22) « En vous rapprochant de votre interlocuteur sécurité ». • 4% (n = 5) « En effectuant une autre formation ».

• 22% (n = 28) « En communiquant la formation dans vos ateliers ». • 40% (n = 53) « En faisant plus de retour d’expérience sur les incidents ».

• 7% (n = 9) « Autre(s)82 » (e.g., rédaction d’une procédure relative à l’anoxie, en communiquant avec le CHSCT, en acceptant une prise de fonction au service sécurité, etc.).

79 Les stagiaires ouvraient une session Internet leur garantissant l’anonymat. L’avantage de ce type de

questionnaire est de « contraindre » les individus à répondre aux questions une par une sans pouvoir revenir en arrière et sans avoir la possibilité de connaître le thème de la question suivante.

80 Pour des raisons de sécurité, certaines personnes travaillant sur certains sites industriels, n’ont pas de

connections internet mais reçoivent leur e-mails.

81 Dans cette question les réponses sont non exclusives. 82 Les réponses sont libres.

A la question 4 (i.e., Depuis cette formation, avez-vous modifié des habitudes ou mis en

place de nouveaux comportements ?). 45% (n = 59) des individus indiquent avoir modifié

leurs habitudes ou mis en place de nouveaux comportements. Cette question étant ouverte83, nous ne souhaitons pas décrire ici toutes les actions. Cependant, 53% (n = 31) rapportent effectivement un acte comportemental (e.g., Nomination d’un technicien par équipe ayant pour but de répertorier les problèmes de sécurité dans son périmètre ; Formations ou information « spot » sous forme de réunions d’équipes sur des sujets spécifiques, etc. ) et 27 % (n = 16) rapportent participer à une action de retour d’expérience (e.g., Communication systématique des incidents pouvant entraîner des accidents au personnel du service EHS et au CHSCT84 ; Consultation régulière des incidents groupe pour un retour d'expérience partagé,

etc.).

Le tableau 11 résume les comportements rapportés par les individus après avoir suivi cette formation.

Tableau 11 : Comportements rapportés par les individus après avoir effectué la formation Comportements rapportés après la formation

1) Selon vous, cette

formation a-t-elle changé votre manière de travailler ?

2) Pensez-vous que

cette formation vous a aidé dans votre travail ?

3) Avez-vous donné

une suite à cette formation dans votre travail ?

4) Depuis cette

formation, avez-vous modifié des habitudes ou mis en place de nouveaux comportements ? Oui (n) 66 108 83 59 Non (n) 64 22 47 71 Pourcentage Oui 51% 83% 64% 45% Pourcentage Non 49% 17% 36% 55%

Il semble donc bien qu’après cette formation les individus déclarent avoir de nouveaux comportements sur la sécurité et notamment en rapport avec le retour d’expérience. Ce point est important car il valide notre objectif principal à savoir obtenir de nouveaux comportements par la mise en place d’une formation à la maîtrise des risques.

Il semble donc qu’au travers de cette formation un changement se soit opéré. Le praticien avait pour objectif de modifier son organisation afin de rendre les individus acteurs de la sécurité au travers de la mise en place d’une « culture de sécurité ». Ainsi, si les comportements rapportés par les individus se traduisent effectivement dans la réalité par de comportements alors nous pouvons considérer que l’objectif de changement est atteint.

83 Dans cette question les réponses sont non exclusives. 84 Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail.

4.2.6 Conclusion

Au cours de cette partie, nous avons présenté la construction d’un programme de formation intitulé « culture de sécurité ».

Reprenant notre modèle issu de l’ingénierie pédagogique nous avons tout d’abord commencé par la phase de diagnostic qui nous a permis de définir les objectifs de la formation, les ressources et contraintes de ce projet ainsi que de réaliser une analyse du public à former. Des objectifs en termes de connaissances et de compétences ont été envisagés pour un module de formation de vingt heures pour la population de cadres de production chimique. Cette formation porte pour sa plus grande partie sur la maîtrise des risques d’accidents majeurs.

Notre deuxième phase de design a été essentiellement axée sur les leviers d’actions à mettre en place. Nous avons fait le choix de générer une réaction émotionnelle chez les stagiaires au travers de la menace perçue, celle-ci étant accompagnée de mesures de maîtrise des risques efficaces et devant être perçues comme telles. Nous avons voulu pouvoir inclure de la communication engageante mais celle-ci n’a été utilisée que pour notre expérimentation. Notre troisième phase a porté sur le développement proprement dit du module de formation. Trois parties sont distinctes dans ce développement à savoir, le support, les exercices et les études de cas.

Une fois la formation réalisée, il faut passer à la conduite de celle-ci. Nous avons précisé quelque peu le contexte des actions de formation ainsi que des éléments du discours et gestes que nous avons utilisés pour faciliter l’apprentissage.

Nous avons évalué l’impact de la formation « culture de sécurité » sur certains points. Concernant l’évaluation des connaissances, celle-ci a été faite par questionnaire à la suite de la formation. Même si ces critères d’évaluation nous ont été imposés, ils montrent que les stagiaires ont acquis des connaissances suite à cette formation. Les compétences ne pouvant être dissociées de l’action, nous ne sommes pas en mesure de les évaluer. L’évaluation de la formation et de l’animateur permettent de considérer que la formation est très appréciée par les stagiaires. Pour terminer nous avons pu nous intéresser aux comportements rapportés. Une grande partie des individus ayant suivi la formation nous indiquent avoir modifié leurs comportements dans un sens sécuritaire. Ce dernier point nous amène à considérer que la formation a effectivement permis de produire des comportements de sécurité. Cependant, il convient de rester prudent car les comportements sont rapportés et pour affirmer notre hypothèse de changement il aurait fallu observer les comportements en situation écologique, même si rien ne laisse suspecter que les individus n’ont pas effectivement produit ces actes.

Si cette formation donne des résultats, il est intéressant de considérer la part de nos leviers d’actions dans cet impact. De très nombreux items peuvent être intéressants à évaluer à condition de s’arrêter quelque peu sur la construction d’un questionnaire et surtout de s’interroger sur les critères que l’on souhaite évaluer. Ajzen (2002) propose notamment une méthodologie complète pour l’évaluation des items de sa théorie du comportement planifié (Ajzen, 1991). Dans le cadre de notre travail, nous avons fait le choix de nous consacrer intégralement à l’évaluation de l’impact de notre modèle. Une fois obtenu un module de formation complètement stable, nous avons pu concevoir et utiliser nos propres mesures (cf. expérimentation).

Il pourra être pertinent de s’intéresser dans un second temps à d’autres mesures d’impact de la formation telles que celles définies par Ajzen (1991) par exemple.

Toujours dans le cadre de notre « Recherche Action », nous avons fait le choix de mettre en place un programme expérimental portant sur notre modèle et évaluant le poids de différentes variables. Pour rendre cette expérimentation possible, il a fallu pouvoir arrêter l’évaluation des connaissances des individus. Le fait qu’aucun stagiaire n’ai ajourné son évaluation des connaissances lors des précédentes sessions a permis de justifier d’arrêter l’évaluation pour toute la période du programme expérimental.