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L'Eglise comme communion - vers une ecclésiologie commune à l'âge de l'oecuménisme: trois études sur la communion

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Texte intégral

(1)

U n i v e r s i t é d e F r i b o u r g S u i s s e

I n s t i t u t d ’ é t u d e s œ c u m é n i q u e s

L’EGLISE COMME COMMUNION –

VERS UNE ECCLESIOLOGIE COMMUNE

A L’AGE DE L’ŒCUMENISME

T r o i s é t u d e s s u r l a c o m m u n i o n

Thèse présentée à la Faculté de théologie de l’Université de Fribourg,

Suisse

pour obtenir le grade de docteur

par

Andrzej CHOROMAŃSKI

Sous la direction du professeur

Guido VERGAUWEN

F R I B O U R G ( S U I S S E )

2 0 0 4

(2)

Cette thèse a été approuvée par la Faculté de théologie

de l’Université de Fribourg, Suisse, en sa séance du 24. 11. 2004

sur la proposition de MM. les professeurs :

Guido Vergauwen, O.P. (1

er

censeur),

Mme. Barbara Hallensleben (2

e

censeur, Doyenne),

Benoît-Dominique de La Soujeole, O.P. (Président du Jury).

(3)

AVANT – PROPOS

La présente dissertation est le résultat de plusieurs années d’étude et de recherches, consacrées à l’ecclésiologie et surtout à la question de l’unité de l’Eglise. L’idée est née à la suite de mon travail de licence consacré à l’intercommunion1. Il m’a permis de constater que les différentes disciplines ecclésiastiques concernant le partage eucharistique avec les chrétiens appartenant à d’autres Eglises que la sienne, trouvaient leurs principaux motifs doctrinaux dans différentes conceptions de la place de l’eucharistie dans le mystère de l’Eglise. En d’autres termes, le cœur du problème du partage eucharistique entre les chrétiens divisés se situait du côté de l’ecclésiologie. Même si à l’époque actuelle, il existe différentes pratiques concernant l’hospitalité eucharistique, les Eglises engagées dans le mouvement œcuménique reconnaissent que la pleine communion eucharistique entre tous les chrétiens ne pourra se réaliser avant que ne soit atteinte la plénitude de leur communion dans l’Eglise visiblement unie. Ceci exige que les Eglises de traditions différentes se mettent d’accord sur ce que cela signifie être l’Eglise et faire partie de l’Eglise.

Dans les pages qui suivent, nous examinerons différentes visions de l’Eglise et de son unité dans la perspective de la communion. La notion de communion (koinônia–communio), en effet, constitue aujourd’hui le point focal du dialogue œcuménique sur l’Eglise. Par le présent travail, nous voulons prendre part à ce dialogue, ayant à cœur l’exhortation de Jésus : que tous ceux qui croient en lui soient un (cf. Jn 17, 20-21). Mon intérêt et ma sensibilité œcuméniques ont été renforcés lors de mes études par une expérience personnelle sur le terrain. Pendant plusieurs années, en effet, simultanément à l’élaboration de cette dissertation, j’ai assumé la tâche de cure d’une paroisse catholique, dans une région de la Suisse – le Jura bernois – à majorité protestante. L’œcuménisme vécu dans la pratique m’a confirmé dans la conviction que pour faire avancer la cause de l’unité, il est nécessaire que nos efforts pastoraux se fondent sur des connaissances approfondies des autres traditions chrétiennes, sur l’amour de sa propre Eglise et sur la fidélité – personnelle et ecclésiale –

1

Intercommunion. La pratique des Eglises et une réflexion théologique sur la position catholique. Université de Fribourg Suisse, 1998. Ecrit sous la direction du professeur L. Walsh.

(4)

toujours plus grande, au Christ. Sinon, nous risquons de tomber dans un

œcuménisme d’indifférentisme, qui conduit au renversement des

perspectives où la recherche des autres chrétiens prend le dessus sur la recherche commune du Christ et de sa volonté pour l’Eglise. Il est indispensable que les chrétiens soient conscients du fait que ce n’est pas en allant les uns vers les autres en oubliant leurs identités ecclésiales propres qu’ils parviendront à éliminer les causes et les conséquences de leurs divisions, mais en allant ensemble vers le Christ et dans l’obéissance toujours plus parfaite à son évangile. C’est par un

œcuménisme de vérité qui ne contourne pas les problèmes mais les

affronte avec humilité et courage, que les Eglises contribueront le mieux à la cause de l’unité chrétienne. C’est avec une telle conviction au fond du cœur que j’ai entrepris cette étude sur l’ecclésiologie dont le but ultime était de mesurer la valeur réelle de la notion de communion dans le dialogue œcuménique actuel sur l’Eglise.

Au terme de ce long cheminement, jalonné tantôt par des périodes d’enthousiasme et de ferveur, tantôt par des moments de découragement et de lassitude, je rends grâce au Seigneur qui, dans son infinie bonté, m’a permis d’achever ce travail malgré mes insuffisances personnelles de toutes sortes. Il est le Dieu d’amour qui ne nous abandonne jamais et nous accompagne par sa grâce dans tous les projets entrepris, pour faire resplendir davantage sa gloire parmi les hommes et faire croître son Eglise dans le monde. Aussi humble qu’il puisse être, ce travail n’a pas eu d’autres raisons.

Tout au long de l’élaboration de ce projet, j’étais entouré de ma famille, mes proches et mes amis fidèles. Leur prière – de loin ou de près – et leur soutient moral me portaient continuellement et me fortifiaient aux temps de découragement. Je suis profondément convaincu que ce travail n’aurait pas pu être accompli sans leur présence – physique ou spirituelle – à mes côtés. Qu’il me soit permis à cet endroit de les remercier pour tout le bien reçu, sans citer leurs noms qui sont gravés dans mon cœur.

Je pense, avec une grande reconnaissance dans le cœur, à notre Alma

Mater Friburgensis et à tous les professeurs de théologie et d’autres

sciences, qui ont contribué à mon éducation par leurs cours et leurs livres, et qui ont ainsi une participation indirecte mais réelle dans ce travail.

Cette dissertation a été rédigée sous la direction de Monsieur le professeur Guido Vergauwen de l’Institut d’Etudes Œcuméniques.

(5)

L’élaboration du projet, surtout dans sa première phase, était plutôt difficile, marquée par des hésitations et des incertitudes concernant aussi bien des questions de fond que de méthodologie. Plusieurs fois le plan a été remanié et même considérablement changé. J’exprime ma grande reconnaissance au professeur Vergauwen qui a su me suggérer des pistes de recherches et des solutions adéquates aux moments de blocage tout en respectant mes idées et ma façon de penser et de travailler. Je remercie également Madame la professeure Barbara Hallensleben, dont les suggestions ont été une aide décisive dans le dernier remaniement du plan de l’ensemble.

Ce projet a aussi profité des échanges avec d’autres étudiants et étudiantes notamment lors de colloques semestriels organisés par le père Vergauwen. Leurs remarques et critiques amicales m’ont permis de clarifier et de mieux élaborer plusieurs questions particulières ; j’en suis reconnaissant à chacune et chacun d’eux.

Je tiens également à exprimer ma sincère reconnaissance à l’Œuvre St– Justin à Fribourg, qui m’a accordé une bourse d’études pendant plusieurs années, et sans laquelle ce travail n’aurait pu voir le jour. Toutes ces personnes qui, de quelque manière que ce soit, ont contribué à l’accomplissement de ce projet, je les remercie du fond de mon cœur et je les recommande au Seigneur dans une prière pleine de reconnaissance.

