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Concept

Le modèle de Gordon-Shapiro (du nom des deux chercheurs qui l'ont établi) n'est rien d'autre que l'extension à plusieurs périodes (ou années) du modèle relatif aux déterminants du prix actuel de l'action (calculé sur une seule période).

Le cours aujourd'hui (C0) d'une action dépend du taux de rendement attendu (lui-même déterminé par le risque de cette action), du dividende versé et du cours de l'année suivante:

C 0 = (DIV 1 + C 1) / (1 + r) Avec:

Div i: Dividende reçu pendant l'année i C i: Cours de l'action (année i)

r: taux de rendement

Mais de quoi dépend le prix de l'année suivante ? Le même raisonnement s'applique, et le prix de l'année 1 peut être calculé de la même manière:

C 1 = (DIV 2 + C 2) / (1 + r)

Bien entendu, le même raisonnement s'applique à P3, et ainsi de suite, jusqu'à l'infini. Sans entrer dans le détail, le développement des calculs aboutit à:

Équation 7: Modèle de Gordon Shapiro.

La formule indique que pour trouver la valeur actuelle, soit le prix aujourd'hui de ce titre, il faut faire la somme des valeurs actuelles de tous les dividendes de l'année 1 à l'année N, puis rajouter à cette somme la valeur actuelle du prix de revente dans l'année N. En fait, l'année N n'a pas grande signification. Partant de l'idée qu'une société ne vit pas pour faire un jour faillite mais pour continuer à exister aussi longtemps que possible, il faut quasiment examiner les flux de paiement à venir à l'infini. Mais on remarquera que, plus on s'éloigne dans le temps, plus la part représentée par le prix final diminue dans le prix actuel. A la limite, la part du prix de revente devient nulle dans le prix aujourd'hui, et ce dernier résulte uniquement des dividendes à venir.

Équation 8: Modèle de Gordon Shapiro sur les seuls dividendes futurs.

Cette formule signifie que le prix aujourd'hui d'une action correspond à la somme des valeurs actuelles de tous les dividendes à venir, et ce jusqu'à l'infini.

La formule permettant de déterminer le prix actuel d'une action n'est guère commode à utiliser. En fait, elle peut être remplacée par une autre, qui dit la chose suivante: la valeur actuelle d'une somme versée à perpétuité est obtenue simplement en divisant cette somme par le taux de rendement exigé, ce qui nous donne l'expression suivante: VA (rente perpétuelle) = Somme à recevoir / Taux de rendement exigé

Dans le cas d'une action, où les paiements à recevoir sont les dividendes versés, la formule s'écrit: P 0 = DIV1 / r

P0: Prix d'achat de l'action (année 0) Div1: Dividende reçu pendant l'année 1 r: taux de rendement

Cette formule est clairement plus facile à manipuler, mais elle conserve un gros inconvénient: elle suppose que le dividende versé à l'infini sera le même que celui de l'année 1. Pour pouvoir tenir compte des changements dans les dividendes versés, il faut introduire le concept d'un taux de croissance du dividende. Tout d'abord, nous avons besoin de quelques définitions.

Le taux de dividende (dividend yield) est le dividende exprimé en pour-cent du prix de l'action (DIV1/P0) Le ratio de distribution (payout ratio) représente le pourcentage des bénéfices versés sous forme de dividende, calculé par la formule suivante: Payout ratio = Dividende / BPA

Le ratio de réinvestissement (plowback ratio) est l'inverse du précédent: il mesure la part du bénéfice réinvesti dans l'entreprise. Il est donné par la formule: plowback ratio = (1 - payout ratio)

La rentabilité des actions (return on equity, ROE) indique ce que rapporte (en pour-cent) un investissement dans une action de l'entreprise.

Nous pouvons maintenant expliquer la formule de Gordon-Shapiro, où formule dite à croissance constante: P 0 = DIV1 / (r - g)

r: taux de rendement exigé g: taux de croissance du dividende

Cette formule permet de tenir compte d'un facteur g de croissance des dividendes (on considère donc que le dividende de l'année prochaine augmentera chaque année d'un facteur g). Il est important de noter que cette formule ne peut être utilisée que si le taux de croissance des dividendes est plus faible que le taux de rendement exigé sur les actions. Le problème essentiel est bien entendu de calculer ce facteur g.

Limites du modèle de Gordon-Shapiro

Le modèle de Gordon-Shapiro fournit une formule relativement simple d'évaluation d'actions. Toutefois ce modèle, en raison de sa simplicité, présente plusieurs inconvénients et reste limité dans son application: de nombreuses entreprises, souvent au début de leur existence, connaissent des taux de croissance très rapide. Elles versent peu de dividendes, pour pouvoir investir le plus possible, et le font à des taux de rendement important (souvent supérieurs à 15 ou 20%). Dans ce contexte, les taux de croissance calculés ne permettent plus d'appliquer le modèle de Gordon-Shapiro, qui est, rappelons-le, un modèle considérant des entreprises ayant un taux de croissance constant.

Les résultats du modèle dépendent des prévisions de dividendes et des calculs de ratios utilisés. Si les prévisions de dividendes sont inexactes ou que les données comptables sont difficiles à analyser, la formule sera faussée. Enfin, nous l'avons déjà mentionné, les taux de rendement exigés ne peuvent pas être précisément calculés à partir d'une seule action. Ils doivent correspondre à ce que le marché exige pour l'ensemble des actions de même risque, en moyenne.

Néanmois, et ces réserves étant faites, nous avons avec Jean-Luc Monceyron pu créer des modèles intéressants pour autant que les données aient une surface statistique. Quand le marché est haussier, que les BPA sont relativement bien anticipés, disons lors d'une phase principale d'un marché haussier, un modèle du type de celui de Gordon-Shapiro permettra sur une large base d'actions (par exemple un indice) de faire des projections raisonnables (en pondérant par les capitalisations) du niveau de l'indice à la fin du "Bull Run". Nous avions, et

cela fut intéressant à postériori car nous n'y avons malheureusement pas trop cru quand le CAC était à 3000pts clairement projeté l'indice autour des 7000pts (selon les hypothèses faites sur les taux) sur la base d'un modèle de flux futurs basé sur un Gordon-Shapiro. Rien d'extraordinaire, un peu lourd à mettre en place (il faut saisir tous les BPA projetés à un, deux, trois ans), mais certainement porteur d'indications sur le niveau maximum que le marché sera en mesure d'atteindre, … si tout va bien !