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Les maisons françaises de Cadix et le marché de la consignation maritime : répartition, structures et évolution du secteur

La très inégale répartition des 207 bulletins maritimes que nous avons exploités ne permet pas de développer dans toutes ses nuances l’évolution de ce secteur tout au long de la période421. En revanche, trois situations bien distinctes se dégagent : la guerre d’indépendance d’Amérique, la période de prospérité des années 1780 et, à partir de 1792, celle des guerres révolutionnaires.

La guerre d’indépendance d’Amérique

Nous ne disposons que de trois bulletins de navigation pour l’année 1779, en date du 22 mars, du 10 mai et du 23 août. Les deux premiers précèdent l’entrée en guerre de l’Espagne contre l’Angleterre alors que le troisième est postérieur à la déclaration de guerre du 16 juin. La neutralité du port de Cadix pendant les premières années de la guerre d’Indépendance semble avoir eu un effet très bénéfique pour l’activité maritime des négociants français. En effet, le nombre moyen de navires qui leur sont consignés à ces trois dates est de 28, soit un chiffre presque trois fois supérieur à ceux relevés au cours de la période 1788-1793.

La deuxième différence majeure par rapport à la période de paix réside dans la nature des pavillons des navires qui sont consignés aux maisons françaises. On constate que tous les navires français présents dans la baie sont consignés à des maisons françaises et que le pavillon français ne représente qu’un quart des navires consignés aux maisons françaises, le pavillon espagnol occupant la première position (30 unités) et le pavillon hollandais faisant jeu égal avec le pavillon français (19 unités). En outre, la totalité des liaisons qui sont effectuées avec un port français se font sous pavillon neutre. En effet, les risques de prise qui planent sur les navires français incitent les armateurs de l’Hexagone à utiliser les navires des nations non-belligérantes (Espagne, Provinces-Unies).

421 Nous disposons de trois exemplaires pour le premier semestre de l’année 1779, des quatre derniers numéros de l’année 1788, de séries à peu près complètes pour 1789 (52 exemplaires), 1790 (40), 1791 (51) et 1792 (41), des cinq premiers exemplaires de 1793, d’un seul exemplaire en 1795 (décembre) et des neuf premiers de 1796.

La répartition des consignations entre les maisons françaises révèle pour sa part la structure extrêmement concentrée de cette activité. Les maisons Cayla Solier Cabannes Jugla et Verduc Jolif Séré s’adjugent à elles deux 29 des 74 consignations recensées et les compagnies Dubernard Jaureguiberry et Lecouteulx, respectivement 5 et 6. Les 34 consignations restantes se répartissent entre 17 compagnies, parmi lesquelles on retrouve en priorité toutes les maisons les plus importantes de la place422.

Les actes consulaires relatifs au paiement des droits, conservés à la chancellerie, permettent de mieux saisir le rôle de Cadix dans la navigation française en temps de guerre. Au total, ces documents nous renseignent sur 51 opérations d’armement-désarmement qui ont été réalisées à Cadix, par des maisons françaises de la place, pour le compte d’armateurs marseillais (36), bordelais (8), bayonnais (2), nantais (3), rouennais (1) ou antillais (1).

Douze de ces opérations correspondent au désarmement de navires revenant des Antilles avec des cargaisons de produits coloniaux qui sont transférées sur des navires neutres avant de rejoindre leur destination finale (Marseille le plus souvent)423. L’un de ces navires reprend, aussitôt déchargé, la route des colonies insurgées d’Amérique avec une cargaison de fusils, de vin, de sel et d’autres denrées de consommation courante424

. Par ailleurs, 22 opérations consistent en l’armement à Cadix, toujours pour le compte d’armateurs français, de navires destinés aux Antilles (14 cas) ou aux colonies insurgées (8 cas). Ces navires sont équipés de l’armement nécessaire pour repousser une attaque corsaire et ils sont munis de commissions en guerre et marchandises. Ces expéditions, qui sont assez régulières entre 1779 et 1782, acheminent aux Antilles les produits qui y sont habituellement consommés (vin, huile, fromages, chandelles, clous, sel) et aux colonies américaines des cargaisons similaires complétées de fusils. Elles sont généralement préparées par des armateurs marseillais (Rabaud, Solier, Payan, Hermitte, Ventre Pascal, Rolland, Grenier) et dans une moindre mesure par des armateurs ponantais (Eyma frères, Salles et Acevedo de Bordeaux, Chaurand de Nantes, Batbedat de Bayonne, Lecouteulx de Rouen). Dans ces cas, Cadix joue le rôle d’un port de rupture de charge qui assure la transition entre une navigation océanique (Cadix-Etats- Unis/Antilles-Cadix) effectuée sous le pavillon français et une navigation méditerranéenne pour laquelle les armateurs préfèrent recourir au pavillon neutre afin de franchir le détroit de

