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Une mesure de la diversité des structures de réseaux

Bibliographie du chapitre 1

Chapitre 2 : La déréglementation du transport aérien

2.3. Le cas singulier des compagnies « low cost »

2.3.2. Des stratégies de desserte apparemment divergentes en Europe D’une façon générale, les compagnies low cost adoptent en Europe une stratégie très

2.3.2.1. Une mesure de la diversité des structures de réseaux

Pour appréhender les aspects structurels des réseaux des compagnies européennes à bas prix, nous avons pris le parti de les différencier par leur taille, par le nombre et la nature des bases en exploitation ainsi que par l’échelle des dessertes.

Tableau 2.34 : Classement des compagnies en fonction du nombre de liaisons exploitées en septembre 2005 (Source : Sites Internet des compagnies).

Compagnie Nombre d’OD Nombre de bases Compagnie Nombre d’OD Nombre de bases

AIR BERLIN 418 24 WINDJET 21 3

RYANAIR 229 16 FLYGLOBESPAN 20 2 EASYJET 204 16 FLYNORDIC 20 2 FLYBE 79 7 VIRGIN 17 1 HLX 62 5 MY TRAVEL LITE 11 1 BMYBABY 60 5 SMARTWINGS 11 1 GERMANWINGS 55 2 INTERSKY 8 1 STERLING 52 5 EVOLAVIA 6 1

SKY EUROPE 41 4 BUDGETAIR 5 1

NORWEGIAN 41 4 GERMANIA XP 4 1

THOMSONFLY 35 3 FLY ME 4 1

DBA 30 4 AIR TURQUOISE 3 1

MYAIR 28 3

VUELING 22 3

AER ARANN 21 5 Totaux 1507 122

Les compagnies européennes low cost n’affichent pas de possibilités de correspondances sur leurs bases, à la notoire exception de Virgin Express. Le nombre de bases s’établit entre 1 et 24 avec deux groupes bien marqués de compagnies : entre 1 et 7 pour 23 d’entre elles et entre 16 et 24 pour les trois autres. Certaines de ces implantations sont très proches les unes des autres pour ne pas dire redondantes, ce qui amène à s’interroger sur un choix d’exhaustivité que les compagnies classiques n’effectuent plus et que l’on imagine coûteux, notamment en personnel. Ainsi, Easyjet et Ryanair exploitent trois bases londoniennes : Luton, Stansted et Gatwick. Easyjet dessert à la fois Orly et Roissy-CDG et Air Berlin décolle tout à la fois des aéroports berlinois de Tegel (pour une grande majorité) et de Schönefeld.

74 Une base pourrait être définie comme un « hub technique » : les appareils y repassent entre deux missions différentes, mais les voyageurs ne peuvent effectuer de correspondance entre deux vols. Dans l’absolu, connaissant les horaires, il leur est possible d’acheter indépendamment des billets pour des segments successifs mais le passage de l’un à l’autre s’effectue à leurs risques et périls et les bagages doivent être à nouveau enregistrés. Au contraire des hubs classiques, il n’y a pas de pulsations, c’est-à-dire des plages de « rendez-vous » favorisant les correspondances. Les avions repartent dès que possible (voir aussi 5.1.3).

Nous avons réparti les bases en six catégories sur la base de la taille des aéroports choisis et de leur fonction (figure 2.33) :

- Les catégories H1 et H2 désignent les aéroports-hubs de compagnies nationales. Une distinction de taille a été effectuée de part et d’autre de la barre des 10 millions de passagers annuels. D’une façon générale, l’implantation d’une base low

cost sur ce type de plate-forme place la compagnie en position d’acteur

secondaire, le gestionnaire de l’aéroport cherchant avant tout à s’adapter à la compagnie classique basée et à ses besoins en termes de capacité des installations. Les cas particuliers d’Orly et de Gatwick ont été assimilés à la catégorie H1 dans la mesure où ils fonctionnent en complémentarité avec les hubs en titre de Roissy-CDG et d’Heathrow avec la même compagnie dominante ;

- La catégorie H3 désigne les aéroports proches de hubs dominés par des compagnies classiques et spécialisés dans l’accueil des low-cost et des charters : Luton (Londres), Stansted (Londres), Hahn (Francfort), Torp (Oslo), Bergame Orio del Serio (Milan), etc.

- Les catégories A1, A2 et A3 désignent des aéroports qui ne fonctionnent pas en hub. En principe, les compagnies à bas prix jouent un rôle mineur dans les deux premières catégories (A1 : trafic passager supérieur à 5 millions annuels et A2 : trafic compris entre 1 et 5 millions de passagers annuels), mais elles peuvent avoir un poids plus important voire dominant dans le groupe des aéroports régionaux (A3) qu’elles ont largement investi comme nous le verrons par la suite.

