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7. La septième Assemblée mondiale du Conseil Œcuménique

7.1. Le Message de l’Assemblée

Selon le Message de l’Assemblée, l’Esprit est la force de Dieu qui conduit l’Eglise vers son accomplissement malgré les méandres de l’histoire humaine3. Cet accomplissement n’est autre que la koinônia des

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Il s’agit du thème de la section III. Les autres sous thèmes ont été respectivement : I – Esprit source de vie, garde ta création ; II – Esprit de vérité, libère-nous ; IV – Esprit Saint, transforme-nous et sanctifie-nous ! Ces questions ont été développées

théologiquement dans un document préparatoire rédigé par le Conseil, Que l’Esprit parle aux Eglises. Guide pour l’étude du thème et des grandes questions à l’ordre du jour de la Septième Assemblée, Genève, WCC, 1990 (cité dans la suite comme Canberra. Guide).

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Publié dans WESTPHAL, M. (éd.), Signes de l’Esprit. Rapport officiel de la Septième Assemblée. Canberra, Australie, 7 – 20 février 1991, Genève, WCC, 1991, 192-194 (cité dans la suite comme Canberra. Rapport).

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fidèles avec Dieu – Père, Fils et Esprit –, et les uns avec les autres. La plénitude de la koinônia sera réalisée à la fin des temps. Cependant, dès maintenant, des signes de cette koinônia eschatologique sont présents dans la communauté chrétienne malgré ses divisions. A travers la diversité des cultures, des races et des traditions, l’Esprit rassemble en une seule assemblée œcuménique des chrétiens de diverses Eglises. Encore divisés, mais déjà animés par le même Esprit, ils savent se reconnaître mutuellement comme frères et sœurs dans le Christ, membres de l’unique famille des enfants de Dieu. Grâce à l’Esprit – la force vitale de l’œcuménisme –, les Eglises progressent continuellement sur le chemin de l’unité et découvrent, de manière parfois surprenante et inattendue, leur profonde unité spirituelle au cœur de leur diversité. L’Esprit pousse les Eglises à rechercher sans relâche et toujours plus intensément leur unité visible – condition nécessaire de l’efficacité plus grande de leur mission d’évangéliser et de servir le monde. Dans la puissance de l’Esprit, les Eglises sont appelées à continuer la mission du Christ dans le monde actuel, à savoir : conduire toute l’humanité à la communion avec Dieu et, en lui, les uns avec les autres.

Les efforts œcuméniques des Eglises ne peuvent cependant se limiter à la recherche de l’unité des chrétiens, ils doivent avoir une portée plus large en cherchant à établir entre les peuples du monde des relations fondées sur la réconciliation et l’amour fraternel. Car nous avons été réconciliés par le Christ et investis de son Esprit de réconciliation, nous devons donc chercher, à notre tour, la réconciliation entre les chrétiens afin que l’Eglise unie puisse être un signe et un instrument efficaces de la réconciliation universelle du genre humain. Car la repentance et le pardon sont nécessaires pour rétablir l’unité de la communauté chrétienne, toutes les Eglises et tous les fidèles sont appelés à faire preuve d’humilité pour se repentir et pour accorder le pardon aux autres. Réconciliés avec Dieu et les uns avec les autres, les chrétiens de toutes les Eglises pourront alors vivre pleinement selon l’Esprit du Seigneur et porter dans le monde les fruits de cette réconciliation qui sont : la paix, la vérité, la droiture, la justice, la liberté et, finalement, l’unité.

7.2. Thème général : Viens, Esprit Saint, renouvelle toute la création

La présentation du thème général devant l’Assemblée a été confiée au patriarche Parthenios d’Alexandrie1. Au début de son intervention, il a remarqué que prendre pour thème le Saint Esprit et le prier, c’est aussi s’exposer à l’action toujours imprévisible de son souffle. Afin que l’œcuménisme puisse profiter de cette nouvelle Assemblée mondiale des chrétiens, les Eglises doivent se laisser conduire par l’Esprit et prendre ensemble les risques qu’il leur inspirera, en sachant que la sainte Trinité est un mystère, que le Saint Esprit est un mystère, et que l’Eglise – corps du Christ et temple de l’Esprit – est, elle aussi, un mystère ineffable2. Au début de son intervention, le patriarche a relevé le caractère pneumatique des notae Ecclesiae3. L’unité et l’unicité de l’Eglise sont

ancrées dans l’unique Esprit : animée par l’Esprit qui est un, l’Eglise est aussi une, même si elle est composée d’une multitude de communautés dispersées à travers le monde et se referant à des traditions chrétiennes diverses. Elle est sainte malgré les innombrables péchés de ses membres, car Dieu lui-même l’investit de sa propre sainteté par l’action de l’Esprit. Elle est catholique car à travers l’étendue de la terre, le même Esprit anime tous ses membres qui ont été baptisés dans le même Christ et vivent sous le signe de la foi en lui. Elle est apostolique car l’action de l’Esprit la préserve continuellement dans la Tradition de foi des apôtres.

