Préparation et conduite des entrevues semi-dirigées

Cette recherche consistant à analyser des effets d’un dispositif de formation, il nous a fallu recueillir des données liées à l’exploration de la perception des catéchistes paroissiaux quant à leur participation au dispositif de formation. Les entrevues ont été menées longtemps après la participation des catéchistes aux sessions de formation. Nous dirons même qu’elles ont été faites au cœur de l’engagement pastoral des catéchistes paroissiaux. C’est donc par des en- trevues que nous avons observé ce que les participants perçoivent de leur formation comme effets et d’aller plus loin que l’interprétation que nous en ferons. Cette forme d’entrevue est « une mise en scène libre de ce que cette personne a vécu, ressenti, pensé à propos de quelque chose » (Bardin 2009 : 93). Elle est la plupart du temps centrée sur le chercheur de terrain qui, au-delà de sa qualité de chercheur, est aussi impliqué dans ce ressenti ou ce vécu de ceux qui sont interviewés. Il est lui-même en recherche d’autant plus qu’il découvre parfois quelque chose d’imprévisible et, en même temps, il rentre dans l’environnement des indivi- dus pour mieux saisir les conditions de production de leur perception de la réalité à l’étude. Dans notre recherche, nous avons donc mené des entrevues semi-directives et des entrevues de groupe autour d’un questionnaire ouvert. L’avantage de ce type d’entrevue est de favoriser

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l’obtention des données significatives sur le dispositif de formation que les catéchistes avaient auparavant suivie. Nous avons basé nos entrevues sur un questionnaire ouvert en deux volets : des entrevues préliminaires et des entrevues d’approfondissement. Les entre- vues préliminaires concernaient des questions de mise en route, des questions d’ordre général accompagnées de la présentation de la recherche, des modalités et des objectifs poursuivis. Ce volet permettait de mettre le catéchiste en confiance et de créer un environnement d’ap- privoisement. Le second volet était consacré à l’expression libre portant sur un questionnaire orienté vers l’appréciation de ces pratiques par rapport au dispositif de formation. Dans cette manière de procéder, nous voulions arriver à faire parler les catéchistes de leur expérience de participation à ce dispositif de formation. C’est sur ce second volet de questionnaire que nous insisterons le plus.

Dans les entrevues individuelles qui duraient chacune soixante (60) minutes, nous avons ren- contré les catéchistes paroissiaux, c’est-à-dire ceux qui sont en responsabilité pastorale dans une communauté chrétienne locale (poste). Le questionnaire utilisé portait sur la connais- sance du plan de formation, la pédagogie de formation et les propositions pour l’avenir44_{. Ces} grands ensembles ou thèmes comportaient des questions ouvertes articulées au thème prin- cipal. Notre guide ne parlait pas directement des effets du dispositif de formation, mais le défi était de déceler dans les récits des personnes rencontrées ce qui constituait un effet de formation ou un renouvellement de pratique que l’on pourrait imputer à leur participation aux sessions de formation. En effet, les entrevues se déroulant en milieu rural et devant des gens peu habitués à ce type de communication, nous avons pris la peine de ne pas nous pré- senter à eux comme des enquêteurs auprès desquels ils devaient se défendre. Nous avons ainsi conduit notre questionnaire en prenant la position de guide, et à chaque début d’entre- vue, nous partions de ce qu’ils avaient dit dans le volet préliminaire tel : « vous êtes catéchiste dans votre poste depuis x années, vous assistez aux sessions de formation depuis tant d’an- nées, est-ce cela? Pouvez-vous me dire comment vous en êtes arrivé là? » ou « vous savez que je suis hors du diocèse depuis x années, je suis heureux de savoir que les formations en zone pastorale ont continué. Comment ces formations contribuent-elles à vous faire grandir dans votre foi et à améliorer votre engagement pastoral? Ce type de question nous a aidé à

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commencer les entrevues de façon plus vivante et confiante. Les catéchistes se sont mis en confiance et ont ressenti que nous portions un intérêt à leur responsabilité pastorale. La suite des questions a été plus rapide et les entrevues sont devenues parfois un terrain de confi- dences, de découvertes. Nous l’avons fait non plus en suivant scrupuleusement le guide d’en- trevues, mais en faisant remonter les thèmes précis du guide. Il nous a été parfois jugé néces- saire de regrouper certaines questions autour d’un thème commun, de l’énoncer ou de les énoncer et enfin de laisser la personne parler45_.

En cours d’entrevue, il nous arrivait souvent de relancer la personne, surtout lorsqu’elle com- mençait à sortir du thème et à développer d’autres questions. Cette relance devenait parfois nécessaire pour aider la personne à approfondir ou à préciser un point jugé nouveau et im- portant. Toutefois, nous nous sommes trouvé la plupart du temps à suivre la personne plutôt que le guide. Nous laissions faire pour ne pas devoir interrompre le récit de la personne et créer une frustration, mais finalement, dans le récit de cette personne étaient abordées de nombreuses questions du guide. L’ambition en fin d’entrevue était de donner aux personnes interviewées la possibilité d’explorer leur itinéraire personnel, de questionner leur propre histoire et de partager avec le chercheur le questionnement de chaque évidence pour en es- pérer une autre lecture (Donegani 2007 : 110-111).

