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LA MISE EN ŒUVRE DE L’EXECUTION DE LA SENTENCE ARBITRALE

272. L’exécution de la sentence arbitrale est soumise à des contingences pratiques importantes. Il en va ainsi de la détermination de l’autorité compétente pour la reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale qui constitue à la fois une étape inévitable et une condition de facilitation de la procédure (section 1). En effet, dès lors que cette autorité est correctement identifiée, la partie qui recherche la reconnaissance et l’exécution peut déposer une requête simple – sans plaidoyer –, accompagnée des actes et documents énumérés par la loi568. Dans

la mesure où la Convention de New York, bien que mentionnant l’autorité compétente, ne la désigne pas formellement, ni n’indique le degré de son intervention dans la phase post- arbitrale (article III)569, ce sont bien les droits nationaux qui permettent cette désignation. Ce sont eux également qui arrêtent la procédure d’exécution (section 2). En vertu d’un principe général, les formalités relatives à l’exécution de la sentence interne ou à la reconnaissance et à l’exécution de la sentence arbitrale étrangère/internationale, sont soumises à l’ordre juridique de l’État où cette exécution est demandée. Par conséquent, les modalités de la reconnaissance et de l’exécution de la sentence arbitrale seront fonction du lieu où elles sont sollicitées – ici, la France et l’Iran.

SECTION 1

LA DETERMINATION DE L’AUTORITE COMPETENTE

273. La partie cherchant à faire reconnaître et exécuter la sentence arbitrale doit le faire devant l’autorité compétente de l’État d’accueil en déposant une requête simple (sans plaidoyer) accompagnée des actes et documents énumérés par la loi. La Convention de New York, bien que mentionnant l’autorité compétente570, laisse cette désignation à la charge des lois

568 Est ici visé le cas d’une demande de reconnaissance et d’exécution à titre principal. Sur la reconnaissance à titre incident, v. supra n° 225 et s.

569 V. par exemple sur ce point M. DE BOISSESON, op. cit. note 113, p. 448, n° 536. 570 Elle la vise par exemple à l’article V.

nationales571. De façon générale, les règles relatives à la compétence permettent, par le biais de divers critères, d’élire une juridiction par rapport aux autres. Les critères pertinents dans cette perspective sont de deux ordres.

274. D’abord, la compétence d’attribution permet l’identification d’une catégorie de juridictions. Sa détermination est facilitée par l’existence de dispositions précises en droit français et iranien (§ 1). En revanche, le second critère, celui de la compétence territoriale, est plus incertain. Le droit iranien manque de clarté sur ce point et ce sont au final les règles générales énoncées dans le nouveau Code de procédure civile adopté en 2000, teintées de théories doctrinales, qui sont utilisées. En ce qui concerne le droit français, le silence du décret de 1981, qui avait occasionné en son temps un certain nombre de controverses, a été comblé par le décret de 2011. C’est dorénavant le tribunal de grande instance de Paris qui est expressément désigné par le premier alinéa de l’article 1516 CPC pour les sentences rendues à l’étranger (§ 2).

PARAGRAPHE 1

LA DETERMINATION DE L’AUTORITE MATERIELLEMENT

COMPETENTE

275. De façon générale, la compétence d’attribution d’une juridiction s’entend de son aptitude à connaître d’une affaire. Cette aptitude est déterminée par divers critères, parmi lesquels figurent notamment l’ordre auquel appartient la juridiction considérée (par exemple, juridiction civile ou juridiction répressive), le degré de la juridiction (juge d’appel ou juge de première instance), la nature de la juridiction (commerciale ou prud’homale), la nature des affaires (divorce, filiation, etc.)572. En ce sens, les notions de compétence d’attribution et de compétence matérielle se confondent.

276. Une définition quasi consensuelle en Iran, et proche de celle retenue en France, prescrit qu’il s’agit de la compétence attribuée aux autorités judiciaires pour connaître des affaires. Les critères pertinents aux fins de sa détermination sont de plusieurs ordres. En premier lieu, cette

571 L’article III énonce en effet que « [c]hacun des États contractants reconnaîtra l’autorité d’une sentence arbitrale et accordera l’exécution de cette sentence conformément aux règles de procédure suivies dans le territoire où la sentence est invoquée » (non souligné dans le texte). V. sur cette question M. DE BOISSESON, op.

cit. note 113, p. 448, n° 536.

aptitude est déterminée par l’ordre auquel appartient la juridiction (tribunal civil ou juridiction administrative ou pénale). En deuxième lieu, il importe d’identifier le degré de la juridiction, à savoir juge d’appel ou de première instance. En troisième lieu enfin, la nature de la juridiction, à savoir publique (Tribunal général) ou exceptionnelle (Tribunal militaire ou Tribunal des clergés), permet une nouvelle classification. Parce que les règles encadrant la détermination de la compétence matérielle relèvent de l’ordre public et détiennent un caractère impératif, leur violation entraîne la nullité de toute action judicaire et de la décision rendue dans cette perspective qui les méconnaîtraient573.

