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CHAPITRE 2 RSE et événementiel sportif

4. Le comportement stratégique des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE matière de RSE

4.2. Proposition d’une typologie des comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE d’événements sportifs en matière de RSE

4.2.3. Les précurseurs (ou leaders)

Les organisateurs d’événements sportifs qui adoptent un comportement de type précurseur en matière de RSE se positionnent comme des leaders sur cette thématique. Ils sont régulièrement à la pointe des innovations managériales qui découlent des démarches de RSE.

Ils multiplient les échanges avec leurs parties prenantes, les retours d’expériences et initient volontiers des logiques de gouvernance partagée. Ces organisateurs d’événements sportifs optent pour un comportement proactif au sens de Sethi (1975). Ils développent des relations étroites avec leurs parties prenantes, y compris secondaires et/ou externes, et intègrent leurs apports dans leurs processus de prise de décision. Ils sont attentifs à limiter l’impact négatif de leur activité sur ces parties prenantes et cherchent à maximiser leur impact positif.

L’intégration de la RSE dans leurs stratégies de management peut les conduire à privilégier des comportements éthiques au détriment de leur intérêt économique immédiat. Ils se soumettent librement à des processus indépendants d’évaluation de leurs démarches de RSE.

Les comportements décrits par Oliver (1991) sont essentiellement défensifs et n’indiquent pas une attitude proactive favorable à l’acceptation et à l’intégration des pressions institutionnelles. Tout juste illustrent-ils le fait qu’une organisation peut se soumettre à ces pressions dans l’intérêt de ses parties prenantes et pas uniquement dans son propre intérêt. Le modèle d’Oliver ne permet donc pas de caractériser le comportement précurseur en matière de RSE de certains organisateurs d’événements sportifs. Toutefois, l’attitude de manipulation, qui constitue le degré le plus élevé de résistance aux pressions institutionnelles dans le modèle d’Oliver, pourrait s’entendre en termes positifs. Il s’agirait alors d’une attitude proactive d’encouragement au changement et à l’adoption des pratiques de RSE. Les organisateurs d’événements sportifs dont le comportement stratégique en matière de RSE est précurseur cherchent en effet à influencer leurs parties prenantes et à faire évoluer les procédures de contrôle et d’évaluation. Pour Oliver, il s’agit d’une attitude de manipulation. Nous défendons ici l’idée que cette manipulation peut être effectuée dans un sens positif, avec un objectif d’évolution des pratiques dans une logique de RSE. Cette catégorie d’organisateurs fait passer l’intérêt de la société avant son propre intérêt immédiat, consciente qu’à long terme, les deux se rejoignent. Les précurseurs peuvent donc contribuer à faire évoluer les attentes des parties prenantes d’une façon plus favorable à l’ensemble de la société, par une attitude de manipulation que nous qualifions de manipulation positive pour la différencier de celle du modèle d’Oliver que nous qualifions alors de manipulation négative.

Les précurseurs ont un comportement de meneur qui les pousse à aller au-delà des attentes de leurs parties prenantes et même à les devancer. Ces organisations font plus que ce que la société attend initialement d’elles en matière de RSE. Elles développent des référentiels et des outils d’évaluation en concertation avec des organismes indépendants (ADEME, AFNOR, etc.), participent au développement de nouvelles normes, mettent en place des systèmes de gouvernance partagée, encouragent et favorisent le comportement responsable de toutes leurs parties prenantes (internes et externes, primaires et secondaires). La démarche de ces organisations peut les conduire à faire passer l’intérêt de leurs parties prenantes avant leur propre intérêt immédiat. Leur attitude proactive (Clarkson, 1995) les amène à anticiper leurs responsabilités jusqu’à être parfois perçues comme « militantes ».

Les organisateurs d’événements sportifs dont le comportement stratégique en matière de RSE est qualifié de précurseur adoptent volontiers un rôle de conciliateur (Rowley, 1997).

Ils engagent systématiquement le dialogue avec leurs parties prenantes et sont favorables à la négociation. Ils se trouvent généralement au centre d’un réseau de parties prenantes dense et ont de multiples interactions avec leur environnement. Ce réseau de parties prenantes est source de pressions ou d’attentes à leur égard mais leur position centrale et leur attitude de leader leur permettent de ne pas se contenter de subir ces pressions et d’agir vis-à-vis des parties prenantes pour construire des démarches de RSE concertées.

Les pratiques de RSE sont totalement intégrées à la culture et aux modes de gestion de ces organisateurs d’événements sportifs dits précurseurs en matière de RSE. La raison d’être de ces organisations sociétales (au sens de Bayle et al., 2011) est de participer au développement durable de la société. De fait, il s’agit le plus souvent, pour les auteurs, d’organisations à but non lucratif dont la dimension RSE ou développement durable est inscrite dans les « gènes ». Le sport est utilisé, par ces organisations, comme un vecteur de cohésion sociale, de développement économique, de protection de la santé, d’éducation à l’environnement ou encore de transmission de valeurs. Il est un moyen mais la finalité est le développement durable de la société. Dans cette logique, l’organisation assume toutes ses responsabilités – et parfois même plus.