Andrzej Choromanski

Fribourg, Suisse Le 18 juin 2004

(6)
(7)

TABLE DES MATIERES

AVANT – PROPOS... I

TABLE DES MATIERES ... V

ABREVIATIONS ET SIGLES ... XV

INTRODUCTION... 1

P R E M I E R E E T U D E : La notion de communion –

quelques éclaircissements sur le terme, sa compréhension et

son évolution ... 7

Notes méthodologiques ... 8

1. Le mot communion – évolution du sens ... 9

2. La Koinônia dans le grec classique ... 14

3. Communio, communicatio et communicare dans le latin

classique ... 18

4. La communion dans la Bible... 21

4.1. La communion dans l’Ancien Testament et la culture juive 21 4.2. La communion dans le Nouveau Testament ... 24

4.2.1. Introduction ... 24

4.2.2. La koinônia comme mise en commun des ressources matérielles et spirituelles ... 28

4.2.3. La koinônia comme participation communautaire ... 30

4.2.4. La koinônia comme communauté ... 38

(8)

4.2.6. La koinônia et l’intercommunion à la lumière du Nouveau

Testament ... 45

5. Le concept de communion selon les Pères ... 47

5.1. La koinônia chez les Pères grecs ... 47

5.2. La communio chez les Pères latins... 53

5.3. La communion : vie partagée – éléments du concept chez les Pères ... 55

D E U X I E M E E T U D E : L’Eglise en tant que communion

dans la Foi et Constitution et le Conseil Œcuménique des

Eglises... 59

Notes méthodologiques ... 60

1. L’émergence du concept... 63

2. La troisième Assemblée mondiale du Conseil Œcuménique

des Eglises – Nouvelle Delhi 1961 ... 68

2.1. L’unité est communion ... 68

2.2. Don de Dieu et défi pour l’Eglise ... 70

2.3. Les composantes de la communion... 70

2.3.1. Le baptême ... 71

2.3.2. La foi et son annonce au monde... 73

2.3.3. La prière et l’eucharistie... 75

2.3.4. Le ministère... 77

2.3.5. La vie commune... 77

2.3.6. Les structures ... 79

2.4. Conclusion... 80

3. La quatrième Conférence mondiale de la Foi & Constitution

– Montréal 1963... 82

(9)

3.2. L’Eglise selon Montréal ... 84

4. La quatrième Assemblée mondiale du Conseil Œcuménique

des Eglises – Upsal 1968 ... 90

4.1. La présentation de l’Assemblée ... 90

4.2. La catholicité selon Upsal ... 92

4.3. Les appréciations et les critiques ... 96

5. La cinquième Assemblée mondiale du Conseil Œcuménique

des Eglises – Nairobi 1975 ... 103

5.1. L’Eglise, communauté conciliaire – Déclaration de Nairobi ... 103

5.2. Le terme et le développement du concept de conciliarité dans le COE ... 104

5.3. Concile et conseil – distinction des concepts ... 106

5.4. La communauté conciliaire selon Nairobi ... 108

5.4.1. La communauté unie dans la foi ... 108

5.4.2. La communauté catholique ... 109

5.4.3. Les dimensions et les niveaux de la conciliarité ... 112

5.5. Critiques de Nairobi... 115

6. La sixième Assemblée mondiale du Conseil Œcuménique des

Eglises – Vancouver 1983 ... 117

6.1. Elargir et approfondir la communauté œcuménique de vie ... 117

6.2. L’Eglise liée au monde ... 118

6.3. L’Eglise distincte du monde ... 122

6.4. Les Exigences du processus conciliaire ... 124

6.5. Promouvoir le modèle de la communauté conciliaire ... 128

7. La septième Assemblée mondiale du Conseil Œcuménique

des Eglises – Canberra 1991... 130

(10)

7.2. Thème général : Viens, Esprit Saint, renouvelle toute la

création... 131

7.3. Thème particulier : Esprit d’unité, réconcilie ton peuple .. 134

7.4. Une étude orthodoxe sur l’unité... 139

7.5. Une étude catholique sur la diversité... 142

7.6. La Déclaration de Canberra... 148

7.7. Les commentaires théologiques de la Déclaration... 153

7.7.1. Un commentaire anglican... 153

7.7.2. Un commentaire catholique ... 155

7.7.3. Un commentaire orthodoxe... 157

7.7.4. Un commentaire luthérien... 159

7.7.5. Un commentaire réformé ... 160

8. La cinquième Conférence mondiale de la Foi & Constitution

– Saint-Jacques-de-Compostelle 1993 ... 162

8.1. La structure et les buts de la Conférence ... 162

8.2. La complexité de la notion de koinônia ... 164

8.3. La koinônia divine et la koinônia ecclésiale ... 167

8.4. Aspects de la koinônia ecclésiale ... 172

8.4.1. La koinônia dans la foi et sa portée réelle ... 172

8.4.2. La koinônia dans les structures, notamment le ministère... 176

8.4.3. La koinônia dans la vie et ses implications concrètes ... 179

8.4.4. La koinônia dans le témoignage et ses exigences existentielles.. 186

8.5. Le Message final de Saint Jacques de Compostelle – une conclusion... 193

9. Vers une vision commune de l’Eglise – déclaration

provisoire de la Foi & Constitution sur l’Eglise... 196

9.1. Introduction : koinônia – fondement d’une ecclésiologie commune ... 196

9.2. L’Eglise dans ses origines de communion ... 200

9.2.1. L’Eglise de Dieu ... 201

9.2.2. L’Eglise du Christ ... 201

(11)

9.3. L’Eglise dans son être de communion ... 203

9.3.1. L’Eglise une et multiple ... 203

9.3.2. L’Eglise sainte et pécheresse... 205

9.3.3. L’Eglise catholique, apostolique et eschatologique ... 206

9.3.4. L’Eglise sacramentelle et missionnaire... 209

9.3.5. L’Eglise universelle et locale ... 212

9.4. L’Eglise dans sa vie de communion ... 215

9.4.1. La foi ... 215

9.4.2. Le baptême ... 218

9.4.3. L’eucharistie... 220

9.4.4. Le ministère... 222

9.4.5. L’épiscopè... 226

9.4.6. Primauté – collégialité – conciliarité... 229

9.5. Conclusion... 232

10. Conclusions générales de la deuxième étude ... 235

10.1. Le développement doctrinal de la notion de communion . 235 10.2. Atouts du concept de communion... 238

10.3. Limites du concept de communion ... 247

T R O I S I E M E E T U D E : L’Eglise comme communion

selon la doctrine de l’Eglise catholique. Autour de Vatican II

... 253

Notes méthodologiques ... 254

1. L’émergence du concept de communion dans l’ecclésiologie

catholique contemporaine ... 255

1.1. Vatican II – un nouveau regard sur l’Eglise... 255

1.2. L’Eglise comme « societas perfecta et hierarchica » – un rappel de l’ecclésiologie préconciliaire ... 257

1.3. Vatican II : entre « societas » et « communio » – une ecclésiologie en tension... 263

(12)

1.4. Influences non-catholiques sur l’ecclésiologie conciliaire... 270

1.5. Le concept de communion comme la clef d’une relecture actualisée de l’ecclésiologie de Vatican II ... 274

2. La personne humaine comme un être relationnel –

fondements anthropologiques de l’ecclésiologie conciliaire de

communion ... 278

2.1. De l’« animal social » à l’« être relationnel » – quelques repères philosophiques... 278

2.2. Créé comme un être de communion ... 286

2.2.1. En communion avec Dieu ... 286

2.2.2. Créé pour une vie de communion – homme et femme... 287

2.3. Le Christ – homme de communion... 289

2.3.1. L’homme à la lumière du Christ ... 289

2.3.2. Le Christ – membre de la société et modèle d’une vie de communion ... 290

2.4. La vie sociale et l’appel à la communion... 291

2.5. L’Eglise et la vocation de l’homme à la communion... 295

2.6. L’homme, un être de communion selon Vatican II – une conclusion... 297

3. Triple perspective théologique de l’ecclésiologie de

communion ... 299

3.1. Perspective trinitaire : communion trinitaire – source et modèle de la communion ecclésiale... 299

3.1.1. Dieu est une communion... 300

3.1.1.1. Quelques repères bibliques et patristiques... 300

3.1.1.2. La périchorèse comme mode de communion en Dieu... 303

3.1.1.3. L’amour comme le ciment de la communion trinitaire ... 304

3.1.2. La communion de l’Eglise – un mystère trinitaire ... 305

3.1.2.1. Ecclesia de Trinitate – Ecclesia ad Trinitatem... 305

3.1.2.2. La communion ecclésiale : une icône de la communion trinitaire ... 310

3.1.2.3. La communion trinitaire comme modèle de vie partagée pour l’Eglise ... 313

3.1.3. L’eucharistie comme lieu de communion de l’Eglise avec la Trinité – le Rapport de Munich... 314

(13)