422

cf. annexe 23.

423 Ainsi, le 8 août 1780, la compagnie Jean, Alain Jolif et Cie accompagne une lettre destinée à la compagnie Roux frères de Marseille d’une liste de 19 navires français arrivés en convoi depuis Saint-Domingue, avec des cargaisons de sucre, café, indigo, coton et cuirs (ACCIM, Fonds Roux, LIX-822, 08/08/1780).

Gibraltar. La liaison avec Marseille pouvait par ailleurs s’effectuer selon d’autres modalités : un certain nombre de convois furent organisés entre Cadix et Marseille425 et des navires bien armés n’hésitaient pas à s’aventurer en Méditerranée. En 1782 par exemple, huit compagnies françaises de Cadix achètent, pour le compte d’armateurs marseillais, des navires sur le marché local, en demandent la naturalisation française au consul, font établir les cautionnements indispensables à l’obtention de la commission en guerre et marchandises et les envoient à Marseille avec des cargaisons de plomb, de laine, de vin ou de cochenille. Au total, sur l’ensemble de la période, 17 navires ont ainsi été armés à Cadix pour le compte d’armateurs résidant à Marseille (14 cas), Bordeaux, Le Havre ou Nantes.

Au total, 17 maisons françaises de la place ont pris part à cette activité d’armement suscitée par le contexte de la guerre d’Indépendance. Parmi elles, se distinguent les maisons Verduc (12 opérations) et Mercy Lacaze (7 opérations, dont 5 pour les colonies d’Amérique). Viennent ensuite toutes les maisons de l’élite française de la place : Lecouteulx (4), Cayla Solier Cabannes Jugla (3), Fornier (3), Delaville (2), Rey et Brandembourg (1).

La période 1788-1793

La série de bulletins maritimes conservée aux Archives Nationales couvre de façon quasi continue la période allant de décembre 1788 à janvier 1793, période qui coïncide avec l’un des cycles les plus prospères de l’histoire maritime de Cadix, entre la crise commerciale de 1786 et l’entrée de l’Espagne dans les guerres révolutionnaires en mars 1793. Au total, au cours de ces quatre années, 516 navires ont été consignés à 42 compagnies françaises. L’exploitation de ces données permet non seulement d’identifier les principaux acteurs français du secteur, mais aussi de mieux comprendre leur rôle dans l’organisation des échanges maritimes européens.

Les acteurs du secteur

Quatre maisons françaises se distinguent parmi les 42 compagnies concernées, puisqu’elles assurent 297 des 516 cas de consignations relevés (58 %). Si l’on ne peut

425 Le 20 octobre 1780, les députés de la nation française écrivent au comte d’Estaing, commandant d’une escadre française mouillant dans la baie de Cadix, pour lui demander de renforcer l’escorte prévue pour le convoi qui doit accompagner les navires revenant des îles et destinés à Marseille. Dix jours plus tard, ils adressent des courriers aux Chambres de Commerce de Marseille, Bordeaux, Nantes et La Rochelle pour annoncer que le comte d’Estaing a accepté leur requête (CADN, Cadix, registre 260, correspondance des députés).

déterminer avec précision si ces maisons étaient armateurs des navires qu’elles accueillaient ou simples consignataires, il ne fait guère de doute qu’elles devaient tirer de substantiels revenus de cette activité.

