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La reconnaissance et l’exécution des sentences a-nationales

LES SENTENCES DELOCALISEES OU A-NATIONALES

B. La reconnaissance et l’exécution des sentences a-nationales

130. L’applicabilité de la Convention de New York de façon générale aux sentences a-nationales a suscité un certain nombre de difficultés (1). En tout état de cause, sa réception tardive dans le régime juridique iranien a largement empêché les juristes – doctrine et juges – de s’exprimer sur cette possibilité, bien que le prononcé de certaines sentences en quelques rares occasions suggère l’applicabilité de la Convention de New York aux sentences a-nationales dans le régime juridique d’Iran. À l’inverse, la reconnaissance et l’exécution des sentences a- nationales ont été l’objet de débats intenses en droit français (2).

1. Les difficultés relatives à l’applicabilité de la Convention de New York aux sentences a-nationales

131. Ainsi que souligné précédemment, les théories relatives aux arbitrages délocalisés ou dénationalisés existaient avant l’adoption de la Convention de New York. Toutefois, en raison du manque de précision de celle-ci quant à cette question, les débats ont connu un nouvel essor dans les années suivant son adoption. C’est notamment son article V (1) (d) qui a occasionné la controverse à propos de l’hypothèse d’une procédure d’arbitrage « délocalisée » ou « a-nationale »279. Aux termes de cette disposition,

« La reconnaissance et l’exécution de la sentence ne seront refusées, sur requête de la partie contre laquelle elle est invoquée, que si cette partie fournit à l’autorité compétente du pays où la reconnaissance et l’exécution sont demandées la preuve : (…) d) Que la constitution du tribunal arbitral ou la procédure d’arbitrage n’a pas été conforme à la convention des parties, ou ; à défaut de convention, qu’elle n’a pas été conforme à la loi du pays où l’arbitrage a eu lieu ».

Par conséquent, à peine d’inexécution, la procédure d’arbitrage doit être « conforme à la convention des parties » ou, à défaut de convention, « conforme à la loi du pays où l’arbitrage a eu lieu ».

278 H. G. GHARAVI, L’efficacité internationale de l’annulation d’une sentence internationale, op. cit. note 259, p. 183, n° 262.

132. Certains, notamment M. VAN DEN BERG, ont vu dans cette disposition l’impossibilité de l’applicabilité de la Convention de New York aux sentences dénationalisées280. Cette opinion

est en particulier fondée sur l’analyse des travaux préparatoires de la Convention et sur la modification de son titre : initialement, la CCI avait proposé qu’elle soit intitulée « Convention relative à l’exécution des sentences arbitrales », mais c’est finalement la proposition du Conseil économique et social de l’ONU – « Convention relative à l’exécution des sentences arbitrales étrangères » – qui fut retenue281. Par conséquent, le champ

d’application de la Convention de New York serait limité aux sentences régies par une loi d’arbitrage282. La mention à l’article I (1), qui détermine le critère de la nationalité de la

sentence arbitrale, du lieu de l’arbitrage exigerait le renvoi à une loi étatique. De même, la mention des sentences qui ne sont pas considérées comme sentences nationales dans l’État requis ne viserait pas les sentences a-nationales, mais uniquement celles rendues selon une loi d’arbitrage étrangère et rattachées à celle-ci283. De surcroît, en application de l’article

280Contra G. KAUFMANN-KOHLER, « Identifying and Applying the Law Governing the Arbitration Procedure - The Role of the Law of the Place of Arbitration »,op. cit. note 232, p. 343.