277. Conformément à l’article 35 de la Loi d’arbitrage iranienne, l’autorité compétente pour la reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale internationale est le tribunal général de la préfecture de la province dans laquelle est situé le lieu de l’arbitrage. Le tribunal général est également compétent pour la délivrance de l’exequatur des sentences arbitrales étrangères soumises à la Convention de New York et des autres sentences étrangères. Il reste qu’en vertu de l’article III de la Convention de New York, la reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale étrangère sont confiées aux dispositions nationales. C’est ici l’article 488 du Code de procédure civile iranien, en tant que loi générale régissant l’arbitrage interne, qui est pertinent. Cet article dispose que :

« [s]i la partie condamnée n’exécute pas la sentence dans les 20 jours suivant la signification de celle-ci, le tribunal renvoyant le litige à l’arbitrage ou au tribunal compétent pour connaître du litige principal doit, suite à la demande de la partie bénéficiaire de la sentence, délivrer l’exequatur. L’exécution de la sentence est effectuée conformément aux dispositions légales » (notre traduction).

Conformément à l’article 15 du Code de procédure civile iranien, ce tribunal est désigné en tant que « tribunal général », car « [l]a procédure de première instance est, selon le cas dans, dans le ressort de compétence du tribunal général ou du tribunal révolutionnaire, sauf disposition légale contraire » (notre traduction).

278. En droit français, l’article L 311-11 du Code de l’organisation judiciaire, issu de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution, énonçait en son alinéa premier que « [l]e tribunal de grande instance connaît à juge unique des demandes en reconnaissance et en exequatur des décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que

573 A. CHAMS, Le Code de procédure civile*, op. cit. note 133, vol. 3, p. 383 et s. ; A. MATIN DAFTARI,

Procédure civile et commerciale*, op. cit. note 70, p. 414 et s. ; J. MADANI, Le Code de procédure civile*,

des sentences arbitrales françaises ou étrangères »574. C’est donc ce tribunal de grande instance à juge unique qui était compétent pour connaître des demandes d’exequatur. Mais l’introduction de cette autorité nouvelle a suscité la réserve, notamment parce qu’elle créait une ambiguïté et un risque de confusion vis-à-vis de l’ancien article 1477 CPC575.Le décret

92-755 du 31 juillet 1992 supprima donc la seconde phrase de l’alinéa 1 de l’ancien article 1477 CPC afin de clarifier la situation576 et la compétence pour la délivrance de l’exequatur fut confiée au tribunal de grande instance dans le ressort duquel la sentence avait été rendue577. La Cour de cassation, dans un arrêt du 29 juin 1994, énonçait ainsi que « le juge de l’exécution désigné par l’article 1498 du nouveau Code de procédure civile pour déclarer exécutoire en France les sentences arbitrales rendues à l’étranger, est le tribunal de grande instance siégeant à juge unique »578. L’article L 311-11 a finalement été abrogé et c’est dorénavant l’article R 212-8, introduit par le décret n° 2008-522 du 2 juin 2008, qui régit cette question. Il dispose que « [l]e tribunal de grande instance connaît à juge unique : (…) 2° Des demandes en reconnaissance et en exequatur des décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que des sentences arbitrales françaises ou étrangères ».

279. En Iran comme en France, les règles relatives à la compétence d’attribution sont par conséquent clairement définies : en Iran, la demande d’exequatur est portée devant le président du Tribunal général ; en France, elle l’est devant le Tribunal de grande instance à juge unique.

574 V. sur cette disposition Ph. THERY, « Quelques observations à propos de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution », Rev. arb., 1991, p. 727 et s. ; Ph. THERY, « Les procédures civiles d’exécution et le droit de l’arbitrage », Rev. arb., 1993, p. 159 et s.