3.2. Perspective sacramentelle : Eglise – sacrement de la

communion ... 318

3.2.1. Introduction ... 318

3.2.2. L’Eglise comme mystère dans la Bible ... 319

3.2.2.1. Introduction ... 319

3.2.2.2. L’Ancien Testament ... 320

3.2.2.3. Le Nouveau Testament... 321

3.2.3. L’appellation de l’Eglise comme sacrement dans l’ecclésiologie catholique... 324

3.2.3.1. Rappel historique... 324

3.2.3.2. Un concept–clef de l’ecclésiologie conciliaire ... 329

3.2.4. La sacramentalité de l’Eglise à la lumière de la sacramentalité du Christ... 332

3.2.4.1. Le Christ – sacrement fondamental et universel du salut .... 332

3.2.4.2. L’Eglise – sacrement de la communion « in Christo»... 333

3.2.5. L’Economie sacramentelle du salut dans l’Eglise... 337

3.2.5.1. La communauté visible comme signe et moyen de la communion spirituelle ... 337

3.2.5.2. Le régime sacramentel du salut ... 339

3.2.6. L’Eglise – sacrement pour le monde... 344

3.2.6.1. La sacramentalité de l’Eglise et son universalité... 344

3.2.6.2. La vocation missionnaire de l’Eglise à la lumière de sa sacramentalité... 346

3.2.6.3. L’appartenance à l’Eglise à la lumière de sa sacramentalité349 3.2.6.4. La fraternité à la lumière de la sacramentalité... 351

3.2.7. Conclusions... 353

3.3. Perspective eschatologique : communion ecclésiale – l’avant-goût de la communion du Royaume ... 355

3.3.1. Introduction ... 355

3.3.2. L’eschatologie dans l’histoire de l’Eglise – un aperçu... 356

3.3.3. L’eschatologie et le contexte socio–culturel ... 365

3.3.4. L’Eglise et le Royaume – entre identification et distinction ... 368

3.3.4.1. Perspective scripturaire ... 370

3.3.4.2. Perspective conciliaire... 372

3.3.4.3. Applications existentielles dans le contexte social ... 376

3.3.5. La communio sanctorum... 381

3.3.6. L’eucharistie comme sacrement de la communion eschatologique ... 385

3.3.7. Conclusions... 390

(14)

4.1. Introduction ... 394

4.2. L’unité et la diversité dans la communion ecclésiale ... 396

4.2.1. Fondements divins de l’unité et de la diversité ecclésiales ... 396

4.2.1.1. L’aspect trinitaire ... 396

4.2.1.2. L’aspect christologique ... 399

4.2.1.3. L’aspect pneumatologique... 401

4.2.2. L’Eglise une et multiple depuis ses origines ... 402

4.2.3. La primauté de l’unité ... 406

4.2.4. Domaines de l’unité et de la diversité ... 411

4.2.4.1. La foi révélée... 411

4.2.4.2. Les sacrements, surtout l’eucharistie... 415

4.2.4.3. Les structures visibles d’unité ... 425

4.2.4.4. La charité... 427

4.2.5. La diversité socio–culturelle et l’inculturation... 428

4.3. La catholicité de la communion ecclésiale... 433

4.3.1. Deux regards sur l’Eglise – une introduction ... 433

4.3.2. Sens du terme catholicité selon quelques témoignages de la Tradition... 435

4.3.3. La conscience de la catholicité dans l’Eglise primitive... 440

4.3.4. Racines et caractéristiques de la catholicité selon Vatican II ... 445

4.3.5. L’Eglise universelle comme communion des Eglises locales ... 448

4.3.5.1. Distinctions des termes... 448

4.3.5.2. Le caractère universel de l’appartenance ecclésiale d’un fidèle ... 451

4.3.5.3. La relation entre l’Eglise universelle et l’Eglise locale dans la communion catholique ... 453

4.4. L’apostolicité de la communion ecclésiale... 462

4.4.1. L’apostolicité comme critère décisif de l’authenticité de l’Eglise462 4.4.2. Les apôtres selon le Nouveau Testament ... 463

4.4.3. Le sens de l’apostolicité – aperçu historique... 470

4.4.4. L’postolicité de l’Eglise selon l’ecclésiologie catholique contemporaine... 473

4.4.4.1. Le caractère total de l’apostolicité... 473

4.4.4.2. L’apostolicité de la foi et l’apostolat de l’Eglise ... 474

4.4.4.3. L’apostolicité du ministère et la communion ... 481

4.4.4.3.1. La succession apostolique et le ministère épiscopal .... 481

4.4.4.3.2. Les munera et les potestas dans le ministère de communion de l’évêque... 488

4.4.4.3.3. La collégialité des évêques et la communion... 492

(15)

4.5. Conclusions ... 505

4.5.1. L’unité... 505

4.5.2. La catholicité... 508

4.5.3. L’apostolicité ... 511

Vers une vision commune de l’Eglise –

observations finales ... 517

(16)
(17)

ABREVIATIONS ET SIGLES

AA Apostolicam Actuositatem. Décret sur l’apostolat des

laïc du Concile de Vatican II, 18. 11. 1965

AG Ad Gentes. Décret sur l’activité missionnaire de l’Eglise

du Concile de Vatican II, 07. 12. 1965

AAS Acta Apostolicae Sedis, Commentarium officiale, Roma

ARCIC Commission Mixte Internationale du Dialogue entre

la Communion Anglicane et l’Eglise Catholique Romaine

BA Bibliothèque augustinienne, Paris

CCEO Corpus Canonum Ecclesiarum Orientalium. Promulgué

par le pape Jean-Paul II, le 18 octobre 1990

CCRO Commission Mixte Internationale de Dialogue entre

l’Eglise Catholique Romaine et l’Eglise Orthodoxe

CCSL Corpus christianorum series Latina, Tournai

CD Christus Dominus. Décret sur la charge pastorale des

évêques du Concile de Vatican II, 28. 10. 1965

CDF Congrégation pour la Doctrine de la Foi

CE Congrégation pour les Evêques

CEC Catéchisme de l’Eglise Catholique. Promulgué par le

pape Jean-Paul II, le 11 octobre 1992 (cité ici d’après la version définitive française, 1998)

CEP Congregation Pour l’Evangelisation des Peuples

CIC Codex Iuris Canonici. Promulgué par le pape

Jean–Paul II le 23 janvier 1983

COE Conseil Œcuménique des Eglises, Genève (= WCC)

CPB Commission Biblique Pontificale

CPDIR Conseil Pontifical Pour le Dialogue Interreligieux CPUC Conseil Pontifical Pour l’Unité des Chrétiens

CQR Church Quarterly Review, London

CSEL Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum, Vienne

CTI Commission Théologique Internationale

DC La Documentation Catholique, Paris

DH Dignitatis Humanae. Déclaration sur la liberté

religieuse du Concile de Vatican II, 07. 12. 1965

DThC Dictionnaire de Théologie Catholique, Paris

(18)

D.S. Dictionnaire de spiritualité

DS Enchiridion Symbolorum, H. Dezinger–Schönmmetzer,

Fribourg, 1963

DV Dei Verbum. Constitution dogmatique sur la révélation

divine du Concile de Vatican II, 18. 11. 1965 ER The Ecumenical Review, Geneva

EThL Ephemerides Theologicae Lovanienses, Louvain

EV Esprit et Vie, Longres

FC Foi & Constitution, Genève (= FO)

FO Faith & Order, Geneva (= FC)

GS Gaudium et Spes. Constitution pastorale sur l’Eglise

dans le monde de ce temps du Concile de Vatican II, 07. 12. 1965

JBL Journal of Biblical Literature, Boston

JES Journal of Ecumenical Studies, Philadelphia

JThS Journal of Theological Studies, Londres

LG Lumen Gentium. Constitution dogmatique sur l’Eglise

du Concile de Vatican II, 21. 11. 1964

LWF Lutheran World Federation

LV Lumière et Vie, Lyon

Mansi J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima

collectio, nouvelle éd. L. Petit et J.B. Martin, Paris,

60 vol.