La maison Jugla Solier arrive en première position avec un total de 89 navires qui lui ont été consignés. Il s’agit dans les deux tiers des cas de navires français naviguant entre Cadix et Marseille, ce qui s’explique par les liens étroits que la compagnie entretenait avec les maisons marseillaises, et notamment avec les compagnies Solier et Rabaud qui appartiennent au même réseau de la banque protestante. Ainsi, les gérants de la société sont les consignataires de onze navires armés pour les Indes orientales par les deux maisons marseillaises, d’abord sous le pavillon savoyard, puis, à partir de 1791, sous le pavillon français. Ces expéditions, qui sont bien connues grâce à l’ouvrage que Louis Dermigny leur a consacré426, faisaient escale à Cadix pour y charger des piastres et la maison Jugla Solier, qui possédait des intérêts sur ces armements, apparaissait comme un consignataire naturel pour ces navires. En outre, la maison Jugla Solier a également accueilli neuf navires reliant Marseille aux Antilles et sept navires faisant route vers la façade atlantique européenne. Elle jouait également un rôle notoire dans les liaisons avec le Maroc puisque huit navires provenant des ports français de l’Atlantique et allant vers le royaume chérifien lui sont consignés et qu’elle est probablement intéressée dans l’armement de la tartane la Languedocienne qui s’est arrêtée à Cadix à l’aller et au retour des deux expéditions effectuées entre Marseille et Mogador en 1790 et 1791. En dehors de l’accueil de ces navires faisant escale à Cadix, la maison Jugla Solier était spécialisée dans les liaisons entre Marseille et Cadix puisqu’au moins vingt-sept des navires qui lui sont consignés faisaient la navette entre les deux ports, dont trois de façon récurrente : le Ville de Cadix qui effectue six rotations entre 1789 et 1792, le Décidé (4 en 1791-1792) et le Baron de Copet (3 en 1789-1790). Dans ces derniers cas, il est fort probable qu’il s’agit de navires armés par ses soins ou sur lesquels elle possédait des intérêts.

La maison Magon Lefer, qui a été consignataire de 72 navires, présente un profil assez similaire : elle reçoit essentiellement des navires français (70), faisant dans la majorité des cas une simple escale commerciale à Cadix (44). Parmi ces derniers, on retrouve les expéditions coloniales qui font étape à Cadix pour y charger des piastres : sept de ces navires sont destinés aux Indes, soit dans le cadre des expéditions de la Compagnie des Indes dont la compagnie Magon a longtemps été le correspondant attitré, soit dans le cadre d’armements privés au

départ de Marseille ou de Saint-Malo ; vingt autres navires sont destinés aux Antilles, tous en provenance de Marseille où la compagnie bénéficie de solides contacts427. En dehors de ces expéditions coloniales, elle accueille les navires de la grande route commerciale française qui relie Marseille aux ports bretons et normands et sur laquelle Cadix constitue une étape commerciale et maritime importante. Enfin, comme la maison Jugla Solier, elle joue également un rôle dans la navigation de débouché qui touche Cadix. En 1789 et en 1792, les gérants de la compagnie accueillent cinq navires chargés de blé destiné à la consommation locale, deux provenant de Mazagan, la première année, et deux provenant de Tunis, la seconde. Ils sont également très liés avec les ports exportateurs de toiles : Saint-Malo, dont ils sont originaires et où ils conservent des parents, Morlaix et Le Havre. Au moins neuf navires faisant la navette entre l’ouest français et Cadix leur sont adressés entre 1789 et 1792.

La compagnie Lecouteulx qui a reçu 54 navires s’inscrit aussi dans un schéma qui concilie navigation d’escale et navigation de débouché, avec cependant quelques nuances dans les destinations. On retrouve dans son activité les expéditions coloniales destinées aux Indes puisque, en sa qualité de commissionnaire de la compagnie des Indes, elle accueille cinq navires faisant route entre Lorient et Pondichéry et un autre provenant de Marseille entre 1789 et 1790. Elle est également impliquée dans les liaisons avec l’Afrique : probablement en qualité d’armateur, pour trois navires qui reviennent de Mazagan avec une cargaison de blé en 1789, et en qualité de consignataire, pour quatre navires gagnant le Maroc en provenance de la côte atlantique française. Elle diffère en revanche des deux maisons précédentes par le fait qu’elle ne reçoit aucun navire reliant Marseille aux Antilles alors qu’elle entretient des liens étroits avec les Etats-Unis. Ainsi, entre 1789 et 1792, elle est le consignataire de onze des quatorze navires américains accueillis par des maisons françaises de la place, ce qui témoigne des contacts étroits qu’elle devait avoir avec des maisons de Charleston, Baltimore et Philadelphie.