281 J.-F. POUDRET, S. BESSON, op. cit. note 152, p. 863, n° 880. L’idée d’une sentence détachée de toute loi étatique avait été présentée lors des travaux sur un projet de Convention en 1953. La Chambre de commerce internationale considérait en effet que la Convention de Genève de 1927 ne prévoyait que la reconnaissance et l’exécution des sentences respectant les règles de procédure de l’État où l’arbitrage a eu lieu. Selon la CCI, il ne pouvait pas y avoir de progrès en la matière s’il n’existait pas une reconnaissance du concept de sentence internationale, c’est-à-dire d’une sentence complètement indépendante des lois nationales. La CCI proposait donc un projet permettant l’exécution de sentences internationales. Pour obtenir l’exécution, la composition du tribunal arbitral et la procédure devaient être conformes à la volonté des parties ou, à défaut, à la loi du lieu de l’arbitrage. Le Comité économique et social des Nations Unies ne reprit pas le projet, estimant que la formulation retenue par la CCI pouvait permettre aux parties de choisir une procédure qui excluait tout contrôle des sentences. Il préféra viser les sentences étrangères et proposa que l’exécution de la sentence soit refusée lorsque la composition du tribunal arbitral ou la procédure arbitrale n’était pas conforme à la volonté des parties dans la mesure où cette volonté était licite (lawful) au regard du pays du lieu de l’arbitrage. Cette proposition rencontra une forte résistance de la part des représentants allemands, suisses et français. Ceux-ci considéraient que cette formulation eût pu entraîner le refus d’exécution d’une sentence à la moindre différence entre la loi désignée par les parties et celle du lieu de l’arbitrage. Lors des discussions préparatoires de la Convention de New York, la question fut à nouveau débattue. Les termes de « sentence étrangère » furent retenus, mais l’hypothèse où les parties avaient choisi une loi de procédure autre que celle du lieu de l’arbitrage fut largement discutée. Les délégués italiens, norvégiens et turcs souhaitaient conserver la proposition du Comité afin de ne pas donner l’impression que les parties pouvaient se soustraire à toute loi nationale. Pour les délégués français, une telle solution conduisait à reconnaître une place à l’autonomie des parties pour la détruire immédiatement. Le groupe de travail n° 3 parvint à rédiger un texte, devenu l’article V (1) (d) de la Convention, qui supprimait, en cas de choix par les parties de la loi applicable à leur procédure, la condition que cette loi soit conforme à la loi du lieu de l’arbitrage. Selon le groupe de travail, en application de l’article V (1) (a), il n’y avait pas lieu de subordonner en outre la validité de la loi de procédure choisie par les parties à la loi du lieu de l’arbitrage. Finalement, la majorité des délégués fut convaincue qu’en raison de la condition posée à l’article V (1) (a), les parties étaient nécessairement soumises à une loi. Cela laissait entendre que l’ensemble des délégués considéraient également que les parties ne choisiraient pas une loi distincte pour le fond de l’arbitrage et pour la procédure. Il semble en tout état de cause que la majorité des délégations était opposée à la reconnaissance d’une sentence arbitrale détachée de toute loi. V.Enforcement of international arbitral awards, Report and preliminary

draft Convention, adopté par le Comité sur l’arbitrage commercial international le 13 mars 1953, CCI, initialement publié inICC Brochure, 1953, n° 174, p. 7, reproduit in UN DOC E/C.2/373.

282 J.-F. POUDRET, S. BESSON, op. cit. note 152, p. 863, n° 880. 283Ibid.

V (1) (a) et (e), il semble que le rattachement de la sentence à une loi nationale soit implicitement exigé par la Convention284. M. VAN DEN BERG explique ainsi que la coordination de l’ensemble des articles démontre clairement l’inapplicabilité de la Convention de New York aux sentences a-nationales285 : la sentence arbitrale non nationale ne se confond pas avec la sentence transnationale286.

133. Cet avis a été combattu par plusieurs auteurs qui, à l’inverse, soutiennent l’application de la Convention de New York aux sentences délocalisées287, notamment en se fondant sur son article I (1)288. Selon les partisans de l’applicabilité de la Convention de New York, cet article régit la reconnaissance et l’exécution des sentences prononcées dans les litiges entres les personnes physiques ou morales dans le cadre d’un pays autre que celui où la reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale a été demandée. Il régit aussi les sentences arbitrales qui ne sont pas considérées comme internes dans le pays où leur reconnaissance et leur exécution ont été demandées289. Par ailleurs, sous réserve de l’accord des parties sur la procédure d’arbitrage ou la composition du tribunal, l’application d’une loi nationale sur l’arbitrage n’est plus nécessaire. Par conséquent, la Convention de New York, en admettant indirectement la conception de la sentence a-nationale, ne s’opposerait pas à l’idée de déconnexion complète

