• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE I LES PAYS DE L’UEMOA : UNE SITUATION

2. Le passage à l’euro et l’avenir de la zone franc

Depuis le 1er janvier 1999, en application du traité de Maastricht, le franc français a fait place à l’euro.

Ceci engendre de nombreuses inquiétudes parmi les pays Africains de la zone franc sur l’avenir du franc CFA, sur l’éventuel retrait de la France vis-à-vis de l’Afrique de l’Ouest et sur l’avenir de la zone franc elle-même.

Bien que le Gouvernement français affirme que l’arrivée de l’euro ne changera rien pour les pays de la zone franc, et qu’il respectera ses engagements, il est manifeste qu’un sentiment d’incertitude se développe au sein de la communauté d’Afrique de l’Ouest sur la possibilité réelle pour la France de tenir ses engagements, donc de continuer à garantir la convertibilité libre et illimitée du franc CFA non plus en francs français mais en euros, notamment dans le cadre des politiques conduites par l’Union européenne.

1 La France ne subventionnera plus les Etats qui n’ont pas conclu d’accord avec le FMI.

II - 76

2.1. 2.1. La position française

La position française est claire : le passage du franc français à l’euro n’altère pas les engagements réciproques pris par la France et par les autres pays de la zone franc - la coopération monétaire franco-africaine peut donc se poursuivre sans difficulté.

De même, la France assume à l’égard de ses partenaires de l’Union européenne, les responsabilités de l’ancrage du franc CFA à sa propre monnaie, et assume seule les conséquences des accords qu’elle a passés avec les Etats de la zone franc.

2.2. 2.2. Les avantages fondamentaux de la zone franc Ils sont au nombre de quatre, et concernent :

- la garantie de convertibilité illimitée des francs CFA en francs français, accordée par le Trésor français ;

- la fixité des parités sans limitation de montants (entre FCFA, et entre les FCFA et le franc français) ;

- la liberté de transfert à l’intérieur de la zone, qu’il s’agisse de transactions courantes ou de mouvements de capitaux, par voie scripturale uniquement depuis le 2 août 1993 ;

- la centralisation des réserves de change de la Banque des Etats d’Afrique Centrale (BEAC) et de la Banque Centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), pour un montant égal à au moins 65 % de leurs réserves extérieures (hors Droits de tirage spéciaux (DTS) et tranche de réserve au FMI), dans le compte d’opérations ouvert auprès du Trésor français au nom de chacune d’elles, en contrepartie de la garantie de convertibilité accordée (ces avoirs bénéficient d’une garantie de change, qui assure le maintien de leur valeur en unités de compte).

On trouvera en annexe n° 4 la présentation de la zone franc en Afrique et les mécanismes spécifiques de fonctionnement de compte d’opérations ouvert auprès du Trésor Public Français.

2.3. 2.3. Le point de vue des pays africains de la zone franc

Les responsables politiques des PAZF, conscients du fait que les mouvements commerciaux de leurs pays se font essentiellement avec l’Union européenne, se montrent favorables à un rattachement de leur monnaie à l’euro selon une parité fixe. Le succès de la dévaluation du franc CFA, quatre ans après, semble leur avoir prouvé l’intérêt économique et financier de la zone franc (parité fixe, convertibilité garantie, comptes d’opérations gérés par le Trésor français).

Cependant, certaines entreprises exportatrices dans les pays africains de la zone franc semblent redouter la survivance des rigidités qu’implique le mécanisme des taux de change fixes, soucieuses de garder la plus grande compétitivité possible par rapport à leurs concurrents africains hors zone franc, c’est-à-dire dans des pays qui manipulent facilement le taux de change de leur

II - 77

monnaie. En particulier, ces entreprises semblent redouter qu’une parité fixe entre le franc CFA et un euro « fort » ne soit réductrice de compétitivité, et entraîne une évasion de capitaux.

2.4. 2.4. Quelle parité ?

