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CHAPITRE I LES PAYS DE L’UEMOA : UNE SITUATION

5. Quelles perspectives ?

De création récente, l’UEMOA a déjà obtenu des résultats encourageants notamment au plan macro-économique.

Néanmoins ces progrès sont fragiles d’autant que les huit Etats-membres sont partie intégrante d’une zone plus vaste largement dominée par le Nigeria et dans une moindre mesure le Ghana.

5.1. 5.1. Des résultats qui demandent à être confirmés

Les politiques industrielles mises en oeuvre par les Etats membres, dans le cadre des plans de développement successifs, traduisent la volonté d’engager des programmes d’investissement importants, reposant sur la valorisation des matières premières, en vue de l’exportation (café, cacao, or, phosphate, uranium, par exemple) et pour la fabrication de produits se substituant aux produits importés (produits alimentaires, textiles, tabacs, par exemple).

En dépit de ces potentialités et de politiques industrielles ambitieuses, de nombreuses contraintes et d’importants goulots d’étranglement (problèmes d’infrastructures de communication, insuffisance de financement, etc.) limitent encore les possibilités d’accroissement de la production et des échanges des produits.

Après plusieurs programmes d’ajustement, appuyés par la communauté internationale, et l’émergence dans la plupart des pays au début des années 1990 d’un processus de démocratisation ayant élargi les cadres de concertation dans la gestion publique, ainsi que les changements apportés au taux de change par la dévaluation de 1994, des résultats positifs ont été obtenus.

L’UEMOA constitue un tournant important par rapport aux expériences précédentes d’intégration régionale en Afrique sub-saharienne, dans la mesure où elle s’appuie sur un schéma global de réformes économiques. En élargissant l’espace économique, l’UEMOA ouvre des perspectives nouvelles de développement pour ces pays et permet une meilleure insertion dans l’économie mondiale. A travers l’unification des espaces économiques nationaux, il vise à transformer l’espace UEMOA en un marché dynamique et attractif pour les investissements productifs et le commerce. Il s’agit également de consolider le cadre macro-économique des Etats membres à travers l’harmonisation de leurs politiques économiques et monétaires.

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5.2. 5.2. Vers un élargissement de l’UEMOA ?

Les relations informelles nouées au fil du temps entre les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO)1 relancent le débat sur l’élargissement de l’UEMOA au Nigeria et au Ghana.

Deuxième puissance de l’Afrique subsaharienne après l’Afrique du Sud, le Nigeria est la puissance économique dominante de l’Afrique de l’Ouest : Etat fédéral de 120 millions d’habitants - soit le double de la population de l’UEMOA -, le géant de l’Afrique représente à lui seul près d’une fois et demie le PNB des huit pays de l’UEMOA réunis. Il se situe au cinquième rang des pays exportateurs de pétrole membres de l’OPEP et deviendra en l’an 2000 le troisième exportateur du continent.

Le niveau d’urbanisation du Nigeria dépasse la moyenne régionale (50 %) et ce pays dispose de 80 % des diplômés de l’enseignement supérieur de la région.

A son poids économique et politique, il faut ajouter celui d’une armée de 80 000 hommes intégrée dans la force d’interposition interafricaine (l’ECOMOG) créée par la CEDEAO, qui assume un rôle de gendarme régional.

Bien que son poids économique soit bien moindre, le Ghana est également très présent en Afrique de l’Ouest, notamment chez ses voisins immédiats, Côte d’Ivoire et Togo.

C’est ainsi qu’il fournit son électricité au Bénin et au Togo alors que le Nigeria approvisionne le Bénin, le Togo et le Ghana en gaz naturel.

Une grande partie des échanges sont informels et jouent des variations de taux de changes, le Naira et le Cedi étant fortement sous-évalués.

Cette concurrence « déloyale » explique que la création du Marché unique qu’implique l’UEMOA risque à terme de fragiliser l’Union. Aujourd’hui le Nigeria, s’il joue un rôle de pôle conjoncturel, n’a pas de politique régionale cohérente et entraînante. Il exerce au contraire, le plus souvent des effets destructurants sur les économies voisines les plus développées. Il faut à cet égard différencier l’impact du Nigeria sur des petites économies comme le Niger ou le Bénin - qui arrivent à en tirer parti n’ayant jamais eu d’industrie importante - de ses effets en Côte d’Ivoire - qui voit son industrie concurrencée par les importations à bas prix en provenance du Nigeria. Face au rôle grandissant du Nigeria les pays de l’UEMOA et la Côte d’Ivoire en particulier auraient un intérêt évident à allier leurs forces avec le Nigeria pour éviter une concurrence destructrice de leur tissu industriel.

