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CHAPITRE I LES PAYS DE L’UEMOA : UNE SITUATION

4. Des infrastructures insuffisantes

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c) Les faiblesses de l’industrie dans l’UEMOA

La crise des années 1980 a été le révélateur des erreurs et des faiblesses de l’industrialisation liées d’une part à la mauvaise gestion des entreprises et d’autre part à un environnement peu propice à l’investissement.

Parmi les faiblesses de l’industrie, les plus importantes, citons :

- les mauvais choix des investissements ont abouti à des projets non viables « les éléphants blancs » (programme sucrier en Côte d’Ivoire par exemple) ;

- les modalités de financement peu adaptées aux besoins des entreprises (recours excessif à l’endettement à court terme pour financer des actifs immobiliers) ont abouti à la sous-capitalisation et à leur endettement excessif ;

- le manque de personnels qualifiés ;

- un environnement institutionnel souvent dissuasif pour les investisseurs, du fait du mauvais fonctionnement et de la corruption des administrations. Les entreprises étrangères recherchent en particulier des règles du jeu économiques claires, non arbitraires, relativement stables et homogènes entre les différents pays de la région ;

- la nécessité d’importer la plupart des intrants faute d’industries de transformation. Les approvisionnements se font en dehors de la zone UEMOA et déséquilibrent les échanges ;

- les fortes barrières tarifaires nationales ont favorisé les industries nationales de substitution aux importations dans l’ensemble des pays de la région mais elles ont entraîné des effets négatifs importants. Par ailleurs, ces barrières encouragent la fraude et la contrebande. Outre le manque à gagner considérable que représente la fraude douanière et fiscale pour les budgets des Etats, ce qui les a amenés à accroître encore les ponctions sur les entreprises en situation régulière, la fraude entraîne la destruction des économies.

Enfin, l’état des infrastructures constitue un obstacle important au développement d’une industrie compétitive.

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C’est dans ce contexte que le transport ferroviaire, longtemps délaissé par les organismes d’aide au développement devient à nouveau une priorité pour les pouvoirs publics et les bailleurs de fonds. Complémentaire de la route, excellent relais des infrastructures portuaires et aéroportuaires, il favorise la mobilité et permet de désenclaver la région du Sahel, comme le Mali, le Burkina Faso ou le Niger.

Pour ces pays, les infrastructures qui acheminent les hommes et les marchandises vers les ports de la côte sont vitales.

4.1. 4.1. Le rôle des infrastructures dans le développement

De nombreuses études sur l’incidence des investissements d’infrastructure sur la croissance économique révèlent une corrélation positive entre le niveau de développement de l’infrastructure et la croissance économique d’un pays.

Le recul de la pauvreté dans les pays africains dépend du rythme de développement de l’infrastructure. Une meilleure desserte d’un pays par les réseaux de transport et de communications favorise l’écoulement des produits agricoles et l’approvisionnement des zones rurales en d’autres biens et services.

La qualité des infrastructures importe tout particulièrement pour le développement et le bon fonctionnement des villes. Les premières stratégies de développement privilégiaient les grands centres urbains. L’application de ces stratégies, a dans bien des cas, abouti à couper les centres urbains de leur arrière pays, et n’a pas permis d’établir les réseaux urbains indispensables au développement des marchés intérieurs.

Dans un monde où l’information joue un rôle de plus en plus important, la compétitivité de l’UEMOA dépendra de sa capacité à accéder à l’information et à communiquer avec le monde entier. Or, à l’heure actuelle dans l’UEMOA, on estime à plus de 60 % la demande non satisfaite de lignes.

L’expérience d’autres pays montre qu’une croissance du PIB de 4 % correspond à une expansion de 10 % du nombre des lignes téléphoniques. Ce qui représente un investissement de l’ordre de 800 millions de dollars par an, soit d’environ 0,5 % du PIB.

4.2. 4.2. La gestion publique des infrastructures est inadaptée

Confrontés au déficit de leurs finances publiques, les Etats de l’UEMOA n’ont pas eu les moyens d’entretenir leurs infrastructures existantes qui se sont révélés peu rentables dès le départ.