284 Aux termes de ces dispositions, « [l]a reconnaissance et l’exécution de la sentence ne seront refusées, sur requête de la partie contre laquelle elle est invoquée, que si cette partie fournit à l’autorité compétente du pays où la reconnaissance et l’exécution sont demandées la preuve : a) Que les parties à la convention visée à l’article Il étaient, en vertu de la loi à elles applicable, frappées d’une incapacité, ou que ladite convention n’est pas valable en vertu de la loi à laquelle les parties l’ont subordonnée ou, à défaut d’une indication à cet égard, en vertu de la loi du pays où la sentence a été rendue ; ou (…) e) Que la sentence n’est pas encore devenue obligatoire pour les parties ou a été annulée ou suspendue par une autorité compétente du pays dans lequel, ou d’après la loi duquel, la sentence a été rendue » (non souligné dans le texte).

285 A. J. VAN DEN BERG, The New York Arbitration Convention of 1958 : Towards a Uniform Judicial

Interpretation, op. cit. note 181, p. 34-40 ; J.-F. POUDRET, S. BESSON, op. cit. note 152, p. 863, n° 880.

286 Selon M. VAN DEN BERG, les sentences a-nationales sont des sentences prononcées à l’occasion d’un arbitrage rendu sans rattachement à une loi étatique de procédure ; plus précisément, sans référence expresse ou tacite à ses dispositions impératives. A. J. VAN DEN BERG, The New York Arbitration Convention of 1958 : Towards a

Uniform Judicial Interpretation, op. cit. note 181, p. 5-29, spéc. p. 24. V. également M. DE BOISSESON, op. cit. note 113, p. 439-440, n° 529.

287V. notamment, pour une analyse détaillée de la Convention de New York et l’absence de tout élément décisif empêchant la reconnaissance de la sentence a-nationale, T. RENSMANN, op. cit. note 269, p. 53-55.

288 Cette idée est l’objet de vives controverses doctrinales. V. A. BUCHER, P.-Y. TSCHANZ, International

Arbitration in Switzerland, Bâle, Helbing & Lichtenhahn, 1989, p. 139-141, n° 430-434 ;M.FERRANTE, « About the Nature (National or A-National, Contractual or Jurisdictional) of ICC Awards under the New York Convention », inJ. C. SCHULTSZ, A. J. VAN DEN BERG (dir.),The Art of Arbitration : Essays on International

Arbitration, Liber Amicorum Pieter Sanders, Boston, Kluwer Law and Taxation Publishers, 1982, p. 129 et s., spéc. p. 135 ;A.B.AVANESSIAN, « The New York Convention and Denationalised Arbitration Awards : With Emphasis on the Iran-United States Claims Tribunal », Journal of International Arbitration, 1991, n° 1, p. 5 et s. 289 M. DE BOISSESON, op. cit. note 113, p. 440, n° 559.

de l’arbitrage des régimes juridiques nationaux. Une telle déconnexion est d’ailleurs constatée quant à la convention d’arbitrage et aux règles régissant l’arbitrage290.

2. La reconnaissance et l’exécution des sentences a-nationales dans les régimes juridiques iranien et français

134. En droit français, l’autonomie de la volonté des parties avait été prise en compte par la réforme de 1981 ; elle l’a été également, mais c’est logique, par la réforme de 2011. Les parties peuvent ainsi, en matière internationale, régler la procédure « directement ou par référence à un règlement d’arbitrage ou à des règles de procédure » (article 1509 al. 1). Les arbitres se voient reconnaître une faculté similaire « dans le silence de la convention d’arbitrage » (article 1509 al. 2)291. Le droit français va donc plus loin que la Convention de

New York, d’une part en supprimant clairement la référence à la loi du siège arbitral et, d’autre part, en instituant une option entre la procédure déterminée par les parties (le droit interne français étant de nature supplétive) et celle instituée par un règlement d’arbitrage. Par ailleurs, dans l’hypothèse d’une divergence entre la Convention de New York et la loi française, l’application de cette dernière est confirmée par la jurisprudence. Les tribunaux français sont du reste parmi les seuls à soumettre les sentences apatrides à la Convention de New York292.