MD La Maison – Dieu, Paris

NA Nostra Aetate. Décret sur l’Eglise et les relisions non

chrétiennes du Concile de Vatican II, 21. 11. 1964

NRT Nouvelle Revue Théologique, Tournai–Louvain–Paris

NV Nova et Vetera, Genève

OE Orientalium Ecclesiarum. Décret sur les Eglises

catholiques orientales du Concile de Vatican II, 21. 11. 1964

ParLi Paroisse et Liturgie, Bruges

ParP Parole et Pain

PG Patrologiae coursus completus. Series Graeca.

Accurante J.P. Migne, Paris, 1857–1866

PL Patrologiae coursus completus. Series Latina. Accurante

J.P. Migne, Paris, 1878–1890

PLS Patrologiae latinae supplementum, éd. Hamman, A.,

(19)

PO Presbyterorum Ordinis. Décret sur le ministère et la vie

des prêtres du Concile de Vatican II, 07. 12. 1965

QLP Questions Liturgiques et Paroissiales, Louvain

RB Revue biblique, Paris

RevSR Revue des sciences Religieuses, Paris

RSR Recherches de Science Religieuse, Paris

RHE Revue d’Histoire Ecclésiastique, Louvain

RHPR Revue d’Histoire et de Philosophie Religieuse,

Strasbourg

RSPhTh Revue des Sciences Philosophiques et Théologiques,

Paris

RThom Revue Thomiste, Paris

RTL Revue Théologique de Louvain

RTP Revue de Théologie et de Philosophie, Lausanne

SC Sacrosanctum Concilium. Constitution sur la Liturgie

du Concile de Vatican II, 04. 12. 1963

SCh Sources Chrétiennes, Paris

SJTh Scottish Journal of Theology, Edinburgh

StLi Studia Liturgica, London

ThS Theological Studies, Baltimore

UnSa Unam Sanctam, Paris

UR Unitatis Redintegratio. Décret sur l’œcuménisme du

Concile de Vatican II, 21. 11. 1964

(20)
(21)

INTRODUCTION

Toutes les Eglises engagées dans le dialogue œcuménique sont d’accord pour dire que la notion de communion (koinônia–communio) exprime ce qu’est l’Eglise dans son être, sa vie et sa destinée ultime. Comme le dit le pape Jean–Paul II dans sa lettre apostolique pour la clôture du grand Jubilé de l’an 2000, la communion incarne et manifeste l'essence–même

du mystère de l'Eglise1. Les Eglises réunies au sein du Conseil Œcuménique des Eglises, ainsi que celles qui sont représentées dans la commission Foi & Constitution sans nécessairement être membres du Conseil – comme l’Eglise catholique romaine –, sont unanimes pour dire que la notion de koinônia est un concept clé dans le récent débat

œcuménique sur l'Eglise2, et qu’elle est fondamentale pour la relance d'une conception commune de la nature de l'Eglise et de son unité visible3.

Pourtant, aussi paradoxal que ça puisse paraître, tout en étant d’accord pour dire que l’Eglise est une communion, les Eglises continuent à avoir des conceptions divergentes de ce que signifie être l’Eglise, être une

Eglise ou être une communauté d’Eglise. Le paradoxe est d’autant plus

grand que sur le fondement des Ecritures saintes et de la Tradition ancienne commune, elles reconnaissent généralement les mêmes parties intégrantes dans le concept de communion. Malgré tout, elles continuent à concevoir différemment la nature, le but et l’unité visible de l’Eglise. Il est évident que tant que les chrétiens auront des conceptions différentes de ce qui constitue l’Eglise dans son être et dans sa vie, la pleine communion visible ne saura pas se réaliser. Il est donc nécessaire qu’ils persévèrent dans un dialogue œcuménique honnête et continuent à

1

JEAN–PAUL II, Novo Millennio Ineunte. Lettre Apostolique pour la clôture du grand Jubilé de l’an 2000, 6 janvier 2001, n°42, cf. nos43-47 (http://www.vatican.va, 01. 04. 2004).

2

Vers une conception et une vision communes du Conseil Œcuménique des Eglises. Déclaration d’orientation générale, n°3.3 (http://www.wcc-coe.org/wcc/assembly/or-6a-f.html, 23. 04. 2004).

3

FOI & CONSTITUTION, La nature et le but de l'Eglise : Vers une déclaration commune, Document de Foi et Constitution 181(novembre 1998), n°48

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scruter ensemble le mystère de l’Eglise, dans l’espoir de pouvoir atteindre un jour la communion pleine et visible, qui s’exprimera dans la célébration commune de l’eucharistie. En évoquant le concile Vatican II et l’engagement irrévocable de l’Eglise catholique dans le mouvement œcuménique moderne, Jean–Paul II dans son encyclique Ut unum sint, consacrée à la question œcuménique, encourage toutes les Eglises à ce dialogue et en explique les conditions nécessaires du point de vue de l’Eglise catholique1. Conscient de l’importance fondamentale de la doctrine, il rappelle que l'unité voulue par Dieu ne pourra pas se réaliser par des compromis doctrinaux, puisqu’en matière de foi, le compromis

est en contradiction avec Dieu qui est Vérité, mais bien par l'adhésion commune à la totalité du contenu révélé de la foi2. En effet, l'amour de

la vérité est la dimension la plus profonde d'une recherche authentique de la pleine communion entre les chrétiens3. C’est pourquoi, chacune des parties qui participent au dialogue doit présupposer chez son interlocuteur une volonté d'unité dans la vérité4.

C’est avec de tels présupposés de base que nous avons voulu participer, par le présent travail, au dialogue sur l’Eglise mené actuellement au sein du mouvement œcuménique. Cette dissertation se veut être une voix personnelle qui entend demeurer entièrement fidèle à la foi de notre Eglise – c’est–à–dire l’Eglise catholique romaine –, et, en même temps, sensible aux convictions de foi émanant des autres traditions chrétiennes. La place de première importance accordée à la notion de communion dans la recherche ecclésiologique actuelle, ainsi que les difficultés qu’elle suscite, nous ont incités à scruter, une fois de plus, ses potentialités et ses limites dans le processus actuel d’élaboration d’une conception commune de l’Eglise ; processus lancé, il y a quelques années, par le document de la Foi & Constitution intitulé La nature et le

but de l'Eglise : Vers une déclaration commune5.

1

JEAN–PAUL II, Ut unum sint. Lettre encyclique sur l’engagement œcuménique de l’Eglise catholique, nos28-39 et 77-79 (http://www.vatican.va/edocs/FRA0080/_INDEX.HTM, 20. 10. 2003). 2 Ibid., n°18. 3 Ibid., n°36. 4 Ibid., n°29. 5

FOI & CONSTITUTION, La nature et le but de l'Eglise : Vers une déclaration commune (novembre 1998), Document n° 181

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Notre dissertation est composée de trois études d’inégale longueur, dont chacune poursuit un but propre et suit d’autres principes méthodologiques, lesquels sont expliqués à chaque fois dans une note introductive. L’unité de l’ensemble est due au fait que chacune des études traite de la même question qui est celle de la communion ecclésiale. La structure de trois études – peu typique pour une thèse de doctorat – nous semble bien correspondre au but que nous nous sommes fixés dans notre dissertation, à savoir : proposer une contribution catholique au dialogue œcuménique actuel sur l’Eglise, au cœur duquel se trouve la notion de communion. Dans cette perspective, nous avons privilégié l’Eglise catholique en accordant la plus grande place à la présentation de sa doctrine sur l’Eglise. Cependant, pour avoir un caractère œcuménique, un travail de théologie catholique doit, d’une part, tenir compte de la foi commune de tous les chrétiens et assimiler de manière organique des conceptions et visions émanant des autres traditions qui ne s’opposent pas à sa doctrine et, d’autre part, démontrer les points de divergence et les impasses qui persistent. C’est pourquoi nous avons élargi ce travail par deux autres études, dont l’une est consacrée à la notion de communion en soi, et l’autre à l’ecclésiologie œcuménique de communion élaborée dans les structures du Conseil Œcuménique des Eglises.