Figure 2.33 : Typologie des aéroports utilisés comme bases par l’ensemble des compagnies de notre panel

On constate sans surprise que trois « poids lourds », Air Berlin, Easyjet et Ryanair, émergent du lot par le nombre de leurs bases et de leurs lignes. En revanche, les stratégies de localisation sont très différentes : là où Ryanair privilégie les aéroports alternatifs (plutôt éloignés des agglomérations qu’ils sont censés desservir) pour baser ses appareils, Easyjet ne répugne pas à s’implanter dans des hubs préexistants (Amsterdam, Genève, Londres-Gatwick, etc.) et des aéroports régionaux, ces derniers étant essentiellement localisés sur le territoire du Royaume-Uni. Air Berlin a une stratégie complètement opposée à celle de Ryanair dans la mesure où aucun aéroport alternatif n’a été sélectionné pour y baser des avions. Le rapport à la clientèle (notamment son « ciblage ») et aux gestionnaires d’aéroports s’en trouve très différent, comme nous le verrons plus loin. La stratégie de couverture territoriale n’est pas non plus la même : on peut opposer le duo Easyjet – Ryanair, qui a implanté des bases dans de nombreux pays (respectivement 5 et 9) à Air Berlin qui a positionné 21 de ses 24 bases en Allemagne, deux en Autriche, et une à Palma de Majorque ! Les deux premières citées tendent à devenir des compagnies

H1: Grand hub (plus de 10 millions de passagers/an) H2 : Autre hub (entre 5 et 10 millions de

passagers/an)

H3 : Aéroport alternatif proche d'un hub exploité par une compagnie classique A1 : Aéroport non-hub, trafic > 5 millions de passagers/an

A2 : Aéroport non-hub, trafic compris entre 1 et 5 millions de passagers/an A3 : aéroport non-hub, trafic passagers < 1 million de passagers/an

véritablement européennes, par opposition à la dernière qui reste cantonnée à la sphère germanique et à ses destinations touristiques privilégiées (figure 2.35).

Figure 2.34 : Deux stratégies contrastées d’implantation de bases : Easyjet (à gauche) et Ryanair (à droite). Les catégories sont les mêmes que celles de la figure 2.

Les autres acteurs du marché font plutôt le choix de desservir des plates-formes accueillant d’autres compagnies (aéroports principaux des grandes métropoles ou aéroports régionaux et touristiques largement développés auparavant). Les acteurs les plus petits jouent fréquemment la carte d’aéroports provinciaux de tailles parfois faibles, comme Friedrichshafen (Intersky), Ancône (eVolaVia), Reims (Air Turquoise), Bournemouth, Coventry et Doncaster/Sheffield pour Thomsonfly.

Figure 2.35 : Deux stratégies de couverture du territoire européen et de positionnement commercial à travers la localisation des bases : Easyjet et Air Berlin (septembre 2005).

3 2 0 6 3 H1 H2 H3 A1 A2 A3 2 0 10 0 4 0 H1 H2 H3 A1 A2 A3 Légende :

Répartition des bases de la compagnie

Easyjet en 2005 Répartition des bases de la compagnie Air Berlin en 2005

Légende : 8 - 10 destinations 11 - 15 destinations 16 - 20 destinations 21 - 25 destinations 26 - 31 destinations Belfast Newcastle East Midlands Berlin Dortmund Bâle-Mulhouse Orly Genève Nice Barcelone Bristol Liverpool 1 2 3 1 - Stansted 2 - Gatwick 3 - Luton 4 - Amsterdam 4 4 - 10 destinations 13 - 14 destinations 16 - 20 destinations 21 - 27 destinations 32 - 39 destinations Berlin Munich Rostock Nuremberg Dresde Leipzig Erfurt Stuttgart Baden Francfort SB Hambourg Brême HN PA DTM M-O DUS C-B Vienne Palma de Majorque Bâle-Mulhouse Salzbourg Linz C-B : Cologne DTM : Dortmund DUS : Dusseldorf HN : Hannovre PA : Paderborn SB : Sarrebruck N

Un petit nombre d’aéroports proches des centres-villes et délaissés par les compagnies traditionnelles, généralement pour des raisons d’espace, sont récupérés par les compagnies à bas prix, peu gourmandes en infrastructures et en services au sol : c’est le cas par exemple de Göteborg (City Airport), Oslo (Torp) ou Rome (Ciampino). Dans le cas particulier de Berlin, desservie par deux aéroports distincts du temps de la partition interallemande, la concentration des trafics « nobles » sur Tegel a fait le bonheur des low

cost qui ont investi la plate-forme de Schönefeld, de surcroît bien desservie par les

transports collectifs lourds (métro et S-Bahn). Dans le cas parisien, le délaissement progressif d’Orly par les compagnies nationales et la chute des chalengeurs malchanceux d’Air France sur le marché intérieur, n’ont créé de façon paradoxale que de faibles opportunités d’implantation pour les compagnies à bas prix comme Easyjet, Thomsonfly ou Sky Europe.

Enfin, deux compagnies de notre panel jouent de fait le rôle de compagnie nationale : il s’agit de Virgin Express et de Sky Europe. La première opère à partir de Bruxelles Zaventem. Elle a été en concurrence avec SN Brussels Airlines, compagnie issue des dépouilles de Sabena, sur les principales destinations européennes, avant qu’une fusion n’intervienne sous un nouveau nom dévoilé en novembre 2006 : Brussels Airlines. La seconde, créée par deux ressortissants belges, s’est implantée à Bratislava, capitale de la jeune république slovaque, avec l’appui du gouvernement. Elle joue sur deux tableaux en termes de stratégie : compagnie « porte-drapeau » slovaque et low cost décollant d’un aéroport proche de celui de Vienne (80 km les séparent). Une seconde base est en cours de développement à Budapest dans des conditions comparables à celles que connaissent les autres compagnies à bas prix.

La localisation des bases peut apporter une contribution décisive au développement de relations interrégionales directes dans la mesure où les 3/4 des bases recensées (80) sont implantées dans des aéroports qui ne sont pas le siège de compagnies classiques, et 20 de ces aéroports ont eu un trafic inférieur au million de passagers annuels en 2004. On peut donc faire l’hypothèse d’une augmentation significative des destinations accessibles en direct au départ de ces bases qui ne coïncident pas avec les grands nœuds du trafic aérien mondial.