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DISSATISFACTION ÉPISTÉMOLOGIQUE D'EINSTEIN VIS À VIS DE LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE23 forces centrifuges sont présentes Ainsi, remarque Newton, les forces centrifuges

La théorie de la relativité restreinte

2.2. DISSATISFACTION ÉPISTÉMOLOGIQUE D'EINSTEIN VIS À VIS DE LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE23 forces centrifuges sont présentes Ainsi, remarque Newton, les forces centrifuges

dans l'eau ne sont pas produites par le simple mouvement relatif entre l'eau et le récipient mais seulement par la rotation véritable de l'eau par rapport à l'espace absolu. En conséquence, conclut-il, les forces centrifuges fournissent un moyen de distinguer le mouvement absolu du mouvement relatif.79L'expérience

du seau d'eau de Newton n'établit pas les propriétés d'indépendance absolue, d'immutabilité, d'immobilité qui proviennent plutôt de la philosophie propre de Newton qui considérait l'espace absolu comme le sensorium de Dieu.80

Certains allèrent même jusqu'à considérer l'espace comme Dieu lui-même. L'évêque George Berkeley rejetta cette identication ainsi que la croyance "qu'il y a quelque chose à côté de Dieu qui est éternel, non créé, inni, indivisible, im- muable" comme étant des "notions pernicieuses et absurdes."81 Comme Gott-

fried Leibniz et Christiaan Huygens avant lui,82 Berkeley essaya de surmonter

les arguments de Newton en redénissant le concept de mouvement.83En 1721,

il proposa de remplacer le concept d'espace absolu par un espace relatif, déni en termes d'étoiles au repos.84Une telle dénition, tout en étant en accord avec les

résultats expérimentaux établis, rendait conceptuellement possible la détermi- nation du comportement inertiel des corps par les astres plutôt que par l'espace absolu. Leonhard Euler, un défenseur du concept d'espace absolu, n'aima pas l'idée et écrivit : "Ce serait une proposition bien étrange & contraire à quantité d'autres dogmes de la Métaphysique, de dire, que les étoiles xes dirigent les corps dans leur inertie."85

Plus d'un siècle plus tard, Ernst Mach réintroduisit l'argument d'une in- uence des astres sur le comportement inertiel des corps et le présenta de façon scientique dans sa Mécanique (1883). Mach fut le premier à présenter une nouvelle interprétation physique de l'expérience du seau d'eau de Newton qu'il décrivit comme suit :

L'expérience du vase rempli d'eau animé d'un mouvement de rota- tion nous apprend que la rotation relative de l'eau par rapport au vase n'éveille pas de forces centrifuges apparentes, mais que celles-ci sont éveillées par son mouvement relatif par rapport à la masse de la terre et aux autres corps célestes ; elle ne nous apprend rien de plus. Personne ne pourrait dire ce que l'expérience aurait donné si la paroi du vase avait été rendue plus épaisse et plus massive, jusqu'à avoir

79Ibid., pp. 10-11.

80Isaac Newton, Opticks, based on the 4th ed., London, 1730 (New York : Dover, 1952),

Query 28, p. 370 ; Query 31, p. 403. Voir également H. G. Alexandre ed., The Leibniz-Clarke Correspondence (1956 ; rpt. New York : Barnes & Noble, 1976), introduction, pp. XV-XVI, XXXIV ; Max Jammer, Concepts of Space, 2nd ed. (Cambridge, MA : Harvard University Press, 1969), chap. 4.

81Berkeley, Principles of Human Knowledge, dans Berkeley : Essay, Principles (1929), p.

191, par. 117.

82Jammer, Concepts of Space (1969), pp. 119-25. 83Berkeley, Principles, pp. 188-90, pars. 114-15.

84George Berkeley, De Motu, dans David M. Armstrong ed., Berkeley's Philosophical Wri-

tings (New York : Macmillan, 1965), p. 270, par. 64.

85Leonhard Euler, "Réexions sur l'Espace et le Temps," Histoire de l'Académie Royale des

24 CHAPITRE 2. LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE une épaisseur de plusieurs lieues. Nous n'avons devant nous qu'une expérience unique et nous avons à la mettre d'accord avec l'ensemble des faits qui nous sont connus, mais non pas avec les ctions que l'on imagine.86

Ainsi Mach suggéra que les forces centrifuges pourraient être produites par des interactions (dont il ne précisa pas la nature) entre des masses, plutôt que par une rotation absolue. Nous appellerons cette hypothèse "l'hypothèse de Mach". De même, Mach considéra le mouvement inertiel rectiligne comme étant relatif aux masses éloignées.87L'hypothèse de Mach devait stimuler Einstein dans son

rejet du concept d'accélération absolue.

2.2.2 Rejet d'Einstein du concept d'accélération absolue

Les remarques d'Einstein citées ci-dessus indiquent que sa préoccupation ini- tiale pour développer la relativité générale fut d'étendre la relativité restreinte en éliminant le concept d'accélération absolue (i.e. d'espace absolue). Einstein exprima la même opinion à plusieurs occasions.88Cette opinion est aussi conr-

mée par Anton Reiser,89Wolfgang Pauli,90Arnold Sommerfeld,91et Cornelius

Lanczos,92pour mentionner suelement quelques personnes. Nous verrons que le

rejet d'Einstein du concept d'accélération absolue apparaît explicitement dans de nombreux articles d'Einstein. En fait ce fut une préoccupation durant toute sa vie. Ainsi en 1953, Einstein écrivit dans la préface de l'ouvrage, Concepts of Space de Max Jammer :

Cela exigea un rude eort pour arriver au concept d'espace indé- pendant et absolu, indispensable pour le développement théorique. Cela n'a pas demandé moins d'eorts acharnés ensuite pour dépas- ser ce concept - - un processus qui n'est probablement en aucun cas encore achevé. . .

La victoire sur le concept d'accélération absolue ou sur le concept de référentiel inertiel devint possible seulement par ce que le concept

86Mach, La Mécanique, p. 225. Mach, Science of Mechanics, p. 284. 87Ibid., Science of Mechanics, pp. 286-87.

88(a) Albert Einstein, "Fundamental Ideas and Problems of the Theory of Relativity," lec-

ture delivered to the Nordic Assembly of Naturalists at Gothenburg, 11 July 1923, dans Nobel Lectures, Physics, 1901-1921, published for the Nobel Foundation (New York : Elsevier, 1967), pp. 482-90, particulièrement pp. 485-86, 488, 489 ; (b) Einstein, Relativity, Special and General Theory, pp. 70-73 ; (c) Einstein, "Autobiographical Notes," pp. 26, 28, 62. (d) Albert Einstein, "Autobiographische Skizze," dans Carl Seelig, Helle Zeit-Dunkle Zeit (Zürich : Europa Verlag, 1956), p. 13.

89Reiser, Albert Einstein (1930), pp. 109-13, en particulier pp. 109-10.

90Wolfgang Pauli, Theory of Relativity, trans. G. Field with supplementary notes by the

author (London : New York : Pergamon, 1958), pp. 142-43.

91Arnold Sommerfeld, "Kurzer Bericht über die allgemeine Relativitätstheorie und ihre

Prüfung an der Erfahrung," Archiv für Elektrotechnik, Berlin, 9 (1921), 391-99, dans Arnold Sommerfeld, Gesammelte Schriften (Braunschweig : Friedr. Vieweg & Sohn, 1968), 2, 270-78 on 273-74.

92Cornelius Lanczos, Space through the Ages : The Evolution of Geometrical Ideas from

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