Enfin, la quatrième et dernière maison de ce groupe a un profil plus particulier : il s’agit de la maison franco-germanique Rey et Brandembourg à laquelle 82 navires ont été consignés entre 1789 et 1792. La diversité même des pavillons qu’elle reçoit la distingue des autres maisons françaises : 29 navires sont français, 25 hollandais et 20 nordiques (15 danois, 2 prussiens, 2 suédois et 1 russe). Les navires hollandais et nordiques desservent notamment les lignes reliant Cadix, ou la Méditerranée, aux espaces de la mer du Nord et de la Baltique. Ainsi, dix navires chargés de bois provenant de Memel lui sont consignés entre 1789 et 1791.

En dehors de cette spécialisation très marquée, les navires accueillis par cette compagnie sont très divers, un seul leur étant consigné plus d’une fois. Il semblerait donc que cette maison joue un rôle que l’on pourrait apparenter à celui des agents maritimes contemporains, qui agissent en qualité de consignataires professionnels et non comme les correspondants de quelques armateurs donnés.

Ces quatre compagnies se distinguent donc à la fois par l’intensité de leur activité de consignataire – elles accueillent une vingtaine de navires par an – et par leur polyvalence. Elles contribuent à l’animation de lignes régulières avec les principaux ports qui approvisionnent Cadix en produits manufacturés, et ce en fonction de l’orientation géographique de leurs réseaux de correspondants (la compagnie Jugla Solier est très liée à Marseille alors que les maisons Magon, Lecouteulx et Rey et Brandembourg le sont à Saint- Malo, aux ports américains et à ceux de la Baltique) ; elles jouent un rôle de simples consignataires sur les grandes routes commerciales de l’époque (Marseille-Antilles, Europe- Indes ou Europe-Afrique) ; elles s’associent à l’armement de navires transportant du blé d’Afrique lorsque la conjoncture s’y prête ; et enfin elles assistent les capitaines des nombreux navires qui assurent la liaison entre la Méditerranée et l’Europe du nord-ouest et qui, pour des raisons commerciales ou strictement navales, sont amenés à faire une escale à Cadix.

A l’échelle inférieure, on trouve un groupe de dix compagnies auxquelles ont été consignés 148 navires (28 %). Les maisons qui le composent se caractérisent par la dimension plus modeste de leur activité maritime et par leur spécialisation dans un seul type de navigation. Ainsi, les compagnies bretonnes sont spécialisées dans l’accueil des navires malouins et morlaisiens chargés de toiles : par exemple, 20 des 32 navires accueillis par la société Quentin frères proviennent de Saint-Malo ou lui sont destinés et, de plus, parmi ces navires, quatre sont très probablement des armements familiaux qui associent la compagnie gaditane à son homologue malouine (Quentin et Cie) : le Héron, qui fait cinq entrées à Cadix entre 1789 et 1792, la Marianne-Thérèse (3 entrées), le Saint-Charles (4 entrées) et le Voyageur (4 entrées). De même la compagnie Galatoire apparaît systématiquement comme consignataire d’un navire faisant la navette entre Cadix et Saint-Malo, le brigantin la Bonne foi, qui lui est consigné à sept reprises au cours de ces quatre années.

Les ports normands ont aussi leurs agents attitrés : la compagnie Séré reçoit neuf navires en liaison avec Le Havre et Saint-Valéry et la compagnie d’origine parisienne Godet Ségalas est consignataire de quatre navires faisant la navette entre Cadix et Le Havre et de

cinq autres qui relient Marseille au Havre. La compagnie nantaise Delaville accueille à elle- seule onze des dix-huit navires en provenance ou à destination de Nantes et le port de Nantes apparaît dans la moitié des parcours des navires qui lui sont consignés. Les compagnies bayonnaises Dechegaray et Lesca sont, quant à elles, spécialisées sur les lignes incluant les ports de la côte nord de l’Espagne et ont essentiellement recours à des navires arborant le pavillon espagnol. La compagnie Bourt et neveux, en sa qualité de consignataire de la Real Compañía Marítima reçoit aussi uniquement des navires espagnols. Les compagnies Sahuc Guillet et Lenormand complètent notre échantillon. La première apparaît comme tête de pont d’une ligne assurant la liaison entre Ostende et Cadix, puisqu’elle reçoit cinq navires impériaux assurant ce trajet. Elle arme en outre une navette sur la ligne Marseille-Cadix, la Marianne, qui effectue cinq rotations entre 1789 et 1792428. La seconde a une activité plus diffuse mais se distingue quand même par l’accueil de six navires céréaliers en provenance du Maroc pendant l’hiver 1789-1790.