135. Il est vrai que dès avant les réformes de 1981, la jurisprudence française était disposée à admettre les sentences a-nationales293. La détermination de la nationalité de la sentence arbitrale était en effet réalisée dans le cadre de la procédure arbitrale choisie par les parties. Dans le cas où la procédure arbitrale était française, la sentence était considérée comme française et soumise aux voies de recours des sentences rendues en France. Si la loi de procédure était une loi étrangère, les voies de recours étaient les mêmes que celles ouvertes contre une sentence rendue à l’étranger. C’est ainsi que dans l’arrêt Götaverken, rendu le 21 février 1980, la Cour d’appel de Paris avait déclaré irrecevable le recours contre une sentence rendue dans un arbitrage international dans lequel aucune loi de procédure n’avait été choisie. Cet arrêt a une portée considérable car la Cour d’appel de Paris reconnaît l’existence d’une

290 L’article V (1) (d) dispose en effet que la procédure d’arbitrage doit être « conforme à la convention des parties, ou à défaut de convention, (…) à la loi du pays où l’arbitrage a lieu », de sorte que la Convention de New York permet aux parties de déterminer elles-mêmes la loi de la procédure. V. Ph. FOUCHARD, L’arbitrage commercial international, op. cit. note 234, p. 668, n° 1207; A. HATAMI, op. cit. note 246, p. 63.

291 L’article 1509 reprend à cet égard l’ancien article 1494 CPC. V. M. DE BOISSESON, p. 440, n° 529. 292 M. DE BOISSESON, op. cit., p. 440, n° 529.

sentence qui n’est pas française (en dépit du lieu du prononcé de la sentence qui était situé en France), et donc étrangère, mais dont la procédure n’est gouvernée par aucune loi étatique294.

136. La même année, la même formation s’était à nouveau prononcée sur l’existence de cette catégorie de sentences dans un arrêt Aksa c. Norsolor. En l’espèce, il s’agissait d’un arbitrage international entre une société française et une société turque pour un contrat de livraison de marchandises à destination de la Turquie. Le lieu de l’arbitrage était Paris et la sentence fut rendue sous l’égide de la CCI. L’article 11 de la CCI (devenu article 19) fut soulevé par la Cour d’appel française, dont elle déduisit que la sentence ne pouvait être considérée comme française puisque rendue selon une procédure arbitrale non française295. L’une des conséquences de cette solution était l’incompétence du régime juridique français pour accueillir le recours en annulation.

137. L’arrêt SEEE c. République de Yougoslavie retint cependant une solution différente. Ayant reconnu qu’en l’espèce la clause compromissoire réglait elle-même la procédure arbitrale en excluant l’application d’une loi étatique, la Cour justifia le recours à la Convention de New York en raison de son « application à la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales rendues sur le territoire d’un État autre que celui où la reconnaissance et l’exécution sont demandées »296.

294C.A. Paris, 21 février 1980, General National Maritime Transport Co. c. Société Götaverken Arendal AB,

J.D.I., 1980, p. 660, note Ph. FOUCHARD ; Rev. arb., 1980, p. 524, note F. JEANTET ; Rev. crit. DIP, 1980, p. 763, note E. MEZGER. En l’espèce, la Cour d’appel avait constaté que « les parties n’ont pas désigné de loi procédurale applicable en dehors des règles de cette nature instituée par le règlement de la juridiction arbitrale ; que les arbitres n’ont pas procédé à cette désignation (…) que la sentence litigieuse rendue selon une procédure qui n’est pas celle de loi française et qui ne se rattache en aucune manière à l’ordre juridique français puisque les deux parties sont étrangères et que le contrat a été conclu et devait être exécuté à l’étranger, ne peut être considérée comme française (…) le lieu des opérations d’arbitrage, uniquement choisi pour assurer leur neutralité n’est pas significatif et ne peut être considéré comme une manifestation de volonté implicite des parties de se soumettre ne serait-ce qu’à titre subsidiaire à la loi française ». Pour le débat en détail, v. J. ROBERT, L’arbitrage : droit interne, droit international, op. cit. note 107, p. 306, n° 354.et BOISSESON, op. cit. note 113, p. 440, n° 529 ; Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN, op. cit. note 2, p. 148, n° 257.

