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Les mouvements de jeunesse

Encadré 7 : La sociologie électorale au Togo vue par un spécialiste

1/ Les mouvements de jeunesse

La catégorie d’âge visée par le terme « jeunes »351

selon Catherine Coquery-Vidrovitch (1992, p. 37) concerne les 15-24 ans. De plus, elle précise que c’est une classe d’âge à la fois spécifique et diversifiée comprenant des scolarisés, des étudiants, mais tous ceux aussi qui relèvent du travail informel, « domestique ou marginal » (TRAORÉ B. A., 2007, p. 16). Ainsi, plus de 47 % de la population malienne a moins de 15 ans. Un chiffre qui est marquant, car si on le compare avec les pays européens, 18 % seulement de la population a moins de 15ans pour la France. Également, l’écart de l’âge médian est significatif (autour de 16 ans pour le Mali contre 39 ans pour la France en 2010352.

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« Ces unités territoriales, fondées en général sur l’existence d‘un pôle urbain relativement vigoureux, auxquelles les campagnes utiles sont liées par des voies de communication par où s’effectue le drainage des produits, par où circulent : nouvelles et idées, semblent être demeurées des cadres de vie et d’animation politique permettant de dépasser le paroquialisme des districts comme l’unanimisme de commande de l’échelon national : il conviendrait d’en tenir compte dans les temps à venir ».

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Ce que révèlent les cartes 23 et 25.

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Quand on aborde le sujet des jeunes, on parle principalement des jeunes hommes. À contrario, il faut préciser que la recherche ne s’est pas ou pour ainsi dire peu intéressée spécifiquement à la couche de population la plus importante en terme de nombre, les jeunes femmes. Cette catégorie sociale est couplée en général avec des études sur l’ensemble des femmes.

352 Les chiffres démographiques proviennent des indicateurs sociaux donnés par l’ONU :

Aujourd’hui, les jeunes au Mali font figure de « cheville ouvrière » du pays par l’ampleur de leur nombre, mais, paradoxalement, leur influence et leur place au sein de la société malienne restent minorées. Pour combler ces difficultés d’insertion, les jeunes se regroupent en associations. Depuis 1991, le nombre des associations de jeunes s’est développé de manière importante pour atteindre en 2005 488 associations répertoriées par la DNSI (Ibid, 2007, p. 17)353.

On peut admettre qu’il existe un grand vide en ce qui concerne la définition de ces associations de jeunes. L’explication du terme oscille entre « mouvement » et « parti politique ». Avant toute chose, on peut étayer de façon évolutive une hiérarchie des expressions selon leur niveau de politisation interne. En tout état de cause, la première définition s’adresse aux associations. En termes de droit, les associations maliennes ont le même statut que les associations françaises loi 1901 et plus particulièrement, « une réunion de plusieurs personnes pour un but commun »354 avec l’obligation de n’en retirer aucun profit. Au fur et à mesure, ces associations de quartiers ou de villages peuvent se politiser. Dans ce cas, elles se constituent en associations politiques, c’est le cas de la plupart des petits candidats indépendants. D’un autre côté, tout parti politique est constitué en son sein d’une association pour les femmes et d’une autre pour les jeunes. Ce type d’association peut être désigné par le terme de « mouvement ». Il sous-entend la participation active d’un groupe d’individus dans un ensemble plus vaste, afin de militer au profit de leur leader partisan. Dernière dimension explicative, le parti politique est, en général, un ancien rassemblement d’associations, politiques ou non, qui se sont constituées autour du projet d’un seul homme. En définitive, nous allons nous concentrer sur les mouvements de jeunesse au sein des partis.

Notre première remarque portera sur l’association de jeunes la plus importante du pays, le CNJ (Conseil National de la Jeunesse)355. Le CNJ a été créé en 2000, mais le processus de sa création a réellement débuté en 1991. Nous sommes dans une période où le débat est intense, la société civile souvent considérée comme « le porte-voix» du peuple se cherche une nouvelle identité.

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Il n’existe pas de données ou d’études plus récentes.

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Source : XMLittré v1.3.

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Informations obtenues au cours d’un entretien avec Bakary Woya Doumbia, premier président du CNJ en février 2008.

De surcroît, l’U.N.J.M. (Union Nationale des Jeunes au Mali) pendant des jeunes du parti unique US-RDA (parti politique de Moussa Traoré), jusque-là marginalisés a décidé de créer une plateforme nationale de la jeunesse intégrant les nouvelles demandes du pluralisme faisant suite au « renouveau républicain ». Il faudra attendre les 8, 9 et 10 juillet 2000 pour que le CNJ soit créé. Au départ cette structure se voulait être indépendante du politique, mais il est difficile de le croire lorsque l’on sait qu’elle est tenue par des personnes d’horizons politiques très différents (Parena, Adema-Pasj). Une chose très intéressante est à souligner, on déplore trop souvent que la politique se pratique sans idéologie particulière. Comment peut- on expliquer, de ce fait, qu’une institution pour la jeunesse qui se veut libre, soit trustée par des militants des mouvements de jeunes des partis politiques ? Par cette nomination au niveau décisionnel d’une institution, les militants des partis politiques ont le sentiment d’obtenir une forme de promotion sociale, car, trop souvent, les jeunes ont l’impression d’être écartés de tout processus décisionnel. Ces relations qui existent entre les partis politiques et les organismes tiers mettent en lumière les stratégies d’utilisation de la jeunesse par la « gérontocratie ».

Sur le plan interne, l’organisation pyramidale des partis politiques est faite de telle manière que les jeunes se retrouvent souvent en position d’attente dans la perspective d’évoluer ou de prendre des responsabilités décisionnelles. Écartés par principe, les jeunes perdent patience eu égard au rôle que les dirigeants de partis souhaitent leur laisser. Les jeunes militants ont très peu de devoirs à accomplir la plupart du temps. Il faut attendre les périodes électorales pour que se révèle sans conteste leur véritable rôle sociopolitique356. En effet, ils sont placés en première ligne de la sensibilisation et de la mobilisation de l’électorat. Une manière pour eux de gagner un peu d’argent et de prendre des responsabilités ponctuellement. Au niveau de la localité, beaucoup de jeunes adhèrent à un parti politique avec la forte conviction qu’ils obtiendront, rapidement, du prestige social ; la plupart déchantent.

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L’organisation d’une coupe de football, de séminaire de stratégies communication ou encore des tentatives d’organiser des journées de réflexion sur des problématiques de société. Il est important de souligner que les jeunes n’ont quasiment aucun rôle au sein des partis politiques. Leurs positions ne sont véritablement que symboliques. Source : entretien avec Karamoko COULIBALY (2008), Président des jeunes de l’URD dans le cercle de Ségou.

Cet aspect des choses explique en partie la renonciation des jeunes au militantisme partisan, se constituant, dans bien des cas en associations indépendantes. En faussant de cette manière le jeu politique, les indépendants accroissent le fossé générationnel entre les jeunes qui souhaitent obtenir des responsabilités au plus vite et des leaders qui tiennent les rênes du pouvoir sans vouloir le partager. Par ce double reflet, le miroir de la société malienne se dessine.

Pour clore notre propos, on peut faire le rapprochement avec une autre « majorité visible », les femmes, qui ont un rôle social indéniable, mais une reconnaissance citoyenne limitée. Contrairement aux jeunes, les femmes n’ont pas la même impatience. S’accommodent-elles bien de leur statut ?

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