575 L’alinéa 1 de l’ancien article 1477 CPC disposait en effet que « [l]’exequatur est ordonné par le juge de l’exécution du tribunal ». Ces fonctions étaient assurées, soit par le président du Tribunal, soit par un vice- président, soit par le magistrat dit juge des requêtes. Le juge de l’exécution n’avait en réalité ni statut ni existence réelle ; il était une abstraction dont il était question dans quelques textes épars. V. S. CREPIN, Les

sentences arbitrales devant le juge français : pratique de l’exécution et contrôle judiciaires depuis les réformes de 1980-1981, Paris, LGDJ, 1995, p. 108, n° 128.

576 Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN, op. cit. note 2, p. 907, n° 1570 ; S. CREPIN, op. cit. note 575, p. 107, n° 128 ; M. DE BOISSESON, op. cit. note 113, p. 448, n° 536.

577 L’ancien article 1477 CPC se lisait comme suit : « La sentence arbitrale n’est susceptible d’exécution forcée qu’en vertu d’une décision d’exequatur émanant du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la sentence a été rendue. À cet effet, la minute de la sentence accompagnée d’un exemplaire de la convention d’arbitrage est déposée par l’un des arbitres ou par la partie la plus diligente au secrétariat de la juridiction ». Le décret du 31 juillet 1992 a remplacé les termes « juge de l’exécution » par l’expression « tribunal de grande instance dans le ressort duquel la sentence a été rendue ».

578 Cass. civ. 1ère, 29 juin 1994, Cramar et société Urcoopa v. SA Mediterranean Shipping Co., Rev. arb., 1996, p. 400, note A. HORY. La jurisprudence antérieure aux réformes de 1991 et 1992 déclarait irrecevable la demande d’exequatur portée devant le TGI et non son seul président. V. TGI Paris, 22 novembre 1989, Rev. arb., 1990, p. 693, note B. MOREAU ; Rev.crit. DIP, 1991, p. 107, note M.-N. JOBARD BACHELLIER.L’article 1498 CPC disposait que : « Les sentences arbitrales sont reconnues en France si leur existence est établie par celui qui s’en prévaut et si cette reconnaissance n’est pas manifestement contraire à l’ordre public international. Sous les mêmes conditions, elles sont déclarées exécutoires en France par le juge de l’exécution ».

PARAGRAPHE 2

LA DETERMINATION DE L’AUTORITE TERRITORIALEMENT

COMPETENTE

280. La compétence territoriale d’une juridiction consiste en son aptitude à connaître d’une affaire en vertu de critères géographiques – domicile ou résidence d’une partie, situation de l’immeuble litigieux, lieu du délit notamment579. En droit iranien, et selon une acception

quasiment consensuelle, une fois la compétence d’attribution déterminée par le biais de l’ordre, du degré et de la nature de la juridiction, les critères géographiques détermineront la compétence territoriale de l’autorité compétente pour connaître de l’affaire. Les critères géographiques utiles sont notamment ceux du domicile ou de la résidence de la partie défenderesse ou de la situation de l’immeuble litigieux le cas échéant580.

281. La distinction opérée par le droit iranien entre les sentences internationales et les sentences étrangères influe sur la détermination de la juridiction territorialement compétente pour recevoir la demande en reconnaissance et en exécution. Suivant le renvoi de l’article 35 de la Loi d’arbitrage à l’article 6 du même texte581, le législateur iranien, en visant spécifiquement

l’hypothèse de la sentence rendue sur le territoire iranien, a déclaré compétent le Tribunal général de la province dans le ressort de laquelle se trouve le siège de l’arbitrage. Concernant en revanche l’hypothèse de la sentence arbitrale étrangère, la solution est moins évidente. En l’absence de dispositions particulières, et en raison du renvoi de la Convention de New York aux législations nationales sur ce point, recours doit être fait aux règles générales mentionnées dans le nouveau Code de procédure civile iranien, ainsi que confirmé par la jurisprudence. L’arrêt n° 109 de la chambre 27 du Tribunal général de Téhéran, rendu le 5 mai 2009 et

579 G. CORNU (dir.), op. cit. note 482, p. 189.

580L. DJONEIDI, L’exécution des sentences arbitrales commerciales étrangères*, op. cit. note 119, p. 328 ; A. KHODABAKHSHI, Le droit de l’arbitrage et les affaires relatives à l’arbitrage dans la jurisprudence*, op. cit. note 51, p. 491.