Par ailleurs, nous avons également mené une entrevue de groupe d’une durée de quatre-vingt- dix (90) minutes. Elle concernait les grands catéchistes, et avait un but complémentaire, celui de croiser le regard de deux groupes de personnes intervenant dans le même contexte. Les grands catéchistes avaient un regard d’ensemble sur la vie de la paroisse. Ils ont des rensei- gnements sur la vie et le travail pastoral sur leur paroisse que les catéchistes n’ont pas. De plus, comme coordinateur de l’activité pastorale, le contenu de leurs entrevues nous a permis de porter un regard plus proche du fonctionnement des communautés animées par des caté- chistes. Voilà pourquoi leur point de vue était devenu nécessaire en raison de leur position au sein de la paroisse, mais aussi des défis et des besoins de formation qui aideraient ces catéchistes à mieux exercer leurs fonctions au sein de leurs communautés. La collecte de données quant à elle, s’est faite au cours d’une sorte de discussion de groupe, au cours de

45 _{Un exemple de regroupement : 2b, 2c pouvaient se retrouver autour du thème de l’actualité du dispositif de}

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laquelle les grands catéchistes donnaient des récits spontanés de leurs perceptions d’une for- mation articulant l’autoformation et le compagnonnage dans un même dispositif de forma- tion. Nous avons suivi la même procédure qu’avec les catéchistes de poste sauf que pour les grands catéchistes, le questionnaire était adapté au groupe. Il était structuré autour de six thèmes suivants : « la perception par les catéchistes de leur formation », « le rôle et la place du catéchiste dans la communauté », « la contribution du dispositif de formation à l’efficacité du travail pastoral des catéchistes », « les attentes et besoins de formation des catéchistes », « les effets de la participation aux formations et leur incidence dans le rapport avec le grand catéchiste » enfin « l’importance et la place du dispositif de formation dans les activités pas- torales de la paroisse » qui répondaient aux questions suivantes :

1. Pouvez-vous me raconter ou m’expliquer comment les catéchistes perçoivent leur formation?

2. Suite à votre regard sur le travail dévolu aux catéchistes, à ce que pensent les com- munautés et la société, comment pouvez-vous imaginer le rôle du catéchiste et sa place dans la communauté paroissiale? quel statut peut-on lui accorder?

3. Comment pensez-vous que le dispositif de formation proposé peut contribuer à l’ef- ficacité des pratiques pastorales des catéchistes paroissiaux?

4. Dans vos rencontres avec les catéchistes, pensez-vous que le dispositif de formation proposé permet de répondre à leurs attentes et à leurs besoins de formation?

5. Quels effets a eu la formation proposée sur votre perception de vous-même en tant que grand catéchiste et chef des autres catéchistes?

6. Un dispositif de formation tel que celui basé sur le « compagnonnage et l’autoforma- tion » répondrait-il, selon vous à un besoin pastoral ou aux défis rencontrés par les catéchistes dans l’exercice de leurs fonctions pastorales? Que faudrait-il privilégier? Sur quoi devrait-on insister plus?

Pour tous ces thèmes, les grands catéchistes devaient s’exprimer ou donner leur avis et con- tribuer ainsi à enrichir le groupe. C’est en écoutant chacun parler, en laissant le débat s’ins- taller que nous avons pu retenir les points saillants de la discussion et enrichir quelquefois ce que nous attendons d’eux. L’avantage que nous avons trouvé dans cette discussion de groupe est que même les plus timides ont réussi à donner leur perception de la réalité mise en dis- cussion. Les échanges ont été plus riches que nous ne l’espérions au départ. En effet, en donnant la parole à tour de rôle à chacun, nous avons pu retenir des thèmes abordés les points sur lesquels plusieurs sont revenus. Ils ont constitué pour nous des repères pour l’avancement de la recherche. Bien entendu, même si nous avons laissé les personnes s’exprimer, nous

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devions recentrer chaque fois le débat pour ne pas sortir du thème ou chevaucher entre les thèmes. Aussi, nous avons accepté que les participants reviennent au cours de la discussion sur un sujet déjà débattu, cela donnait une contribution supplémentaire à la discussion. De plus, pour montrer l’importance de la question, de nouvelles idées pouvaient émerger au fur et à mesure que se déroulait la discussion de groupe. Ce qui démontrait que les participants continuaient à réfléchir sur les thèmes durant l’entrevue et que le nouvel apport permettait d’atteindre un consensus.

Toutes ces entrevues ont été effectuées en langue locale et enregistrées sur un support audio. Puis, elles ont été retranscrites dans un verbatim en employant parfois les expressions équi- valentes. Pour respecter les consignes de confidentialité, nous avons attribué un code à chaque entrevue et les enregistrements ont été conservés en un lieu où seul nous avons accès.