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PREMIÈRES UTILISATIONS DU PRINCIPE D'ÉQUIVALENCE (1907−1911)41 Du premier résultat, Einstein conclut que les rayons lumineux se propageant

Extension de la relativité restreinte via le principe

3.1. PREMIÈRES UTILISATIONS DU PRINCIPE D'ÉQUIVALENCE (1907−1911)41 Du premier résultat, Einstein conclut que les rayons lumineux se propageant

dans une autre direction que l'axe ξ doivent subir une déviation dans un champ gravitationnel. Il trouva toutefois que l'eet était si petit sur Terre qu'il n'avait pas d'espoir de pouvoir le vérier. (A cette date, Einstein n'avait pas encore l'idée d'utiliser une éclipse solaire pour tester la déviation.) En ce qui concerne le deuxième résultat, il est intéressant de noter qu'Einstein déduisit la gravité de l'énergie du principe d'équivalence. Ceci montre qu'Einstein considérait le principe d'équivalence plus fondamental qu'une vérication expérimentale de l'égalité des masses inerte et gravitationnelle dont il aurait pu avoir connais- sance. La raison de la conance d'Einstein dans le principe d'équivalence était qu'il voyait dans ce principe un moyen d'étendre la relativité restreinte, comme nous l'avons vu précédemment.

Les dérivations d'Einstein de la vitesse de la lumière et de la masse gravi- tationnelle de l'énergie étaient en fait superues. L'égalité des masses inerte et gravitationnelle découle directement, sans démarche supplémentaire, de l'iden- tité ontologique postulée d'un champ d'accélération uniforme avec un champ de gravitation uniforme. La vitesse de la lumière variable est, par ailleurs, une conséquence directe de la dénition du temps du système de coordonnées. Tant que le temps propre est utilisé, la vitesse de la lumière est partout égale à c dans le système accéléré. Si le temps du système de coordonnées τ = σ 1 − Φ

c2  est utilisé, alors la vitesse de la lumière est égale à

c0= L τ = L σ 1 −cΦ2  = c  1 + Φ c2 

(où L est une longueur) et varie donc avec la position. Einstein devait prendre conscience de ces dérivations améliorées en 1911, comme nous le verrons.

Le premier essai d'Einstein de généraliser la théorie de la relativité res- treinte ne fut pas très concluant et souleva plus de questions qu'il ne donna de réponses. Einstein apparemment n'avait pas d'espoir immédiat de vérier le principe d'équivalence. Par ailleurs, la théorie des systèmes accélérés devait s'avérer être plutôt subtile et dicile. Même dans le cas simple du mouvement accéléré uniforme et une approximation du premier ordre, il fallait introduire un nouveau concept de temps, i.e. le temps du système de coordonnées, qui n'était pas directement donné par la lecture d'horloges. Ainsi, le temps global du sy- tème de coordonnées devenait une construction conceptuelle sans signication physique immédiate. Plus tard, Einstein réalisa que la situation était même pire et que même le concept de coordonnées spatiales n'avait plus de signication immédiate. Cela demanda à Einstein de nombreuses années avant qu'il put cla- rier la situation. Aussi, il n'est pas surprenant qu'Einstein se tourna en 1908 vers un but plus immédiat : l'intégration de la gravitation dans la théorie de la relativité restreinte. Einstein, toutefois, devint rapidement convaincu qu'une telle tentative était sans espoir car elle semblait conduire à une remise en cause de la stricte égalité entre les masses inertielle et gravitationnelle, et donc à une contradiction avec le principe d'équivalence ; il ne publia rien à l'époque. En fait, Einstein probablement réalisa déjà, à ce moment, qu'étant donné que le prin- cipe d'équivalence prédit une vitesse de la lumière variable, il aurait à choisir

42CHAPITRE 3. EXTENSION DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE VIA LE PRINCIPE D'ÉQUIVALENCE (1907−1912) tôt ou tard entre la théorie de la relativité restreinte et une théorie plus générale

intégrant le principe d'équivalence. Einstein devait opter pour le second choix, ce qui explique sa renonciation plutôt rapide à sa tentative de développer une théorie relativiste de la gravitation dans le cadre de la théorie de la relativité restreinte. Nous analyserons la brève tentative d'Einstein ainsi que les tentatives d'autres personnes pour intégrer la gravitation dans la théorie de la relativité restreinte dans la deuxième partie de ce chapitre.

3.1.3 Pleine conance dans le principe d'équivalence et

dans une relativité générale (1911)

Lorsqu'Einstein écrivit l'article de synthèse de 1907, il était encore employé au bureau des brevets à Berne et devait y rester encore deux années. Durant cette même année 1907, Einstein t une demande de poste comme Privatdo- zent à l'Université de Berne où une chaire de physique théorique avait été créée en 1906. Einstein envoya son article révolutionnaire de 1905 sur la théorie res- treinte, mais celui-ci fut rejetté comme étant insatisfaisant.33 Une autre tenta-

tive, l'année suivante, fut couronnée de succès et Einstein commença à enseigner à la rentrée de 1908. Comme les cours d'Einstein n'étaient pas très brillants à l'époque, la perspective d'un poste de professeur était plutôt mince.34 La si-

tuation devait toutefois changer radicalement en 1909, quand les contributions scientiques d'Einstein commencèrent à recevoir une notoriété publique. Au cours de cette année, Einstein reçut un doctorat honorique de l'Université de Genève en juillet,35 fut invité à la conférence des Naturforscher à Salzburg en

septembre,36 et devint un professeur associé en physique théorique à l'Univer-

sité de Zürich en octobre.37 A partir de ce moment, les universités devaient

rivaliser d'eorts pour inclure Einstein dans leur corps enseignant. Einstein en- seigna seulement trois semestres à l'Université de Zürich puis, autour de Pâques 1911, fut nommé à l'Université de Prague, où il devint professeur en physique théorique. Cette université était celle où Mach avait été actif durant 28 ans (1867 − 1895).38

La nomination d'Einstein à Prague fut étroitement associée à l'inuence phi- losophique de Mach. La personne décisive dans la procédure de nomination, le physicien Anton Lampa, un ancien étudiant de Mach et un ardent supporter de la philosophie positiviste de Mach, proposa la nomination d'Einstein en partie parce qu'il pensait que l'enseignement d'Einstein incorporerait la ligne de pensée de Mach.39Mach, qui était à la retraite à Vienne à l'époque, avait été en corres-

pondance avec Einstein depuis 1909. Quatre lettres (toutes d'Einstein à Mach) sont connues. Dans la première lettre, datée d'août 1909, Einstein écrivit :

33Seelig, Albert Einstein (1960), p. 150. 34Ibid., pp. 154-55.

35Ibid., 157-60. 36Ibid., p. 145. 37Ibid., pp. 162-68.

38Erwin Hiebert, "E. Mach," Dictionary of Scientic Biography, 8 (1973), p. 596. 39Philippe Frank, Einstein : His Life and Times, rev. ed. (New York : Alfred A. Knopf,

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