L’étude par laquelle commence le présent ouvrage vise à nous faire connaître la notion de koinônia–communio, ses parties intégrantes, ses exigences et ses implications ecclésiales nécessaires à travers une approche sémantique, une approche biblique et une approche patristique, précédées d’une présentation de l’évolution historique du sens du mot communion dans l’usage ecclésiastique. La plus courte de toutes les trois, elle est conçue comme une sorte d’introduction développée à la problématique.

La deuxième étude, beaucoup plus longue, retrace le développement théologique de la notion de koinônia–communio et de l’ecclésiologie de communion à travers les contributions successives apportées par les Assemblées mondiales du Conseil Œcuménique des Eglises, et les Conférences mondiales de la commission Foi & Constitution à partir du début des années soixante et jusqu’à la fin du 20ème siècle. L’intérêt d’une telle présentation nous semblait être double. Premièrement, à notre connaissance, aucune étude, n’a retracé de manière systématique l’évolution chronologique de la théologie de la communion ecclésiale dans le dialogue œcuménique mené au sein du Conseil. Il existait donc

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un réel intérêt d’entreprendre une telle étude, à côté de l’histoire doctrinale du mouvement œcuménique, et plus spécifiquement du Conseil Œcuménique des Eglises et de sa commission Foi & Constitution. Deuxièmement – et c’était notre intérêt principal –, il s’agissait de cerner, à travers ce développement la vision de la communion ecclésiale telle que le Conseil l’a élaborée en identifiant ses parties intégrantes et ses conditions nécessaires. Avoir une appréhension claire de cette vision œcuménique de la communion – qui a été formée au cours d’un demi siècle de dialogue doctrinal entre diverses traditions chrétiennes, à partir de sources communes de la foi – nous était indispensable pour pouvoir la comparer avec la conception

spécifiquement catholique fondée sur la doctrine de Vatican II.

La troisième étude, qui est aussi la plus longue, est une présentation de l’ecclésiologie catholique contemporaine sur le fondement des documents du concile Vatican II et du Magistère postconciliaire. Ella a la forme d’un développement systématique construit autour des quelques thèmes fondamentaux de l’ecclésiologie à grande portée œcuménique, et qui sont tous traités à la lumière de la notion de communion. En plus, les thèmes sont mis dans la perspective des données bibliques, patristiques et relèvant de la Tradition théologique de l’Eglise, parfois éclairées par l’apport des sciences philosophiques ou sociologiques. Tout en espérant avoir proposé dans cette étude une vision de l’Eglise qui soit cohérente et conforme à la doctrine de foi catholique, notre présentation ne prétend pas à l’exhaustivité. Sans aucun doute, d’autres questions auraient pu y être traitées ; la même problématique aurait pu être exposée suivant un plan différent. Il s’agit donc d’une présentation personnelle de la doctrine catholique sur l’Eglise comprise comme communion, laquelle présentation est inspirée par une double préoccupation : d’une part, elle veut demeurer fidèle à l’esprit de Vatican II ; d’autre part, elle veut être ouverte aux questions œcuméniques actuelles, et dont la résolution est indispensable pour faire avancer le dialogue doctrinal sur l’Eglise entre les différentes traditions chrétiennes.

Dans la conclusion générale, nous avons mis au jour les parités et les disparités qui existent encore (ou toujours) entre la vision catholique et la vision œcuménique de la communion ecclésiale. Avoir une conscience claire des impasses actuelles et des ouvertures possibles de l’ecclésiologie œcuménique est en effet fondamental si l’on veut évaluer les conditions nécessaires et les possibilités réelles de l’élaboration

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d’une vision commune de l’Eglise, comme : sa nature, son but, sa place dans l’économie divine du salut, son unité et sa destinée ultime.

Quant au genre littéraire, ce travail se rapproche tantôt d’un traité, tantôt d’un essai de théologie. Il est à la fois un écrit où sont exposés d’une manière systématique plusieurs sujets particuliers relatifs au thème de communion ecclésiale – ce qui l’approche d’un traité classique de théologie –, et un ouvrage où sont développées des réflexions diverses sur plusieurs thèmes sans pour autant les épuiser – ce qui l’approche d’un essai.

Rédigée en français, notre dissertation se nourrit surtout de la littérature disponible dans cette langue. Des textes en anglais y sont également largement analysés (surtout dans la seconde étude) ainsi que, sporadiquement, des ouvrages en italien. Nous regrettons de n’avoir pu explorer la riche littérature allemande, surtout récente, sur le thème de la communion. Malheureusement, ignorant cette langue, nous avons dû nous limiter à quelques traductions françaises ou anglaises disponibles. Ecrivant à l’étranger nous ne disposions pas de la littérature théologique dans notre langue maternelle – le polonais.

Malgré ces manquements – et bien d’autres sans doute –, nous espérons avoir écrit un texte qui tienne compte de l’universalité de l’Eglise, sinon quant à la diversité linguistique, au moins quant à l’œcuménicité théologique.

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P R E M I E R E E T U D E :

La notion de communion –

quelques éclaircissements

sur le terme, sa compréhension

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Notes méthodologiques

Cette première étude, la plus courte de toutes les trois, est conçue comme une sorte d’introduction au thème de notre dissertation – la communion (koinônia–communio). Son but consiste à nous familiariser avec la notion de communion à travers trois approches complémentaires – une sémantique, une biblique et une patristique –, qui sont précédées par une présentation de l’évolution historique du sens du mot

communion dans l’usage des Eglises. Bien des études linguistiques,

scripturaires et patristiques qui donnent des analyses détaillées et bien documentées, ont été consacrées à cette notion au cours du dernier demi siècle du dialogue œcuménique ; nous en mentionnons plusieurs dans les pages qui suivent. Cependant, nous n’envisageons pas en produire une autre ; conformément à l’objectif exprimé dans le titre de cette étude, nous fournissons ici quelques éclaircissements relatifs au terme et à sa compréhension, qui constituent une porte d’entrée dans la problématique complexe de la communion.

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1. Le mot communion – évolution du sens

Il est significatif que le thème de l’Eglise – communion (ou de l’Eglise comme communion) ait apparu dans le dialogue œcuménique à l’occasion du débat consacré à l’eucharistie et plus précisément à l’intercommunion. Ce simple fait nous indique déjà au moins deux choses importantes pour notre sujet. Premièrement, nous constatons une certaine ambiguïté dans le terme communion qui peut désigner soit l’Eglise, soit l’eucharistie, soit l’une et l’autre en même temps. Deuxièmement, nous relevons aussi qu’il existe un lien étroit entre l’eucharistie d’un côté et l’Eglise de l’autre. En effet, la notion de communion constitue le point culminant du débat œcuménique concernant le partage eucharistique, considéré par toutes les Eglises comme la plus importante expression visible de l’unité ecclésiale des chrétiens.

Jusqu’une époque récente, le terme communion était employé presqu’exclusivement – tant dans la théologie que dans la pastorale – comme une abréviation de l’expression communion eucharistique. Aujourd’hui encore, pour beaucoup de chrétiens, il renvoie essentiellement à la célébration de la messe ou du culte eucharistique, et se rattache plus spécifiquement à ce moment précis de la liturgie eucharistique où les fidèles reçoivent le corps et le sang du Christ en partageant le pain et le vin de la communion1. Le verbe communier, qui renvoie à l’action de recevoir la communion eucharistique et le participe

communiant, qui – utilisé à la manière d’un substantif – désigne la

personne qui la reçoit, possèdent ainsi des acceptions correspondantes. Dans l’ensemble des Eglises, ce sens eucharistique a dominé pendant des siècles dans l’usage ecclésial du mot communion.