Le Saint Esprit est le Paraclet qui procède du Père et est envoyé par le Fils pour habiter et guider l’Eglise. Selon une expression biblique – reprise et développée à l’époque patristique, notamment par des Pères orientaux –, l’Eglise est le peuple de Dieu qui vit dans l’Esprit. De ce fait, les chrétiens sont des spirituels exposés continuellement au vent de l’Esprit et l’Eglise n’est pas une institution statique mais un grand événement pneumatique en constante évolution dans la force de l’Esprit-Saint4. L’Eglise n’a pas d’existence sans le Saint Esprit ; sa vie est paraclétique puisqu’elle est imprégnée de l’Esprit que le Fils lui envoie continuellement d’auprès du Père. L’Eglise fait l’expérience la plus forte de son caractère pneumatique lorsqu’elle se réunit pour célébrer la cène du Seigneur. La sainte eucharistie est la participation au

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PARTHENIOS D’ALEXANDRIE, Présentation du thème : le Saint Esprit dans Canberra. Rapport, 33-44. 2 Ibid., 34-35. 3 Ibid., 35. 4 Ibid., 36.

sacrifice du Christ par la grâce du Saint Esprit pour rendre grâce au Père. Ainsi, réunis en Eglise autour de la table du Seigneur, nous nous unissons à la très sainte Trinité. La célébration de l’eucharistie est une nouvelle effusion de l’Esprit-Saint, une actualisation continuelle de l’événement de la Pentecôte1. Dans la liturgie eucharistique nous demandons que l’Esprit Saint transforme le pain et le vin en corps et sang du Christ (epiclesis), afin qu’en communiant à ces mystères, nous, êtres humains, devenions, par le même Esprit, un tabernacle vivant de Dieu. En l’Esprit qui donne la vie, qui procède du Père, et qui est glorifié avec le Père et le Fils, nous pouvons façonner nos relations personnelles à l’intérieur de la communauté ecclésiale sur les relations qui existent entre le Père, le Fils et l’Esprit à l’intérieur de la Trinité2. Ces relations dans l’Esprit sont pourtant corrompues à l’intérieur même de la communauté chrétienne par le péché de divisions. Pour guérir la blessure dans le corps du Christ, les Eglises sont appelées à écouter ensemble ce que l’Esprit leur dit (cf. Ap 2, 7) et à travailler solidairement pour surmonter tout obstacle à l’unité3. Les paroles de reconnaissance, d’encouragement, mais aussi celles de réprimande que l’Esprit a prononcées jadis aux communautés des premiers chrétiens en Asie Mineur, n’ont rien perdu de leur actualité (cf. Ap 2-3). Tout en connaissant les bonnes œuvres des Eglises, leur labeur pour l’unité et leur persévérance dans la vérité, l’Esprit les pousse continuellement à la repentance et la fidélité toujours plus grande à l’évangile du Christ. A tous les fidèles qui vivent selon l’Esprit, le Seigneur promet de venir chez eux et de prendre son repas avec eux (cf. Ap 3, 20). La voie de l’unité conduit par une écoute attentive de ce que l’Esprit dit aujourd’hui aux Eglises, et par une mise en pratique de ses inspirations dans les relations œcuméniques4. La fidélité à l’Esprit de Dieu exige que les croyants s’emploient sans relâche à réaliser la prière de Jésus : que tous ceux que le Père lui a donnés soient un, comme un est Dieu dans le mystère de la Trinité.

L’unité divine qui existe au sein de la Trinité, existe aussi dans l’Eglise qui est une Eglise du Père, du Fils et du Saint Esprit, et qui ne fait qu’un avec la Trinité ; c’est une unité invisible et indestructible qui lui est

1 Ibid., 37. 2 Ibid., 39. 3 Ibid., 40. 4 Ibid., 41.

donnée par la grâce continuelle de l’Esprit1. Pour correspondre dans leur vie à cette unité mystique, les Eglises doivent rétablir la plénitude de leur unité visible. A cette condition seulement, elles seront capables d’accomplir efficacement leur mission d’évangélisation du monde. L’évangile s’adresse à tous les gens de toutes les langues, cultures et nations ; c’est un message de salut universel dans le Christ. Dans la force de l’Esprit, les Eglises sont envoyées dans le monde avec la mission de faire des disciples de toutes les nations. Dans cette perspective d’universalité, l’unité visible de l’Eglise du Christ pleinement réconciliée n’est pas la fin de la mission car son objectif ultime est la koinônia de toute l’humanité, que doit servir l’unité des chrétiens2. Seule l’Eglise véritablement réconciliée et unie – dans laquelle il n’y a plus ni païen, ni Juif, ni homme, ni femme, ni esclave, ni homme libre – sera un instrument pleinement efficace de l’avènement dans le monde de la nouvelle humanité réconciliée en elle. A présent, le signe est obscurci et l’efficacité de l’instrument est diminuée à cause des divisions entre les chrétiens ; divisions qui contredisent la vocation universelle de l’Eglise et s’opposent à son identité profonde. Pour cette raison, le premier défi que l’œcuménisme pose aux Eglises et aux chrétiens, est le défi de sainteté ; et la sainteté est la vie dans l’Esprit3. Pour conclure sa présentation, le conférencier a remarqué que dans le dialogue œcuménique une grande attention était accordée à l’unité de l’Eglise, à sa catholicité et à son apostolicité, alors que la note de sainteté était souvent oubliée. Pourtant, pour porter du fruit, l’action œcuménique des Eglises et des chrétiens doit être accompagnée de la sainteté de leur vie personnelle et ecclésiale.