581 L’article 35 (1) de la Loi d’arbitrage dispose que : « Sous réserve des dispositions des articles (33) et (34), les sentences arbitrales rendues conformément à cette Loi sont définitives et exécutables après leur signification et, sur requête écrite adressée à la juridiction visée à l’article (6), sont exécutées conformément à la procédure applicable à l’exécution des décisions judiciaires » (notre traduction). L’article 6 énonce quant à lui que : « 1. Les fonctions mentionnées à l’article (9), aux paragraphes (3) et (4) de l’article (11), au paragraphe (3) de l’article (13), au paragraphe (1) de l’article (14), au paragraphe (3) de l’article (16), à l’article (33) et à l’article (35) seront exercées par le Tribunal général de la préfecture de la province où est situé le siège de l’arbitrage ; Dans l’hypothèse où le siège de l’arbitrage n’est pas déterminé, le Tribunal général de Téhéran exercera ces fonctions. Les décisions rendues dans ce cadre sont définitives et ne peuvent faire l’objet d’un appel. 2. En matière d’arbitrages institutionnels, l’exercice des fonctions mentionnées aux paragraphes (2) et (3) de l’article (11), au paragraphe (3) de l’article (13) et au paragraphe (1) de l’article (14) sera confié à l’institution d’arbitrage concernée ».

confirmé par la Cour de cassation, a ainsi considéré que la juridiction compétente devait être désignée sur la base des dispositions générales du Code de procédure civile582.

282. Aux termes de l’article 11 du Code de procédure civile iranien, la juridiction normalement compétente est celle du lieu de résidence du défendeur – soit sa résidence permanente, soit sa résidence provisoire583. Toutefois, cette règle générale est sujette à un système par paliers. Dans l’hypothèse d’une demande en exécution d’une sentence arbitrale étrangère, elle doit être déposée auprès de la juridiction où la partie condamnée possède des biens. S’il s’agit de biens immobiliers répartis dans différents lieux, plusieurs demandes d’exequatur devront être formulées et chaque tribunal devra le délivrer pour les biens situés dans son ressort de compétence584. Dans l’hypothèse où la partie condamnée n’a pas de résidence connue, permanente ou provisoire, ou de biens immobiliers sis en Iran, la partie recherchant l’exécution pourra déposer sa demande auprès de la juridiction de sa résidence. Si elle ne réside pas en Iran et en l’absence d’éléments de rattachement désignant la juridiction iranienne compétente, l’article 11, s’inspirant de l’article 25585, déclare le Tribunal général de

Téhéran compétent.

283. En France, les règles relatives à la compétence territoriale en matière de reconnaissance et d’exécution des sentences arbitrales étaient, sous l’empire du décret de 1981, variables. Selon l’ancien article 1477 CPC, le juge territorialement compétent était celui « dans le ressort duquel la sentence arbitrale a été rendue », de sorte que le critère ne trouvait à s’appliquer

582En l’espèce, la demande en reconnaissance et en exécution était formulée au sujet d’une sentence rendue au sein de la Chambre de commerce et de l’industrie d’Ukraine. Ayant constaté que la demande n’était qu’une requête – et non une action –, le Tribunal général releva que la Loi d’arbitrage n’était pas applicable et, partant, que les règles mentionnées dans son article 6 ne pouvaient être utilement soulevées. La Convention de New York ne désignant pas l’autorité compétente pour la reconnaissance et l’exécution de la sentence étrangère, le Tribunal général, se fondant sur l’article III de cette Convention, considéra que l’autorité compétente à cet égard doit être déterminée par les dispositions générales du nouveau Code de procédure civile. Faisant application de ces dispositions, il désigna le Tribunal général de la ville d’Uroumieh compétent, en tant que lieu du domicile du défendeur. Consécutivement, il déclina sa compétence en vertu de l’article 28 du nouveau Code de procédure civile et renvoya l’affaire devant la plus haute autorité judiciaire (la Cour de cassation) aux fins de trancher définitivement la question de la compétence.

583 Cet article dispose que : « L’action doit être déposée devant le tribunal dans le ressort duquel le défendeur est domicilié. Si celui-ci ne réside pas en Iran mais possède un domicile provisoire en Iran, le tribunal dans le ressort duquel se trouve ce domicile provisoire est compétent. Si le défendeur n’a ni domicile permanent, ni domicile provisoire en Iran, la requête doit être déposée au lieu où il possède un bien immobilier. À défaut, le demandeur peut recourir au tribunal dans le ressort duquel se trouve son domicile » (notre traduction).