Rien ne sert de posséder un réseau routier s’il n’est pas entretenu.

Il coûte deux à trois fois plus cher de remettre en état une route trop longtemps négligée que de l’entretenir régulièrement. Depuis une quinzaine d’années, les bailleurs de fonds et les gouvernements africains se préoccupent un peu plus du problème de l’entretien des réseaux routiers, mais des résultats durables n’ont été obtenus que dans quelques pays, faute de moyens suffisants prévus dans les budgets des Etats.

Les chemins de fer, qui étaient jadis l’ossature des transports africains, sont aujourd’hui dans une situation critique.

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Par suite d’un entretien insuffisant, les chemins de fer ne peuvent répondre à la demande de transport de marchandises. Les faiblesses du marketing et la mauvaise qualité des services commerciaux des chemins de fer sont souvent dues à une situation de monopole, aggravée par une gestion bureaucratique, au manque d’autonomie, et à l’absence d’études de marché et de coordination intermodale avec les ports et services de transports maritimes.

4.3. 4.3. Faire davantage appel au secteur privé pour la réhabilitation du réseau routier et du chemin de fer

De nombreux pays font appel au secteur privé pour l’entretien des routes (Sénégal, Bénin...) ou pour l’exploitation des chemins de fer.

Les plans d’ajustement structurel du FMI et de la Banque mondiale prévoient un programme d’entretien routier confié à des fonds routiers autonomes alimentés par des redevances sur les carburants, la collecte des péages ou encore la participation de certains secteurs industriels et des communautés urbaines. Au Bénin, c’est un succès parce que les ressources collectés sont administrées par un établissement public, composé paritairement de représentants de l’Etat (ministres, collectivités locales) et du secteur privé (transports, etc.). Les usagers ont donc la parole.

La Côte d’Ivoire et le Burkina-Faso ont confié à la société privé Sitarail l’exploitation de la ligne de chemin de fer reliant Abidjan, Ouagadougou et Kayes. Une filiale d’ingénierie commune à la SNCF et à la RATP, assure l’assistance technique. Les bailleurs de fonds ont versé à Sitarail 400 millions de francs français pour réhabiliter les voies et le matériel et pour les achats d’équipement. Le trafic a repris, tant en ce qui concerne les voyageurs que les marchandises, et un réseau de petites industries et de services s’est constitué : réparation de matériel remorqués, révision des équipements de levage, expertise mécanique, etc. L’exemple de Sitarail montre que le chemin de fer peut apporter un avantage compétitif lorsqu’il s’agit de transport de masse et/ou longue distance pour des marchandises diverses (hydrocarbures, bois, coton, céréales, minerais, etc.)

Dans l’UEMOA une deuxième concession pourrait être attribuée pour la ligne Dakar-Bamako, entre le Sénégal et le Mali. Prévue à l’origine en octobre 1998, la privatisation ne devrait pas commencer avant le début de l’an 2000.

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Encadré 2 : L’Agence Française de Développement finance les infrastructures En s’intéressant à la ligne Abidjan-Ouagadougou-Kayes, la France a été le premier pays à s’engager dans le financement des chemins de fer, à un moment où les bailleurs de fonds étaient surtout orientés vers la route. Depuis, l’Agence française de développement (AFD) a décidé d’intervenir dans la réhabilitation des voies et le matériel ferroviaire au Mali, la modernisation du