Au moment où les ministres africains des Finances et de l’Economie des quinze pays de la zone franc se réunissaient à Libreville, en avril 1998, en présence des ministres français de l’Economie et des Finances, et de la Coopération, l’ancien Premier ministre M. Pierre Messmer tenait à tirer la sonnette d’alarme, soulignant les discours trop optimistes sur l’avenir du franc CFA et sur le « parapluie budgétaire » qu’offrirait la France. Pour l’ancien Premier ministre le franc CFA pourrait se trouver surévalué par rapport à la réalité économique et financière des pays africains de la zone.

Et l’ancien Premier ministre d’en appeler aux pays africains de la zone franc en leur demandant de faire preuve d’une gestion économique, budgétaire et monétaire aussi rigoureuse que possible afin de respecter les critères économiques européens ce que confirmait implicitement M. Michel Rocard1

« Aucune structure monétaire au monde, aucune relation de parité ne peut empêcher qu’à long terme, les échanges d’un pays ne soient reliés à sa productivité et que la parité de la monnaie dans laquelle il fait ses transactions ne l’exprime plus ou moins ».

2.5. 2.5. Quels scénarios pour la zone franc ? Trois scénarios sont à priori envisageables :

maintien de la coopération monétaire telle qu’elle existe actuellement entre la France et la zone franc avec le passage automatique à la parité CFA/euro lorsque la monnaie unique sera en vigueur. C’est le scénario actuel, et celui qui reflète la position officielle aussi bien de la France que des pays Africains de la zone franc ;

création d’une zone monétaire africaine à partir du réaménagement de la zone franc. Dans un premier temps, les deux unions monétaires UEMOA et CEMAC seraient maintenues comme base pour une intégration régionale plus poussée, à laquelle d’autres pays africains viendraient adhérer conformément à la volonté d’ouverture qui caractérise les Traités signés en janvier 1994. Cette intégration régionale élargie et renforcée correspondrait au souhait exprimé tant par le FMI et la Banque mondiale que par l’Union européenne qui considèrent que cette intégration permettra à l’Afrique de l’Ouest de mieux s’insérer dans l’économie mondiale. A terme, ce scénario pourrait conduire à la constitution d’une nouvelle union monétaire autonome par rapport à l’Union européenne et à l’euro ;

éclatement de la zone Franc : chaque pays retrouverait sa souveraineté monétaire en émettant sa propre monnaie sur son territoire,

1 M. Michel Rocard, ancien Premier ministre, Président de la Commission du développement et de la coopération au Parlement européen, au cours de son audition devant la section des Relations extérieures le 10 novembre 1998.

II - 78

ces monnaies pouvant elles-mêmes être ancrées, ou non, à l’euro ou à une autre monnaie. Ce scénario reflète la position de quelques pays africains qui revendiquent le droit à leur indépendance monétaire, au motif que la rigidité de leur système de change ne leur à pas permis de procéder aux ajustements nécessaires lorsque l’environnement international est devenu défavorable, contrairement à d’autres pays africains qui, hors zone franc, ont pu pratiquer des dévaluations compétitives.

C - L’AGRICULTURE : UNE FORCE POUR LUEMOA

L’agriculture des pays de l’UEMOA occupe une place prépondérante dans l’économie et est fortement dépendante des conditions climatiques en raison de la grande irrégularité des pluies d’une année à l’autre, ce qui entraîne de fortes variations des récoltes.

Les pays membres de l’UEMOA pratiquent deux types de culture : une agriculture traditionnelle « vivrière » peu mécanisée destinée à couvrir les besoins de la population et une agriculture « de rente » orientée vers les marchés mondiaux et l’approvisionnement en matières premières des industries locales, davantage fondée sur une logique de rentabilité. Ces deux types de culture sont souvent liées.

Contrairement à une idée reçue, les cultures d’exportation n’ont pas porté préjudice aux cultures vivrières et s’intègrent dans des systèmes garantissant à la fois une relative sécurité alimentaire et l’apport de revenus monétaires.

1. Le poids de l’agriculture dans l’activité économique des pays de