Cependant, sous l’impulsion du mouvement œcuménique, la théologie de la seconde moitié du 20ème siècle a montré un intérêt renouvelé pour

1

Des dictionnaires et des encyclopédies théologiques en témoignent. Jusqu’aux années récentes, lorsqu’ils parlaient de la communion, il y était presque exclusivement question des différents aspects de la communion eucharistique : les conditions et l’âge de sa réception, la communion fréquente, la communion sous une ou deux espèces, l’antienne de la communion, etc. Le Dictionnaire de Spiritualité des années cinquante, par exemple, parle uniquement de la communion au sens de la communion eucharistique, sans même mentionner le sens ecclésiologique du terme (t. 2, Paris, 1953, 1188-1288).

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ce que l’Occident chrétien désigne par le mot communio et l’Orient par le mot koinônia. Des études approfondies dans les Eglises et au sein du mouvement œcuménique ont été consacrées à la signification du terme, à l’évolution du concept, aux conditions et exigences de la communion suivant différentes traditions confessionnelles, et au développement historique de la doctrine et de la pastorale de la communion dans les Eglises1. Ces recherches ont démontré que la limitation du sens du terme

communion au seul domaine eucharistique était incorrecte à la lumière

des données sémantiques, bibliques et patristiques, et qu’elle constituait un appauvrissement de son sens originel et original. Sous l’impulsion de ces découvertes, dès la fin des années cinquante, le terme a fait une véritable carrière théologique, en devenant rapidement la catégorie dominante dans le dialogue œcuménique sur le rétablissement de l’unité visible entre les Eglises. Dans cette évolution de l’usage, le sens ecclésiologique est devenu prépondérant, sans pour autant que le sens eucharistique fût perdu ou oublié. En effet, les Eglises ont mieux saisi que la communion ecclésiale et la communion eucharistique sont inséparables et que la vraie et pleine communion ecclésiale doit nécessairement s’exprimer dans la communion eucharistique.

Dans le langage actuel des Eglises, le terme communion indique le but

vers lequel tend le mouvement œcuménique. Il désigne la communion voulue par le Christ2. Les Eglises reconnaissent que cette communion ecclésiale s’accomplit sacramentellement, et se manifeste visiblement au plus haut degré dans la célébration communautaire de l’eucharistie. La participation commune à la table eucharistique implique et exprime la communion des participants avec Dieu et des participants entre eux.

1

Pour une vue d’ensemble voir, BIRMELE, A., « Status questionis de la théologie de la communion à travers les dialogues œcuméniques et l’évolution des différentes

théologies confessionnelles », dans Dossetti, G (éd.), La Ricerca Constituente 1945-1952, Il Mulino, 1994, 245-284 ; cf. TILLARD, J.M.R., art. « Communion », dans Lacoste, J.Y. (éd.), Dictionnaire critique de théologie, PUF, 1998, 236-242 ; CONGAR, Y.M., art. « Koinônia » Dictionnaire de Spiritualité, t. VIII, Paris, 1974, col. 1743-1769 et du même auteur Diversité et communion, Paris, 1982, 126-134. Parmi les études plus détaillées sur la communion, il convient de consulter, WCC, On the Way to Fuller Koinonia. Official Report of the Fifth World Conference of Faith and Order, Geneva, WCC, 1994 ; CDF, Communionis notio. Lettre sur l’Eglise comprise comme communion, 28 mai 1992, www.vatican.va, 11. 03. 2003.

2

WORLD COUNCIL OF CHURCHES, Terminologie œcuménique, Genève, WCC Publications, 1975, 227.

(31)

Une telle compréhension de la notion de communion, avec ses différentes harmoniques, met en valeur l’enracinement ecclésial de la communion eucharistique et l’enracinement eucharistique de la communion ecclésiale des fidèles. C’est pourquoi, l’eucharistie peut être appelée le sacrement de la communion ecclésiale. La Tradition de l’Eglise témoigne unanimement que l’Eglise est inséparable de l’eucharistie comme l’eucharistie de l’Eglise1. Ceci révèle le caractère total de la communion, qui est ecclésiale et eucharistique en même temps. Les deux aspects sont indissociables et complémentaires, au point que les frontières entre eux s’effacent : mot communion renvoie tantôt à la communauté des croyants, tantôt à l’eucharistie ; comme en témoigne déjà la doctrine paulinienne du corps du Christ (1Co 10, 16-17)2.

Même si le mot communion se distingue par une forte coloration eucharistique, le mouvement œcuménique a démontré qu’il s’agissait d’une notion dont le sens originel dominant était ecclésiologique. Les dictionnaires profanes de la langue nous enseignent déjà que ce terme désigne, en premier lieu, la profonde unité d’esprit et de vie entre les personnes appartenant à une même Eglise, partageant les mêmes croyances de type religieux, et entretenant des formes spécifiques de la

vie commune3. En accord avec cette acception sémantique

fondamentale, dès le début du mouvement œcuménique contemporain, le terme communion était fréquemment utilisé pour désigner différentes communautés confessionnelles dans le christianisme. On parlait ainsi de la communion catholique, orthodoxe, anglicane, luthérienne, réformée, etc4. Dans le monde protestant, où est né le mouvement œcuménique

1

L’intensité du lien entre l’Eglise et l’eucharistie dans la conscience de l’Eglise, à travers les siècles, se trouve illustrée par le renversement de sens qui s’est opéré entre les expressions corpus mysticum et corpus verum au Moyen–Age. Originellement, l’appellation corpus mysticum s’appliquait à l’eucharistie et l’appelation corpus verum à l’Eglise. Peu à peu, par un jeu des diverses circonstances dont l’enchaînement est subtil et complexe, c’est l’Eglise qui, à l’issue de la crise bérengarienne au 12ème siècle, est appelée le corpus mysticum et l’eucharistie le corpus verum (Voir à ce sujet, DE LUBAC, H., Corpus mysticum. L’Eglise et l’eucharistie au Moyen–Age, Paris, 19492). 2

Sur ce texte voir, supra, 5.2.3 : Koinônia comme participation communautaire. 3

« Communion », Le Grand Robert de la langue française, t. II, Paris, 1985 ; « Communion » dans Trésors de la langue française, t. V, Paris, 1977. 4

Cet usage actuel n’est cependant pas une pratique inventée par le mouvement œcuménique contemporain. Dans l’antiquité déjà nous constatons ce type d’emploi du terme communion. C’est, par exemple, le cas de saint Augustin qui l’utilisait pour parler

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moderne, ce type d’usage du mot communion s’accompagnait de l’éclosion progressive d’une nouvelle conscience ecclésiologique, laquelle concevait l’Eglise universelle comme une communion de communions confessionnelles diverses1. Selon cette conception, préconisée pendent longtemps au sein du Conseil Œcuménique des Eglises, la communion ecclésiale n’impliquait pas, de soi, l’appartenance de tous les chrétiens à la même communauté ecclésiastique. L’Eglise du Christ était considérée essentiellement comme une communauté mystique et invisible, composée de tous les baptisés (ou de tous les croyants) qui confessaient les points fondamentaux de la foi chrétienne ; notamment la seigneurie du Christ. L’unique Eglise universelle existait ainsi répandue en une multitude de communions confessionnelles distinctes et indépendantes au niveau de structures ecclésiastique mais unies par la référence commune au même et unique Sauveur, Jésus–Christ.

Cependant, les recherches œcuméniques récentes – puisant surtout dans la Bible, les Pères et la liturgie et s’appuyant également sur la philosophie, la psychologie et la linguistique –, ont permis à la théologie actuelle d’approfondir le sens de la notion de communion et d’en redécouvrir la richesse authentique. Elles ont démontré que le sens ecclésiologique du mot communion ne peut être réduit ni à une simple association extérieure de personnes résultant de leur appartenance aux mêmes structures ecclésiastiques (societas ecclesiastica), ni à une communion purement spirituelle et sans aucun cadre visible (communio

spiritualis). A la lumière de ces acquis, les Eglises engagées dans les

dialogues œcuméniques sont généralement d’accord pour dire que l’unité ecclésiale, qui est désignée par le terme communion (koinônia–

communio), est multidimensionnelle : elle signifie simultanément l’union de plusieurs personnes dans la même foi (communio fidei), une communauté de prière (communio liturgica) et une vie de fraternité entre elles (communio existentialis), tout cela encadré par une structure sociale (communio socialis) qui rend possible et effective la communion. C’est donc une réalité beaucoup plus riche que le sens

tant de l’Eglise catholique que de celle des donatistes : comme les catholiques, les donatistes, eux aussi, formaient dans le monde une communio (AUGUSTIN, Contra Epist. Pareniani I, 3, 5: PL 43, 37; De baptismo I, 10, 14: PL 43, 117).