Si l’articulation et la vision régionale élargie n’apparaît pas comme une nécessité pour les Etats, en revanche les grands groupes internationaux ont intégré dans leur stratégie cette grande zone d’Afrique de l’Ouest sans différenciation de frontières entre l’UEMOA - dont essentiellement la Côte d’Ivoire -, le Nigeria ou le Ghana. L’harmonisation de la politique d’un groupe se

1 Créée en 1975, la CEDEAO rassemble les seize Etats d’Afrique occidentale : Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Liberia, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Togo.

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fait par la réallocation des productions en fonction des opportunités. C’est le cas d’Unilever qui a racheté Blohorn en Côte d’Ivoire et qui a concentré son industrie manufacturière au Nigeria, son industrie oléagineuse en Côte d’Ivoire et son industrie textile au Ghana.

Ces grands groupes tentent eux-mêmes d’instaurer une politique coordonnée dans le cadre de leurs stratégies. Ils ressentent en effet, plus que les Etats, la nécessité économique de marchés élargis.

Par ailleurs, les petites et moyennes entreprises ivoiriennes malgré la perspective du marché unique de l’UEMOA, ont pris des habitudes de commercer et de trouver des débouchés au Ghana. Il en est de même pour les entreprises qui, en raison de difficultés politiques dans leur pays se sont délocalisées (Togo, Liberia, ou Sierra Leone) et se sont installés au Ghana en raison de sa stabilité politique et économique.

Il apparaît évident que les acteurs privés nouent des alliances et ignorent les clivages d’une Union qui leur paraît artificielle.

On peut espérer néanmoins que l’évolution actuelle du Nigeria, boycotté par la communauté internationale lorsque les militaires étaient au pouvoir, s’accompagnera d’un plus grand respect des règles du droit international. Si elle se produisait, une telle évolution permettrait d’envisager à terme une intégration

« de jure » du Nigeria.

Compte tenu de ses liens étroits avec l’UEMOA, le Ghana, conscient des limites de la CEDEAO, organisation plus politique qu’économique, mène également une réflexion sur l’opportunité de se rapprocher de l’UEMOA sans que les résultats en aient été officialisés. En tout état de cause, une telle opération ne pourra réussir que si le Nigeria intègre simultanément l’UEMOA.

B - L’UNION MONÉTAIRE : LES CHANCES OFFERTES PAR LEURO DANS LA ZONE FRANC

Pour l’ensemble des pays membres de l’UEMOA, qui ont le franc CFA comme monnaie commune, le passage à l’euro devrait se traduire par un avantage supplémentaire, dans la mesure où ces pays auront tout intérêt à maintenir une parité fixe avec la monnaie de leurs principaux partenaires commerciaux, qui sont, avec la France, l’ensemble des autres pays membres de l’Union européenne. L’euro étant la monnaie de la première puissance économique mondiale, il leur sera plus facile de faire accepter cette devise dans la facturation de leurs exportations dans le reste du monde, notamment face au dollar. Et la garantie d’une parité fixe avec l’euro procurera à ces pays un autre avantage substantiel en supprimant tout risque de change pour la plus grande partie de leur commerce extérieur, tout en éliminant le coût des transactions sur l’ensemble des devises européennes.

L’ancrage fixe du franc CFA à l’euro pourrait constituer un potentiel de stabilité.

Si le basculement du franc à l’euro n’a posé aucun problème le 1er janvier 1999, il a suscité, en revanche, certaines interrogations sur l’avenir de

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la zone franc, de la part des opérateurs économiques et des Gouvernements des pays de l’UEMOA tout particulièrement.

Au moment où ces interrogations se font plus vives à mesure que l’on avance vers le 1er janvier 2002, date à laquelle le franc français disparaîtra définitivement, il apparaît opportun de revenir sur l’historique de la zone franc, sur ses principes fondamentaux et sur les mécanismes actuels de fonctionnement du compte d’opérations ouvert au Trésor français.

1. La zone franc : brefs rappels