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CHAPITRE I LES PAYS DE L’UEMOA : UNE SITUATION

2. Les évolutions politiques

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baisse de la fécondité. Selon le CEPED1 « on sait maintenant que, crise ou pas, la baisse de la fécondité est bel et bien amorcée en UEMOA ».

La baisse de la fécondité semble inscrite dans les mutations culturelles (développement de l’instruction, urbanisation, émancipation des femmes...), d’autant plus que la crise de la fin des années quatre-vingt et les politiques d’ajustement n’ont pas inversé le processus de la transition démographique.

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par les régimes démographiques de l’Afrique subsaharienne dont la population a, dans une proportion de 60 à 80 %, moins de vingt ans ; ensuite, par un contexte économique et politique où seule l’économie informelle fournit une planche de salut à cette jeunesse à laquelle l’Etat n’a plus rien à offrir. A la fin des années quatre-vingt, et au début des années quatre-vingt-dix, on voit ces différents facteurs se conjuguer pour déstabiliser les régimes de parti unique »1

Vers la fin des années quatre-vingt, la « Conférence nationale », vaste assemblée où toutes les sensibilités du pays ont la possibilité de s’exprimer, est alors devenue le mode de transition politique le plus fréquemment pratiqué.

C’est ainsi qu’entre 1989 et 1990, le Président du Bénin a transmis le pouvoir à un régime démocratiquement élu. Si l’expérience a donné de bons résultats au Bénin et au Niger, il a montré ses limites au Togo, où les conférences nationales se sont avérées inefficaces face à des régimes autoritaires fermement implantés.

C’est dans ce contexte que le Président de la République française a annoncé aux Chefs d’Etats africains, réunis à La Baule en juin 1990, que l’aide française serait désormais liée aux efforts de démocratisation des pays, et que celle-ci « serait plus tiède vers les pays autoritaires, et enthousiaste vers les pays qui vont vers plus de démocratie ». Le Président Mitterrand a précisé la nouvelle politique de la France vis-à-vis de ces pays dans des termes qui ont fait date :

« Je tiens à dire ceci : de même qu’il existe un cercle vicieux entre la dette et le sous-développement, il existe un autre cercle vicieux entre la crise économique et la crise politique. L’une nourrit l’autre. Voilà pourquoi il convient d’examiner en commun de quelle façon on pourrait procéder pour que, sur le plan politique, un certain nombre d’institutions et de façons d’être permettent de restaurer la confiance, parfois la confiance entre un peuple et ses dirigeants, le plus souvent entre un Etat et les autres Etats, en tout cas la confiance entre l’Afrique et les pays développés.

...Il nous faut parler de démocratie. C’est un principe universel qui vient d’apparaître aux peuples de l’Europe centrale et orientale comme une évidence absolue au point qu’en l’espace de quelques semaines, les régimes, considérés comme les plus forts, ont été bouleversés.

Mais il ne faut pas oublier les différences de structures, de civilisations, de traditions, de moeurs. Il est impossible de proposer un système tout fait. La France n’a pas à dicter je ne sais quelle loi constitutionnelle qui s’imposerait de facto à l’ensemble de peuples qui ont leur propre conscience et leur propre histoire, et qui doivent savoir comment se diriger vers le principe universel qu’est la démocratie. Et il n’y a pas trente-six chemins allant à la démocratie.

Comme le rappelait M. le Président du Sénégal, il faut un Etat, il faut le développement et il faut l’apprentissage des libertés... Comment voulez-vous engendrer la démocratie, un principe de représentation nationale avec la participation de nombreux partis, organiser le choc des idées, les moyens de la presse, tandis que les deux tiers d’un peuple vivraient dans la misère ? »2.

1 Bayart Jean-François ; L'Afrique et la fin de l'ère postcoloniale ; Esprit, juin 1998.

2 XVIe Conférence des Chefs d’Etat de France et d’Afrique, La Baule, du 19 au 21 juin 1990.

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Depuis le discours de La Baule, le processus de démocratisation semble s’être ancré dans les pays de l’UEMOA, où le multipartisme est devenu la règle.

On ne compte plus le nombre de partis politiques : en 1997-1998, on dénombrait par exemple 47 partis en Côte d’Ivoire, 66 au Togo, 11 au Sénégal. L’usage du suffrage universel pour les élections à la présidence de la République et à l’Assemblée nationale est généralisé ; un Conseil économique et social existe dans cinq pays de l’UEMOA (Bénin, Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Sénégal).

Ce processus de démocratisation s’est accompagné d’un pluralisme syndical.

L’expérience du Burkina-Faso est intéressante à cet égard. Après plus de dix années de régime militaire, le Burkina-Faso a amorcé en 1991 sa transition vers la démocratie par l’instauration d’un système multipartite, l’adoption d’une constitution démocratique et l’organisation d’élections libres. Celle-ci est extrêmement libérale par rapport aux autres pays de la région, puisqu’elle prévoit la séparation des pouvoirs et un parlement bicaméral ; elle définit en outre le suffrage universel direct comme mode de scrutin applicable à l’élection du président comme des députés. En l’absence de véritables freins à la création des partis politiques, ceux-ci se sont multipliés : on y dénombrait 67 partis et groupements politiques en 1992.

L’adoption de la Constitution a été suivie d’élections municipales en 1995 ; la décentralisation et la mise en place d’une démocratie participative au plan local sont largement amorcées. La liberté d’expression est garantie et respectée ; le pluralisme de la presse est une réalité. La société civile, pour sa part, est très active, en particulier pour ce qui concerne les droits de l’homme et la surveillance du processus électoral. Enfin, les autorités ont clairement affirmé leur volonté de promouvoir la démocratie et la bonne gestion des affaires publiques.

Les pays de l’UEMOA sont donc en train de réussir leur transition démocratique. Mais il n’en demeure pas moins que la démocratie ne saurait être obtenue en un jour. Elle ne peut être que le fruit d’une longue maturation des sociétés et des institutions, dans le cadre d’un système constitutionnel garantissant les libertés et la démocratie ne pourra s’établir durablement dans ces pays que si les performances économiques constatées depuis 1994 se confirment.

2.2. 2.2. L’émergence de nouvelles élites

L’Etat a fortement changé au cours des trente dernières années. En situation de monopole sur la vie économique et politique lors des indépendances, les jeunes Etats francophones étaient peu préparés à être gérés comme des nations démocratiques. Manquant d’expérience, de compétences et de cohésion interne, ils ont aussitôt été accaparés par une petite élite administrative.

Or, la chute brutale des économies dans les années quatre-vingt a accéléré l’affaiblissement des ces Etats ; l’assèchement progressif des finances publiques, provoqué par la baisse des cours des matières premières et par le poids de la dette, a remis en cause leur capacité redistributrice. Progressivement, les gouvernements, qui s’appuyaient essentiellement sur le secteur « moderne » et

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sur les populations urbanisées, se sont détachés des sociétés rurales. Dans le même temps, de nouvelles élites nées dans le sillage des indépendances sont apparues, exprimant un rejet de plus en plus radical des élites administratives au pouvoir. Il s’agit essentiellement d’une bourgeoisie commerçante ancienne ou de mouvements religieux comme les confréries islamiques1. Ces nouvelles élites resurgissent aujourd’hui du fait de la libéralisation de l’économie qui leur permet de retrouver un rôle, autrefois occulté par la toute puissance des Etats.

C - DES DÉFIS À RELEVER

En dépit de ce contexte relativement favorable, les pays de l’UEMOA doivent faire face à de nombreux défis :

• le désengagement de la communauté internationale dans l’aide au