1

CONGAR, Y.M., « Note sur les mots ‘Confession’, ‘Eglise’ et ‘Communion’ », Irénikon, 23 (1950), 30-36.

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mystique de communio spiritualis, et beaucoup plus intime que ne revêt le sens sociétaire de communio socialis. Même si l’eucharistie se trouve au centre de la vie de l’Eglise, il n’est pas correct de limiter la communion ecclésiale à la célébration de la cène, ni de réduire le sens de ce mot à cette acception particulière. Dans l’Eglise, la communion se noue à travers des liens multiples dont certains sont divins et d’autres humains. Grâce à ces liens, les membres de l’Eglise se savent en communion si organique et si profonde avec le Seigneur et entre eux qu’ils n’hésitent pas à s’appeler le corps du Christ.

L’évolution par laquelle est passé le terme communion au cours des dernières décennies, grâce au mouvement œcuménique, est double et concerne tant son usage que sa compréhension. Concernant l’usage, le terme n’est plus réservé exclusivement au domaine eucharistique, et est devenu courant dans l’ecclésiologie ; dans le mouvement œcuménique, cet emploi ecclésiologique est actuellement dominant. Concernant la compréhension, différentes vues unilatérales, préconisées dans certaines Eglises, ont cédé progressivement la place à une conception plus globale, dans laquelle sont organiquement associés différents aspects de la communion.

Ce qui pose problème aux Eglises d’aujourd’hui, ce n’est plus tellement la compréhension de la notion de communion, mais, comme nous allons le voir dans cette dissertation, les conceptions différentes de ses diverses parties intégrantes. Lorsque les Eglises affirment ensemble que la communion implique la profession de la même foi, cela ne signifie pas encore qu’elles sont d’accord sur l’interprétation de ses divers articles ; si les Eglises admettent que la pleine communion visible de l’Eglise implique le partage commun de l’eucharistie, elles se distinguent pourtant considérablement dans leurs doctrines eucharistiques respectives, et dans les conditions d’admission à la table du Seigneur ; si elles reconnaissent toutes que des structures communes sont nécessaires pour maintenir l’Eglise en communion visible, elles en ont toutes des conceptions variées, et souvent incompatibles entre elles ; etc.

Revenons pourtant à notre mot, afin de savoir s’il est possible de chercher des solutions communes à ces problèmes particuliers à partir de l’analyse de la notion elle-même1.

1

Ajoutant encore que même si communion est un mot par excellence religieux, il se rencontre également dans la littérature profane. Dans cet usage littéraire, qui s’inspire sans doute du sens religieux, la notion de communion se rapporte parfois au partage des

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2. La Koinônia dans le grec classique

Dans le français ecclésiastique, le mot communion traduit plusieurs termes des langues anciennes lesquels possèdent des sens associés mais distincts. Il s’agit tout d’abord du terme grec koinônia et des autres mots dérivés de la racine koinos. Les mots de ce groupe – y compris la forme nominale koinônia – ne sont pas propres à la culture chrétienne. Leur usage littéraire remonte aux temps des écrivains et des philosophes grecs de l’antiquité classique.

Etymologiquement, koinos désigne ce qui est publique, commun, accessible à tous, ordinaire et s’oppose à idios qui désigne ce qui est

propre à, particulier, privé1. Les formes verbales dérivées de koinos se traduisent par mettre en commun, communiquer, participer à, avoir part

à. Il existe deux formes nominales : koinônia et koinonos. Le substantif

féminin koinônia désigne la communauté ou la collectivité, tandis que le substantif masculin koinonos désigne un particulier qui peut être un ami proche, un compagnon de route fortuit, ou un associé dans une affaire quelconque. Quant à l’adjectif koinonikos, son sens est qui concerne la

communauté. Tous les mots du groupe koinos expriment l’idée de

communion entre des personnes. Cette communion peut pourtant avoir divers degrés d’intensité. Suivant le cas, il peut s’agir aussi bien d’une association purement extérieure basée sur la communauté d’intérêts, que d’une communion intérieure ancrée dans l’unité de sentiments et de pensées. Dans tous les cas cependant, il s’agit d’une relation de relative proximité entre des personnes qui tendent ensemble vers un même but, ou qui mettent à l’usage commun leurs biens propres ou encore qui partagent une vie commune quelle que soit sa forme (famille, habitation

activités de la vie quotidienne par les membres d’une famille, ou par de proches amis ; parfois, il désigne une profonde relation affective et sentimentale entre des personnes liées par des liens d’amitié ou d’amour ; on la trouve également employée pour désigner la relation sexuelle par laquelle s’exprime l’amour entre un homme et une femme (Cf. « Communion », Trésor de la langue française, t. V, Paris, 1977 et « Communier » et « Communion » dans RAY, A. éd., Dictionnaire historique de la langue française, Paris, 1992 ; nous trouverons dans ces articles des références à des auteurs et à des œuvres).

1

Cf. « koinos » et « idios », dans Dictionnaire étymologique de la langue grecque. Histoire des mots, Paris, 1968.

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commune, etc.). Deux idées y sont associées intimement : celle de donner et celle de recevoir.

Platon, par exemple, utilise le terme koinônia dans trois acceptions qui reflètent trois degrés de proximité entre les personnes concernées. Au niveau le plus bas et dans un sens très large, la koinônia exprime chez lui l’idée de rencontre entre des personnes humaines qu’il s’agisse d’une fête ou d’un voyage fait ensemble. A un niveau plus élevé se situe une

koinônia basée sur l’amitié ou l’amour. Au sommet de cette hiérarchie,

il y a la koinônia entre les humains et les dieux, où le ciel et la terre sont reliés1.

Aristote, par contre, n’utilise jamais les termes du groupe koinos pour exprimer l’idée de communion entre les humains et les dieux ; il les réserve uniquement au contexte d’une communauté humaine, qu’il s’agisse de la cité, de l’armée, de la tribu ou de la famille. De même, il fait une distinction entre une koinônia d’intérêt et une koinônia d’esprit. Dans la première situation, des personnes s’associent sur le fondement d’un intérêt commun ou pour atteindre plus facilement un même but ; cependant, même dans ce cas, le sens est plus profond que celui d’association extérieure : le partage du même intérêt ou la poursuite du même but font naître entre les gens des liens de solidarité, une sorte de camaraderie. Dans la seconde situation, il s’agit d’une communauté intime de sentiments d’amitié ou d’amour, lesquels sentiments poussent les personnes concernées à établir des formes stables de vie communes et s’engager définitivement les unes envers les autres. Selon Aristote, ce second cas constitue une forme plus élevée et plus parfaite de la

koinônia que le premier.

Le terme koinônia revient régulièrement dans La Politique et dans

L’Ethique à Nicomaque2. Pour Aristote, l’homme est par nature un être communionnel, incapable de parvenir à son plein épanouissement ni d’atteindre son bonheur propre sans s’associer à d’autres hommes. Cette inclination naturelle le pousse à créer différentes communautés, dont les trois fondamentales sont la famille, le village et la cité (l’état). Toute

1

SIEBEN, H.J., « Koinônia » [chez Platon et Aristote], Dictionnaire de Spiritualité, t. VIII, Paris, 1974, col. 1743-1745 ; KITTEL, G. (ed)., Theological Dictionary of the New Testament, Grand Rapids, 1965, 789-800.

2

Pour la notion de koinônia dans l’ensemble de l’œuvre d’Aristote, voir, ARISTOTE, Politique. Livre I et II, éd. de la Collection des Universités de France (par J. Aubonnet), Paris, 19682, note explicative n°4, p. 106.