584 Pour le détail des débats législatifs relatifs à cette disposition, v. Assemblée consultative islamique, 11e période de législation, 45e session du dimanche 12 juin 1938, n° de série 832. V. également L.DJONEIDI,

L’exécution des sentences arbitrales commerciales étrangères*, op. cit. note 119, p. 330.

585 L’article 25 NCPCI dispose que : « Si l’acte d’état civil est établi en Iran et que l’intéressé réside à l’étranger, l’affaire est portée devant le tribunal du ressort de l’établissement de l’acte d’état civil. Si le lieu de l’établissement de l’acte d’état civil et le domicile de l’intéressé se trouvent à l’étranger, le Tribunal général de Téhéran est compétent » (notre traduction).

qu’aux seules sentences rendues en France. Pour les autres, c’est-à-dire les sentences rendues à l’étranger, la loi restait silencieuse. Diverses solutions furent envisagées dans cette perspective. La tendance majoritaire consistait à s’en tenir aux solutions de la jurisprudence antérieure qui retenait la compétence des juridictions du domicile du défendeur à l’exécution forcée ou, plus généralement, du lieu où le demandeur souhaitait procéder à l’exécution forcée586.D’autres proposèrent de recourir aux critères retenus pour déterminer la compétence spéciale lorsque les juridictions françaises sont saisies sur le fondement des articles 14 et 15 du Code civil. Dans ce cas, la jurisprudence admettait que « le demandeur peut valablement saisir le tribunal français qu’il choisit en raison d’un lieu de rattachement de l’instance au territoire français ou, à défaut, selon les exigences d’une bonne administration de la justice »587. La flexibilité de cette solution ne compensait cependant pas sa complexité pratique588.Enfin, certains préconisaient, en se fondant sur l’alinéa 2 de l’ancien article 1493 CPC, de désigner le Tribunal de grande instance de Paris, selon une analogie avec le dispositif prévu pour résoudre les difficultés de constitution du tribunal arbitral589. La Cour d’appel de Paris accepta la solution et, dans un arrêt du 10 juillet 1992, affirma qu’« [à] défaut d’une disposition précise, adéquate à cette circonstance, et l’article 42 CPC n’ayant pas de vocation privilégiée à s’appliquer en la matière, le choix du Président du Tribunal de grande instance de Paris, hors de toute fraude, apparaît approprié »590. Cette approche présentait l’intérêt de concentrer toutes les demandes devant un juge dont la pratique est suffisamment fournie pour éviter les hésitations susceptibles de résulter du manque d’expérience de certains tribunaux. 284. En dépit de son opportunité, cette dernière solution était cependant difficile à justifier en

l’absence de texte. De fait, d’autres juridictions que le Tribunal de grande instance de Paris avaient eu l’occasion de se prononcer sur les demandes d’exequatur de sentences rendues à

586 V. Ph. FOUCHARD, « L’arbitrage international en France après le décret du 12 mai 1981 », op. cit. note 371, p. 374 ;A.HUET, « Les procédures de reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers et des sentences arbitrales en droit international privé français », J.D.I., 1988, p. 5 et s., spéc. p. 21 ; J. ROBERT, « L’arbitrage en matière internationale », op. cit. note 465, p. 214 ; T. MOUSSA, « L’exequatur des sentences arbitrales internationales », Gaz. Pal., 14 avril 1992, p. 275 ;S. CREPIN, op. cit. note 575, p. 109, n° 129.

587 Cass. civ. 1ère, 13 juin 1978, Rev. Crit. DIP, 1978, p. 722, note B. AUDIT ; J.D.I., 1979, p. 414, obs. Ph. KHAN. Le principe a été réaffirmé plus récemment : Cass. com., 11 décembre 2001, Mutuelles du Mans

c.Wuyts, JCP, 2002, IV, p. 1168. Sur cette question, v. Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN, op. cit. note 2, p. 908, n° 1571.

588 Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN, op. cit. note 2, p.908, n° 1571 ; S. CREPIN, op. cit. note 575, p. 108, n° 129.

589 P. LEVEL, « La réforme de l’arbitrage international »,JCP CI, 1981, I, 9899.

590 C.A. Paris, 10 juillet 1992, Sté GL Outillage c. Sté Stankoimport, Rev. arb., 1994, p. 142, note P. LEVEL ;

l’étranger591. À l’occasion de la réforme de 2011, le législateur a choisi de retenir cette

solution, de sorte que « les rédacteurs du décret ont consolidé la jurisprudence applicable en la matière, tout en faisant converger la majeure partie du contentieux de l’arbitrage international

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