295 L. FRANC-MENGET, op. cit. note 231, p. 183, n° 246.

296 Il est ici utile de souligner l’avis de MM. POUDRET et BESSON, lesquels ont écrit à ce propos : « Cette jurisprudence nous semble difficilement compatible avec plusieurs dispositions de la Convention de New York. En premier lieu, l’art. I ch.1 indique que celle-ci s’applique à la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales “rendues sur le territoire d’un État autre que celui où la reconnaissance et l’exécution sont demandées”. La seconde phrase ajoute certes que la Convention s’applique “également aux sentences arbitrales qui ne sont pas considérées comme sentences nationales dans l’État où leur reconnaissance et leur exécution sont demandées”, mais nous avons vu au chapitre 2.3.1 (N.121 et 124) que cette précision visait le cas d’un arbitrage se déroulant selon une loi d’arbitrage étrangère. Elle concerne ainsi la délocalisation géographique, et non la décentralisation juridique dont il est question. En deuxième lieu, l’art. I ch.3 permet aux États contractants d’émettre une réserve de réciprocité ayant pour effet de limiter le champ d’application de la Convention aux sentences rendues sur le territoire “d’un État contractant” (ou, ajoutons-nous, soumises à la loi d’arbitrage d’un État contractant). Cette réserve implique que la sentence est rattachée à un ordre juridique étatique déterminable

138. Après la réforme de 1981, la localisation de l’arbitrage n’est plus le seul critère pouvant soumettre une sentence aux règles adoptées par le décret de 1981297 : le texte admettait l’exécution de la sentence indépendamment de toute loi étatique et, lorsque la sentence était rendue à l’étranger, fournissait seulement le critère de localisation pour la mise en œuvre des règles adoptées par le décret de 1981. Lorsque la sentence était prononcée en France, si son objet était international, la déconnexion de la sentence de toute loi étatique n’avait plus d’incidence, puisque l’application du décret de 1981 n’était pas conditionnée par l’existence d’un lien juridique. Ainsi, les problèmes susceptibles de naître à propos de l’application de la Convention de New York au sujet des sentences a-nationales ne se posaient pas si elles étaient rendues en France298.

139. De même, la réforme de 2011 a maintenu cette logique : l’application des nouvelles dispositions s’étend aux sentences dont l’exécution est demandée en France, indépendamment de la loi qui régit l’arbitrage – qu’elle soit étatique ou non – et indépendamment du lieu où la sentence a été initialement rendue – en France ou à l’étranger. En ce sens, le constat dressé à propos de la réforme de 1981 demeure valable quant à celle de 2011 :

« le décret, en écartant toute règle de nature conflictualiste, permettait à l’arbitrage de se développer “dans l’espace interétatique, tout rattachement coupé avec toute législation étatique, sur le seul support de la volonté autonome des parties” »299.

140. Contrairement à la France, la reconnaissance et l’exécution des sentences a-nationales ont peu fait l’objet de débats doctrinaux en droit iranien. Ce constat a pu être résumé dans le

et exclut que les négociations de la Convention aient pu envisager l’application de celle-ci à des sentences a- nationales. Enfin, l’article V fait de nombreuses références au droit du siège qui, si elles ne sont pas à elles seules décisives, confirment que les sentences a-nationales n’ont pu être visées par le texte conventionnel. À la suite de Van den Berg, nous estimons ainsi que les sentences juridiquement délocalisées ou “a-nationales” ne peuvent être reconnues et exécutées selon les dispositions de la Convention, ce qui n’exclut évidemment pas un exequatur selon les dispositions nationales (parfois plus favorables) de l’État requis ». V. J.-F. POUDRET, S. BESSON, op. cit. note 152, p. 865-866, n° 881.

297 Prenant acte de cette évolution libérale de l’arbitrage international, le législateur français avait estimé en 1981 qu’elle rendait superflue la localisation de l’arbitrage international. Édictant des règles spécifiques pour celui-ci, il se refusa à en fixer le champ d’application dans l’espace, et donc à rattacher à un système juridique étatique déterminé un arbitrage présentant des éléments d’extranéité. Cependant, le droit français ne faisait pas complètement abstraction du lieu de l’arbitrage. En particulier, il tirait certaines conséquences du fait que la sentence ait été rendue à l’étranger. Elle devait être soumise au même régime d’exécution et de contrôle judiciaire en France que si elle avait été rendue en matière d’arbitrage international, sans pourtant pouvoir y être annulée, cette sanction étant réservée aux sentences rendues en France (anciens articles 1502 et 1504 CPC). V. Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN, op. cit. note 2, p. 52, n° 94.

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