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communauté se compose de plusieurs êtres humains qui sont différents les uns des autres et qui établissent entre eux des relations de types divers. Toute communauté implique l’existence d’au moins un but commun sur la base duquel plusieurs personnes s’unissent dans une action commune. Grâce aux échanges – qui peuvent concerner des biens matériels ou des biens spirituels – les membres de la communauté s’aident mutuellement à bien vivre, c’est–à–dire à mener une vie vertueuse, synonyme chez Aristote de la vie heureuse.

L’idée d’une koinônia entre les hommes et les dieux, présente déjà chez Platon, sera reprise par le stoïcisme. Les stoïciens considèrent que l’aspiration de l’homme à une vie de communion s’étend non seulement sur ses semblables mais également sur les dieux. Selon Pythagore de Samos (+580 av. J-C), le fait d’appartenir à un même dieu doit s’exprimer dans une vie de koinônia entre ses adorateurs, koinônia qui doit consister dans le dévouement mutuel et la mise en commun des biens.

Ces quelques exemples nous permettent de distinguer les trois principales situations dans lesquelles le mot koinônia et les termes associés sont utilisés par des auteurs grecs. Il peut s’agir soit d’une association des citoyens (village, cité), soit d’une communauté intime entre des personnes humaines (famille, amis, amoureux), soit d’une union entre des hommes et des dieux, sur base de laquelle se construit une vie de communion entre les hommes se référant au même dieu. Quel que soit le cas, deux idée–clefs se conjuguent dans le concept grec de koinônia : celle d’une association de plusieurs personnes en vue d’une action commune, et celle d’une participation commune aux mêmes biens (matériels ou spirituels) ; association et participation sont inséparables l’une de l’autre. Il s’agit au fond d’une vie partagée bien que l’extension et l’intensité de ce partage puissent varier suivant les situations. Chez les philosophes grecs la conviction domine que la

koinônia correspond à la nature sociale de l’homme : l’homme est un

être communionnel qui ne peut pas se réaliser pleinement ni développer ses potentialités humaines dans l’exclusion des autres1. Dans la culture grecque antique, l’amitié entre des hommes (philia) était considérée comme la réalisation la plus parfaite de la koinônia. L’idéal de cette

1

Cf., supra, Troisième étude, 2.1. De l’« animal social » à l’« être relationnel » – quelques repères philosophiques.

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koinônia de type adelphique vécue au sein d’un petit groupe d’amis et

où tout est partagé, est bien exprimé dans un proverbe attribué aux pythagoriciens mais très estimé par la quasi-totalité de philosophes de l’antiquité : entre amis tout est commun1. L’idéal de la koinônia adelphique était répandu et grandement estimé dans le monde grec à

l’apparition du christianisme.

1

On trouve cette idée chez tous les grands philosophes de l’antiquité. A titre d’exemple, PLATON, Lysis, 507c ; ARISTOTE, Eth. Nic., VIII, 11, 1159b 31 ; TERENCE, Adelphes, 804.

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3. Communio, communicatio et communicare dans le latin

classique

Communion est la transcription française du substantif latin communio.

Grammaticalement, communio se compose de cum et munus1.

Etymologiquement, il reflète donc les diverses significations véhiculées par ces deux composants. Les principaux sens de la préposition cum sont : avec, du côté de, ensemble, en même temps, simultanément. Dans l’usage profane – habituellement militaire ou civique –, le nom munus signifie charge, obligation ou devoir à accomplir (envers la patrie, la cité, etc.) ; tandis que dans l’usage religieux (mais pas nécessairement chrétien), munus signifie sacrifice offert pour des morts ou offrande

rendue à la divinité ; le contexte est habituellement cultuel et liturgique.

Véhiculant simultanément le sens d’association dû à la préposition cum et le sens de responsabilité dérivant du substantif munus, le nom composé com/munio désigne la communauté dans sa réalité vivante d’association de personnes liées entre elles par la participation à une mission commune et portant ensemble une commune responsabilité. Selon ce sens sémantique, la communio n’a donc rien d’un assemblage accidentel des personnes qui se seraient trouvées ensemble en raison de circonstances extérieures et indépendantes de leur volonté. Au contraire, la communio apparaît comme le résultat d’un choix délibéré de la part de personnes qui veulent s’associer pour accomplir une charge commune ou pour poursuivre ensemble un même but. Derrière le nom latin de communio, il se cache ainsi un réseau de liens divers, dont certains sont extérieurs (objectifs poursuivis) et d’autres intérieurs (sentiments), grâce auxquels se réalise une profonde unité entre les personnes qui communiquent entre elles et participent délibérément ensemble à la même réalité.

Communiquer et communier rendent en français le verbe latin communicare qui possède un double contenu. Suivant le cas, il véhicule

le sens de rendre commun, mettre en commun, faire la cause commune, ou celui de prendre part à, avoir part à, participer à. Il possède ainsi

1

Il faut se garder d’une fausse étymologie instinctive qui tirerait le mot communio de cum- et unio. En effet, le verbe unire et le nom union sont postérieurs à communio (Cf. les articles, « Communio », « Communicatio », « Cum » et « Munus », dans Oxford Latin Dictionary, Oxford, 1968).

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une dimension active de donner et une dimension passive de recevoir ; dimensions qui sont associées. Ces deux facettes du mot communicare correspondent aux éléments dynamique et statique dans la vie de toute communauté humaine. Toute communauté est établie dans sa structure

statique d’entité sociologique, en vertu de la communication dynamique

qui se fait entre ses membres. Ainsi, la communion (communio) apparaît comme le résultat de la communication (communicare – communicatio).

Communio, communicatio et communicare, avec toutes les nuances de

sens dégagées plus haut, sont employés par des auteurs latins classiques1. Ainsi, chez Cicéron (+43 av. J-C), le terme communicatio signifie le partage de sentiments intimes et de projets de vie entre des amis, tandis que communio révèle une relation particulièrement forte qui résulte de ces échanges. Le caractère exceptionnellement intime et profond d’une relation entre des humains et décrite comme communio, est confirmée par le fait que Cicéron utilise le même terme pour décrire les liens du sang au sein de la même famille (communio sanguinis). Cicéron, et un siècle plus tard l’historien Tacite (~ +120 ap. J-C), recourent fréquemment aux termes du groupe communio-communicatio pour désigner le partage des joies et des malheurs par des personnes qui vivent ensemble (communicare res adversas, labores, gloriam,

inimicitatis). Un autre historien romain, Valère Maxime, contemporain

de Tacite, utilise la formule communicare concordiam cum aliquod pour exprimer l’idée de réconciliation basée sur la concorde entre tous. Plaute (~ +184 av. J-C) utilise le verbe communicare pour désigner le partage d’un repas avec quelqu’un (communicabo te mensa) ; cette communauté de table devient un signe des relations amicales entre les participants. Homme d’état, historien et penseur, Jules César (+44 av. J-C) y recourt pour décrire le partage des biens matériels – notamment de l’argent – entre les époux : le mari et la femme sont sensés recevoir et mettre en usage commun les mêmes biens et dots (Viri quantas pecunias ab

uxoribus acceperunt, tantas ex suis bonis cum dotibus communicant).

Dans le latin classique – qu’il s’agisse de l’association en vue de poursuivre un même but, de la possession commune d’une chose, du partage d’un repas commun ou de la concorde fraternelle –, les mots du groupe communio-communicatio-communicare décrivent toujours les

1

Tous les exemples cités dans ce paragraphe sont puisés dans les articles

« Communicatio », « Communico » et « Communio », dans Nouveau Dictionnaire Latin – Français, Paris, 1936, 286+ ; nous y trouvons les références aux auteurs cités.

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relations de proximité entre des amis ou les membres de la même famille. L’idée dominante est celle de la proximité spirituelle qui s’exprime à travers différentes formes de la vie commune. Communion apparaît ainsi comme la forme la plus élevée de convivere.

Même si le substantif munus est parfois utilisé pour désigner l’offrande rendue aux dieux, ni les noms communio et communicatio ni le verbe

communicare ne sont jamais utilisés chez les auteurs non chrétiens pour

exprimer le sens d’une communion entre les dieux et les hommes, ou celle entre les membres d’un groupe religieux. Ce type d’usage apparaîtra seulement avec l’avènement du christianisme.

Références

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