Enfin, les 28 autres compagnies de notre échantillon n’ont accueilli en tout que 71 navires (14 %), soit entre un et cinq navires par compagnie, et elles apparaissent donc comme des acteurs tout à fait mineurs dans ce secteur. On constate par ailleurs qu’il s’agit en général de compagnies situées au bas de la hiérarchie de la colonie française, même si quelques compagnies des deux premières classes figurent également dans ce groupe429. Parmi ces dernières, notons la présence de la compagnie Verduc Jolif Séré qui avait joué un rôle prépondérant dans le secteur pendant la guerre d’Indépendance d’Amérique et dont le retrait s’explique par sa faillite, déclarée le 14 avril 1789.

Ces données confirment la forte concentration de ce secteur. Comme au cours de la guerre d’Indépendance d’Amérique, ce sont les compagnies les plus puissantes de la colonie qui s’adjugent l’essentiel du marché. Elles révèlent en outre la nature duale de la fonction de Cadix dans la navigation européenne, à la fois port de transit et port de débouché.

428 Nous savons par une correspondance du fonds Roux que ce navire appartenait à la compagnie Sahuc Guillet (ACCIM, Fonds Roux, LIX-843, courrier du 19/10/1787). Notons en outre que cette maison d’origine lyonnaise semble avoir constamment entretenu un armement faisant la liaison entre Cadix et Marseille comme en témoigne une déclaration enregistrée à la chancellerie du consulat en 1783 : Antoine Guillet y fait constater par divers témoins l’engagement qu’il a contracté auprès du capitaine du navire portugais Nuestra Señora de la Soledad, qui appartient à la compagnie, de ne lui payer son récent voyage pour Marseille qu’après une nouvelle rotation Cadix-Marseille-Cadix (AHPC, Cadix, 2568-436, 02/10/1783).

429

C’est le cas des compagnies Rivet, Dubernad Jaureguiberry, Barrère Forcade, Verduc Jolif Séré et Vial Montaud.

Les fonctions de Cadix dans la navigation européenne

Sur les 319 navires consignés aux maisons françaises pour lesquels nous connaissons à la fois le port d’origine et celui de destination, Cadix apparaît dans 186 cas comme une escale commerciale ou technique sur l’une des quatre grandes routes du commerce maritime européen qui se croisent à proximité du port andalou430. La première et la plus importante de ces routes relie l’Europe méditerranéenne, et ses extensions orientales, à la façade atlantique européenne qui s’étend de Lisbonne à Hambourg et se prolonge vers la mer Baltique. Toutes les nations maritimes représentées à Cadix utilisaient donc le port comme escale, à l’image des Hollandais pour lesquels Cadix était une étape sur la route reliant les Provinces-Unies à la Méditerranée et au Levant431. Pour la navigation française, Cadix avait cependant encore plus d’importance que pour les autres pays, dans la mesure où le port se situait exactement à mi- chemin entre les deux façades maritimes de l’Hexagone. Ainsi parmi les 77 navires consignés à des maisons françaises qui ont suivi cette route commerciale, 52 relient deux ports français, soit, le plus souvent, Marseille à un port breton ( Nantes, Saint-Malo et Morlaix) ou normand (Le Havre, Rouen et Saint-Valéry).

Outre cette fonction d’étape sur la grande route du cabotage européen, Cadix apparaît souvent comme la dernière escale effectuée par des navires quittant l’Europe en direction des trois espaces auxquels est lié le Vieux Continent : l’Afrique atlantique, qui s’étend des ports marocains jusqu’à l’Angola, le continent américain et l’océan Indien, avec notamment deux grandes destinations pour la navigation française : l’île de France et Pondichéry. Les liaisons