« petit train bleu » entre Dakar et Thiès au Sénégal et s’apprête à soutenir la privatisation de la ligne Dakar-Bamako. En ce qui concerne les routes, l’AFD est sensible aux projets de désenclavement et d’aménagement urbain. Elle développe une approche filière, apportant ses fonds pour la réalisation d’infrastructures en fonction de l’intérêt que présentent les lieux de production. Toutefois, dans la pratique, l’Agence limite son action à des cas particuliers (route nationale au Sénégal...,), dans la mesure où il s’agit d’un domaine d’intervention privilégié de l’Union européenne et que la construction de routes bitumées est chère. Une exception notable : la Côte d’Ivoire, où le Fonds européen de développement alimente uniquement des projets régionaux. L’AFD et la Banque mondiale financent le Programme d’ajustement structurel du transport (Past), d’un montant de 6 milliards de francs français sur cinq ans. Dans le cadre du Past, l’Agence contribue à l’essor du port et de l’aéroport d’Abidjan, à l’extension du transport urbain et des routes reliant la Côte d’Ivoire et le Mali. En Côte d’Ivoire, Proparco, filiale de l’AFD pour le secteur privé, participe à hauteur de 100 millions de francs à la construction d’un pont à péage à Abidjan, d’un montant total de 800 millions de francs. Quant au secteur portuaire, l’AFD projette de consacrer, cette année, 29 millions de francs à Dakar, pour la création d’une voie de contournement du terminal à conteneurs. Elle intervient à Lomé (Togo), avec la mise en concession du terminal à conteneurs. Elle examine le dossier de la privatisation de la Société béninoise de manutention portuaire (Sobemap). L’Agence a également prévu d’apporter son appui à la mise en concession des aéroports sénégalais dans les deux ans.

Source : Agence Française de Développement - Rapport 1997.

4.4. 4.4. Le rôle du chemin de fer dans le désenclavement a) La concurrence rail-route

La réhabilitation du chemin de fer se justifie quand la route n’arrive pas dans les pays enclavés.

Aucune route ne relie directement Dakar à Bamako. Celle qui existe au départ de la capitale sénégalaise aboutit à Kayes, la première grande ville malienne, après la frontière. D’un coût de 560 millions de francs, le projet de modernisation de la ligne ferroviaire entre les deux métropoles africaines (surtout nécessaire dans sa partie comprise entre Kayes et Bamako) présente un double avantage : il offre une nouvelle voie de désenclavement au Mali et stimule la compétition entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire.

En revanche, lorsque le rail et la route se sont développés parallèlement sur les mêmes axes géographiques, la réhabilitation du chemin de fer ne se justifie plus autant.

Par exemple, la concurrence de la route explique au moins en partie les pertes de l’Organisation Commune Bénin-Niger (OCBN). L’OCBN gère le transport ferroviaire sur l’axe Cotonou-Parakou en territoire béninois (438 kilomètres) et assure l’acheminement par la route entre Parakou et le Niger.

La mise en concession, imaginée par les bailleurs de fonds devrait permettre de remédier aux problèmes d’organisation et de gestion. Lent et vétuste, le chemin de fer béninois n’est ni pratique ni compétitif. Il faut compter entre 12 heures et 14 heures pour relier Parakou depuis Cotonou (deux fois plus de temps que par la route).

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D’ici 2020, les échanges intra-régionaux devraient être multipliés par 10.

La densification des réseaux urbains et l’intensification des échanges villes-campagnes entraînent également une forte croissance de la demande de transport à moyenne distance. Au-delà de l’entretien et de la réhabilitation des réseaux existants, l’enjeu est, à terme, de densifier ces réseaux, à la fois pour faire face au développement des flux villes-campagnes et des flux intra-régionaux.

b) Concurrence rail-ports

Le projet ferroviaire Abidjan-Dakar, s’il se concrétise, suscitera une vive concurrence entre deux modes de transport, le chemin de fer et les ports, et entre les deux grands ports ivoirien et sénégalais, Abidjan (numéro deux en Afrique, derrière Durban) et Dakar. Pour le moment, la métropole ivoirienne capte l’essentiel du trafic avec le Mali. La route la relie directement à Bamako et une partie de la ligne ferroviaire Abidjan-Ouagadagou peut être également utilisée en territoire ivoirien. En ce qui concerne la route, la Côte d’Ivoire est bien dotée, alors que l’Est et le Nord du Sénégal sont mal lotis. A tel point que les engrais, produits à partir du phosphate sénégalais, quittent Dakar pour le port d’Abidjan, d’où ils remontent jusqu’à Bamako.

Néanmoins, si des infrastructures performantes sont indispensables au développement de la région, elles s’avèrent insuffisantes tant que l’investissement, notamment étranger, stagnera1.