La figure 2-8 synthétise les principales caractéristiques de chacun des trois comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE identifiés. Elle fait référence aux auteurs et analyses présentées ci-dessus. Elle précise

également que la RSE est plutôt perçue comme un outil par les suiveurs et les pragmatiques, tandis qu’elle est plutôt vécue comme un idéal par les précurseurs. Enfin, le comportement des ces organisations est plus ou moins volontaire selon leur type. Ainsi, le comportement des suiveurs sera plutôt contraint puisque nous avons établi qu’ils se contentent, au mieux, de suivre la réglementation et de répondre aux pressions institutionnelles en la matière. A l’opposé, le comportement des précurseurs sera plutôt volontaire puisque ces derniers sont proactifs et anticipent les attentes de leurs parties prenantes.

Figure 2-8 : Typologie des comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE

Durand et François (2011) notent que les objectifs de la RSE diffèrent selon la vision – instrumentale ou éthique – retenue. Les organisations sportives qui instrumentalisent la RSE l’utilisent principalement à des fins communicationnelles pour améliorer leur image, partager des compétences avec leur réseau et prendre en compte les problématiques sociétales.

L’objectif principal est d’accroître la légitimité de l’organisation au sein de son environnement. Quant aux organisations sportives qui intègrent la RSE à leurs logiques de fonctionnement, elles ont pour objectif d’améliorer leur avantage concurrentiel, de réduire leur impact environnemental, d’améliorer la cohésion interne et d’avoir un apport positif pour les communautés locales et, au-delà, pour la société dans son ensemble. Ce type de démarche s’accompagne d’un véritable changement de « business model ».

Majoritairement utilisées en marketing, les cartes perceptuelles (ou mapping) permettent de représenter graphiquement le positionnement des marques, produits ou entreprises en fonction de deux critères (prix, qualité perçue, performance, notoriété…). Les critères retenus correspondent aux axes et permettent de positionner les marques sur le graphique pour les situer les unes par rapport aux autres. Nous utilisons ce type de représentation graphique dans la figure 2-9 afin de visualiser le positionnement des différents types de comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE les uns par rapport aux autres. Les critères utilisés pour les axes sont le caractère plus ou moins contraint ou volontaire de l’intégration des démarches de RSE (axe des abscisses) et la vision instrumentale ou éthique de la RSE (axe des ordonnées).

Figure 2-9 : Carte perceptuelle des comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE

Nous avons donc identifié trois types de comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs en matière de RSE. Cette typologie repose sur plusieurs critères au premier rang desquels la vision de la RSE retenue (instrumentale ou éthique). Elle est également fonction du degré plus ou moins volontaire ou contraint des démarches de RSE.

Chacun de ces trois types de comportement a été précisément décrit en référence à la littérature scientifique (cf. figure 2-8).

Ce chapitre nous a permis d’établir quelles étaient les spécificités de la « RSE du sport » et de proposer une définition du concept de Responsabilité Sociétale des Organisateurs d’Evénements Sportifs, propre au champ de l’événementiel sportif français :

La Responsabilité Sociétale des Organisateurs d’Evénements Sportifs traduit leur volonté de prendre en compte les enjeux et intérêts économiques, sociaux et environnementaux de l’ensemble de leurs parties prenantes.

Plusieurs autres apports issus de ce chapitre seront également utiles à la poursuite de notre travail de recherche et, notamment, à la présentation des résultats. Nous avons, par exemple, établi quelles sont les différentes catégories de parties prenantes pour un événement sportif et quelle est la nature de la relation qui les lie à l’organisateur de l’événement sportif.

Nous avons constaté que cette relation est double puisque, d’un côté, l’organisateur de l’événement sportif est amené à prendre en compte les intérêts de ses parties prenantes et que, d’un autre côté, celles-ci participent à la stratégie de RSE de l’organisateur de l’événement sportif. Sur la base de cette étude des parties prenantes de l’événementiel sportif, nous serons en mesure de proposer une cartographie des parties prenantes de chaque événement sportif étudié.

Par ailleurs, en nous fondant sur l’analyse de la littérature effectuée au cours de toute cette première partie (chapitres 1 et 2), nous avons proposé une typologie des comportements stratégiques des organisateurs d’événements sportifs. Celle-ci servira de cadre d’analyse pour les cinq études de cas que nous avons menées et dont nous présenterons les principaux résultats dans le quatrième chapitre.

CHAPITRE 3